J’ai tenu à tricoter avec mes souvenirs marseillais les deux textes qui
suivent dans leur intégralité en les laissant intacts. Ils décrivent
deux détenues que j’ai connues à la même période lors de mon
incarcération en 2013-2014 à Fleury-Mérogis, dans le 91. Thérèse a vécu
son corps comme entièrement aliéné à la cour de promenade, à sa cellule,
au petit espace des parloirs, aux contingences. Elle en est morte. Tandis
que Sana a déréalisé et réinventé son corps, elle a ainsi agrandi la
cour de promenade, sa cellule, le petit espace des parloirs, et les
contingences, elle a survécu. Tout corps est imaginaire, quand il est
enfermé, quand il jouit, quand il meurt. Et surtout quand il se regarde
dans le miroir. J’ai dû quitter la ville sans corps ? Paris ? et
rejoindre la ville orga-nique ? Marseille ? pour enfin accepter que mes
écrits, Thérèse est décédée et Sana ou le Corps incarcéré deux fois,
soient incarnés par deux lectrices dans le cadre d’Une semaine, un
auteur, consacrée à mon travail et organisée par Peuple et culture
Marseille sur la langue des minoré.e.s.