JOURNAL
DE LA
SOC
M DE S'.
oïlOii
DE PARIS
CINQUANTE-SEPTIEME ANNEE
(•I9i<;)
BERGER-LE VR AU LT, LIBRAIRES-ÉDITEURS
PARIS (6^)
5 — 7, RUE DES BEAUX-ARTS
NANCY
RUE DES GLACIS, 18
MGMXVI
CONSEIL
DE LA
SOCIÉTÉ DE STATISTIQUE DE PARIS
HA
EN 1916
5(^
MM.
Président Malzac.
Vice-p/'ésidents Raphai'l-Georges Lkvy, Kiigriie u'Eichthal el Paul Mkuuiot.
Secrétaire général. . . Alfred Barrioi,.
Trésorier-archiviste.. Paul Matuat.
Membres du Conseil. . Les anciens Présidents de la Sociélé (membres de droit),
Edmond Fléchey, secrétaire général honoraire, Simiand,
Delamottk, Joseph Girard, Kniile Bor.i;r., Pierre Nkvmarck
et Charles Lefkrvrk.
TABLi; m MATIËRES IH ClNgU'ANTFrSCPTIÈME VOLUME
(Année 10I'«)
Payes
Numéro de janvier. — I. — Procès-verbal de la séance du 15 décembre 1915 .... 1
II. — La statistique internationale des valeurs mobilières {suite et fin), par
M. Alfred Neymarck 5
III. — Variété : L'instruction primaire dans la République de l'Uruguay, par
M. Paul :\Ieuriot 32
IV. — Bibliographie : La Province rhénane et la Westphalie, de Yves Guyot,
par A. B 34
\'. — Avis de mise en vente des ouvrages publiés p ai- la Société de Statistique
à Loccasion de son Cinquantenaire 34
VI. — Avis relatif au concours pour le prix Adolphe Coste 35
VIL' — Avis relatif au concours pour le prix Emile Mercet 36
Numéro de février. — I. ^ Procès-verbal de la séance du 19 janvier 1916 37
IL — Les valeurs mobilières et la guerre, par M. Alfred Xej-marck 43
III. — Vai'iété : A propos de milliards, par M. Gaston Cadoux 69
IV. — Note sur la petite monnaie, par A. B -. 71
V. — Bibliographie : La . France aux États-Unis (Louis Rouquette), par
M. Eug. B. Dubern 74
La Question du crédit à l' exportation (X...), par M. Eug.B . Dubern .... 74
Les Effets du blocus économique deV Allemagne (A.-E. Sayous), par M. Eug;
B. Dubern 75
Numéro de mars. — L — Procès-verbal de la séance du 16 février 1916 77
IL — La question des chemins de fer d'Alsace-Lorraine en 1870-1871, par
M. Paul Meuriot ._ 84
m. — Chronique des questions ou%Tières et des assurances s\ir la vie, par M. Mau-
rice Bellom 97
IV. — Variété : Statistique pénitentiaire de Suède pour 1913, par M. A. Barriol . 103
Numéro d'avril. — L — Procès- verbal de la séance du 15 mars 1916 105
Annexes : Rapport du trésorier sur les comptes de 1915, la situation
fmancière et le budget de 1916, par M. Paul Matrat 111
Rapport présenté au nom de la Commission des Fonds et Archives, par
M. Paul Meuriot ^ 114
11. — La prospérité économique de l'Allemagne, sa « place au soleil » et la guerre,
par M. Gaston Cadoux 125
III. — Variété : La production fruitière française et ses débouchés, par M. Bois-
landry Dubern X . 141
IV. — Bibliograpliie : La Guerre de 1914 vue en son cours, par M. Paul Leroy-
Be AL LIEU (analysé par M. Boislandry Dubern) ,. 145
V. ^ — Liste des documents présentés dans les séances des 15 décembre 1915,
19 janvier, 16 février et 15 mars 1916, et des publications périodiques
parvenues pendant l'année 1915 146
VI. — Avis de mise en vente des ouvrages publiés parla Société de Statistique
à l'occasion de son Cinquantenaire 148
Numéro de mai. — I. — Pruces-verbal de la seaucf du lu avriil'JlG 149
IL — Chronique de démographie, par M. Michel Huber 153
IIL — La population et les lois électorales eh France, de 1789 à nos jours (pre-
mière et deuxième parties), par M. Paul Meuriot 157
IV. — Bibliographie : Il costo délia guerre Europea : S pesé e perdite. Mezzi di
fronteggiarle, par M. Paul Meuriot 178
V. — Nécrologie : M. Alfred ^Nluteau, par M. Malzac 179
Pages
Numéro de juin. — I. ■ — Procès-verbal de la séance du 17 mai 1916 181
II. - — Annexe au procès-verbal de la séance du 17 mai 1916 : Rapport sur la
médaille Bourdin, par M. Alfred Neymarck 186
III. — Le commerce international en 1915, par M. Yves Guyot 188
IV. • — La population et les lois électorales en France, de 1789 à nos jours {suite),
par M. Paul Meuriot 221
V. — Chronique des questions ouvrières et des assurances sur la vie, par M. Mau-
rice Bellom 234
VI. — Variété : A propos de la population étrangère et cultuelle de l'ItEdie, par
M. Paul Meuriot 238
VII. — Liste des documents présentés dans les séances des 19 avril et 17 mai
1916 240
Numéro de juillet. — I. — Procès-verbal de la séance du 21 juin 1916 241
II. — Le Japon, notre ami et notre allié, par M. Joseph Girard 249
III. — Statistique internationale des valeurs mobilières (France), par M. Alfred
Neymarck 273
IV. — La population et les lois électorales en France, de 1789 à nos jours {suite),.
par M. Paul Meuriot 298
V, — Ligue nationale des Économies - 306
VI. — Nécrologie : Emile Waxweiler 309
VII. — Avis de mise en vente des ouvrages publiés par la Société de Statistique à
l'occasion de son Cinquantenaire 310
VIII. — Liste des documents présentés dans la séance du 21 juin 1916 311
Numéro d'août-septembre. — I. — Le revenu domanial des États allemands, par
M. Paul Meuriot ' 313
II. — La population et les lois électorales en France, de 1789 à nos jours {suite
et fin), par M. Paul Meuriot 324
III. — Chronique des questions ouvrières et des assurances sur la vie, par M. Mau-
rice Bellom 371
IV. — Bibliographie: Annuario statistico italiano, i>a.r F. M 376
Numéro d'octobre. — I. — La douane et la guerre, par M. L.-J. Magnan 377
IL — La balance économique de la France en 1 912 et 1915, par M. René Pupin . 392
III. — Les compagnies d'assurances sur la vie dans le Royaume-Uni, par M. Ar-
thur-J. Cook 404
IV. — Avis de mise en vente des ouvrages publiés par la Société de Statistique
à Toccasion de son Cinquantenaire 408
Numéro de novembre. — I. — Procès-verbal de la séance du 18 octobre 1916 409
II. — L'Allemagne de demain, par M. A. Chervin (à sMicre) 415
III. — La richesse mobilière des Français au début de 191 6, par M. René Pupin . 450
IV. — Variété : Du calcul de la population par feux, par M. P. Meuriot 455
V. — Bibliographie : La Banque de France, hier, aujourd'hui, demain (André
Liesse), par E. B. D 457
VI. — Avis de mise en vente des ouvrages publiés par la Société de Statistique
à l'occasion de son Cinquantenaire 458
VII. — Liste des documents présentés dans la séance du 18 octobre 1916 .... 459
Numéro de décembre. — I. — Procès-verbal de la séance du 15 novembre 1916. . . . 461
II, — De la méthode statistique dans les sciences expérimentales, par M. Ch.
Richet 466
III. — L'Allemagne de demain, par M. A. Chervin (à suiVre) 473
IV. — Chronique des questions ouvrières et des assurances sur la vie, par M. Mau-
riceBellom -. . 520
V. — Bibliographie: Le Répertoire du commerce austro^allemand en France avant
le 3 août 1914 525
Le Protectionnisme et l'Avenir économique de la jP/ance (Daudé-Bancel),
par (P. M • Ô25
VI. — Liste des documents présentés dans la séance du 18 octobre 1916 .... 526
VII. — Travaux de la Société (communications en séance, discussions, etc., 1916). 527
VIII. — Table alphabétique des matières 528
IX. — Table alphabétique des auteurs et des personnes citées 532
JOURNAL
DE LA.
SOCIÉTÉ DE STATISTIQUE DE PARIS
N» 1. — JANVIER 1916
I
PROCÉS-VERBAL DE LA SÉANCE DU 15 DÉCEMBRE 1915
s O Is^ Ivl-A-I RE
PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE DU 17 NOVEMBRE 1915.
NOMINATION D'UN MEMBRE HONORAIRE ASSOCIÉ; NOMINATION ET PRÉSENTATION DE MEMBRES TITU-
LAIRES.
NÉCROLOQIE.
ÉLECTIONS.
PRÉSENTATION D'OUVRAGES.
DISCUSSION RELATIVE A LA COMMUNICATION DE M. O'EICHTHAL SUR <■ LA VALEUR SOCIALE DES INDI-
VIDUS AU POINT DE VUE ÉCONOMIQUE; — DÉPINITION ET MÉTHODE ».
RÉSULTATS DES ÉLECTIONS.
SOUSCRIPTION A L'EMPRUNT DE LA VICTOIRE.
CLOTURE.
PROCES-VERBAL DE LA SÉANCE DU 17 NOVEMBRE 1915
La séance est ouverte à 17^ 40, sous la présidence de M. iMaurice Bellom,
président, qui fait connaître que le numéro du Journal de la Société n'ayant
pu être distribué avant la séance, l'adoption du procès-verbal de la séance
du 17 novembre 1915 sera reportée à la séance de janvier.
Le procès-verbal de la séance du 20 octobre 1915 est adopté sans observa-
tions.
NOMINATION D'UN MEMBRE HONORAIRE ASSOCIÉ; NOMINATION ET PRÉSENTATION
DE MEMBRES TITULAIRES
M. Maurice Bellom, président, prononce l'allocution suivante :
« Mes chers Collègues, je suis certain d'être votre interprète en ouvrant
cette séance par un hommage d'admiration et de gratitude adressé à un peuple
qui vient de tracer une des pages les plus glorieuses de l'épopée dont les émou-
vantes péripéties se déroulent sous nos yeux. Loin de rechercher le repos légi-
time à la suite de trois guerres successives, l'héroïque Serbie s'est volontaire-
ment exposée aux douleurs d'un martyre inconnu de la Belgique elle-même.
If* siRia. 67» TOL. — *• 1 1
^ s -
Sans jouir du voisinage d'une nation amie, le peuple serbe a sacrifié au souci
de l'honneur jusqu'à la dernière parcelle de son territoire : refusant avec
mépris des propositions de paix comme les présents d'un nouvel Artaxerxès,
il a assumé la périlleuse mission qui incombait aux descendants directs de
Léonidas et de Thémistocle et il a opposé le rempart de sa vaillance au flot
envahisseur des modernes barbares.
« La Société de Statistique, qui a rayé de la liste de ses membres les repré-
sentants des iiations ennemies, s'honorera d'accueillir dans son sein un repré-
sentant du peuple serbe. J'ai cru pouvoir prendre l'initiative de pressentir à
ce sujet l'éminent diplomate serbe, M. le ministre Vesnitch, qui m'a signalé
comme le plus distingué statisticien de la Serbie, ancien directeur général hono-
raire de la Statistique serbe, M. Yovanovitch (Bogolioub). J'ai eu le bonheur
de faire accepter au Conseil de notre Société ma proposition de nommer membre
honoraire associé ce savant particuhèrement qualifié. C'est donc sous ce patro-
nage que je viens (avec M. Varagnac) le présenter à vos suffrages. » (Assenti-
ment général.)
M. le Président met aux voix les candidatures de MM. Brizon, directeur de
la Banque des Pays du Nord, présenté par MM. A. Neymarck, Ch. Laurent
et Barriol, ainsi que celle de M. G. Allix, présenté par MM. A. Liesse et
Barrigl;
Ces candidatures sont acceptées à l'unanimité et MM. Brizon et Allix
nommés membres titulaires.
M. le Président fait connaître qu'il a reçu les demandes de candidatures de :
M. Raiga, docteur en droit, chef de service à la préfecture de la Seine,
chargé de conférences à la Faculté de Droit, présenté par MM. Cadoux et
Barriol;
M. Lefort, sous-chef de bureau au ministère des Finances, présenté par
MM. A. Neymarck et Barriol;
M. Dejoux, directeur de la Maison Dactyle, présenté par MM. G. Faure
et Barriol.
Conformément à l'usage, il sera statué à leur sujet dans la séance de janvier
1916.
NÉCROLOGIE
M. le Secrétaire général fait part à la Société du décès, de M. Pierre-Auguste-
Marie Vannacque, administrateur honoraire des P. T. T., chevalier de la
Légion d'honneur, survenu à Paris le 3 décembre 1915.
M. Maurice Bellom, président, s'exprime en ces termes :
« Messieurs, je ne veux pas manquer de rendre à notre cher et éminent pré-
sident, M. Vannacque, l'hommage qui est si largement dû à sa mémoire.
L'aménité de son caractère et la sûreté de ses relations doublaient, pour tous
ceux qui l'ont approché, le précieux concours de sa science statistique. Les
épreuves imméritées qu'il a subies au terme de sa carrière ont été supportées
par cet administrateur émérite avec un stoïcisme qui doit inspirer le respect.
C'est dans ces sentiments de vénération et de regrets que je prie en votre nom
la famille d'> M. Vannacque d'agréer l'hommage de notre profonde sym-
pathie. »
M. A. Neymarck s'associe aux paroles pleines de cœur que vient de pro-
noncer M. le président et il rappelle que M. Vannacque, qui l'avait précédé à
la présidence de la Société, a rendu de très grands services à la statistique en
général et à la Société de Stalisti(fuç de Paris en particulier, et il rend un der-
nier hommage à sa parfaite bienveillance et à sa si courtoise obligeance.
ÉLECTIONS
M. le Président déclare ouvert le scrutin pour le renouvellement partiel du
Conseil pour 1916.
PRESENTATION D'OUVRAGES
M. le Président donne la parole à M. le Secrétaire général qui fait part à la
Société de la réception d'un certain nombre d'ouvrages parmi lesquels il signale
notamment les documents suivants :
Italie. — Ministère de l'Agriculture, de l'Industrie et du Commerce. Conseil
supérieur du Travail. Les spectacles publics et législation sociale de
prévoyance.
Massachusetts. — Bureau confédéral de statistique. Législation du travail
pour 1915.
Suisse. — Conseil fédéral. Données statistiques concernant la gestion de la
régie fédérale des alcools en 1914.
Rapport du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur la gestion de la
régie des alcools pour l'année 1914.
Résultats statistiques du recensement fédéral de la population (l^r déc.
1910).
Documents privés :
Yves GuYOT. La province rhénane et la Westphalie (Étude écono-
mique).
D^ C. A. Verryn Stuart. Suleiding tôt de beoefening der statistiek.
M. le Secrétaire général annonce enfin qu'il a reçu de M. Neymarck le texte
des études si complètes et si intéressantes qu'il a fait paraître à propos de
l'Emprunt national et il saisit cette occasion d'exprimer à M. Neymarck la
gratitude de la Société pour le travail formidable qu'il a effectué pour cette
cause patriotique.
M. le Président fait enfin une mention particulière d'un document que
M. AuDiFFRED, sénateur, a adressé non seulement à la Société, mais encore,
à titre privé, à un certain nombre de ses membres, savoir la proposition de
loi dont il est l'auteur, relative à la représentation de nos grands intérêts
nationaux (Sénat, annexe au procès-verbal de la séance du 25 septembre 1915).
DISCUSSION RELATIVE A LA COMMUNICATION DE M. D'EICHTHAL SUR « LA VALEUR
SOCIALE DES INDIVIDUS AU POINT DE VUE ÉCONOMIQUE; — DÉFINITION ET
MÉTHODE "
M. Barriol s'excuse de prendre la parole, contrairement à l'usage qui veut
que le secrétaire général s'abstienne de participer aux discussions de la Société,
et il exprime le regret de n'avoir pas eu le loisir, à cause des préoccupations
que lui a values l'Emprunt, de préparer le travail qu'il se proposait de sou-
mettre à la Société, comme suite à l'étude de M. d'Eichthal. Il se bornera
donc à de courtes observations. Relevant d'abord une critique formulée par
notre collègue, M. Barriol fait remarquer qu'on ne saurait rendre les auteurs
de méthodes d'évaluations responsables des erreurs commises par ceux qui
les ont appliquées. Abordant ensuite l'examen de la définition de la « valeur
sociale économique d'un individu à un moment donné » proposée par M. d'Eich-
thal, il croit qu'elle devrait être précisée et il propose la formule suivante :
« La valeur sociale économique d'un individu à un moment donné est la
valeur probable de l'accroissement de richesse dont l'individu pourra augmenter
la richesse collective qui existait à la date où a débuté sa propre existence, en
tenant compte de sa survie productive et des variations de son activité. »
M. Barriol fait ensuite la comparaison de la valeur étudiée par M. d'Eich-
thal et de celle qu'il avait envisagée dans ses articles de la Reçue Économique
internationale de décembre 1910 et mai 1911 et aussi dans le Journal de la
Société de Statistique de Paris d'août-septembre 1911 : il s'agit là de concep-
tions tout à fait difîérentes, elles-mêmes distinctes de ce que le regretté de
Foville avait appelé « le capital humain ».
_ 4 _
M. R.-G. LÉVY se demande si l'on ne pourrait reprendre la définition pro-
posée par M. d'Eichthal en en retranchant le premier terme, relatif à la
« somme de richesse dont l'individu a augmenté au moment de l'observation
la richesse collective )>, et M. d'Eichthal est bien d'accord pour reconnaître
que l'observation des faits passés n'a d'autre intérêt que de servir de base
aux évaluations d'avenir.
M. CoLSON critique l'application des mathématiques pour l'évaluation du
capital humain. M. Fernand Faure dit qu'il n'a jamais pu comprendre que
l'on pût songer à tenter cette évaluation. Pour lui, seules doivent être consi-
dérées comme véritables richesses ce qui possède le caractère de l'appropria-
tion; ce n'est plus le cas pour l'homme.
Après un échange de vues entre MM. d'Eichthal, Colson et Barriol,
M. le Président remercie les divers orateurs qui ont pris part à la discussion
qui pourra être utilement continuée dans l'avenir, le sujet lui paraissant loin
d'être épuisé.
RÉSULTATS DES ÉLECTIONS
Le scrutin ayant été clos à 18 heures, le dépouillement a donné les résul-
tats suivants :
M. Malzac {Président).
MM. d'Eichthal et P. Meuriot {Vice- Présidents)'.
MM. Emile Borel, P. Neymarck et Ch. Lefebvre pour les fonctions de
membres du Conseil ont obtenu 84 voix sur 85.
M. le Président déclare donc M. Malzac élu président pour 1916, MM. d'Eich-
thal et P. Meuriot, vice-présidents pour 1916, 1917 et 1918, MM. Emile
Borel, P. Neymarck et Ch. Lefebvre pour les fonctions de membres du
Conseil pour 1916, 1917 et 1918.
En conséquence, le Conseil de la Société de Statistique de Paris est ainsi
composé pour l'année 1916 :
Président M. Malzac.
V ice- Présidents . . . MM. Raphaël-Georges Lévy, Eugène d'Eichthal,
Paul Meuriot.
Secrétaire général . . M. Alfred Barriol.
Trésori.er- Archiviste . M. Paul Matrat.
Conseil :
Membres de droit . . MM. les anciens présidents de la Société, Edmond
Flechey, secrétaire général honoraire.
Membres élus .... MM. François Simiand, Delamotte, Joseph Girard,
Emile Borel, Pierre Neymarck, Charles Le-
febvre.
SOUSCRIPTION A L'EMPRUNT DE LA VICTOIRE
M. Maurice Bellom, président, s'exprime en ces termes :
« Mes chers Collègues, notre si dévoué et si vénéré trésorier, M. ,Matrat,
m'a proposé de consacrer une fraction du patrimoine de la Société à la sous-
cription à l'Emprunt de la victoire : la plus prochaine réunion de notre Conseil
était trop éloignée pour qu'il fût possible à M. Matrat et à moi-même de le
consulter à ce sujet avant la clôture de la souscription; j'ai donc. immédiate-
ment approuvé la patriotique initiative de notre trésorier qui s'est empressé
de souscrire à 100 francs de rente et qui vous en apporte aujourd'hui sous la
forme du récépissé officiel l'honorable témoignage. Nous espérons, lui et moi,
que vous voudrez bien nous accorder un bill d'immunité pour la procédure
- 5 -
sommaire avec 'aquelle nous avons disposé, en vue de la défense nationale,
des fonds de la Société de Statistique de Paris. » {Assentiment unanime.)
CLOTURE
Avant le lever de la séance, M. Maurice Bellom, président, prononce les
paroles suivantes :
« Cette séance, la dernière de l'année, ne saurait prendre fin sans que je ne
me fasse l'interprète des sentiments communs qu'éveille dans nos cœurs un
coup d'œil rétrospectif jeté sur les événements des douze mois qui viennent
de s'écouler. C'est tout d'abord la sympathie la plus profonde pour ceux
d'entre nous qui ont été frappés dans leurs plus chères affections; c'est ensuite
la mélancolie commandée par la gravité des circonstances que traverse à l'heure
actuelle notre patrie bien-aimée; c'est enfin le réconfort qu'inspire la sérénité
de votre confiante attitude au milieu d'un labeur de savants éminents, de
statisticiens émérites et, pour faire usage d'un mot qui résume tous les autres,
de Français. »
La séance est levée à 19*^ 15.
Le Secrétaire général, Le Président,
A. Barriol. Maurice Bellom.
II
LA
STATISTIQUE INTERNATIONALE DES VALEURS MORILIÈRES^^^
(Suite et fin [-2])
II
LES VALEURS MOBILIÈRES AU JAPON AU 31 DÉCEMBRE 1912
{Rapport de M. Hannbusa.)
1° Pour le nombre de titres en circulation, les renseignements font défaut.
2» Les valeurs mobilières existant à la fin de 1912 sont :
Yen
Dette nationale 2.524.085.751
— locale 294.170.272
Actions des sociétés 2.671.846.145
Titres des sociétés 502.974.880
Total 5.993.077.048
(1) Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur. — Cette étude, présentée
par M. Alfred Xeymarck à l'Institut international de Statistique à Vienne, en septembre
1913, permet de fixer la situation des marchés financiers à l'origine de la guerre que nous
subissons. Elle fait suite aux rapports présentés par notre ancien président dans les sessions
de l'Institut international de Statistique depuis 1891. {Note de la rédaction.)
(2) Voir Journal de la Société de Statistique de Paris, nunVéros de juillet 1915, p. 322,
août-septembre, p. 353, et octobre, p. 411.
- 6 -
Remarque. — Dans les actions des sociétés sont compris les billets des ban-
ques et sociétés.
3° Cours moyens des principales valeurs mobilières négociées aux bourses
dans le courant de décembre 1912 (négociation directe) :
Dette publique :
Ancienne dette
Dette impériale 5 %
— publique 1" émission 4 %
— — 2e — 4%
Banques :
Spécie Bank
Banque hypothécaire du Japon
— industrielle du Japon
1'^ banque
15- —
Banque coloniale d'Yezo
Cheininf de fer de :
Kawagoyé
Tobu
Narila
Nankaï
Tramways électriques de :
Odawara
Keï-Hin (Tokio- Yokohama)
Ban-Shin (Osaka-Kobe)
Keï-Han
Yokohama
Kioto
Bourses :
Bourses de riz et autres céréales et marchan-
dises de Tokio
Bourse des actions d'Osaka
— de Tokio
Nai'ires à vapeur de :
Nippon-Yusen
Toya-Kisen
Osaka-Shosen
Bassin et chantier :
Bassin do Yokohama
Chantier d'I«hikawajima
Assurances :
Yokohama (incendie)
Tokio (incendie)
Assurance mutuelle (incendie)
Filatures de coton de :
Fuji
Tokio
Kanegafuchi
Miye
'aleur nominale
ou
valeur versée
Coun moyen
Yen
18.000
12.450
100.000
90.000
100.000
82.660
100.000
83.370
100.000
210.150
200.000
376.990
50.000
76.760
50.000
108.860
100.000
182.880
50.000
74.900
50.000
68.000
50.000
83.230
50.000
50.150
50 . 000
71.610
50.000
44.720
50.000
42 380
50.000
106.180
50.000
60.950
50.000
61.000
50.000
48.970
50.000
100.000
50.000
116.850
50.000
139.660
50.000
107.350
50.000
47.210
50.000
83.970
33.000
84.040
50.000
51.230
12.506
27.340
12.500
17.280
12.500
16.670
50.000
81.940
50.000
50.680
50 . 000
113.970
50 . 000
94.810
- 7 -
aleur DomiiitU
ou
Cours moven
valeur versée
Yen
50,000
68.340
50.000
62.800
50.000
65.660
50.000
42.440
37.500
29.300
50.000
70.000
50.000
113.600
50.000
42.880
50.000
40.610
50.000
72.420
50.000
63.020
50.000
46.120
50.000
72.810
Éclairage électrique et gaz :
Tokio (ga?i
Nikkan (Japon-Chosen) (gaz)
Tokio (éclairage électrique)
Ujigawa (électricité)
Kiniigawa (électricité hydraulique) . .
Mines :
Houillère d'Iriyama
— d'hvaki
Industrie :
Fuji (fabrique de papier)
Oji -
Teikoku (chanvre et lin)
Tokio (carton et papier)
Dainippon (fabrique de sucre). . . .
Daiwan — ....
Les intérêts annuels de la dette publique sont de 4 (min.) à 5 yen (max.)
pour 100 yen et ceux des dettes locales sont de 4 (min.) à 8 yen (max.) pour
100 yen.
Voici les taux des dividendes des sociétés pour le 1^^ semestre de 1912 :
Dividende
Dette publique : pour 100
Ancienne dette ADnuité (remb. partiels)
Dette impériale 5% 5
— publique l^e émission 4 % 4
— — 2e — 4% . . 4
Banques :
SpécieBank 12
Banque hypothécaire du Japon 10
— industrielle du Japon 8
ire banque 10
15^ banque 9
Banque coloniale d'Yezo 9
Chemins de fer de :
Kawagoyé 10
Tobu 9,8
Narita 6, T.
Nankaï 9
Tramways électriques de :
Odawara 7
Keî Hin. 5
Ban-Shin 13
Keï-Han 6,5
Yokohama 7,5
Kioto 6
- 8 -
Bourses : Dividendts
Bourse de riz et autres céréales et marchandises de Tokio . 15
Bourse des actions d'Osaka 9,2
— de Tokio 1R,7
Navires à vapeur de :
Nippon- Yusen 10
Toya-Kisen 8
Osaka-Shosen g
Bassin et chantier :
Bassin de Yokohama 12
Chantier d'Ishikawajima 10
Assurances :
Tokio , 8
Yokohama 7
Assurance mutuelle 8
Filatures de coton de :
Fuji 10
Tokio. 8
Kanegafuchi 14
Miye 14
Éclairage électrique et gaz :
Tokio (gaz) 10
Nikkan(gaz) 8,5
Tokio (éclairage électrique) 10
Ujigawa (électricité) 5
Kinugawa (électricité hydraulique) 5
Mines :
Houillère d'Iriyama 12
— d'Iwaki 5
Industrie :
Fuji (fabrique de papier) 7
Oji — 5
Teikoku (chanvre et lin) 11
Tokio (carton de papier) 12
Dainippon (fabrique de sucre) 6
Daiwan (fabrique de sucre) 20
40 Pour les valeurs mobilières appartenant à l'étranger, les renseignements
font défaut.
50 Les valeurs mobilières, à la fin de 1912, se répartissent comme suit :
Dette nationale : Y""
Dette intérieure 1.096.402.065
— extérieure 1.427.683.686
Total 2.524.085.751
Dette locale 294.170.272
Actions des sociétés :
Commerce . 585.574.710
Industrie 1.032.677.673
Agriculture 10.335,677
Banque 238.740.000
Chemins de fer 804.518.085
Total 2.671.846.145
- 9 -
Dettes sociétaires.
Billets de banque 290.290.930
Titres de sociétés . . .• 212.683.950
Total 502.974.880
Millions de yen
1.099
1.042
1.295
1.154
1.414
))
2.861
1.881
4.410
»
4 . 350
»
5.993
»
Total en général 5.993.077.048
Le mouvement des valeurs mobilières au Japon, depuis 1899, a été le sui-
vant :
Montant total Montant appartenant Montant appartenant
Fin (le aux aux
valeurs mobilières nationaux étrangers
1899 1.099 1.042 57
1901 1.295 1.154 141
1903
1905 2.861 1.881 980
1908
1910
1912
PERSE
LA DETTE PUBLIQUE ET LA SITUATION FINANCIÈRE DE LA PERSE
La dette persane sur base d'argent 7 % se répartit comme suit : avances
consenties par l'Angleterre : £■ 440.000; avance faite par la Russie en 1913 :
£. 200.000; solde de l'emprunt kran consolidé de 1911 garanti par la Banque de
Russie : £■ 976.100. Quant à la dette persane extérieure sur base d'or 5 %, elle
consiste en deux emprunts russes de 1900 et de 1902, en l'emprunt anglo-indien
de 1903-1904 et celui de 1911 de la Banque impériale. Le montant total de ces
dettes atteint actuellement £ 5 millions. Mentionnons également la dette du
Creusot, qui s'élève à ^242.210, ainsi que d'autres dettes diverses représentant
un minimum de £ 800.000. Notons enfin qu'il est question d'unifier une partie
des dettes mentionnées plus haut au moyen d'un emprunt de consolidation de
£■ 6 millions qui serait émis au prix de 87 ^/^ %, ce qui donnerait net £. 5.250.000.
Voici comment serait affecté le produit de ce nouvel emprunt :
Livres iterling Litres sterling
Remboursements .
Avance russe 200.000 ,
Avances britanniques 440.000
Emprunt anglo-indien 310.000
Conversion de l'emprunt kran consolidé
(russe) 926.000
Dette du Creusot 242.210
Dettes diverses 131.790 2.250.000
Restant disponible 3.000.000
5.250.000
- 10 -^
Voici comment se présentent les comptes du Gouvernement persan pour
l'année fiscale 1911-1912 :
Recettes. Livre» itcrling
Mayliat (impôt foncier) 693.210
Domaines de la couronne 119.600
Accises 129.930
Postes et télégraphes 118.190
Passeports 31.680
Droits de transport 22.880
Divers revenus 78.110
Revenus estimatifs à percevoir 55.000
1.248.600
Douanes 794.250
2.042.850
Dépenses.
Ministères 678.300
Trésorerie générale • 35.900
Administrations 66.000
Allocations aux agents financiers 159.200
Vérification des comptes 4.600
Diverses dépenses gouvernementales 111.700
Montant des traites gouvernementales 16.300
1.062.200
Emprunts (intérêts et amortissements) 536.400
1.598.600
URUGUAY
LA DETTE PUBLIQUE AU 31 DÉCEMBRE 1912 ET DEPUIS 1892
D'après le rapport annuel de VOfflce du Crédit public, nous empruntons les
renseignements suivants sur la dette publique uruguayenne à la fin de l'année
1912.
Au 31 décembre 1912, le montant total de la dette atteignait 133.295.145 pe-
sos contre 131.857.540 pesos au 31 décembre 1911, soit une augmentation de
1.437.605 pesos.
Pendant l'année 1912, il a été émis pour 57.161 pesos de la dette amortissable
deuxième, et deux nouvelles dettes ont été créées, notamment celle du rachat
de titres (une espèce d'obligations pour le rachat de terres fiscales) jusqu'à
concurrence de 1.115.012 pesos, ainsi que la dette de la Banque d'assurance
officielle de 3 millions de pesos, soit au total 4.172.173 pesos. Toutefois, la detfe
de la Banque d'assurance n'a jamais été placée dans le public, et ne le sera
vraisemblablement jamais, étant donné que les titres sont détenus en gage par
la Banque de la République, qui avance les sommes nécessaires au fonctionne-
ment de la Banque. Cette dette peut donc pratiquement être considérée comme
une dette nominale.
Le montant nominal des dettes rachetées pendant l'année dernière a atteint
2.734.568 pesos et la différence entre cette somme et celle qui a été émise ressort
à 1.437.605 pesos, constituant l'augmentation nette de la dette.
- 11 -
Voici un état de la dette publique au 31 décembre 1912
Montants
Dette intérieure. —
Pesos
Dette de garantie 2.271.300
— intérieure unifiée 1.955.500
— de liquidation 202.874
— amortissable, 2e série 1.252.086
Eastern Railway Guarantee Bonds. ...... 220.600
Banque d'assurance officielle 2.969.700
«RescatedeTitulos» 1.115.012
Dette e.xtérieure.
Dette con^ïolidée 80.132.838
Emprunt 5% 1896 4.868.448
— de conversion 29.789.365
— (travaux publics! ... 5.772.922
Dette internationaie.
Emprunt brésilien . 2.294.500
Total 133.295.145
Il y a deux dettes de moindre importance, dont le service est effectué au
moyen de recettes spéciales et qui ne sont pas comprises dans le tableau ci-
dessus; notamment les obligations des Usines électriques et l'emprunt de l'Uni-
versité, dont le montant au 31 décembre était respectivement de 884.900 pesos
et de 955.500 pesos.
Le service de la dette publique a été le suivant en 1912 :
On a payé pour intérêts 5.373.770 pesos, contre 5.305.271 pesos en 1911;
pour rachats 2 355.157 pesos, contre 2.268.168 pesos l'année précédente; soit
au total 7.728.928 pesos, contre 7.573.447 pesos. A cette somme, il faut ajouter
pour garanties payées aux chemins de fer 651.170 pesos, contre 704.013 pesos
et quelques sommes moindres pour commissions et petites dépenses. Au total,
le service de la dette absorbe donc une somme de 8.388.855 pesos, contre
8.299.078 pesos en. 1911, ce qui fait ressortir l'augmentation à 89.777 pesos.
L'émission et l'extinction annuelle de la dette ont été les suivantes pendant
les dix dernières années :
1903
1804
1905
1906
1907
1908
1909
1910
1911
1912
Emission
Extinciion
Pesos
2.884.607
2.305.032
1.000.000
2.028.257
300.000
1.570.450
21.306.054
15.485.869
3.442.445
2.579.462
4^. 669 . 668
8^.258.425
2.651.496
2.609.731
1.031.406
2.608.313
260.972
2.632.305
4.172.173
2.734.568
- 12 -
Voici quelles ont été les variations de la dette publique uruguayenne depuis
le règlement de 1891 :
1892.
1893
1894.
1895.
1896.
1897.
1898.
1899.
1900.
1901.
1902.
1903.
1904.
1905.
1906.
1907.
1908.
1909.
1910.
1911
1912.
Dette
iDlérinure
Dette
extéripure
Dette
internationale
Total
Milliers
de piastrei-or
11.684
90.562
1.827
104.073
11.355
90.562
1.677
103.584
11.089
90.562
4.955
106.606
10.893
89.415
4.750
104.968
12.835
101.412
4.540
118.787
15.947
100.491
4.328
120.766
19.986
100.325
4.114
124.425
23.102
100.162
3 . 896
127.160
22.189
99.661
3.657
125.507
22.193
99.195
3.415
124.803
21.229
98.716
3.230
123.175
22.948
97.699
3.107
123.754
22.682
97.023
3.021
122.726
21.948
96.570
2.938
121.456
9.430
114.995
2.851
127.276
8.879
116.507
2.753
128.139
8.609
118.898
2.650
130.157
8.013
125.232
2 . 560
135.805
8.443
123.310
2.475
134.228
6.909
122.561
2.387
131.857
10.437
120.564
2 . 294
133.295
VENEZUELA
LA DETTE PUBLIQUE AU r' JANVIER 1912 ET LES CHEMINS DE FER VÉNÉZUÉLIENS
Dans notre rapport de 1907, nous avons vu par quelles alternatives avait
passé la dette publique vénézuélienne, qui remonte à 1830 et qui se compose
aujourd'hui de la dette intérieure, de la dette extérieure à 3 % ou dette diplo-
matique, et du reste des obligations réglées par la commission mixte.
Comparativement à 1910 et 1911, la dette publique vénézuélienne se décom-
posait comme suit au 1^^ janvier 1912 :
Années
au
1er janvier
Dette
intérieure
Dette
extérieure
Dettes
diverses
Dette
totale
1910
1911
1912
65. 524. 4 2S
63.717.371
62.587.001
129.178.080
124.011.193
231.204.254
13.292.544
8.815.776
3 . 507 . 283
207.995.052
196.544.340
189.298.538
L'événement principal de l'année 1912 pour le Venezuela a été l'arrangement
définitif pris au sujet des demandes d'indemnités faites par les étrangers lésés
au cours des troubles vénézuéliens, et l'attribution, a'u règlement de ces indem-
nités, du 30 % de surtaxe imposé aux douanes de La Guaira et de Puerto-
Gabello. Mais le président a décidé de garder cette surtaxe, et d'en appliquer le
revenu à des travaux d'utilité publique. On se rappelle que le total des indem-
- 13 -
nités fixées par le tribunal de La Haye s'élève à 38.385.412 bolivars, soit
38.385.450 francs, et pèse depuis 1905 sur les finances du pays.
D'après le South American Journal, on évalue la longueur des chemins de
fer vénézuéliens à 430 milles, et les recettes brutes de 1911 à £ 431.608, soit
£ 1.000 par mille, tandis que les recettes nettes se chiffrent par £■ 182.827, ou
plus de -£ 400 par mille. Quatre des railways existant appartiennent à des com-
pagnies anglaises, mais trois seulement de ces compagnies offrent quelque
intérêt aux capitalistes de la Grande-Bretagne. Ces trois compagnies exploitent
une longueur totale de 167 milles, ont un capital de £ 2.746.000 et réalisèrent
l'an dernier un bénéfice brut de £■ 216.641, soit £■ 1.300 par mille, tandis que
les recettes nettes étaient de £■ 108.847 ou £■ 630 par mille, et 4 % du capital
engagé.
Le tableau que voici mentionne la longueur de voie, le capital, les réserves,
les recettes brutes et nettes, les dividendes des trois compagnies en question.
Capital
Obligations
Compagnies
Milles
RéserTes
La Guayra and Caracas.
Puerto Cabello ....
Bolivar
Total
23
34
110
167
370.000
340.000
2.50.000
960.000
Recettes
brutes
Actions
Livres sterling
350 . OÔÔ"
460.000
976.000
1.786.000
Recettes
nettes
53.915
5.754
15.000
74.669
Dividendes
pour 100
Livres sterling
La Guayra and Caracas.
Puerto Cabello ....
Bolivar
Total
81.805+ 7.594
36.919+ 3.106
98.017 + 16.533
43.607+ 8.540
9.176+ 1.877
56.064+ 17.144
216.741 + 27.233 108.847+27.561
TROISIÈME PARTIE
STATISTIQUES ET DOCUMENTS DIVERS
LES ÉMISSIONS EN 1912 ET DEPUIS 1871
D'après nos relevés, conformes à la statistique que dresse tous les ans le
Moniteur des Intérêts matériels, le montant des émissions en 1912 se serait
élevé à 20.189.450.000 francs contre 19.465.645.500 francs en 1911. Le mon-
tant des conversions aurait été de 688 millions. Cette statistique, que nous
publions ci-dessous, s'attache à classer chaque emprunt d'après son pays d'ori-
gine. Sur les 20 milliards d'émissions, 6 milliards 150 millions s'appliquent à
des fonds d'État, sans compter les emprunts occultes ou différés, les place-
ments des bons du Trésor, les accroissements des dettes flottantes et qu'il
faudra « consolider » tôt ou tard.
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- 15 -
La répartition géographique des émissions peut se résumer comme suit :
1911
1912
Totaux
Pour 100
Totaux
Pour lOO
Fraucs
Fraucs
Graudii-Bretagiieet colonies (1).
1.975.507.500
10,14
1.549.000.000
7.68
( ioutinent
8.699.804.000
595.677.500
7.810.500.000
44,70
3 , 06
40 , 1 3
10.530.950.000
300.000.000
6.904.000.000
52,16
Vfriuue
1,48
Amérique
34 , 20
Asie
384.156.500
1,97
905.500.000
4,48
19.465.645.500 100
20.189.450.000 100
Les principales catégories de titres ressortent, pour les cinq dernières années,
dans les proportions suivantes :
1908 1909 1910 1911 1912
Pourientagcs
Emprunts d'États^ de provinces et
de villes 34,17 34,65 34,18 29,42 30,22
Établissements de crédit 6,47 9,30 10,23 17,18 16,40
Chemins de fer et sociétés indus-
Irielles 57,80 46,05 42,12 50,97 50
Conversions 1.56 10 13,47 2,43 3,38
100 100 100 100 100
Rappel des émissions depuis 1871 :
Années Émissicos
Milliards
1871 15,6
1872 12,6
1873 10,9
1874 4,2
1875 1,7
1876 3,7
1877 7,9
1878 4,6
1879 9,4
1880 5,5
1881 7,2
1882 4,5
1883 4,2
1884 4,9
1885 3,3
1886 6,7
1887 5
1888 7,9
1889 12,7
1890 8,1
1891 7,6
1892 2,5
1893 6
Émissions Conversions
1894
1895
1896
1897
1898
1899
1900
1901
1902
1903
1904
1905
1906
1907
1908
1909
1910
1911
1912
Millii
jrds
17,8
12,6
6 , 5
1,3
16,7
7,6
9.6
0,7
10,5
1,6
11,3
0,6
11,9
»
9,9
»
21,9
8,5
18,3
8,7
14,4
1,S
19,1
1 ,7
26,5
10,3
15,3
0,2
21,2
0,3
24 , 6
2,5
26,5
3,6
19,5
0,7
20,2
0,7
[1) Non compris le Canada et les colonies sud-africaines.
- 16 -
L'ensemble de ces émissions par périodes quinquennales donne les chiffres
suivants :
Périodes Milliards
1871-1875 ^5
1876-1880 31,1
1881-1886 24,1
1886-1890 40,4
1891-1895 40,4
Période! Hilliardi
1896-1900 60
1901-1905 83,7
1906-1910 114,1
1911-1912 39,7
II
LES BUDGETS EUROPEENS EN 1890 ET AUJOURD'HUI
Allemagne (niill. de marks) :
Empire
États particuliers. . . .
Autriche-Hongrie (mil), de cour.)
Monarchie
Autriche
Hongrie
Belgique (niilI. de francs). . .
Bulgarie (mill. de leï)
Danemark (mill. de couronnes) .
Espagne (mill. de pesetas) . . .
France (mill. de francs) ....
Grande-Bretagne (mill. deliv. st.)
Grèce (mill. de drachmes) . . .
Italie (mill. délires)
Luxembourg (mill. de francs). .
Monténégro (mill. de couronnes)
Norvège (mill. de couronnes) . .
Pays-Bas (mill. de florins) , . .
Portugal (mill. de milreis) . . .
Roumanie (mill. de leï) ....
Russie (mill. de roubles) . . . .
Finlande (mill. de marcs)
Serbie (mill. de dinars)
Suède (mill. de couronnes) . . .
Suisse (mill. de francs)
Turquie (mill. de livres turques).
Budget
Budget
Exercice
dC8
Exercice
de*
—
dépenses
-
dépense*
1890-1891)
1.280,5
(1911-1912)
2.935,7
1890-1891)
2.354
(1911-1912)
5.788,3
(1890)
132,2
(1913)
504
(1890)
546,3
(1912)
2.916,7
(1890)
355,9
(1912)
1.852,7
(1890)
333,8
(1912)
708,1
(1890)
81,1
(1912)
214
1890-1891)
66,3
(1912-1913)
101,7
1890-1891)
810,7
(1913)
1.165,3
(1890)
3.046
(1912)
4 . 498
1890-1891)
154,6
(1911-1912)
240,6
(1890)
91,3
(1912)
143,3
1890-1891)
1.872,1
(1912-1913)
2.630,2
(1890)
7.4
(1912)
20,6
»
»
(1912)
4,2
1890-1891)
48,3
(1910-1911)
128,3
(1890)
134,6
(1913)
231,2
1890-1891)
45,5
(1910-1911)
73,5
1890-1891)
164,9
(1912-1913)
505,6
(1890)
947,9
(1913)
3.208,4
(1890)
54,1
(1911)
159,9
(1890)
46,2
(1912)
130,8
(1890)
92,8
(1913)
263
(1890)
72,2
(1913)
103,2
»
»
(1912)
34,6
- 17
III
LES DÉPENSES MILITAIRES EUROPÉENNES EN 1906 ET EN 1912
Allemagne. . . .
Autriche-Hongrie.
Belgique
Bulgarie
Danemark. . . .
Espagne
France
Grande-Bretagne .
Grèce
Italie
Norvège
Pays-Bas ....
Portugal
Roumanie. . . .
Russie
Serbie
Suède
Suisse
Turquie
Totaux . .
Dépenses
Budget
Dépense!
Budget
militaires
de
militaires
de
■niions de fmcs
Millitns de (rines
1.258
(1906-1907)
1.648
(1912-1913)
465
(1906)
675
(1912)
60
(1906)
78
(1912)
28
(1906)
40
(1912)
26
(1906-1907)
43
1912-1913)
, 186
(1906)
282
(1913)
1.044
(1906)
1.344
(1912)
1.480
(1906-1907)
1.777
(1911-1912)
27
(1906)
30
(1912)
416
(1906-1907)
648
(1912-1913)
26
(1905-1906)
30
(1910-1911)
94
(1906)
112
(1913)
50
(1905-1906)
70
(1910-1911)
45
(1906-1907)
74
(1912-1913)
1.275
(1906)
2 . 06^j
(1913)
20
(1906)
30
(1913)
102
(1906)
114
(1913)
35
(1906)
44
(1913)
120
(1)
235
(1912-1913)
6.757
9.338
IV
LES DETTES PUBLIQUES EUROPÉENNES EN 1906 ET EN 1912
Capital R d Pt Dépenies Capital
de ,^ de de
la dette * • la dette la dette
HillioDS de friDcs
llllioiii de Irinei ^ .■
Allemagne. ... 21.100 (1907) 825 25.930
Autriche-Hongrie. 15.790 (1906-1907) 608 19.410
Belgique .... 3.330 (1906) 125 3.739
Bulgarie 377 (1907) 32 604
Danemark. . . . 333 (1906) 11 492
Espagne 9.146 (1907) 405 9.408
France 29.177 (1907) 1.232 31.162
Grande-Bretagne. 19.725 (1906) 775 18.103
Grèce 825 (1906) 33 983
Italie 13.022 (1906) 577 14.024
Norvège ,470 (1906) 19 508
Pays-Bas .... 2.390 (1907) 76 2.428
Portugal .... 4.000 (1906) 122 4.530
Roumanie. , . . 1.435 (1907) 84 1.566
Russie 22.959 (1907) 1.010 23.578
Finlande .... 140 (1906) 6 176
Serbie 550 (1907) 25 659
Suède 528 (1906) 20 848
Suisse 101 (1906) 6 122
Turquie 2.392 (1906) n 2.900
Totaux. 147.790 5.991 161.170
Budget
de
Dépenses
de
la dette
(1912)
(1911-1912
(1912
(1912
(1912
(1912
(1912
(1912
(1912
(1912
(1912
(1913
(1911
(1912
(1913
(1912
(1913
(1912
(1912
(1912
Mlllioiis
1.
de francs
.190
870
199
40
13
410
.286
617
37
575
22
80
178
89
.072
8
32
36
8
276
7.438
Budget
de
(1911-1912)
(1912)
(1912)
(1912)
1912-1913)
(1913)
(1912)
(1911-1912)
(1912)
(1912-1913)
(1910-1911)
(1913)
(1910-1911)
(1909-1910)
(1913)
(19111
(1912)
(1913)
(1913)
(1912)
(1) Évaluation du groupe parlementaire français d'arbitrage à la Conférence de La Haye.
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- 19 -
VI
L'ENCAISSE ET LA CIRCULATION DES BANQUES D'ÉMISSION EUROPEENNES
A LA FIN DES ANNÉES 1890, 1895, 1900, 1909, 1910, 1911 ET 1912
Dans le relevé ci-dessous, ne sont pas compris les stocks d'or des trésors
d'États.
Encaisse or des banques d'émission européennes.
Banques
France
Russie
Finlande . . .
Angleterre
Écos5e . . . .
Irlande ...
Allemagne ....
— (locales).
Autriche Hongrie. ,
Italie
Sicile ....
Naples . . .
Belgique
Bulgarie
Danemark
Espagne
Grèce
Hollande
Norvège
Portugal
Roumanie
Serbie
Suède
— (privées) . . .
Suisse
Totaux
1890
1895
1900
1909
1910
1
1911
1912
Millions de francs
3
1.120
1.950
2.334
3.495
3 . 279
3
.206
.207
922
1.920
1.846
3.141
3.285
3
.352
3
.540
22
22
22
25
22
35
35
569
1.090
714
816
784
811
758
103
128
161
132
»
»
»
78
75
83
87
»
»
»
632
768
611
851
826
908
971
»
»
65
»
))
»
»
113
513
966
1.422
1.386
1
.356
1
.270
299
301
951
975
1
.008
1
.023
354
106
35
56
57
48
48
35
67
196
204
212
216
60
79
92
»
»
189
214
3
3
7
31
32
40
51
84
98
102
98
103
105
113
152
200
350
770
411
41 S
437
3
2
2
!)
»
»
»
106
93
123
254
262
295
340
39
34
41
42
48
54
54
10
27
26
31
34
37
39
46
62
40
95
120
158
157
8
6
7
13
25
32
50
24
34
52
112
113
119
140
10
10
13
»
»
»
»
62
83
100
136
156
161
173
4.589 7.637 8.160 12.754 12.122 12.544 12.836
Les monnaies des divers pays européens ont été converties en francs d'après
les parités suivantes :
Mark, 1^ 25; florin autrichien, 2^ 50; couronne autrichienne, 1^ 39; livre ster-
ling, 25 francs; florins hollandais, 2^10; milreis, 5^60; rouble-or, 4 francs;
rouble-papier, 2^50; leû, peseta, drachme, lire, marc finlandais, dinar, 1 franc.
- 20
Encaisse argent des banques d'émission européennes.
Baoqiiet
f'rance
Russie
Finlande . .
Angleterre
Ecosse . . .
Irlande . . .
Allemagne ....
— (locales) .
Autriche-Hongrie. .
Italie
Sicile. . . .
Naples . . .
Belgique
Bulgarie. .....
Danemark
Espagne
Grèce
Hollande
Norvège
Portugal
Roumanie
Serbie
Suède
— (privées). . .
Suisse
Totaux
1890
1895
1900
1909
1910
1911
1912
Millions de francs
1.241
1.23.5
1.099
876
826
804
689
20
20
163
196
172
171
178
4
3
3
3
3
3
2
»
»
V
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»
17
20
14
21
»
»
»
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10
10
10
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»
316
299
301
293
327
350
325
»
»
32
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»
»
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348
266
250
314
303
298
349
( 53
50
108
89
108
126
56
{ 10
2
4
4
5
5
1 2
13
16
15
15
16
44
20
15
»
u
60
73
2
4
7
17
21
19
16
»
»
»
»
»
»
»
82
252
408
403
768
754
737
»
»
»
»
M
»
»
142
173
141
77
53
25
17
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»
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10
42
48
38
28
35
47
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3
5
1
1
1
1
5
5
9
7
7
7
4
3
3
5
6
7
7
7
14
20
17
»
»
»
»
23
12
10
16
10
9
13
2.335 2.456 2.602 2.406 2.634 2.671 2.505
Circulation fiduciaire des banques d'émission européennes.
Banques
France
Russie
Finlande . .
Angleterre
Ecosse . . .
Irlande . . .
Allemagne
(locales*
Autriche-Hongrie. .
Italie
Sicile ....
Naples . . .
Belgique
Bulgarie
Danemark
Espagne
Grèce
Hollande
Norvège
Portugal
Roumanie
Serbie
Suède
— (privées). . .
Suisse
Totaux
1890
1895
1900
1909
1910
1911
1912
Millions de franc
;s
3.052
3 . 485
4.187
5.324
5.261
5.310
5.584
3.402
4.324
1.532
3.167
3.327
3.569
3.997
54
56
72
112
124
115
117
628
658
924
721
715
730
732
160
194
214
185
186
193
200
177
173
182
184
202
194
196'
1.378
1.650
1.762
2.589
2.591
2.813
3.149
v
1)
223
190
188
191
192
936
1 . 302
1 . 569
2.297
2.495
2.668
2.956
( 758
820
1.442
1.524
1 . 694
1.700
1.126
( 242
66
95
97
91
90
1 52
253
385
407
408
421
400
449
596
807
869
929
963
2
2
20
74
83
110
162
111
122
135
181
184
196
204
731
990
1.586
1.671
1.715
1.763
1.855
98
112
138
134
133
135
190
410
433
472
622
620
657
666
70
71
92
108
115
124
135
48
311
385
390
434
455
474
135
137
122
294
348
447
438
39
25
36
51
50
66
92
64
79
100
283
289
305
320
83
85
115
»
»
<»
»
173
190
230
286
297
315
339
13.276 15.900 15.831 21.592 22.254 23.478 25.173
21 -
VII
LES VARIATIONS DU TAUX DE L'ESCOMPTE EN 1912
Comme pour nos précédents rapports, nous empruntons au Moniteur des
Intérêts matériels les chiffres des variations du taux de l'escompte sur les prin-
cipales places européennes en 1912.
Mois
Janvier .
Février .
Mars. . .
Avril. . .
Mai . . .
Juin. . .
Juillet. .
Août. . .
Septembre
Octobre .
Novembre
Décembre
Linster
dam
■ Berlin
1
inixelles
Londres
Paris
Hom»
Saint-
Pétersbourg
Vienne
4
5
4V2
4
3V2
57,
4/^2
5
4
5
^\U
4,31/2
3V2
5\^2
4V2
5
4
5
4\/2
3V,
3V2
51/2
472.5
5
4
5
4V2
3^/,
3V2
5V2
5
5
4
5
4V2,4
3V2,3
3\!,
572
5
5
4
5,41
u
4
3
3
5V2
5
5
4
4V2
4
3
3
5V2
5
5
4
4V2
4
3,4
3
5V2
5
5
4
4V.
4
4
3
573
5
5
4
4V2,
5
4,5
4,5
3,3V2
4,51/
'2 5,572
5,572
4
5,6
5
5
5
4
514
572.6
572,6
51/0,6
Moyennes annuelles du taux de l'escompte de 1886 à 1912.
1886.
1887.
1888.
1889.
1890.
1891.
1982.
1893.
1894.
1895.
1896.
1897.
1898.
1899.
1900.
1901.
1902.
1903.
1904.
1905.
1906.
1907.
1908.
. 1909.
1910.
1911.
1912.
Amster-
dam
Berlin
Bruxelles
Londres
Pari»
Rome
Saint-
Pétersbourg
Vienne
2,50
3,29
2,75
3,04
3
„
»
4
2,50
3,40
3,06
3,38
3
5 , 50
5,05
4,12
2,50
3,33
3,27
3,30
3,10
5,50
5,34
4,16
2,50
3,68
3,54
3,56
3,10
5,22
5,75
4,19
2,80
4,38
3,20
4,55
3
6
5,85
4,52
3,12
3,80
3
3,53
3
5,78
4,88
4,40
2,70
3,20
2,70
2,54
2,66
5,âO
4,88
4,02
3,40
4,08
2,83
3,05
2,50
5,18
4,70
4,24
2,58
3,12
3
2,11
2,50
5,70
4,50
4,09
2,50
3,15
2,60
2
2,20
5
5
4,30
3,02
3,65
2,85
2,48
2
5
6,05
4,09
3,14
3,84
3
2,78
2
5
5,87
4
2,75
4,28
3,04
3,26
2,20
5
5,27
4,16
3,83
4,98
3,91
3,75
3,06
5
5,59
5,04
3,60
5,33
4,08
3,96
3.23
5
6,07
4,57
3,23
4,10
3,28
3,72
3
5
5,67
4,08
3
3,32
3
3,33
3
5
5,07
3,55
3,40
3,84
2,17
3,75
3
5
4,65
3,50
3,24
4,22
3
3,30
3
5
5,37
3,50
2,68
3,81
3,18
0
3
5
5,63
3,70
4
5
3,84
4,27
3
5
7,27.
4,33
5,10
6,03
4,95
4,93
3,47
5,07
7,12:
4^89
3,38
4,76
3,50
3
3,04
5,04
5,99
4,25
2,88
3,92
3
3,10
3
5
4,99
4
4,23
4,35
4,12
3,72
3
5
4,50
4,19
3,45
4,40
4,16
3,47
3,14
5,13
4,50:
4,40
4
4,95
4,11
3,77
3; 38
5,56
J5.
5,16
- 22 -
VIII
INDEX-NUMBERS. — LES PRIX DE GROS
D'après le savant statisticien anglais M. A. Saderbeck, le tableau des index-
numhers calculé sur quarante- cinq catégories de marchandises est établi ainsi
qu'il suit :
La moyenne des onze années de 1867 à 1877 étant 100, voici les chiffres
qu'il a obtenus depuis par périodes décennales :
1878-1887 79 1898-1907 71
1888-1897 67 1902-1911 74
1890-1899. ...... 66
Depuis 1890, voici quels ont été les coefïicient's annuels :
Années Coefficients Annéci CoefficicnU Années Coefficient*
1890 72 1898 64 1906 77
1891 72 1899 68 1907 80
1892 68 1900 75 1908 73
1893 68 1901 70 1909 74
1894 63 1902 69 1910 78
1895 ..... 62 1903 ...... 69 1911 80
1896 61 1904 70 1912 ..}... 85
1897 .... 62 1905 72
W index-number de 1912 est de 5 points supérieur à celui de l'année 1911
et de 15 % inférieur au niveau de la période-type, qui était équivalent à la
moyenne des vingt-cinq années 1853 à 1877; par contre, V index-numher de
1912 est supérieur de 29 % à la moyenne de la décade 1890-1899, qui a fourni
le chiffre le plus bas que l'on ait eu à enregistrer.
Les fluctuations mensuelles ont été les suivantes pendant ces quatre der-
nières années :
Mou 1907 1908 1909 1910 1911 1912
Janvier 80 76 72 77,1 » 81,8
Février 80,7
Mars 80
Avril 80,7
Mai 82,4
Juin 82
Juillet 81,1
Août 79,4
Septembre 79,1
Octobre 78,8
Novembre 76,7
Décembre. 76,2
74,5
71.9
78,1
»
82,9
74,1
72,4
79,1
»
84,4
73,8
74,3
78,5
»
85
73,6
75,4
78,4
»
85,3
72,9
75,1
76,9
»
85 , 5
73,1
75,2
78,1
»
86,5
72,2
74,9
78,2
»
85,9
72,5
74,7
77,6
»
86,7
72,2
75,2
77,2
»
85,8
72,2
75,5
77,8
»
85,3
72,3
76,3
77.9
»
86,4
- 23
En prenant séparément, comme le fait V Économiste Européen, les produits
alimentaires et les matières premières, les index-numbers se comparent ainsi
(1867 — 1877 = 100 dans les deux cas) :
Produits alimentaires
Matières premières .
1878
1890
1902
1895
1896
1911
1912
1887
1899
1911
FévriiT
Moye
Juillet
Does
60
Décembre
Décembre
84
68
71
63,8
78,9
78,4
76
64
77
57,0
58,6
82 , 3
92,2
La position comparative des six groupes séparés de marchandises à la fin
des deux dernières années et durant les périodes précédentes est montrée dans
le tableau suivant (l'index-number de la période 1867-1877, pris comme base
de comparaison, étant représenté par 100 dans tous les cas) :
1878
à
1889
Produits alimentaires végétaux. 79
Produits alimentaires animaux . 95
Sucre, café, thé 76
Minéraux 73
Textiles 71
Produits divers 81
1890
1902
1911
1912
Différence
1899
a
1911
Décembre
Moyenne»
Décembre
pour 100
en 1912
61
66
75,5
72,6
— 4
81
88
90
96,9
+ 77:
63
49
66,2
57,7
— 13
71
90
100,6
117,3
+ 161/.
56
70
68,6
82,5
+ 20
66
74
80,7
83,2
+ 3
Dans l'ensemble, toutes les sortes de céréales se retrouvent à un niveau plus
élevé, bien que les prix de clôture indiquent un fléchissement. La viande est
considérablement plus chère pour toutes les catégories, tandis que le sucre est
tombé de 14 s. 9 d. à 9 s. 5 d. par cwt., sur la perspective d'une récolte abon-
dante. Le café a conservé ses hauts prix de l'année précédente.
En ce qui concerne les minéraux, on note partout une avance considérable.
Le fer a progressé de 50 s. 2 d. à 67 s, 6 d. par tonne; le cuivre, de £ 63 à
£ 76 5/g;rétain,de £ 205 à £ 229 Va", le plomb, de £ 16 à £ 18 1/2; le charbon
(à Londres), de 20 s. 6 d. à 21 s. 6 d., tandis que la moyenne, pour l'année en-
tière, des prix du charbon d'exportation, s'est avancée de 11 '/le-- à 12 "/ig »•
par tonne.
Le cours du coton qui, l'année précédente, était tombé à 5 d., s'est élevé
en 1912 à 7 ^2 ^} pour s'inscrire à 7 ^/gà. à la fin de l'année. La laine fine a enre-
gistré une hausse d'environ 10 % et la laine grossière de 15 %. Le jute a haussé
de près de 30%; le lin et le chanvre sont également en hausse. Les peaux, le
cuir et le pétrole enregistrent une forte avance ; le bois est aussi plus cher, mais
l'huile de lin, qui s'était maintenue à des cours élevés depuis la fin de 1909,
et dont les prix avaient progressé de 39 s. à plus de 46 s. en mai, a fléchi
jusqu'à 25 s. en décembre.
L'argent a enregistré une avance sérieuse, les prix et les index-numbers se
- 24 -
comparant ainsi (60,84 d. l'once étant la parité de IS^/g d'argent pour 1 d'or
= 100) :
Prii lodex-numbers
Moyenne 1890-1899 34 d. 55,8
— 1900-1909 263/4 44
— 1902-1011 26V8 42,9
— 1893 355/8 r)8,6
— 1908 24% 40,1
— 1909 23"/i6 38,9
— 1910 24% 40,5
1911 24^732 40,4
— 1912 28V32 46,1
Plus bas novembre 1902 21 "/je 35,6
Fin décembre 1906 32Vi6 •'>3,1
— 1908 233/i8 38,1
— 1909 241/4 38,9
— 1910 » »
— 1911 25Vi6 41,2
— 1912 29 d. 47,7
IX
LES CHEMINS DE FER DU MONDE DE 1825 A 1911
D'après les chiffres que nous avons- rassemblés dans nos précédents travaux
et rapports (Voir rapport présenté à La Haye, exposé chap. VIII), la longueur
des chemins de fer exploités dans les cinq parties du monde atteignait 16.690
kilomètres en 1845, 145.025 en 1865, 484.460 en 1885, 886.313 en 1905 et 983.868
en 1909.
A la fin de 1910 et de 1911, d'après VArchiv fiir Eisenhahnwesen, ils attei-
gnaient une longueur de 1.030.014 et 1.057.809 kilomètres se décomposant
comme suit :
En Europe . .
Amérique .
Asie. . . .
Afrique . .
Australie .
Total. . .
Fin 1909
Kilotnëtres
329.855
513.824
99.436
33.481
30.316
Fin 1910
Kilomètres
333.980
526.382
101.916
36.854
31.014
AugmentsliOD
en 1910
Kiloinètrps Pour 100
4.125
1 2 . 558
2.480
3.373
698
1,25
2,44
2,50
10,01
2,30
Fin 1911
Klluniètres
338.880
541.028
105.011
40.489
32.401
Augmentation
en 1911
Kilomètres Pour lUO
4 . 900
14.646
3.095
3 . 635
1.387
1,47
2,78
3,04
9,86
4,47
1.006.912 1.030.146 23.234 2,29 1.057.809 27.663 2,68
Le tableau suivant indique combien les différents pays, dans chaque partie
du monde, possèdent de chemins de fer en exploitation, et quel est le rapport de
là population et de la superficie de chaque pays avec le nombre de kilomètres
de voies.
- 25
Europe.
Allemagne
Autriche - Hongrie (y
compris la Bosnie et
1 Herzégovine) . . .
Grande-Bretagne et Ir-
lande
France
Russie (y compris la
Finlande)
Italie
Belgique
Luxembourg
Pays-Bas
Suisse
Espagne
Portugal
Danemark
Norvège
Suède
Serbie
Roumanie
Grèce
Bulgarie
Turquie
Malte, Jersey, île deMan
Chemins de fer
Longueur
des
fhemius de fer
Dont
ligues
d'État
Superfloie
d«-s pays
Nombred'liabiiuiiSs
pour
100 kilo-
mètres
carrés
poui-
10.000 ha bi-
taiits
Kilomètres
Kilomètres
Kilomètres carrés
61.936
56.431
540.800
64.551.000
11,4
9,5
44.820
35.842
676.500
51.018.000
6,6
8,8
37.649
»
314.000
45.472.000
12
8,3
50.232
8.900
536.400
39.252.000
9,3
12,8
61.078
36.163
5.390.000
128.171.000
1,1
4,8
17.222
14.369
286.600
34.270.000
6
5
8.660
4.330
29.500
7.386.000
29,3
11,7
519
197
2.600
246.000
19,9
21
3.194
1.796
33.100
5.825.000
9,6
5,5
4.781
2.738
41.400
5.559.000
11,5
14,2
15.097
»
496.900
18.618.000
o
8,1
2.983
1.080
92.600
5.429.000
3,2
5,5
3.771
1.959
38.500
2.589.000
9,7
14,4
3.092
2.609
322.300
2.350.000
1
13,2
14.095
4.418
447.900
5.476.000
3,1
25,7
936
574
48.300
2.821.000
1,9
3,3
3.607
3.474
131.300
6.860.000
2,7
5,3
1.590
»
64.700
2.632.000
2,4
6
1.945
1.692
96.300
4.253.000
2
4,6
1.557
»
169.300
6.130.000
0,9
2,5
110
»
1.100
1,100
10
3
338.880 176.572 9.760.100 437.280.000 3,5
7,7
Amérique.
États-Unis
Canada
Terre-Neuve ....
Mexique
Amérique centrale. .
Grandes Antilles. . .
Petites Antilles . . .
Colombie. . . . . .
Venezuela
Guyane anglaise. . .
Guyane hollandaise .
Equateur
Pérou
Bolivie
Brésil
Paraguay, . , . . .
Uruguay ......
Chili
République Argentine
396.860
X
9.305.300
92.037.000
4,3
43,1
40.869
2.767
8.768.000
6.500.000
0,5
61,9
1.095
»
110.800
237.000
1
46,2
24.717
»
2.016.000
14.545.000
1,2 .
17
2.850
201
(?)
(?)
(?)
(?)
5.302
241
(?)
(?)
(?)
(?)
541
»
(?)
(?)
(?)
(?)
988
•
1,330 .'800
4.500.000
0,07
2,2
1.020
»
1.043.900
2.647.000
0,1
4,2
167
»
229.600
295.000
0,07
5,7
60
»
(?)
(?)
(?)
(?)
563
»
299.600
1.400.000
0,2
4
2.665
1.358
1.137.000
4.607.000
0,2
5,8
1.217
»
1.334.200
2.269.000
0,1
5,4
21.778
8.760
8.361.400
21.279.000
0,3
10,2
373
»
253.100
636.000
0.1
5,9
2.638
»
178.700
1.043.000
1,5
25,3
5.750
2.672
776.000
3.314.000
0,7
17,3
31.575
3.971
2.885.600
4.894.000
1,1
64,5
541.028 19.970
(?)
(?)
(?;
26
Chemins de fer
I.ouguom-
Dont
Supei'fii'ie
-— —
.les
L-liemius de fer
lignes
d'Élat
lies |iays
Nomlire irhabitaiits
100 kilo-
mètres
carrés
pour
10.000 hal.i-
umts
Asie.
■ —
—
—
Kilomètres
Kilomèlres
Kilo
meries carr.'S
Asie centrale russe . . .
(•,.544 1
9.947
554.900
9. '505. 000
1,2
7
Sibérie et Mandchourie .
10.84B 1
12
.518.500
7.049.000
0 , 09
15,4
Chine
9 . 854
»
11
081.000
357.250.000
0,09
0,3
Japon (y compris la Co-
rée)
9.933
7.441
636.000
63.135.000
1,6
1,6
Indes orientales an -
glaises
52.838
4 6.297
5
.068.300
295.213.000
1
2 8
Ceylan
928
))
63.900
4.040.000
l/^
• -',3
Perse
54
»
1
645.000
9.500.000
0,003
J),06
Asie Mineure et Syrie (y
compris Chypre). . .
5.277
1.468
1
.778.200
19.568.000
0,3
2,7
Indes portugaises . . .
82
»
3.700
572.000
2,2
1,4
Malaisie
1 . 380
»
86.200
719.000
1,6
19,2
Indes néerlandaises . .
2.533
2.213
599.000
29.577.000
0,4
0,9
Siam
1.090
952
633.000
9.000.000
0,2
1,2
Cochinchine, Cambodge^
Annam, Tonkin^ Pon-
dichéry, Malacca, Phi-
lippines
3.632
(?)
(?)
(?)
'?)'
(?)
105.011 68.318
Afrique.
Egypte
Algérie et Tunisie ,
Colonie du Congo belge
Union sud-africaine
Colonies allemandes
— anglaises .
— françaises.
— italiennes.
— portugaises
Australie.
Nouvelle-Zélande . . .
Victoria
Nouvelle-Galles du Sud.
Australie méridionale. .
Queensland
Tasmanie
Australie occidentale. .
Hawaï
5.9i;}
6.382
1.227
15.760
3.457
2.995
3.024 »
119 »
1.612 »
40.489 26.474
4.493
2.903
i)
13.507
3.457
2.115
4.476
5 . 669
6 . 288
:{ . 405
6.483-
1 .035
4 . 903
142
32 . 401
4 . 430
5.617
5.862
3.311
5.891
755
3.451
(?)
994.300
897.400
(?)
(?)
(?)
(?)
'?)
(?)
19\
271 .000
229.000
799.000
2.341.600
1.731.400
67.900
2.527.300
17.700
11.287.000
6.695.000
(?)
(?)
(?)
(?)
(?) -
(?)
1 .021.000
1 .271.000
1 .596.000
434.000
908.000
186.000
472.000
109.000
(?)
0,6
0,7
(?)
■ (?)
f?)
(?)
(?)
(?)
1 ,6
2 . 5
0,8
0,1
0,4
1,5
0,2
0,8
(?i
5,2
9,5
(?) •
(?) .
(?)
(?)
(?)
(?)
(?)
<?1
43 , 8
44 , 6
39,4
78,4
71,4
55 , 6
103,9
13
29.317 7.985.000 5.997.000. 0,4
Les dépenses d'établissement par kilomètre ont été évaluées, en moyenne^
pour l'Europe, à 400.000 francs, et à 227.500 francs pour les pays extra-euro-
péens; calculées sur cette base, elles se seraient donc élevées à la fm de 1911
au chiffre total de :
Pour l'Europe
Pour les autres parties du monde . .
Soit enseinbU' ;'i.
338.880 km. :'i 400. 000'
718.929 à 227.500
135.552.000.000
163.556.347.500
299.108.347.500'
- 27 -
Le groupement ci-dessous, établi à la fin de chacune des périodes décennales
1840-1910 et de 1911, permet de se rendre compte de l'accroissement successif
des réseaux de voies ferrées des cinq parties du monde; ces chiffres ne sauraient
toutefois être pris dans leur sens absolu, car ils ne comprennent ni les petits
chemins de fer et lignes similaires, ni les tramways, ni les lignes servant sur-
tout au trafic local.
Pendant les cinquante dernières années, le réseau des chemins de fer du globe
a presque décuplé de longueur; il a passé, en effet, de 108.012 kilomètres à fin
1860, à 1.030.014 kilomètres à fin 1910.
Année d'ouverture Europe Amérique Asie Afrique Aujtralie
rie la — ■ ■ — — — — Eusemlile
première ligne 1825 1827 1853 1860 1854
Longueur des lignes en exploitation.
Kilomètres
Fin 1840 2.925 4.724 » ,> -. 7.679
— 1850 23.504 15.064 » » » .38.568
— 1860 51.862 53.935 1.393 455 367 108.012
— 1870 104.914 93.139 8.185 1.786 1.765 209.789
— 1880 168.983 174.666 16.287 4.646 7.487 372.429
— 1990 223.869 331.417 33.724 9.836 18.889 617.285
— 1900 283.525 402.171 60.301 20.114 24.014 790.125
— 1910 333.980 526.382 101.916 36.854 31.014 1.030.146
— 1911 338.880 541.028 105.011 40.989 32.401 1.057.809
Augmentation des lignes en pourcentages à la fin de chaque période décennale.
Périodes
1840-1850 710 215 « » » 401
1850-1860 121 257 » » » 180
1860-1870 102 73 486 50 350 94
1870-1880 61 88 99 56 333 78
1880-1890 32 89 107 0,4 142 66
1890-1900 27 21 79 14 27 28
1900-1910 18 31 69 83 29 30
1911 1,47 2,78 3,04 9,86 4,47 2,68
COURS DES
X
PRINCIPALES VALEURS A LA FIN JUIN 1911, FIN DÉCEMBRE 1911
ET 1912 ET FIN JUIN 1913
Valeurs en hausse.
Fin juiu
1911
Fin 1911
Fin juin
1913
Fonds d'État.
HeUénique5% 1881 282 289,25 297 307
Guatemala 4% 44 45'/2 47V2 ^-
Nicaragua 4% 1886 82 80 73 82'/,
;L 1909»
Fin juin „. ,.,, „. .ma Fin jaia
19U Vmim Fml912 jgjg
Banques et établisseinenU de crédit.
Banque d'Autriche-Hongrie .... 1.930 1.994 2.087 2.06«
— de France 3.965 4.21.5 4.460 4.670
Crédit Foncier du Brésil 561 564 598 585
— Argentin 786 827 785 790
Comptoir National d'Escompte . . . 942 940 1.015 1.048
Crédit Lyonnais 1.502 1.533 1.618 1.625
Société Générale 790 ^820 817 810
Banque Nationale de Grèce . . . . 4.135 4.140 4.118 4.500
— de Roumanie 5.580 5.685 5.125 5.770
— Néerlandaise 203 210Vî 216V« 214
— de Genève 582 590 700 670
Chemivs de ier.
Great Northern, dei 52V8 54»/4 52 52"/îs
Madrid-Saragosse-Alicante 435 416,50 438 462
Nord de l'Espagne 418 418 460 466
Andalous 259 265 312 307
Aussig-Toeplitz 1.830 1.745 2.030 1.960
Prince Henri (Luxembourg^ 760 770,50 783 761,50
Braine-Gand, priv 1.770 1.810 1.852 1.795
Mexican railway, ord ^^^^Vu 4678 5S\.'^ 53\/^
Orientaux 770 795 825 855
Nord Western (Uruguay) 46 543/4 62 53
— Eastern I33/4 13^4 13»/4 13 V»
Sud-Ouest Brésil, priv . 495 470 530 530
Est (France) 875 927 910 879
F. CM 1.170 1.203 1.259 1.241
Midi 1.050 1.087 1.135 1.125
Nord 1.645 1.630 1.665 1,680
Orléans 1.225 1.245 1.320 1.287
Amsterdam-Rotterdam 86V4 8IV4 «S»/* 94
Central Néerlandais 26Vs ^^^^U^ 32 33
Thessahe 140 121 150 154
Métallurgie.
Sarrebruck 10.150 9.950 » »
Ateliers de la Meuse 1.635 1.532 1.751 1.789
Aciéries de Firminy . 1.400 1.380 1.565 1.600
— de Longwy 1.450 1.498 1.700 1.508
Châtillon-Commentry 1.970 1.908 2.191 2.880
Commentry-Fourchambault 1.470 1.475 1.531 1.600
Creusot (Schneider) 1.865 1.866 2.075 2.070
Denain-Anzin 2.230 " 2.302 2.567 2.275
Aciéries de la Marine 1.560 1.687 1.925 1.774
Dniéprovienne 1.795 1.855 3.170 3.100
Aciéries du Donetz 860 738 435 1.328
Hartmann 725 686 680 »
Huta-Bankowa 2.060 2.110 2.260 2.340
Maltzof. 2.190 580(5^)1.150(56) 1.065 {5»)
Russo-Belge 1.570 1.420 2.146 »
Taganrog 600 610 750 645
29 -
Fin juin _. ,.,,
1911 ^'" 19"
Charbonnages et mines diverses.
Anzin 8.100 8.000
Béthune 5.520 5. .375
Bruay 1.240 1.277
Carmau-x. 2.300 2.340
Carvin 3.710 3.750
Courrières 3.450 3.610
Lens 1.225 1.340
Liévin 4.350 4.160
Oiîtricourt 3.050 2.840
Courcelles-Nord 1.975 1.885
Laura-Ver 775 720
Hibernia 243 248
Czeladz . 2.115 2.153
Peuarroya 1.225 1.196
Escombrera-Bleyberg 610 595
Mokra-el-Hadid 1.870 1.809
Rio-Tinto, ord 1.760 1.850
Vieille-Montagne 860 892
Trifail 228 252
Malfidano 555 599
Kanguet 475 500
Valeurs en caisse.
Fonds d'État.
Allemand 31/2% 93,70 91,75
— 3. 83,50 82,75
Prussien 3V2 • 93,60 91,75
— 3 83,40 82,75
Anglais (Consol.) 2 Va 7978 77
Argentin .5, 1884 515 531
— 4, 1896 96,40 97,35
Autrichien 4 99,40 97,95
Hongrois 4^ or 97,50 96,15
— 3,1895 76,40 74,25
— 372,1897 . . .' 81,50 80
Belge 3 (ire série) 90^50 88,50
Brésilien 4,1889 87,75 87,70
— 41/0,1888 99 99
— 4, rescision 89,25 88,25
Bulgare 5,1896 158 509
— 41/2, 1907 487 483
Chilien 41/2, 1885 97 96
— .5,1892 103 101
— 41/2,1906 96,75 95,50
Chinois 6 or, 1895. 105^8 10^
— 41/2,1898 lOlVs 953/4
— .5, 1902 520 509
Colombien 3, 1896 501/4 49^8
Costa-RicaS, 1911 » 457,50
Cubain 5, 1904 . 1045/8 lO^Vg
Dominicain, Custrus 5 105 103
Français 3. . 95 94,25
Fin 1912
Fin juin
1913
8.750
8 . 380
6.900
6.325
1.720
1.450
2.875
2.505
4.930
4.360
5 . 800
4.870
1.690
»
4.955
»
3.000
2.940
2.212
2.091
822
870
248
248
2.180
7.180
1.325
1.405
1.000
1.070
2.390
2.280
1.910
2.822
995
948
245
270
595
590
520
505
88,50
84,60
77 .80
74,40
88 , 50
84,60
77,80
74,40
75^/32
73
504
500
91
87 .
92,15
88,40
90,55
85 , 40
72,50
69
77
74,60
78,85
74 .
82,75
78
98
89V2
84,25
79,50
513
500 .
475
474
94
92
100
99
93
92
1013/4
103
941/2
91V2
512
497
501/8
481/4
424,50
417
1041/2
101
102,75
101
89 , 25
84
- 30 -
'ml'" ''>""9" •'■"Ï912 ^'^g{f
Haïti 6, 1896 520 522 518 512
Hellénique 4, 1902 , • • • ''^^7 453 445 412
— 21/2,1898 '. . . 84,50 82,50 79 77
Honduras 1869 36 28,50 28,25 22
Luxembourgeois 372,1896 ..... 97,50 96,50 92 91
Italien 33/4 104,50 101,50 98,75 96,50
Japonais 4, 1899 92 88 82,50 80,75
— 41/2,1905 IOOV4 97V8 95 91%
— 5,1907 105,35 105,25 103,75 101,25
Marocains, 1904 527 535 536 523
Mexicain 5, 1899 ......... 100 99,75 98,75 95
— 4,1904 91,70 92,25 87,75 79,50
— 3 33,15 32,50 29,25 27,25
Norvégien 3, 1886 83 80 731/0 72V2
— 31/2,1894 98,30 95,50 94 " 87,75
— 3,1896 84,25 83,25 80 75,75
Hollandais 21/2 701/, 69 663/8 66^/4
— 3 84 Sl'/g 78% 77I/4
Paraguay 3, 1 886 551/2 57 54 55
Peruvian Corp. 6(1 '■«'hyp.) 1041/9 1067, lOS'/g 102
Portugais 3 (ire série) 68,60 66,50 65 63,75
Roumain 4, 1890 99,70 96,50 96,50 95,50
— 4,1896 94,70 90 87,50 87,50
— 5,1903 102,60 101,25 100,50 98,50
Russe 4, 1880. . . ' 94,60 94 90,50 87
— 4, consol. (ire) 99^39 97 92,75 89,75
— 3,1891-1894 86,55 84 96,75 72,50
— 31/2,1894 91,75 88,25 83 79,50
— 41/0,1905 100,30 100,25 100 99,75
— 41/2,1909 103,90 103 102 98,75
San Salvador 6 lOOi/g 98^8 991/2 97%
Serbe 4,1895 93,20 91 83,75 80,25
— 5,1902 505 504 499 491
— 41/2,1906 476 465 440 425
Siamois 41/2, 1905 506 502 500 485
Suédois 31/2, 1904 94,50 94 84,50 82,50
— 3,1894 85 85,50 79,75 76.75
Turc 4, unifié 92 89 85i/„ 85
— 4, consolidé 465 454 440 429
— 4 (Douanes) 492 487 465 448
Uruguayes 31/2,1891 76% 75i/o ^li'^'is 70
— 5,1909 1021/4 IOIV2 1001/0 97
Vénézuelies3, 1905 631/0 60% 59% 59
Banques et établissements de crédita
Banque d'Allemagne 143 140 132 131
Deutsche Bank 264 264 249 241
Disconto-Gesellschaft 188 192 183 180
Dresdner Bank 156 159 151 146
Banque d'Angleterre 352 248V4 2421/2 2323/4
Bankvereir 548 543 510 509
Banques des Pays autrichiens. ... 568 598 547 738
— .Nationale Belge 4.210 4.100 3.900 3.800
— de Bruxelles 1.18S 1.168 1.015 995
31
Banque d'Espagne
— hypothécaire d'Espagne
— de Paris et des Pays-Bas
Crédit Industriel et Commercial
Banque d'Italie
— Impériale Ottomane .
— Nationale Suisse. . .
— Fédérale Suisse , . .
— d'Amsterdam ....
— du Luxembourg . . .
— d'Esc, de Saint-Pétersbourg
— internationalesde Commerce
— de l'AzoIT-Don. . . .
— Nationale d Egypte .
Land Bank of Egypte ....
Crédit Foncier Égyptien . . .
Banque Nationale du Mexique.
London Brazil Bank
Banque Industrielle du Japon .
Great Eastern(ord.)
— Central (déf.)
— Western (ord.)
London-Brighton (ord.) . . . ,
London North Western
North-British (préf.)
Midland (déf.)
Ouest
Méridionaux
Méditerranée
Lombards
Sicile
Nord-Empereur Ferdinand . .
Nord-Milan (priv.)
Butschirad
Portugais
Alpes Bernoises
Guillaume-Luxembourg . . .
Atchison Topeka (ord.) . . .
Baltimore &Ohio (ord.) . . .
Chicago Milwaukee (ord.) . . .
Illinois Central (ord.)
Louisville & Nashville ....
New- York Central
Pennsylvania
Southern Pacific (ord.)
Union Pacific (ord.)
Mexicain South Railway . . .
North Eastern (Uruguay). . .
Argentin Great West
Buenos-Ayres Pacific (ord.) . .
— Great South (ord.
— Western (ord.) .
Fin juin
1911
Fin 1911
Fin 1912
Fin juin
1913
458
457
456
459
811
794
776
770
1.832
1 . 790
1.775
1.718
725
725
709
741
1.463
1 . 505
1.455
1.420
713
683
646
636
490
492
475
465
725
740
710
688
199
200
190
187
170
172
167
157
501
535
493
470
530
540
509
495
1.578
1.579
1 . 584
1.550
2OV2
183 4
17^'„
151/2
214
186
178
168
792
777
767
750
1.088
1.031
890
777
331/2
323/4
341/8
33
209
208
200
180
Chemins de fer.
71%
|10V,
6O1/2
581/4
10^^16
12
15'/16
157x6
128%
I22V4
11778
1151/2
121
117
107
103
144%
138V4
1331/8
13078
66V8
63
61
6IV4
76%
731/8
711/,
7374
930
914
895
862
660
614
589
552
415
420
365
317
122
114
109
122
675
685
660
650
5.190
4.980
4.090
4.940
470
455
435
380
2.505
2.410
2.395
2.445
365
320
322
302
457
492
405
378
685
680
662
656
11778
109
»
y.
IIIV2
10574
108
951/0
13IV2
1131/2
1153/4
105
145
145
13078
114
155
16078
145
135
114Vo
10974
1111/0
1021/2
64^/,
63
6274
571/4
127%
115'«
10878
981/2
1957,6
179
1641/8
14978
103
106
104
100
13%
1374
1374
13%
105
107
101
95
931/4
99'/8
89V,
79
1231/4
1241/8
12474
1221/4
12778
1331/4
1241/4
1211/2
Fia juin -. ,„,,
19il P'° 1911
Central Argentin (ord.) lOSVa IO7V4
Nitrate Railways (Chili) 361 845
Auxil. de Ch.de fer au Brésil (priv.). . 735 670
Basse Egypte 640 600
Cairo Electric Railway 270 229
Schantung (Chine) 134 124
Métallurgie.
Aumetz-Paix 968 979
Bochiim 235 233
Witten 205 201
Baume-Marpent 2.015 1.990
Cockerill 2.010 1.958
Ougrée-Marihaye 1.575 1.561
Providence 2.555 2.750
Charbonnages et mines diverses.
Gelsenkirchen 199 208
Harpener. 187 198
Amercœur 2.750 2.120
Bascoup 2.550 2.700
Bonne-Fin 980 920
Falisolle 2.875 2.687
Fontaine-Lévêque '. 3.360 3.320
Gouffre. . 2.195 1.865
Levant du Fléun 5.340 4.975
Monceau-Fontaine 8.000 7.500
Réunis de Charleroi 2.125 1.920
Sacré-Madame 4.850 4.470
. Drocourt 6.845 6.920
Willem-Sophia 560 535
Dombrowa(part.) 1.625 1.605
Sosnowice 1 . 485 1 . 590
Huanohaca 83 70
Bolia Karaidin 374 406
Asturiennes des Mines . 6.050 5.700
Zincs de Silésie 1.510 1.558
III
VARIÉTÉ
Fin 1912
Fin juin
1913
lOSVg
IO3V/4
341
332
680
560
580
510
221
167
125-
121
877
810
1 85
135
185
186
1.750
1.600
1.990
1 912
1.631
1.528
2.950
2.525
191
178
183
185
2.282
2.095
2.380
2.300
980
825
2.562
2.207
3.430
3.245
1.910
1 . 805
5.740
4.955
8.250
7.750
1.950
1.631
3 . 547
2.700
8.275
6.600
390
415
1.480
1.535
1.457
1.422
63
50
455
509
5.600
5.400
1.475
1.405
Alfred Neymarck.
L'INSTRUCTION PRIMAIRE DANS LA REPUBLIQUE DE L'URUGUAY
Sous ce titre, la Direction de l'Enseignement primaire do l'Uruguay donne — en
espagnol et en anglais — une vue générale tant historique que statistique du déve-
loppement de l'enseignement populaire dans ce pays. De même que l'Uruguay ne
s'est vraiment peuplé qu'à l'époque contemporaine (il compte aujourd'hui 1.300.000
habitants et il n'en avait que 400,000 en 1880), c'est aussi de notre époque que date
l'organisation d(> l'instruction primaire uruguayenne. Lors do la fondation de Mon-
tevideo en 1726, les curés de la ville furent les premiers maîtres élémentaires et quel-
que temps après des Franciscains reçurent la mission d'enseigner los primeros nidi-
mentos. Ces modestes fondateurs disparurent dans la période troublée du commen-
cement du dix-neuvième siècle. Elle fut suivie de la création, à Montevideo, de la
Société Lancastrienne qui, là comme en Europe, mit à l'ordre du jour l'enseignement
mutuel et, en 1825, une école normale fut fondée dans le but de former des maîtres
imbus de la méthode lancastrienne. Mais tout fut remis en question par la guerre de
l'Indépendance (1843-1851) et il fallut attendre plus d'un quart de siècle pour que
l'enseignement primaire reçût dans la République une organisation rationnelle.
L'honneur en revient à José Padro Varele qui avait, dès 1868, fondé la Sociedad
de amigos de la Educacion popular. Cette société créa des cours normaux pour les
futurs instituteurs, organisa des conférences; Varele écrivit un traité de V Educacion
del puehlo, fonda une Enciclopedia de Educacion, sorte de revue pédagogique, et
publia sous le nom de Legislacioti escolar un plan méthodique d'organisation de
l'enseignement primaire. Ce projet inspira la loi organique de 1877 {Ley de Educacion
comun), dont Varele eut à peine le temps de voir l'application; il mourut en 1879.
Cette loi a établi une direction générale de l'enseignement primaire au ministère
le l'Instruction publique, dont dépendent les commissions particulières constituées
dans les départements. Des diplômes sont désormais exigés de quiconque veut tenir
une école publique; ces diplômes sont délivrés soit dans les écoles normales, soit à la
suite d'examens spéciaux. Le titre effectif de directeur n'est obtenu que par concours.
Du reste, la liberté de l'enseignement est reconnue, sous la seule condition de se sou-
mettre aux inspections de l'État. L'enseignement est obligatoire dans tout centre
de population où il existe une école; cette obligation, dans les districts ruraux,
s'étend pour les garçons dans un rayon de 4 kilomètres de l'école; pour les filles,
dans un rayon de 2 kilomètres. La gratuité de l'école a été la conséquence naturelle
de l'obligation; la laïcité a été l'œuvre de la loi de 1909.
On distingue dans les écoles publiques deux catégories, les écoles rurales et les
écoles urbaines. Pour les premières, il y a un programme d'études unique, distribué
en trois années de scolarité. Dans les villes, il y a trois sortes d'écoles, celles du pre-
mier, second et troisième degré. Dans les écoles du premier degré, l'enseignement est
réparti sur trois ans; dans les autres écoles, sur deux ans.
Les écoles rurales et celles du premier degré dans les villes sont mixtes; toutefois
dans celles-ci, l'âge des garçons ne peut excéder neuf ans. Le rapport officiel que
nous analysons se félicite du caractère mixte de l'école publique qui a contribué
a suavizar el carâcter del alumno varon sin ajeminarlo ».
Le recrutement du personnel enseignant est assuré par les deux écoles normales
établies à Montevideo. Il faut quatre années d'études pour obtenir le diplôme de
maître du premier degré; cinq à six années pour ceux du second et du troisième
degré respectivement. L'école normale des garçons comptait, en 1913, un total de
50 élèves; celle des jeunes filles 450. Les femmes recherchent donc davantage la
carrière de l'enseignement. Les maîtres et maîtresses du premier degré sont tenus
de passer au moins deux ans dans une école rurale.
Toutes les mesures dont nous venons de parler ont eu une conséquence heureuse
sur le développement de l'enseignement primaire dans l'Uruguay. Il y a à peine
trente ans, en 1887, on ne comptait dans la République que 366 écoles avec 30.500
élèves; aujourd'hui (1914) le total des écoles est de 906 avec près de 92.000 élèves.
L'instruction populaire coûte à l'État 2 milhons de pesos (plus de 10 millions de
francs, soit 6 % du budgetj.
P. M.
- 34 -
IV
BIBLIOGRAPHIE
La Province rhénane et la Westphalie, par Yves Guyot, ancien ministre. —
Étude économique accompagnée de 18 cartes et graphiques.
Après l'Alsace-Lorraine les futurs traités n'auront pas de question plus intéres-
sante à résoudre que le sort de la Province rhénane et de la Westphalie. Ces deux
provinces, qu'une maladresse de Talleyi'and livra jadis à la Prusse, constituent aux
portes mêmes de la France une puissance industrielle et minière dont le développe-
ment formidable touche aux intérêts les plus vifs de nos régions du Nord-Est. Il
suffit de dire qu'elles ont rendu fatales les guerres de 1866, de 1870 et la guerre
actuelle pour en souligner la valeur.
Cette valeur, il faut qu'au moment des discussions à venir, chaque Français la
connaisse et puisse en témoigner. A cette fin, M. Y. Guyot a condensé dans une
étude remarquable les pièces du procès : houille et minerai de fer, métallurgie et
industries textiles, agriculture, finances, cartels et dumping, toutes les questions
économiques des territoires en jeu y sont examinées avec maîtrise et précision. Une
étude géographique et ethnographique concourt à donner les éléments d'une solu-
tion que Français et Alliés apprécieront.
V
AVIS DE MISE EN VENTE
DES
OUVRAGES PUBLIÉS PAR LA SOCIÉTÉ DE STATISTIQUE
A L'OCCASION DE SON CINQUANTENAIRE
Nous rappelons que la Société a publié, à roccasion de son Cinquantenaire et de la
réunion de la XIP session de l'Institut international de Statistique, un ouvrage intitulé :
LA SOCIÉTÉ DE STATISTIQUE — NOTES SUR PARIS
Cet ouvrage, dont il a été rendu compte dans le Journal de la Société (numéro d'aoû^
1909, page -281), a été adressé par la poste le 2 août à tous les membres de la Société.
// est mis en vente, au prix de 5 francs, à la Librairie Berger-Levrault, 5-7, rue
des Beaux- Arts, à Paris.
Le numéro exceptionnel du Journal (août 1909), consacré presque entièrement au
compte rendu du Cinquantenaire de la Société et composé de 156 pages, est également
mis en vente à la même librairie, au prix de 3 francs l'exemplaire.
(1) 1 vol. broché, 3 fr. 50. Attingev frères, éditeurs, Paris, 2, rue Antoine-Dubois.
- 35 —
VI
AVIS RELATIF
AU
PRIX ADOLPHB COSTB
NOTE EXPLICATIVE
M. Adolphe Coste, ancien président de la Société en 1893, a fait un legs à la Société
de Statistique de Paris en exprimant le désir que les arrérages fussent consacrés, dans la
mesure du possible, à la publication périodique d'une évaluation détaillée de la fortune
publique et privée de la France.
Afin d'honorer la mémoire du regretté président, le Conseil d'administration de la
Société a décidé de donner en 191b un prix consistant en une somme de 500 francs
et une médaille.
Ce prix serait attribué à l'auteur du meilleur mémoire sur un sujet se rattachant à
V Évaluation de la fortune publique et privée de la France, tant en capital
qu'en revenu, ou susceptible d'apporter à cette évaluation une contribution
utile, même partielle et limitée.
Pour être admis à présenter un travail, il n'est pas nécessaire de faire partie de la
Société. Les membres élus de la Société faisant partie du Conseil en 1916 sont seuls
exclus du concours.
Les mémoires devront être adressés, avant le 31 décembre 1916, à M. Barriol,
secrétaire général de la Société, 88, rue Saint-Lazare, à Paris {IX*).
\\s devront lui parvenir sous pli cacheté, ne portant d'autre indication extérieure que
l'adresse du destinataire, et lui être remis directement, auquel cas il sera délivré un reçu,
ou transmis par la poste comme envoi recommandé.
Le pli cacheté devra renfermer :
1° Le mémoire non signé, mais portant une devise;
2° Une enveloppe cachetée, portant, d'une manière visible, la même devise que le
mémoire et renfermant un avis d'envoi, signé du nom du concurrent et indiquant son
adresse complète.
Les mémoires devront être écrits en langue française, à la machine à écrire, en double
exemplaire et sur recto ; ils resteront la propriété de la Société, qui se réserve expres-
sément le droit de les publier en tout ou en partie.
- 36 -
VII
AVIS RELATIF AU CONCOURS
POUR LE
PRIX EMILE MERCET
CONCOURS DE 1913-1916
Note explicative
M. Emile Merçet, ancien président de la Société, président du Conseil d'admi-
nistration du Comptoir national d'Escompte de Paris, décédé le 18 juillet 1908, a
légué à la Société de Statistique de Paris une somme destinée à fonder un prix
triennal qui devra être ■ attribué au meilleur mémoire sur une question mise au
concours.
Ce prix consiste en une médaille d'or de 300 francs et une somme de 500 francs en
espèces.
Le Conseil d'administration de la Société a décidé de mettre au concours la ques-
tion suivante :
Étude sur les variations comparées, depuis 1850,
du loyer des capitaux placés
soit en rentes et obligations, soit en escompte, pensions, reports
et prêts sur titres.
Rechercher notamment sous l'influence de quelles causes se sont produites ces variations soit en France,
soit à l'étranger.
Pour être admis à concourir, il n'est pas nécessaire de faire partie de la Société.
Les membres de la Société qui feront partie du Conseil en 1916 sont seuls exclus du
concours.
Les mémoires des concurrents devront être adressés, avant le 31 décembre 1916,
à M. Barriol, secrétaire général de la Société, 88, rue Saint-Lazare, à Paris {IX^).
Ils devront être sous pli cacheté, ne portant d'autre indication extérieure que,
l'adresse du destinataire; ils seront soit remis directement, auquel cas il sera délivré
un reçu, soit transmis par la poste comme envoi recommandé.
Le pli cacheté devra renfermer :
10 Le mémoire non signé, mais portant une devise;
!2o Une enveloppe cachetée, portant, d'une manière visible, la même devise que le
mémoire et renferriiant un avis d'envoi, signé du nom du concurrent et indiquant
son adresse complète.
Les mémoires devront être écrits en langue française, très lisiblement sur recto,
et, si possible, à la machine à écrire et en double exemplaire; ils resteront la pro-
priété de la Société qui se réserve expressément le droit de les publier en tout ou
en partie.
Le Gérant: R. STEINHEIL
NANCY-PARIS, IMPIUMBRIE BERaER-LEVRAULT — J.VNVIIR I916
JOURNAL
DE LA
SOCIETE DE STATISTIQUE DE PARIS
N- 2. — FÉVRIER 1916
PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE DU 19 JANVIER 4916
s o Tsa:isa:j^xTi:E:
OUVERTURE DE LA SÉANCE, PAR M. MAURICE BELLOM, PRÉSIDENT.
ALLOCUTION DE M. LE PRÉSIDENT ET INSTALLATION DU PRÉSIDENT POUR 1916 ET DU BUREAU.
ALLOCUTION DE M. MALZAC, PRÉSIDENT POUR 1916.
ADOPTION DU PROCÈS-VERBAL DES SÉANCES DES 17 NOVEMBRE ET 15 DÉCEMBRE 1915.
NÉCROLOGIE: MM. RAPIN, MELLON ET DERRUA.
NOMINATIONS ET PRÉSENTATIONS.
PRÉSENTATION D'OUVRAGES.
COMMUNICATION DE M. PAUL MEURIOT SUR LA QUESTION DES CHEMINS DE FER D'ALSACE-LORRAINE
EN 1871.
OUVERTURE DE LA SÉANCE PAR M. MAURICE BELLOM, PRÉSIDENT
La séance est ouverte à 17^40 sous la présidence de M. Maurice Bellom,
président sortant, qui s'exprime en ces termes :
ALLOCUTION DE M. LE PRÉSIDENT ET INSTALLATION DU PRÉSIDENT POUR 1916 ET
DU BUREAU
« Messieurs, à l'heure où je descends de ce fauteuil où votre confiance m'a
élevé, je vous demande la permission de rompre une fois de plus avec nos
traditions et de vous apporter, au lieu d'un discours en règle, une poussière
d'allocution, au lieu du fruit raisonné d'une intelligence qui travaille, l'épan-
chement désordonné mais ému d'un cœur qui déborde, oui, Messieurs, d'un
cœur qui déborde pour vous d'admiration, de gratitude et de sympathie :
d'admiration pour votre œuvre à la fois scientifique, philanthropique et patrio-
tique; de gratitude pour la collaboration que vous n'avez cessé de me prêter;
de sympathie pour vos personnes, pour vos familles, pour ços deuils, que
dis-jc? pour nos deuils : car tout n'cst-il pas commun dans cette Société, nnn
!'• SKuiE. 50" vol.. — M" 2 s
- 38 -
seulement fondée sur l'unité des travaux scientiliquos, mais encore animée
d'un même idéal issu de la recherche de la vérité, cette condition nécessaire
de la civilisation et du droit.
« Certes, vous n'avez pas attendu ces heures tragiques pour faire l'appren-
tissage de la souffrance : vous avez connu les souffrances do l'intelligence
dévorée par la soif de la vérité, vous avez connu les souffrances de l'esprit
d'invention poursuivi par le désir du progrès. Toutefois ceux qui, comme moi,
ont fait depuis une période triennale l'expérience annuelle de deuils successifs
savent que les souffrances de l'intelligence ne sont rien en comparaison des
souffrances du cœur; mais ils savent aussi que la main toute-puissante qui
nous frappe est douée d'une infinie bonté et qu'elle donne toujours à nos
épaules la force nécessaire pour supporter le fardeau dont elle les charge.
« Vous en avez fourni la preuve par l'énergie que vous avez témoignée dans
votre assiduité à nos séances et dans votre participation à nos débats et à nos
travaux. Vous en avez ainsi doublement mérité de la patrie, tout d'abord par
votre contribution au rayonnements cientifique d'une France devenue chaque
jour plus chère dans les épreuves qu'elle a traversées, dans les périls qui la
menacent, puis par le réconfort que vous avez apporté aux impatients et aux
timides que la prolongation de la lutte aurait pu inciter à la lassitude et au
découragement.
« Ce n'est donc point par une sèche énumération de la table des matières
que je pourrai rendre hommage à vos travaux. Je les résumerai en disant que,
pour répondre à l'appel adressé par moi dès le début de ma présidence, vous
avez consacré aux statistiques de guerre l'ensemble de vos études. De la sorte,
non seulement vous avez attesté que toutes vos préoccupations et toutes vos
pensées étaient dirigées vers les péripéties et les conséquences de cette lutte
mondiale, mais aussi vous avez affirmé l'indépendance de la science française
vis-à-vis de cette science étrangère qui prétendait l'asservir par une documen-
tation dont elle semblait posséder le monopole et par une méthode dont elle
paraissait détenir le secret. Vous avez montré que l'idéal le plus pur issu de la
culture littéraire n'est pas incompatible avec la rigueur de la méthode scien-
tifique, en un mot que la patrie de Corneille et de Victor Hugo est en même
temps celle de Descartes et de Pasteur.
« Sans doute, je n'aurai ni l'honneur ni la joie de mettre le point final à ce
volume des Statistiques de guerre dont j'ai cherché, dès le premier jour de ma
présidence, à rédiger la préface et à délimiter le cadre. Mais j'ai la confiance que
l'œuvre entreprise sera couronnée de succès, à la fois grâce à votre infatigable
labeur et grâce à la haute direction que vous vous êtes donnée. En appelant
à votre tête le premier de nos vice-présidents, vous vous êtes assuré non seu-
lement une compétence statistique particulièrement éprouvée dans les ques-
tions sociales si vivantes au cours de la guerre, appelées à devenir si brûlantes
au lendemain de la paix, mais encore une expérience des débats parlementaires
dont toute réunion humaine, fùt-elle scientifique, ne cesse jamais d'éprouver
le plus réelbesoin. Je reïnets donc entre ses mains le précieux dépôt que vous
m'aviez confié, moins avec la satisfaction de m'exonérer d'une charge rendue
légère par votre collaboration, qu'avec la certitude de placer votre glorieuse
phalange sous la conduite d'un chef toujours prêt à la guider vers cette terre
promise du vrai où le règne de la justice doit enseigner la tolérance réciproque
et le respect mutuel des droits sacrés des individus et des peuples. »
Il invite ensuite M. Malzac, nouveau président, à prendre place au fauteuil
qu'il lui cède.
ALLOCUTION DE M. MALZAC, PRÉSIDENT POUR 1916
M. Malzac prononce le discours suivant :
« L'heure n'est pas aux longs discours, mais cUo laisse place cependant,
pour votre nouvel élu, uu double et agréable devoir de vous exprimer sa gra-
- 39 -
titude personnelle et de dire au président sortant, le lieutenant-colonel Mau-
rice Bellom, combien nous lui savons gré d'avoir associé, dans une même
activité et un même dévouement, l'Armée qui nous est chère et la Statistique
que nous servons.
« Et puis, mes chers collègues, il y a la tradition, qui est la véritable ossature
de sociétés comme la nôtre et à laquelle nous devons rester attachés dans ces
menues choses que sont les allocutions d'usage aussi bien que pour tous les
actes de notre vie sociale.
« Lamennais a dit : « Le passé est la lumière placée au seuil de l'avenir. »
« Combien cette parole nous apportera de soutien dans l'œuvre que notre
Société aura à accomplir au lendemain des plus formidables commotions que le
monde ait jamais traversées.
« Elle va se trouver, dans sa maturité, en présence des mêmes problèmes
que posèrent à sa prime jeunesse, toutes proportions gardées, les douloureuses
épreuves de 1870, et la tradition lui apportera, pour lui faciliter sa tâche, les
directions des maitres vénérés qui présidèrent alors à ses travaux et tout ce
que leurs continuateurs y ont ajouté d'études et de documentations pendant
plus de quarante années.
« Le champ à parcourir sera malheureusement plus vaste, mais ce sera tou-
jours le mouvement des hommes et des choses que la Société de Statistique
de Paris aura à définir, à classifier et à dénombrer.
« Nos devanciers nous enseignent qu'il faut savoir se garder de faire œuvre
hâtive et par suite incomplète ou éphémère et nous avons aussi le devoir impé-
rieux d'écarter les spécialisations tendancieuses et d'éviter jusqu'à l'apparence
d'avoir obéi à une pensée de censure ou de louange.
« Le statisticien n'est pas un juge prononçant des sentences : il est un témoin
et c'est le seul souci de la vérité qui doit inspirer ses travaux.
« Vitam impendere vero : c'est là sa devise et c'est là son honneur.
<t La Société de Statistique de Paris n'y a jamais failli.
^ Je n'ignore pas le plaisant brocard : on fait dire aux statistiques ce que Von
veut ; mais il me sera permis de faire remarquer que cette malice ne s'adresse
pas, en réalité, aux travailleurs scrupuleux qui élaborent les statistiques et
qu'elle atteint ceux-là seuls qui tentent de les dénaturer pour des fins plus ou
moins intéressées.
(( De semblables perversions ne doivent cependant pas nous laisser indiffé-
rents, surtout quand on voit un certain général de Bernhardi torturer la sta-
tistique démographique, jusqu'à en faire en quelque sorte l'instigatrice des
dévastations, des atrocités et des crimes systématiquement accumulés sur
terre et sur mer par des empires de proie.
« Voici en effet ce qu'écrivait, dès 1911, ce général prussien, dans La Guerre
d'aujourd^hui :
« L'Allemagne nourrit actuellement, sur une étendue qui est à peu près celle
« de la France, 65 millions d'habitants, tandis qu'en France il n'y en a que
(( 40 millions. Cette population énorme s'' accroît tous les ans de 1 million environ.
« Il est impossible que l'agriculture et l'industrie de la mère-patrie puissent
« procurer à la longue à une masse d'hommes croissant dans de telles propor-
« tions un travail assez rémunérateur...
« Si nous voulons obtenir pour notre nation la place qui lui convient dans le
« monde, il faut nous confier à notre glaive, renoncer à toute utopie pacifiste
c( efféminée, et augmenter nos armements afin de pouvoir jeter dans la balance
« décisive toute la force de nos 60 millions d'hommes. »
« Un autre publiciste allemand n'a-t-il pas écrit que le fils unique de la fa-
mille française devrait céder la place aux quatre enfants et plus de la famille
allemande ?
« Quel avenir serait réservé à notre pauvre humanité, si une pareille doc-
— 40 -
trine pouvait jamais prévaloir, étendant sur les individus et les peuples une
menace permanente d'asservissement et d'expatriation !
« Ce serait la fm des petites nations, dont la natalité ne saurait égaler, en
nombres absolus, celle de leurs grandes voisines et ce serait aussi la prédomi-
nance des appétits de la bête sur les plus nobles aspirations et les plus pures
conquêtes de la civilisation humaine.
« Non, la statistique n'a dans cette œuvre de mort aucune part directe ni
indirecte.
« Messagère de vérité et de progrès, excitatrice des généreuses émulations
entre les peuples, elle se dressera, elle aussi, contre l'exécrable militarisme
pangermaniste, violateur des traités , destructeur de la libre évolution des
intelligences et des élans spontanés de la conscience et du cœur.
« L'humanité ne subira pas cette régression vers la barbarie.
« Nous en avons pour garantes l'imprescriptible souveraineté de la Justice
et du Droit et l'inébranlable volonté de nos vaillants du iront de lutter jus-
qu'au bout pour apporter au monde cette paix par la victoire, dont le premier
de nos membres d'honneur, M. Poincaré, président de la République, disait
dans son beau message du 4 août 1915 : « La seule paix que puisse accepter la
« République est celle qui garantira la sécurité de l'Europe^ qui nous permettra
« de respirer, de vivre et de travailler, qui reconstituera la patrie démembrée,
« qui réparera nos ruines et qui nous protégera avec efficacité contre tout retour
« offensif des ambitions germaniques. )>
« Nous associant à ces fières paroles, au nom de la Société de Statistique de
Paris, j'adresse aux héroïques combattants l'expression reconnaissante de
notre inlassable admiration et je renouvelle à nos collègues, frappés daits
leurs plus chères affections, notre ferme propos de garder fidèlement la mémoire
des fils de France, tombés, face au drapeau, pour la gloire et le salut de la
patrie. »
ADOPTION DU PROCÈS-VERBAL DES SÉANCES DES 17 NOVEMBRE ET 15 DÉCEMBRE 1915
M. le Président met aux voix les procès-verbaux des séances des 17 novembre
et 15 décembre 1915 insérés dans les fascicules de décembre 1915 et janvier
1916 du Journal de la Société.
Ces procès-verbaux sont adoptés sans observation.
NÉCROLOGIE : MM. RAPIN, MELLON ET DERRUA
M. le Président fait connaître qu'il a le très profond regret d'annoncer la
mort d'un des doyens de la Société, M. Amédée Rapin, décédé dans son châ-
teau de Ploix (Cher) le 16 juillet 1915, à l'âge de quatre-vingt-onze ans.
Il informe la Société que le secrétaire général a reçu de bonnes nouvelles de
notre autre fondateur M. Serre t.
11 fait part du décès de MM. Mellon et Derrua.
NOMINATIONS ET PRÉSENTATIONS
M. le Président met aux voix les candidatures de MM. Raiga, docteur en
droit, chef de service à la préfecture de la Seine, charge de conférences à la
Faculté de Droit, présenté par MM. Cadoux et Barriol;
Lefort, sous-chef de bureau au ministère des Finances, présenté par
MM. A. Neymarck et Barriol;
Dejoux, directeur de la maison Dactyle, présenté par MM. G. Faure et
Barriol.
Ces candidatures sont acceptées à l'unanimité et MM. Raiga, Lefort et
Dejoux sont nommés membres titulaires.
- M -
M. le Président fait connaître qu'il a reçu la demande d'admission de M. Ma-
gnais', chef du bureau des tarifs à la Direction générale des Douanes, présenté
par MM. Giraud et Pupin, et celle de M. Noetzlin, administrateur de la
Banque de Paris et des Pays-Bas, présenté par MM. A. Neymarck et Bar-
RIOL.
Conformément à l'usage il sera statué à leur sujet dans la séance de fé-
vrier 1916.
PRÉSENTATION D'OUVRAGES
M. le Président donne la parole à M. le Secrétaire général qui fait part à la
Société de la réception d'un certain nombre d'ouvrages; il signale notamment :
États-Unis : Département du Travail. Les efîets de la détermination du
salaire minimum dans l'Orégon.
Massachusetts : 14*^ Direction annuelle des organisations du Travail. 1915.
Bibliographie du Travail. 1914.
Suède : Statistique générale annuelle des chemins de fer suédois. 1914.
Le service sanitaire et les soins donnés aux malades dans la marine du
1er octobre 1914 au 30 septembre 1915.
L'Office des assurances de l'Etat sur les accidents du travail en 1914.
Rapport annuel sur l'arpentage.
^L le Secrétaire général fait mention particulière des deux fascicules de docu-
ments relatifs à la guerre que M. Payelle a fait parvenir à la Société, savoir :
Rapports et procès-verbaux d'enquêtes de la Commission instituée en vue
de constater les actes commis par l'ennemi en violation du droit des gens (appli-
cation du décret du 23 septembre 1914).
M. le président remercie au nom de ses collègues M. Patelle et le félicite
du travail formidable que lui a coûté l'établissement de ces douloureuses
statistiques.
COMMUNICATION DE M. PAUL MEURiOT SUR LA QUESTION DES CHEMINS DE FER
D'ALSACE-LORRAINE EN 1871
Dans l'étude qu'il a entreprise, M. P. Meuriot s'est attaché, d'une part, à
faire l'historique de la constitution du réseau alsacien-lorrain et l'exposé de sa
situation en 1870 et, d'autre part, à analyser le règlement de sa situation en
1871, par le traité de Francfort et ses conventions subséquentes.
L'industrielle Alsace fut, parmi les provinces de France, une des premières
à posséder un chemin de fer. M. Koechlin, après avoir obtenu, dès 1837, pour
une société dont il était mandataire, la concession de la petite ligne de Mulhouse
à Thann, ligne d'un intérêt plutôt industriel et local, qui fut ouverte en 1839
et rachetée par la Compagnie de TEst en 1858, fut déclaré, en 1838, conces-
sionnaire de la ligne de Strasbourg — Bâle, d'une longueur de 139 kilomètres,
qui devait être prolongée jusqu'à Lauterbourg à la jonction de la ligne bava-
roise de Lauterbourg à Mannheim; c'est le premier élément du réseau des
grandes voies ferrées d'intérêt national et international qui devait par la suite
recevoir un assez grand développement dans cette région; cette ligne fut ache-
vée en 1844. Bientôt la Lorraine prend sa part de la grande ligne Paris — Stras-
bourg, longue de 502 kilomètres, concédée en 1845; puis, successivement,
s'ouvrent les lignes de Frouard— Metz, de Metz à Forbach et à la frontière
prussienne : ces voies avaient été concédées à la Compagnie Paris — Strasbourg
qui, en 1854, devint la Compagnie des Chemins de fer cle l'Est. A cette même
époque (1854-1858) fut construite la seconde grande ligne de l'Est, Paris-
Mulhouse— Bâle, qui comprenait dans le seul département du Haut-Rhin un
développement de 68 kilomètres et constituait elle aussi une grande artère de
relations internationales.
- 42 -
En 1861, la ligne do Paris — ^Strasbourg est prolongée jusqu'au delà du Rhin
par le pont de Kehl qui relie FAlsace au grand-duché de Bade.
Enfin les lignes d'Alsace sont complétées successivement par une série de
voies partant de la ligne centrale de Mulhouse à Strasbourg et dirigées vers les
Vosges, tandis que la Lorraine voyait ouvrir les lignes de Metz — Thionville et
Thionville à la frontière prussienne (1854-1859), Thionville— Longuyon (1863)
et Sarreguemines à la frontière prussienne, dernière ligne ouverte avant la
guerre de 1870, livrée à l'exploitation le 1^^ juin de cette même année.
M. P. Meuriot fait ensuite l'exposé des projets élaborés pour la jonction
des lignes d'Alsace et de Lorraine, projets inspirés par des considérations d'ordre
militaire, mais malheureusement incomplètement réalisés avant la guerre, et
il montre les lacunes que présentait notre réseau lorsque celle-ci éclata; il rend
un hommage ému au parti que la Compagnie de l'Est sut tirer alors, par son
initiative et à l'aide de ses ressources propres, de moyens restreints dont, par
surcroit, l'administration militaire avait fort incomplètement réglé l'emploi.
M. P. Meuriot termine cette première partie de sa communication par l'his-
torique de la constitution du petit réseau du grand-duché de Luxembourg.
En ce qui concerne le règlement de la situation des chemins de fer d'Alsace-
Lorraine en 1871, M. Meuriot donne la longueur totale (746 kilomètres) et la
répartition du réseau compris sur le territoire annexé par l'Allemagne, en dis-
tinguant l'ancien et le nouveau réseau; la Compagnie de l'Est se voyait enlever
en outre l'exploitation des 237 kilomètres de chemins de fer luxembourgeois.
De plus, un certain nombre de chemins de fer d'intérêt local, construits ou
concédés en vertu de la loi de 1865, étaient également perdus.
Laissant au second plan les conventions particulières qui réglèrent le sort
de ces derniers (l'une d'elles, relative au chemin de fer d'Avricourt à Cirey,
entraîna une rectification de frontière avec rétrocession à la France de la com-
mune d'Igney et d'une partie de la commune d'Avricourt), l'orateur s'attache
surtout à l'examen du règlement de la situation des lignes perdues par la Com-
pagnie de l'Est et notamment des négociations qui aboutirent à la rédaction
des « articles additionnels », véritable traité-annexe du traité du 10 mai 1871.
Le Gouvernement français était obligé d'user, dès avant la rectification du
traité de paix, de son droit de rachat de la concession de l'Est pour les lignes
concédées en Alsace-Lorraine et l'État allemand lui était subrogé dans tous les
droits acquis par le rachat de la concession; les propriétés que la France trans-
mettait à l'Allemagne par l'effet de ce même rachat étaient bien entendu mi-
nutieusement énumérées, le matériel roulant en étant expressément excepté
(le (Gouvernement allemand restitua de ce chef environ 3.500 wagons et 100 lo-
comotives).
L'État français s'engageait à libérer les chemins de fer cédés à l'Allemagne
de « tous les droits que des tiers pourraient faire valoir, notamment des droits
des obligataires )>; ainsi, la cession des voies de TEst était effectuée nette de
toute hypothèque et les créanciers de la Compagnie n'auraient plus affaire
qu'à l'État français, qui prenait en outre à sa charge les réclamations que la
Compagnie de l'Est pourrait élever vis-à-vis du Gouvernement allemand ou
de ses mandataires. L'indemnité à payer par l'État allemand à la Compagnie
de l'Est par l'entremise de l'État français était fixée à 325 millions (à déduire
sur nos 5 milliards), somme obtenue par une transaction entre l'indemnité
de 360 millions réclamée par la Compagnie et les 120 millions offerts par les
négociateurs allemands. Les articles additionnels réglaient enfin la situation
des chemins de fer du Luxembourg et consacraient l'abandon des droits de
la Compagnie de l'Est sur la partie de son réseau située de Saint-Louis à Bâle.
M. P. Meuriot termine sa communication par l'étude très complète des
discussions et débats parlementaires qui précédèrent le vote de la loi du 17 juin
1873 réglant la situation de la Compagnie de l'Est vis-à-vis de l'État français,
vote qui fut obtenu à une très grande majorité et sans caractère politique, les
- 43 -
voix des différents partis se confondant dans la majorité et la minorité. La
convention de 1873, conclut l'orateur, avait sauvegardé, mais très strictement,
les intérêts de la Compagnie et c'est l'Etat français qui en tirait le plus clair
bénéfice, l'annuité de 20 millions touchée par la Compagnie de l'Est ne repré-
sentant guère plus de la moitié du bénéfice annuel qu'elle eût tiré de ses che-
mins de fer alsaciens-lorrains : ceci montre Ténorme dommage subi par la Com-
pagnie de l'Est en 1871; on peut espérer qu'ayant souffert avec le pays du dé-
sastre de cette première guerre, elle aura, comme lui, prochainement une
revanche réparatrice.
M. le Président adresse les remerciements de la Société à M. Paul Meuriot
pour son intéressante communication; à propos de cette dernière, M. R.-G.
LÉVY tient à montrer comment, même en matière de conventions de chemins
de fer, l'Allemagne tient ses engagements et il expose les conditions dans les-
quelles ont été réglées, contrairement au contrat intervenu, les annuités dues
à la Direction générale des Chemins de fer d'Alsace-Lorraine, en qualité de
concessionnaire du chemin de fer Guillaume-Luxembourg.
Après une intervention de M. Desroys du Roure, M. Cadoux fait observer
que la communication de M. P. Meuriot doit, au point de vue de la statistique
générale, nous inspirer une résolution d'ordre pratique : si, au moment du rè-
glement, nos ennemis invoquent l'impossibilité de réparer par des indemnités
les dommages qu'ils auront causés, nous pourrons reprendre leurs propres
statistiques et montrer qu'ils ont, dans leurs chemins de fer de l'Etat, dans
leur domaine forestier ou minier, dans la part que l'État a dans les divers
trusts industriels, un gage fort appréciable.
La séance est levée à 19*^ 30.
Le Secrétaire général, Le Président,
A. Barriol. Malzac.
II
LES VALEURS MOBILIÈRES ET LA GUERRE d)
I. — Exposé préliminaire.
II. — Les difTérences de cours sur les titres à revenu fixe et à revenu variable cotés
au marché officiel.
III. — Nombre de valeurs inscrites à la cote officielle de 1800 à 1913 : capital qu'elles
représentaient aux cours cotés à la veille de la guerre.
TV. — Titres étrangers : difficultés et impossibilités de leur négociation.
La fermeture de bourses européennes et extra-européennes.
V. — Cadre de cette communication.
VI. — Cours de compensation au Parquet des agents de change, .31 juillet 1914 et
30 septembre 191.5 ; difîérences en pour cent. Rentes françaises. Fonds étran-
gers.
VIL — Le 3 % ancien et le 3 % amortissable.
VIII. — Différence de cours sur les fondb étrangers divers.
IX. — Quelles prévisions est-il possible d'émettre ?
X . — Cours de compensation et difTérences en tant pour cent sur les sociétés de crédit.
XL — Classement par importance de la baisse sur les sociétés de crédit françaises.
(1) Communication faite à la Société de Statistique de Paris à la séance du 20 octobre
191.5 par M. Alfred Neymarck.
_ 4-4 -
XII. — Classement par importance de la baisse sur les sociétés de crédit étran-
gères.
XIII. — Actions de chemins de fer français et étrangers. Sociétés métallurgiques Char-
bonnages. Forges. Aciéries. Titres divers,
XIV. — Les valeurs à revenu fixe.
XV. — Obligations Foncières et Communales.
XVI. — — Ville de Paris
XVII — — Chemins de fer français.
XVIII. — — — étrangers.
XIX. ^ — — — grandes compagnies industrielles.
• XX. — Observations diverses.
XXI. — La baisse en 1870 des obligations de chemins de fer.
XXII. — Obligations du Crédit Foncier de France et de la Ville de Pans.
XXIII. — Obligations de compagnies diverses.
XXÎV. — Hausse ou baisse : gain ou perte. Erreurs d appréciation
XXV. — Les époques d'amortissement des obligations de chemin de fer.
XXVI. — Conclusions. Quelques conseils à retenir. Odieuse et sauvage pensée allemande.
La conduite admirable de l'épargne française. Future communication sur
les valeurs mobilières et la paix : Victoire finale et réparatrice.
1
EXPOSÉ PRÉLIMINAIRE
Mes chers Confrères,
Vous vous rappelez mes deux communications précédentes : les Tempêtes de
Bourse (15 janv. 1913); les Beaux Temps de Bourse (18 févr. 1914) et les
conseils de prudence que je me permettais de répéter à diverses reprises et qui
pouvaient paraître exagérés.
Les tempêtes ont surgi à nouveau, et celle qui sévit depuis août 1914 est la
plus violente qui se soit jamais produite. Dans tous les pays, les valeurs mobi-
lières ont subi une dépréciation de cours sans précédent. A aucune époque,
quand la guerre a éclaté, le nombre et le montant des titres mobiliers n'avaient
été aussi élevés. J'en ai fait le relevé dans mon Rapport à V Institut international
de Statistique, à la session de Vienne (sept. 1913), rapport qui est en cours
do publicatiibn dans notre Journal. Le poids des offres de titres devait être d'au-
tant plus lourd que la quantité de valeurs négociables avait augmenté dans des
proportions considérables. Aussi, se borner à comparer la baisse des titres mobi-
liers lors des grandes conflagrations européennes et extra-européennes qui ont
eu lieu depuis le commencement du siècle dernier à l'époque actuelle qui a vu
éclater la plus grande guerre mondiale qui ait jamais existé, serait comparer
ce qui n'est pas comparable. Reportez-vous aux tableaux des cours depuis 1800
publiés dans ma communication sur les Tempêtes de Bourse : sur toutes espèces
de fonds d'État, titres à revenu fixe et à revenu variable. Il n'y a pas d'exemple
de dépréciations semblables à celles qui, depuis fin juillet 1914, se sont pro-
duites sur tous les titres — à de très rares exceptions près — aussi bien en
France qu'à l'étranger.
Et, à ce sujet, permettez-moi, tout d'abord, de faire une observation prélimi-
- 45 -
naire sur laquelle j'aurai l'occasion de revenir dans le cours de cette commu-
nication. On serait tenté de dire que si la baisse des titres mobiliers a été de
10, 15, 20, 25, 40, 50 %, la fortune publique et privée a subi une perte de 10,
15, 20, 25, 40, 50 %. La baisse ou la hausse d'un titre n'est pas la constatation
d'une perte ou d'un bénéfice. Cela veut dire que le pouvoir d'achat ou de
vente, en cas de réalisation, du titre qu'on possède, est plus élevé ou plus
faible; mais pour qu'il y ait bénéfice ou perte pour celui qui détient ce titre,
il faut que le titre ait été réalisé. C'est toujours l'histoire de la bonne vieille
femme que Léon Say avait connue et dont il racontait les joies et les inquié-
tudes quotidiennes quand elle lisait le soir, sur son journal, les fluctuations
en hausse ou en baisse des titres de son portefeuille. Quand elle est morte,
jamais la valeur vénale de son portefeuille n'avait été aussi élevée, et cepen-
dant, pendant son existence, la bonne vieille femme avait vu son portefeuille
hausser ou baisser dans de fortes proportions. Comme elle possédait des titres
sérieux et que, suivant une expression que j'ai souvent employée, elle était
« restée tranquille », les « tempêtes de bourse » ont été suivies des « beaux temps
de bourse », comme après la pluie vient le beau temps. Elle a pu s'appliquer le
beau vers d'Horace par lequel je terminais ma communication de 1914 et que
je rappelle en mettant l'adjectif au féminin au lieu du masculin :
Impavidam ferlent ruinse.
II
LES DIFFÉRENCES DE COURS SUR LES TITRES A REVENU FIXE
ET A REVENU VARIABLE COTÉS AU MARCHÉ OFFICIEL
Messieurs, le sujet que je traiterai ce soir devant vous sur les «Valeurs mobi-
lières et la Guerre» est vaste et complexe. Il peut comprendre de multiples divi-
sions et subdivisions et de non moins nombreuses considérations économiques,
financières, statistiques sur des questions principales ou accessoires ou secon-
daires, mais ayant toutes de l'importance. Il est nécessaire de se limiter, et de
procéder avec méthode. J'aurai, du reste, bien souvent à revenir sur ce sujet.
Je me bornerai ce soir à établir devant vous et à commenter brièvement
les différences de cours qui se sont produites sur les fonds d'État et principaux
titres à revenu fixe et à revenu variable négociables au marché officiel de la
Bourse de Paris. Je n'étendrai pas cette fois ma communication aux valeurs se
négociant sur le marché en banque ou aux bourses départementales, ni sur les
marchés étrangers. La statistique concernant ces divers marchés ne doit s'ap-
puyer que sur des documents certains offrant une garantie de contrôle : or, à
l'heure actuelle, sur la plupart de ces marchés et sur bien des titres qui s'y
négocient, ces documents font défaut.
Avant de commencer cette communication, j'ai voulu rechercher si, dans le
passé, après chacune des grandes commotions causées par les guerres, les révo-
lutions, les crises, il avait été fait quelques travaux sur les fluctuations des
cours des titres mobiliers, soit sur la situation des marchés financiers avant,
pendant et après ces crises. Sauf pour les années 1869, 1870, 1871 et 1872, les
- 46 -
renseignements font défaut. Aucun travail de ce genre n'a été fait. Je ferai
exception pour une courte, mais très minutieuse et substantielle étude d'un de
mes plus fidèles et bien regrettés collaborateurs de la première heure, M. Louis
Theureau, économiste de talent et auteur d'ouvrages appréciés; un relevé
des oscillations à la Bourse de Paris, en 1869, 1871 et 1872, des principales
valeurs mobilières françaises et étrangères, et c'est tout. Des études, de simples
relevés même sur les époques précédentes, font défaut. Ce qui explique cette
absence de statistiques est que, en réalité, les valeurs mobilières étaient dans l'en-
fance. De 1869 ou plutôt de 1872 à 1880, je l'ai fait remarquer plusieurs fois,
il a été créé en capital et en nombre plus de titres que depuis 1800; de 1881 à
1900, cette progression s'est encore accentuée et de 1901 à 1912 est devenue
vertigineuse, dans le monde entier. Les 850 milliards de valeurs négociables
dans le monde fm 1912, sur lesquelles, déduction faite de multiples emplois,
625 à 650 milliards appartiennent en propre aux nationaux de divers pays, en
sont la preuve. Chez nous, les valeurs mobilières françaises et étrangères, fonds
d'État compris, qui nous appartenaient en propre en 1869, pouvaient se chif-
frer par 30 à 35 milliards; fm 1912, leur montant était de 110 à 165 milhards
et nous pouvions évaluer de 160 à 165 milliards le montant des titres négocia-
bles sur les marchés français.
III
NOMBRE DE VALEURS INSCRITES A LA COTE OFFICIELLE DE 1800 A 1913 :
CAPITAL QU'ELLES REPRÉSENTAIENT AUX COURS COTÉS A LA VEILLE DE LA GUERRE
Rappelons, à ce sujet, quelques chiffres que, dans nos divers travaux, nous
avons donnés en détail ici même plusieurs fois sur le nombre de catégories de
valeurs inscrites à la cote officielle de la Bourse de Paris depuis 1800, rien
qu'au marché officiel, et sur le capital vénal des seuls titres français, évalué au
cours du 31 décembre (1).
Valeurs inscrites à la cote officielle.
Nombre Nombre
Années de Anuéci de
valeurs valeurs
1800 10 1869 402
181Ô 5 1883 782
1830 30 1891 928
1848 130 1892 1.087
1S52 152 1903 1.131
A la fin de 1913, plus de 2.000 valeurs diverses étaient admises à la cote
officielle de la Bourse de Paris. Elles étaient divisées en vingt-trois grandes
catégories de titres français et cinq catégories de valeurs étrangères.
(1) Voir nos Finances contemporaines, t. VI et VII : L'Épargne française et les Valeurs
mobilières. — Voir nos Rapports à r. Institut international de Statistique depuis 1891.
- Al -
Le capital au cours du 31 décembre 1913 des seules valeurs françaises
négociables au marché officiel était de 70.104.201.700 francs. Le capital au
cours du 31 décembre des valeurs étrangères s'élevait à 70.761.976.600 francs,
fonds d'État compris. Il comprenait, en chiffres ronds, 55 milliards de fonds
d'État étrangers et 15 milliards de valeurs de sociétés étrangères, assurances,
banques, chemin de fer et divers. C'était donc au total 140.866.178.300 francs
de titres cotés au marché officiel seulement, en titres français et étrangers.
Ce n'est pas tout. Pour le premier semestre de 1914, c'est-à-dire jusqu'au
30 juin 1914, déduction faite des radiations effectuées, le montant net des
admissions à la cote officielle s'était élevé à 2.573.896.500 francs, dont
1.814.372.000 francs de valeurs étrangères et 759.524.500 francs de valeurs
françaises.
A la veille de la guerre, la valeur vénale des titres français et étrangers négo-
ciables à Paris, rien qu'au marché officiel seulement dépassait 143 milliards.
Je vous donne. Messieurs, les derniers chiffres de mes statistiques, chiffres
mis à jour, contrôlés et que vous pouvez considérer comme officiels.
Avec le montant des titres négociables sur le marché en banque et aux bourses
départementales, l'ensemble des valeurs négociables en France pouvait être
évalué, d'après les cours du 31 décembre 1913, à plus de 165 milliards.
Que l'on rapproche ces chiffres formidables de ceux que nous avons donnés
dans nos travaux antérieurs sur le montant des valeurs négociables depuis le
commencement et dans le cours du siècle dernier et depuis le commencement
de ce siècle, on comprendra, sans qu'il soit nécessaire d'insister longuement,
quelle perturbation profonde devait causer sur tous les marchés une guerre
mondiale, éclatant subitement, préparée de longue date par les agresseurs.
Grand nombre de porteurs de titres voulaient réaliser, et, bien loin de vouloir
placer de l'argent, chacun s'appliquait à conserver celui qu'il pouvait posséder,
peu ou beaucoup. Une masse de détenteurs de titres voulaient vendre alors
qu'il n'y avait pas d'acheteurs : d'où impossibilité de réaliser.
IV
TITRES ÉTRANGERS : DIFFICULTÉS ET IMPOSSIBILITÉS DE LEUR NÉGOCIATION
Les placements en valeurs étrangères se négociant sur plusieurs marchés
devaient permettre, disait-on souvent, de « se faire de l'argent », en les réahsant
sur les marchés étrangers, dans le cas où on ne pourrait le faire dans son pays,
avec les titres français qu'on possédait. On disait que ces placements en titres
étrangers pouvaient permettre de trouver sur les bourses des pays neutres les
contre-parties absentes sur les bourses des pays belligérants. Dans une période
normale, calme, tranquille, il peut en être ainsi. Mais la guerre, englobant les
grandes puissances européennes et de ramification en ramification devenant
mondiale, le nombre, inconnu jusqu'à lors, de pays belligérants, ne purent per-
mettre la vente de titres qu'on considérait comme des réserves pouvant être
réalisées au dehors. La raison en était très simple, sans même avoir à examiner
une question économique et financière des plus graves et des plus intéressantes :
- 48 —
ce qu'il faut entendre par valeur internationale et quelles sont les conditions
qui assurent ou détruisent l'internationalité d'un titre, que j'avais traitée plu-
sieurs fois notamment dans mon Rapport général, au nom de la Commission
extra-parlementaire, du régime fiscal, des fonds d'État étrangers, et à la suite
de la mission dont la Commission et le ministre m'avaient chargé, toutes les
grandes bourses, brusquement et simultanément, fermèrent les portes, comme
on peut le voir par le relevé suivant :
MO juillet. — Fermeture des Bourses de Bruxelles, Amsterdam et Saitit-Pétersbourg.
31 juillet. — — de la Bourse de Vienne.
— La coulisse à terme et au comptant à Paris est suspendue.
— l.a liquidation au Parquet, comme en banque, est prorogée d'un mois.
— Fermeture du Stock Exchange.
New- York, quelques jours après, suivit l'exemple des marchés européens.
Berlin suspendit ses opérations, mais, dès le 4 août, le Gouvernement alle-
mand, par une loi de circonstance, mit à la disposition des porteurs de titres
et détenteurs de marchandises, un organe spécial de prêts pour remplacer les
bourses défaillantes. Les bons de Caisse de guerre devaient suppléer à la sup-
pression brusque des capitaux d'épargne venant sur le marché de la Bourse.
A l'heure actuelle, bien des marchés financiers n'ont pas réouvert leurs portes
chez nous, les opérations à terme furent suspendues à partir du 1^^ août 1914 :
la liquidation de fin juillet 1914 fut successivement prorogée et ce n'est que
depuis le 30 septembre 1915, grâce à de puissants appuis et concours, que cette
liquidation a pu s'accomplir et que nous sommes rentrés dans une période nette,
débarrassée de ses impedimenta ; de même que c'est seulement depuis le mois de
novembre 1914 que la Bourse de Paris a réouvert ses portes. *
V
CADRE DE CETTE COMMUNICATION
Ces observations préliminaires m'ont tout naturellement conduit à tracer
le cadre de cette communication :
1^ Quelles sont les différences de cours sur les principales valeurs du marché
du 31 juillet 1914 au 30 septembre 1915?
2*> Quelles sont les différences sur les rentes françaises et étrangères, titres à
revenu fixe et titres à revenu variable?
3'' Quels enseignements principaux peut-on tirer de ces constatations, au
point de vue pratique, pour la conduite de Tépargne, des capitalistes de tout
ordre et de tout rang.
Cette communication, comme je le disais en commençant, complétera les
deux précédentes sur les Tempêtes et sur les Beaux temps de Bourse.
J'examinerai successivement les différences de cours qui se sont produites
sur les valeurs négociables à terme au marché officiel en comparant leur cours
de compensation de la liquidation du 31 juiffet 1914 à ceux de la liquidation
de fin septembre 1915. Nous avons traduit cette différence en francs et en tant
- m -
pour cent, et avons classé les valeurs en mettant en tête de ce classement
celles dont la dépréciation en tant pour cent a été la plus forte et en terminant
par celles dont la dépréciation a été la plus faible. Nous avons divisé ces titres
en plusieurs catégories :
1'' Les fonds français;
20 Les fonds étrangers;
3^ Les sociétés de crédit françaises et étrangères;
4*' Les chemins de fer français et étrangers.
Dans la seconde partie de cette communication, je passerai ensuite à l'exa-
men des titres à revenu fixe se négociant au comptant et qui sont le patrimoine
favori de l'épargne :
1^ Obligations Crédit Foncier de France, foncières et communales;
2» — Ville de Paris ;
3^ — des grandes compagnies de chemins de fer français et étran-
gers;
40 Obligations des grandes compagnies industrielles.
Voici ce que nous disent les chiffres :
VI
COURS DE COMPENSATION AU PARQUET DES AGENTS DE CHANGE, 31 JUILLET 1914
ET 30 SEPTEMBRE 1915 : DIFFÉRENCES EN POUR CENT. RENTES FRANÇAISES.
FONDS ÉTRANGERS
Fonds jrançais.
'■> % perpétuel
:! % amortissable . . . .
Fonds étrangers.
Turc 4 % 1901-190.5 . . .
— 4 % 1909
— 4 % 1904
— 4 % 1908
Brésil 4 % 1910
Autriche 4 % (florins) . .
Mexique 4 % 1904 . . . .
Brésil 5 % Pernambouc. .
Mexique 4 %1910. . . .
Brésil 4 % 1889
Turc 4 % unifié
Bulgare 4 1/2 % 1907 . . .
Minas Geraès4Va 191] . .
Russe 4 V2 %19Ô9. . . .
Serbie 4 % 189.5
Russe 4 % 1901 Cous. . .
Serbie 5 % 1913
Bulgare .5 % 1896 . . . .
Russe 4 % Cons. (ire série)
Serbie 4 Vt % 1909. . . .
Liq-
31 juillet 1914
jidatioti
30 ieptembre 1915
Différence
totale
eu nioios
Différeuce
pour 100
en moins
83,05
66,50
17,55
21,13
87
75,25
9,75
11,20
386
215
171
44.30
360
203
157
43,61
372
212
160
43,01
368,
210
158
42,93
355
225
130
36,61
85
56
29
34,11
69
47
22
32,46
466
314
152
32,18
70,50
48
22,. 50
31,91
72,20
52,50
19,70
27,28
81,10
60
21,10
26.01
434
325
109
25,11
360
271
89
24,72
98 , 60
77
21,60
21,90
76,50
60,70
15,80
20,65
85,85
68 , 50
17,35
. 20,20
86
68,65
17,35
20,17
488
397
91
18.64
87,25
70,95
16,30
18,56
410
335
75
18,29
- 50 -
Fonds étrangers.
Russes % 1896
— 3 % 1891-189i . . .
Italie 3 72%
Russe 31/2 % 1894
Roumanie 4 % converti . .
Russes % 1906
Buenos-Ayres4 V2 %1910. .
Egypte unifiée
Chines %1911
Japon 4 % 1910
Maroc S %1910
Anglais 2 Vî%
Argentin 4 % 1896 (resc.) . ,
Portugais 3 % V^ série . . .
Japon 4 % 190S
Maroc 5 % 1904
Japons % 1907
Uruguay 3 V2 % 1891 . . .
Chines % 1913 (réorg.), . .
BahiaS % 1910
Argentin S % 1907 . . . .
— 41/2% 1911 . . .
Serbie 41/2 % 1906
Sao PauloS % 1913 . . . .
Espagne 4 %
I.iqi
juillet 1914
nidation
30 septembre 1915
Différence
totale
en moins
Différence
pour 100
en moins
69,90
57,50
12,40
17,73
72,75
60,50
12,25
16,83
94, 7S
79
15,75
16,62
77, SO
65
12,50
16,12
86, 7S
74,25
12,50
14,29
102, SO
88
14,50
14,14
423
370
53
12,52
100, SO
88,75
11,75
11 ,69
480
430
50
10, 4l
84
75,45
8,55
10,17
S22
469
53
10,15
75,20
68
7,20
9,57
84
76
8
9 , 52
64
58,05
5,95
9,29
83,50
76
7,50
8, -98
SI 8
474
44
8,49
102,50
94,50
8
7,80
68
63
5
7,35
476
444
32
6,72
420
395
25
5,95
493
464
29
5,88
89,40
84,50
4,90
5,48
415
395
20
4,81
479
465
14
2,92
87,70
87.50
0,20
0,22
VII
LE 3 °/o ANCIEN ET LE 3 "/o AMORTISSABLE
Sur la rente française 3 % la différence de cours représente 21,15 %; sur le
3 % amortissable, 11.20 %.
Nous ne parlons pas du 3 ^2 amortissable 1914 qui, par suite des avantages
qui lui ont été accordés par l'échange contre des obligations de la Défense
nationale, est sorti presque indemne de la tourmente.
On remarquera que le 3 % amortissable a sensiblement moins baissé que le
3 % ancien. Cela tient, d'une part, à ce que la quantité de titres est de beau-
coup moindre que celle des rentes perpétuelles et que, d'autre part, le 3 .%
amortissable est soutenu par la prime élevée qu'il donne au remboursement.
Remboursable à 100 francs par tirages annuels d'ici 1953, le détenteur d'a-
mortissable, quelles que soient les fluctuations des cours, est sûr d'être rem-
boursé à 100 francs. « Le temps travaille pour lui », comme nous l'avons dit
plusieurs fois et le redirons encore, en parlant des obligations de chemins de fer.
- 51
VIII
DIFFÉRENCE DE COURS SUR LES FONDS ÉTRANGERS DIVERS
Sur les fonds d'État étrangers, la baisse la plus forte atteint les divers fonds
ottomans : 44,30 %, 43,61 %, 43,01 %, 42,93 %. Le 4 % turc unifié a moins
baissé (26,01 %) que les obligations ottomanes auxquelles étaient assignées
des garanties diverses.
Ce sont les fonds brésiliens, et parmi eux le 4 % 1910, qui tiennent ensuite
le record de la baisse, avec 36,61 %, alors que la baisse du 4 % brésilien 1889
est seulement de 27,18 %. Les fonds autrichiens ont baissé de 34,11 %, puis
viennent les fonds mexicains 4 % 1904 et 4 % 1910, avec 32,46 % et 31,91 %
de baisse.'^
Les fonds bulgares 4 ^/g 1907 ont baissé de 25,11 % ; les fonds serbes 4 % 1895,
5 % 1913, 4 1/2 1906 et 4 1/2 1909 ont baissé de 20,65 %, 20,17 %, 4,80 % et
18,29 %.
Sur les fonds russes 4 1/2 1909, 4 % 1901, 4 % consolidé l^e série, 3 % 1896,
3 % 1891-1894, 3 V2 1894, 5 % 1906, la baisse a été de 21,90, 20,20, 18,56,
17,73, 16,83, 16,12, 14^4 %. Elle a été plus faible sur les rentes 3 % et 3 V2 %
que sur les autres rentes 4 % et 4 1/2, pour les mêmes raisons que celles qui exis-
tent sur d'autres fonds, notre 3 % perpétuel et 3 % amortissable : prime élevée
au remboursement et les chances de plus-value par le relèvement ultérieur des
cours.
La rente italienne 3 ^/a a baissé de 16,62 %; les fonds égyptiens (unifié), de
11,69 %, les fonds anglais 2 1/2 de 9,57 %. Les fonds japonais 4 % 1905 et
5 % 1907 ont baissé de 8,98 et 7,80 %; les 5 % marocains 1910 et 1904 ont
baissé de 10,15 et de 8,49 %. C'est sur les fonds uruguayens, chinois, argentins
que la baisse a été la plus légère, de 7 à 5 %. Un seul fonds d'État n'a pas
baissé et dépasse même, à l'heure actuelle, les cours qu'il cotait avant la guerre :
c'est le 3 % extérieur espagnol. L'Espagne a bénéficié de l'état de guerre mon-
diale; son commerce extérieur s'est accru; elle a dû vendre beaucoup de mar-
chandises et produits aux pays étrangers et la hausse considérable des changes
sur Madrid, la plus-value de la peseta — fait qui restera historique — expli-
quent cette situation.
Les fonds d'État des pays neutres, hollandais, suisses 3 % et 3 Va? danois,
suédois, norvégiens, ont baissé presque autant que ceux des pays belligérants.
Voici quels étaient leurs cours fin juillet 1914 et ceux qui sont actuellement
et approximativement cotés, car leurs négociations sont très restreintes :
3 % Hollandais . .
3 % Suisse 1890 . .
3 V2 Suisse 1910 . .
3% Danois 1894 . .
3 % Norvégien 1888.
3 V2 Suédois 189 r,. .
:!1 juillet 1914
Actueli
84,70
79
81
68,10
88
87,85
71, 7r,
G5 , 50
77
77
93,75
91,50
- 52 -
Sur tous les fonds d'Etat, sauf sur la rente espagnole, la dépréciation des
cours a donc été générale aussi bien sur les fonds des pays belligérants que sur
ceux des pays neutres : mais la dépréciation des cours la plus forte est celle qui
frappe les fonds des pays ennemis : allemands, autrichiens, hongrois. Il a été
défendu de publier les cours des fonds allemands en Allemagne : sur toutes les
places et sur n'importe quel marché, ils sont invendables. S'il s'en négocie,
c'est, comme on dit, sous le « manteau de la cheminée » et aux risques et périls
des vendeurs et acheteurs. Rappelons simplement que fm juillet 1914, le 3 %
allemand se négociait à 74; le 4 % autrichien à 91 ; le 4 % hongrois à 81 environ.
IX
QUELLES PRÉVISIONS EST-IL POSSIBLE D'ÉMETTRE
Que deviendront tous ces fonds d'État étrangers divers après la guerre?
Que deviendront les « garanties » ou prétendues telles qui avaient été données
en gage aux capitalistes prêteurs? Quels sont les fonds qui mériteront d'inspirer
le plus de confiance? Comment tous les pays arriveront-ils à payer et même à
trouver les capitaux nécessaires pour les dépenses, les frais, les charges que la
guerre leur a coûtés, directement ou indirectement?
A quels totaux colossaux s'élèveront les budgets, les dettes publiques conso-
lidées et celles à consolider, c'est-à-dire les dettes flottantes, leurs charges
comme intérêt et amortissement? Nous nous bornons pour aujourd'hui à poser
ces points d'interrogation. Les ministres des Finances, les hommes d'État,
les grands financiers et politiciens, dans tous les parlements et dans tous les
pays, auront fort à faire, et vous me permettrez d'ajouter, mes chers confrères,
que les statisticiens et les économistes auront, eux aussi, plus à faire que jamais
pour renseigner, documenter, guider les uns et les autres.
X
COURS DE COMPENSATION ET DIFFÉRENCES'EN TANT POUR CENT
SUR LES SOCIÉTÉS DE CRÉDIT
Société!^ de crédit.
Banque Fr. Rio-Plata
Banque Gomm. privée de Saint-Pé-
tersbourg
Banque de Paris
Crédit Lyonnais
Banque privée
— des pays autrichiens . . . .
— Russo-asiatique
— Union Moscou
— Russe Comin. Industriollo. .
Différence
Différence
ni juillet 1914
no ieplembrc 1915
totale
pour 100
-
-
en moins
francs
eu moins
445
145
300
67 , 41
51 5
255
260
50,48
1.385
805
580
41,87
1,555
905
650
41 , 80
360
215
145
40,27
500
300
200
40 »
642
390
252
39,25
635
390
245
38,58
807
S5
302
37,42
Banque Gomm. Italienne ....
— Comm. Azofî Don
Comptoir National d'Escompte . .
Société Générale
Banque de Salonique
— Française Commerce et Ind
— Union Parisienne ....
Crédit Mobilier
Banque d'Athènes
Londres Mexico
Crédit Foncier d'Algérie ....
— — de France ....
Foncier Hongrois
Banque du Mexique
Comp. Algérienne
Banque de Comm. de Sibérie . . .
Central Mining
Crédit Foncier d Autriche. . . .
Société Marseillaise .......
Banque Ottomane
Crédit Foncier Égyptien
— Français
Association Minière
Land Bank Egypt
Crédit Franco-Égyptien
Banque Transatlantique
Crédit Industriel
Banco Esp. Rio-Plata
Banque de l'Algérie
— Nat. Afrique Sud ....
— de France
— Nationale Crédit
Fonc. Franco-Canadien
Banque Espagnole Ile Cuba. . . .
— - Espagnole Crédit
— d'Orient
31 juillet 1914
745
30 septembre 1915
475
Différence
totale
en moins
francs
270
Différence
pour 100
en moins
36,24
1.420
915
505
35.56
1.015
655
360
35,46
755
490
265
35,09
90
61
29
32,22
265
180
85
32,07
780
530
250
32,05
492
337
155
31,50
45
31
14
31,11
260
180
80
30,76
620
435
185
29,83
890
629
261
29,32
417
300
117
28,05
48a
350
132
27,38
1.260
920
340
26,98
1 . 460
1.089
371
25,41
210
158
52
24,76
1.174
890
284
24,19
695
530
165
23,74
578
445
133
23,01
730
565
165
22,60
321
255
66
20,5li
225
180
45
20 »
159
129
30
18,86
155
126
29
18,70
265
220
45
16,98
725
614
111
15,31
338
291
47
13,90
2.825
2.445
380
13,45
313
280
33
10,54
4.575
4.165
410
8,96
620
575
45
7,25
725
675
50
6,89
436
425
11
2,52
259
250
9
2,47
80
80
»
»
XI
CLASSEMENT PAR IMPORTANCE DE LA BAISSE SUR LES SOCIÉTÉS DE CRÉDIT
FRANÇAISES
Apràs les fonds d'État, les valeurs qui ont le plus baissé sont les actions de
sociétés de crédit françaises et étrangères. Cette dépréciation varie de 67,41 %
à 2,47 %, d'après les cours de compensation des 31 juillet 1914 et 30 septembre
1915. Il n'en pouvait être autrement. Les opérations financières normales et
courantes sont presque suspendues en temps de crise; de même, les grandes
affaires de crédit. L'actif des sociétés de crédit, qui se compose de valeurs mobi-
lières, d'effets de commerce, de créances en portefeuille, subit inévitablement
on risque do subir des moins-values. Les réserves que ces sociétés ont eu la
!'■* BKKIK. 57' vor-. N*"
- 54 -
sagesse de constituer pendant les temps de prospérité servent à atténuer les
pertes probables. Il ne peut être question de distribuer des dividendes et les
actionnaires doivent encore s'estimer bien partagés s'il leur est réparti l'intérêt
statutaire du capital qu'ils ont versé. Dans toutes les périodes de guerre, de
crise, ce sont les titres de sociétés de crédit qui ont souffert lé plus, à rares
exceptions près, comme les établissements privilégiés, comme la Banque de
France. Viennent la paix et la fin des crises, ce sont aussi ces mêmes établisse-
ments, pourvu qu'ils aient une organisation et un fonctionnement sains, qui
regagnent le plus tôt et le plus vite le terrain perdu.
Voici, en ce qui concerne les établissements de crédit français, quelles ont
été les différences en tant pour cent des cours fin juillet 1914 à fin septembre
1915 :
Banque de Paris 41,87%
Crédit Lyonnais 41,80
Banque privée . 40,27
Comptoir National d'Escompte 35,46
Société Générale 35,09
Banque Française 32,07
Union Parisienne 32,05
Crédit Mobilier 31,50
— Foncier d'Algérie 29,83
— Foncier de France 29,32
Compagnie Algérienne 26,98
Société Marseillaise 23,74
Crédit Français 20,56
— Industriel et Commercial 15,31
Banque de France 8,96
— Nationale de Crédit 7,25
XII
CLASSEMENT PAR IMPORTANCE DE LA BAISSE SUR LES SOCIÉTÉS DE CRÉDIT
ÉTRANGÈRES
En ce qui concerne les sociétés de crédit étrangères en dehors de la Banque
française du Rio de la Plata, dont la dépréciation s'élève environ à 67,41 %,
ce sont les banques russes et mexicaines qui ont été le plus touchées.
Banques russes.
Banque de Commerce de Saint-Pétersbourg 50,48%
— Russo-Asiatique 39,25
— Union de Moscou 38,58
— Russe Commerciale et Industrielle 37,42
— AzolT-Don 35,56
T- de Commerce de Sibérie 25,41
Banques mexicaines.
Banque Londres-Mexico 30,76%
— du Mexique 27,38
— 55 — \
Les banques et établissements austro -hongrois ont baissé dans les proportions
suivantes :
Banque des pays autrichiens '. . . . 40 » %
Foncier Hongrois 28,05
— Autrichien 24; 19
Parmi les banques mêlées aux affaires orientales et occidentales, la Banque de
Salonique a baissé de 32,07 %, la Banque d'Athènes, de 31,11 %; la Banque
ottomane, de 23,01 %; la Land Bank Egypt, de 18,86 %; le Crédit franco-
égyptien, de 18,70 %; le Crédit Foncier égyptien, de 22,60 %.
XIII
ACTIONS DE CHEMINS DE FER FRANÇAIS ET ÉTRANGERS — SOCIÉTÉS MÉTALLUR-
GIQUES — CHARBONNAGES — FORGES — ACIÉRIES — TITRES DIVERS
Après les actions des sociétés de crédit, c'est sur les actions des chemins
de fer français et étrangers, les actions de sociétés métallurgiques, charbonnages,
forges, aciéries, et titres divers — nous parlons toujours de valeurs cotées au
parquet — que les fluctuations de cours et dépréciation ont été les plus impor-
tantes.
Sur tout ce groupe de valeurs, nous nous bornons à relever les cours fin
juillet 1914 et fin septembre 1915, à défaut des derniers cours connus.
Nous nous bornons à relever quelques cours fm juillet 1914 et fin août 1915
ou précédents (Voir tableau, p. 56) :
La baisse a donc été à peu près générale sur les titres à revenu variable. Elle
a été très forte sur les titres les plus sérieux : compagnies de chemins de ferj
actions de sociétés de crédit; elle a été moins accentuée sur les titres de so-
ciétés métallurgiques, valeurs minières, actions de charbonnages, forges et
aciéries; les différences de cours sont variables sur les titres de sociétés diverses,
suivant la nature des affaires de ces sociétés. En général, et cela se comprend
aisément, la baisse a été plus faible sur les titres de sociétés qui ont travaillé
ou travaillent pour les fournitures de guerre. Il y a, avons-nous dit souvent,
des valeurs de guerre et des valeurs de paix. On s'en rendra compte par le
relevé que nous avons établi sur les valeurs principales se négociant au marché
officiel : actions de chemins de fer français et étrangers; actions de sociétés
de crédit; actions de mines métalliques, de charbonnages, forges et aciéries,
valeurs diverses.
Quelles seront pour chacun de ces groupes de titres et chacune de ces va-
leurs, les probabilités d'un relèvement, leurs chances et leurs risques d'avenir?
Quelles éventualités meilleures ou pires peut-on prévoir sur ces titres et sur
un plus grand nombre encore parmi ceux qui se négocient à la Bourse de Paris.
C'est ce qu'il conviendra de suivre avec attention, mais cet examen sortirait
aujourd'hui du cadre des statistiques.
Tabliau
56
FIN afCEHBRE
1913
Est . .
Lyon .
Midi. .
Nord .
Orléans
Ouest .
Nord-Espagne
Sar»g088e . .
Andalous . .
Autrichiens .
Lombards . .
Mokta-El-Hadid
Boléo
Affuilas
Penarroya
Nickol
Maltidano
Phosphates de Gafsa fact.) .
— — (parts).
Mines de Uannaux . . .
Mines de Bruay ....
Mines de Lens
Courriéres (act. 100 fr.).
Mines de Bourges . . .
Grand'Combe
Aciéries de France . . .
Châtillon-Comnientry. .
Commentry-Fourchamb.
Creiisot
Aciéries de la Marne . .
Suez ■ .
Omnibus
Voitures à Paris . . .
Transatlantique . . .
Messageries maritimes
llio-Tinti
Brianslc. or. d
— priv
Printemps
Sucreries Say ....
FIN JUILLET
1914
ou
précédents
FIN AOUT
1915
ou
précédents
DIFFÉRENCE
fiu juillet
1914
à fin aoi'it
1915
FIN SEPTEMBRE
1915
Actions de chemins de fer français
942
830
1.281
1.100
1.115
1.000
1.704
1.530
1.320
1.220
889
847
Actions de che
450
350
438
355
305
275
772
G90
110
80
1.040
9.i0
1.223
1.235
720
364
364,50
254
— 55
— 150
— 50
— 307
— 85
— 127
+
7.50
1.010
945
1.210
1.1(10
710
Actions de mines métallicpies
.220
126
1.374
1.090
305
935
831
1.800
530
90
1..325
890
180
700
tiOO
1.675
589
68
1.305
1.030
690
594
+
125
59
— 22
— 20
+ 140
— 10
— 6
Actions de charbonnages français
2.630
1.4;!0
1.497
4.930
465
1.985
2 . 230
1.205
1.175
1.680
400
1 . 950
2.620
1.360
950
1.720
2.099
+ 390
+ 95
— 225
+ 40
+ 149
1.665
563
61
1.305
1.090
175
680
310
2.630
1.392
1,010
1.720
399
2.110
Actions de forges et aciéries
DIFFÉRENCE
de lin juillet
1914
à
fin septembre
1915
DIFFÉRENCE
pour ino
80
90
55
320
120
137
— 9,63
— 8,18
— 5,50
— 20,91
— 9,83
— 16,17
14
354
+ 41 + 1,14
9,50
355
Pas de dépréciation
21
■J.50
— 25 — . 9,09
1)
545
— 145 — 21,01
11
66
— 14 — 17,50
+
135
33
29
20
200
5
20
290
+ 400
+ 127
— 1H5
+ 40
— 1
+ 160
— 7,50
+ 6,22
— 32,22
— 1,60
+ 22,47
— 2,77
- 2,85
— 48,33
+ 17,93
+ 10,03
— 14.04
+ 2,38
— 0,25
+ 8,20
765
550
675
+ 125
061
+ 111
+ 20,18
1.961
2.030
1.919
— 111
1 . 950
— 180
— 8,86
1..S97
1.340
1.315
— 25
1.950
+ 610
+ 45,52
2.030
1.918
1.812
— 106
1.860
— 58
— 3,02
1.740
1.610
1.720
+ 110
1.720
+ 110
+ 6,83
Actions de valeurs diverses
4.945
4.300
3.900
— 400
4.000
— 300
— 6,97
607
490
430
— 60
420
— 70
— 14,28
185
170
115
— "5
115
— '>ô
— 14,70
1.56
98
106
+ 8
106
+ 8
+ 8,16
120
70
69
— 1
110
+ 40
+ 57,14
1.780
1..500
1.519
+ lî'
1.490
— 10
— 0,66
467
299
297,50
— 1,50
278
— 21
— 7,02
430
295
305
+ 10
282
— 13
— 4,40
399,50
350
298
— 52
310
— 40
— 11,12
428
290
397
+ 107
401
+ 111
+ 38,27
Le signe — indique la baisse.
Le signe + indique la hausse.
XIV
LES VALEURS A REVENU FIXE
Passons maintenant aux principales valeurs à revenu fixe qui forment la
partie saine et solide de la petite épargne française : obligatioiis de la Ville de
Paris, du Créd^it Foncier, compagnies de chemins de fer, grandes sociétés indus-
trielles. La baisse ne les a pas épargnées, elle les a frappées comme les rentes.
- 57 -
Dans les périodes comme celles que nous avons traversées, comme je l'ai déjà
fait remarquer, les porteurs de titres cherchent bien plus à se créer des res-
sources ou bien, par des réalisations, à ajouter de nouvelles ressources à celles
qu'ils possédaient, qu'à effectuer de nouveaux placements. Il en résulte que la
masse des ordres de vente et des offres dépasse le nombre des ordres d'achat
et de demandes de titres : la dépréciation des cours est la conséquence de cette
situation.
Mais si la baisse des obligations et rentes a été importante, elle a été bien
plus accentuée sur les actions et titres à revenu variable. Cela se comprend.
Dans les époques de crise, une société voit ses affaires et ses bénéfices diminuer
et même disparaître, pendant que ses dépenses restent stationnaires ou augmen-
tent, et que ses risques de pertes s'accroissent. Avec ses réserves ou avec un
minimum de profits, voire même en faisant appel au crédit, elle peut satis-
faire à ses engagements, à ses obligations, c'est-à-dire à ses créanciers, payer les
intérêts des dettes qu'elle a contractées, etc., mais il lui serait impossible de
payer quoi que ce soit à ses commanditaires, c'est-à-dire à ses actionnaires. C'est
ce que nous avons expliqué bien des fois, en répétant sans cesse que les titres
à revenu fixe convenaient à l'épargne, aux personnes dont l'avoir est modique et
qu'il fallait posséder déjà une certaine aisance et fortune pour acheter des titres
à revenu variable (1).
XV
FONCIÈRES ET COMMUNALES
Fiu juillet 1914 Fin septembre 1915
Foncières 2,80 i 895. . .
Commi.inales 2,60 1899 .
Foncières 3 % 1903. . .
Communales 3 % 1906 .
Foncières 3 % 1909 . . .
Communales 3 % 1912 .
Foncières 3,50 % 1913. .
— 4 % 1913 . . .
Communales 2,60 1879 .
— (cinquièmes)
Foncières 3 % 1879 . . .
Communales 3 % 1880 .
Foncières 3 % 1883 . . .
— 2,60 1885. . .
— (cinquièmes) .
Communales 3 % 1891 .
— 2,60 1892 .
4 % 1865 . .
3 % 1871 . .
1871 (quarts)
402 , 50
357
3S2
342
451
392
448
392
247
208
236
202
486
415
465
420
442
443
99
95
490
470
489
467
390
330
385
346
88,25
79
347
312
383
350
XVI
VILLE DE PARIS
502
519
383
368
91
96
Différence tottle
Différence
francs
o/„
— 45,50
— 11,30
— 40
— 10,47
— 59
— 13,08
— 56
—^12,50
— 39
— 15,78
— 34
— 14,40
-^1 ,
— 14,60
— 45
— 9,67
+ 1
+ 0,22
— 4
— 4,04
— 20
— 4,08
— 22 V
— 4.49
— 60
— 15,38
— 39
— 10,12
— 9,2.'
— 10,48
— 35
— 10,08
— 33
— ?,61
+ 17
— 15
+ 5
■\- 3,3?^
— 3,91
+ 5,49
- 58 -
Fin juillet 1914 Fin teptembre 1915 Différence lotale
4 % 1875 ....
4 % 1876 ....
2,50 %1892 . . .
1892 (quarts) . .
2,50 % 1894-1896.
1894-1896 (quarts)
2 % 1898 ....
1898 (quarts) . .
2 % 1899 ....
1899 (quarts). . .
2,50 % 1904. . .
1904 (cinquièmes)
2,75 % 1905 . . .
1905 (quarts). . .
2,75 %1910. . .
3 % 1910 ....
1910 (quarts). . .
3 % 1912 ....
francs
516,25
484
— 32.25
495
482
— 13
300
273
— 27
82,50
68 , 50
— 14
300
279
— 21
82
68,25
— 13,75
356
318
— 38
98
83,75
— 14,25
309
306
— 3
88
76
— 12
374
324
— 50
78
65
— 13
342
324
— 18
87,25
74,25
— 13
333
283
— 50
345
297
— 48
87
73,25
— 13,75
254
216
— 38
Différence
- 6,24
- 2,62
- 9 ).
- 16,96
- 7 ))
- 16,76
-10,76
-14,54
- 0,97
-13,63
-13,36
-16,66
- 5,26
- 14,89
- 15,01
- 13,91
- 15,80
- 14,96
XVII
OBLIGATIONS DE CHEMINS DE FER FRANÇAIS
Est 3 % anc
— 3 % nouv. . .
— 2,50 %|nouv.. . ,
P.-L. M. 3 % anc. . .
— 3 % nouv . ,
— 2,50 % nouv
Nord 3 % anc. . . ,
— 3 % nouv. . . .
— . 2,50 % nouv . .
Orléans 3 % anc. . ,
— 3 % nouv.
— 2,50 % nouv
Ouest 3 % anc. . . .
• — 3 % nouv. .
— 2,50 % . . .
Midi 3 % anc . . .
— 3 % nouv. . .
— 2,50 % . . . .
390
345
— 45
— 11,53
410
340
— 70
— 17,07
370
318
— 52
— 14,05
402,50
»
»
))
404
»
»
»
358
324
— 34
— 9,49
400
348
— 52
— 13 »
401
358
— 43
— 10,72
377
322
— 55
— 14,58
395
363
— 32
— 8,10
413,75
367
— 46,
75
— 11,29
366
341
— 25
— 6,83
401
37 4
— 27
— 6,73
414
368
— 46
— 11,11
36 4
336,50
— 27,
50
— 7,55
407
357
— 50
— 12,28
400
363
— 37
— 9,25
367
340,50
— 26,
.50
7^22
XVIII
OBLIGATIONS DE CHEMINS DE FER ÉTRANGERS
4 % Chicago-Milvaukee
4 % New- York H aven.
3 V4 Pensylvania . . .
4 % Central Pacific . .
3% Nord Espagne (ire)
3% Saragosse(l'"e) , .
425,25
481
+ 55,75
+ 13,10
397
448
+ 51
+ 12,84
446
481,60
+ 35,60
+ 7,98
386,50
385
— 1,50
— 0,38
353
349
— 4
— 1,13
352
345
— 7
— 1,98
- 59
XIX
OBLIGATIONS DE VALEURS INDUSTRIELLES
Schneider (Creusot 4 %) . . . .
Fives-Lille4 %
Malfidano 4 «„
Métropolitain 4 "^
Maries 4 %
Dourges4 %
Aciéries Longwy 4 %
Transatlantique 4 %...*. .
Omnibus 4 %
Penarroya 4^50 %
Phosphates Gafsa 4,50 % . . .
Eaux, élect. îndo Chine 4,50 %
Triphasé 4,50 %
Messager-Maritimes 5 %. . . .
Distilleries Indo-Chine 5 %. . .
Krivoi-Rog5 %
Fin Juillet 1914
Fin leptembre 1915
Différence totale
Différenc*
frinci
o/o
495
470
— 25
— 5,05
492
455
— 37
— 7,52
485
466
— 19
— 3,91
465
429,75
— 35,25
— 7,58
484
480
— 4
— 0,83
480
460
— 20
— 4,16
500
501
+ 1
+ 0.20
410
460
+ 50
+ 12,19
440
378
— 62
— 14,09
515
475
— 40
— 7,76
510
480
— 30
— 5 88
492
460
— 32
— 6 50
505
450
— 55
— 10,89
463
370
— 93
— 20 ,08
515
485
— 30
— 5,82
413
490
— 77
— 18,64
XX
OBSERVATIONS DIVERSES
Les obligations du Crédit Foncier, de la Ville de Paris, des grandes compa-
gnies de chemins de fer français constituent une notable partie du portefeuille
de notre épargne et, avec nos rentes, en forment la partie la plus saine et la plus
morcelée. Elles ne peuvent échapper à la baisse générale, mais leur revenu, du
moins, a été et est régulièrement payé; en même temps que les tirages d'amor-
tissement et de lots s'effectuent. Leur sécurité reste intacte et les détenteurs
de ces valeurs ne doivent concevoir aucune crainte, à moins de supposer, —
ce qui serait vraiment un sacrilège, — la ruine et la disparition de la France.
Les obligataires de la Ville de Paris, du Crédit Foncier, des grandes compagnies
de chemins de fer n'ont rien autre à faire que de conserver leurs titres tran-
quillement. Le temps travaille pour eux, répéterons-nous encore, car, chaque
jour qui s'écoule les rapproche de l'époque à laquelle leurs titres seront rem-
boursables, ce qui constitue une forte prime sur les cours d'achats et ceux
actuels surtout.
Qu'ils se gardent surtout de céder à la tentation qui leur serait suggérée
de les arbitrer contre d'autres titres qui ont baissé davantage et qui pourraient
monter.
C'est en écoutant de tels conseils que, à toute époque, dans toutes les grandes
crises, des porteurs de titres de premier choix se sont ruinés. Après la guerre
de 1870, on conseillait aux porteurs de rentes françaises — le 3 % était tombé
à 50^ 80 — de les vendre, et de vendre également leurs obligations et actions
- 60 -
de chemins de fer français, Ville de Paris, Crédit Foncier, grandes sociétés
françaises, et pour acheter... des fonds portugais, espagnols, turcs, des actions
et obligations de chemins de fer étrangers, etc. Ce sont là des faits historiques
que nous avons suivis, avec chiffres à l'appui, presque jour par jour : dans Nos
Finances contemporaines cornme dans Le Rentier, nous avons cité des faits et des
chiffres précis (1).
XXI
LA BAISSE EN 1870 DES OBLIGATIONS DE CHEMINS DE FER
En ce qui concerne les obligations des grandes compagnies de chemins de
fer français, en 1870, la baisse des obligations de chemins de fer n'avait pas été
moindre de 100 francs par titre. Elles valaient en juin et juillet 1870, 350 à
360 francs; fm décembre 1871, elles valaient en moyenne 250 francs environ (2).
Depuis le commencement de la guerre actuelle, la baisse a été importante,
sans doute, surtout sur les titres des compagnies qui ont supporté de gros dom-
mages, mais elle n'est pas comparable à celle de 1870 et cela s'explique, parce
que chacun a pu apprécier la sécurité de ces titres qui sont extrêmement ré-
partis dans les petits portefeuilles. Les cours actuels, dans leur ensemble, cor-
respondent à peu près aux plus hauts prix cotés en 1870.
Qu'on n'oublie pas, d'autre part, que quarante-cinq ans se sont écoulés
depuis la guerre de 1870 et, conséquemment, la durée d'amortissement de ces
obhgations n'est plus aujourd'hui que de quarante ans à quarante-cinq ans au
maximum, soit une période moyenne de vingt à vingt-deux ans.
Pour être remboursé à 500 francs avec l'obligation qu'on possède, il n'y a
guère plus de temps à courir aujourd'hui qu'il ne s'en est écoulé depuis 1870. Par
le jeu normal et automatique de l'amortissement annuel, toutes les obligations
des grandes compagnies de chemins de fer seront remboursées à 500 francs.
D'ici 1950 à 1960, soit dans une période moyenne de vingt à vingt-cinq ans
(car une obligation qu'on possède peut tout aussi bien sortir remboursable
en 1916 qu'en 1960), toutes les obligations de chemins de fer seront rem-
boursées à 500 francs, soit avec une plus-value considérable.
Un capitaliste qui possède ou qui achète, par exemple, aux cours actuels de
325 à 330 francs des obligations Lyon fusion ancienne ou nouvelle 3%; des
obligations Paris-Lyon 2,50 % à 325 francs, débourse ou possède un capital
de 655 francs; ces 655 francs lui seront remboursés à 1.000 francs brut, d'ici
1959, soit avec une plus-value de 355 francs, soit près de 50%.
Cela veut dire qu'un capital de 100.000 francs placé en obligations des
grandes compagnies, vaudra 150.000 francs d'ici quarante-quatre ans au plus
tard, ou dans une période moyenne de vingt-deux ans.
Celui qui possède ou achète une obligation Nord 3 % à 365 francs, une obli-
gation 2,50 % à 325 francs, débourse ou possède un capital de 690 francs. Ces
690 francs seront remboursés à 1.000 francs d'ici 1950, soit avec une plus-value
de 320 francs, soit 45 % !
(1) Voir Le Rentier depuis novembre 1914.
(2) Voir Nos Finances contemporaines, t. VI et \'1I.
- 61 -
Les obligations des grandes compagnies de chemins de fer sont de vraies
valeurs « de père de famille » car elles peuvent lui permettre de constituer une
dot ou une assurance pour ses jeunes enfants. Il n'a pas à s'en occuper. Quelles
que soient les fluctuations de cours, ses enfants, ses héritiers ou lui recevront
un capital supérieur à celui qu'ils possèdent aujourd'hui. Gomme nous n'avons
cessé de le dire : à moins de supposer que les grandes compagnies et que l'Etat
fassent faillite, ne puissent tenir leurs engagements, — une telle supposition
est inadmissible et, si par malheur elle se réalisait, quelle est la fortune qui reste*
rait debout et ne serait pas atteinte, bouleversée et détruite — le temps tra-
vaille pour le porteur de ces titres qui a la sagesse et la prudence de rechercher
la sécurité du capital et du revenu même plus faible que celui qu'il pourrait
trouver ailleurs.
XXII
OBLIGATIONS DU CRÉDIT FONCIER DE FRANCE ET DE LA VILLE DE PARIS
Les obligations du Crédit Foncier, de la Ville de Paris, comme celles des com-
pagnies de chemins de fer, ont baissé sur leurs cours d'avant la guerre, mais
dans de faibles proportions. Elles ont suivi le mouvement de régression des
rentes. Leur taux de capitalisation s'en est ressenti, et au lieu de rapporter
net, comme avant la guerre, 3,50 à 3,75 %, elles rapportent maintenant 4 à
4,50 % : en variant, ou plutôt en dosant ses placements, on peut se faire un
revenu moyen de 4,50 % qui est depuis de longues années inconnu.
A la veille de la guerre, nous indiquions seize obligations industrielles di-
verses qui pouvaient entrer dans les portefeuilles.
Vous me permettrez de reproduire ici textuellement le barème qui paraissait
dans le Rentier du 7 juillet 1914, p. 353, trois semaines avant la guerre, en
juxtaposant les cours actuels ou derniers cours connus ou cotés, sur ces
diverses obligations auxquelles nous pourrions ajouter plusieurs autres dont
nous avions souvent parlé, comme celles de la Compagnie générale des Eaux,
de la Compagnie centrale du Gaz, du Gaz pour la France et l'étranger, des
Pennaroya, Ateliers et Chantiers de la Loire, Forges et Aciéries du Nord et
de l'Est, Annuités de la Compagnie de l'Azote, obligations de nos grands
Charbonnages français.
Ces divers placements ne peuvent causer aucune préoccupation à ceux qui les
ont effectués (Voir tableau, p. 62).
En juillet 1914 ces seize obligations auraient coûté 7.664 francs. Elles coûte-
raient aujourd'hui approximativement 6.754* 50. La dépréciation du cours a
donc été de 11,86 %. Les obligations qui ont le plus baissé sont celles des Messa-
geries Maritimes et celles de la Compagnie Transatlantique. D'autres obliga-
tions industrielles du premier choix comme celles de la Compagnie générale des
Eaux, Gaz et Eaux, Gaz pour la France et l'étranger, Charbonnages du Tonkin,
Pennaroya 4,50 «/o, Forges et Aciéries du Nord et de l'Est, Forges et Aciéries
de la Marine, Annuités de l'Azote 5,50 o/o ont baissé d'environ 7 à 8 %.
Tableau
- 62 -
obligations
Cours
approximatif Revenu
„ e" brut
juillet '1914
Schneider (Creusot 4 %) . . . . 495
Fives-Lille4 % 492
Malfidaiio 4 % 485
Métropolitain 4 % 465
Maries 4 % 484
Bourges 4 % 480
Aciéries Longwy 4 % 500
Transatlantique 4 % 410
Omnibus 4 % 440
Pennaroya4,50 % 515
Phosphates Gafsa 4,50 % . . . 510
Eaux, Èlect. Indo-Cliine 4,50 %. 492
Triphasé 4,50 % 505
Messageries Maritimes 5 %. . . 463
Distilleries Indo-Chine 5 %. . . 515
Krivoï-Rog5 % 413
Totaux 7.664
20
20
20
20
20
20
20
20
20
22,50
22,50
22,50
22,50
25
25
25
Rembour-
■emeut
brut
500
500
500
500
500
500
500
500
500
500
500
500
500
500
500
500
Court
IS ao6t
191Ô
460
455 (21
468 (1"
428,50
[pas de cours)
460 (29
501 (31
401
397,50
475
473,50 ( 8
460
449
364
495
467
(31
/28
déc. 1914)
juin 1915)
avril 1915;
iuillet 1914)
juin. 1915)
mai 1915)
juin. 1915)
(11 juin 1915)
345
8.000 6.754,50
XXIII
OBLIGATIONS DE COMPAGNIES DIVERSES
Les obligations de chemins de fer étrangers.
Les obligations de chemins de fer étrangers qui sont restées à peu près à
leur cours d'avant la guerre ou qui ont dépassé ces cours sont les obligations
des chemins de fer espagnols^ nord de l'Espagne et Saragosse par suite de la
hausse du change, et les obligations de grandes compagnies de chemins de fer
américains qui ont bénéficié tout à la fois de la hausse exceptionnelle du change
américain et des achats qui ont lieu comme valeurs de change. Voici quelques
cours comparés :
Fin
décembre
1913
30 juiu
1914
Fin
juillet
1914
ou
précédents
Fin
juillet
1915
ou
précédents
Haugie
4 % Ghicago-Milwaukee . .
425,25
436
420
455
+ 35
4% New-York llaven. . .
397
412
397
405
+ 8
3,75 % Pensylvania. . . .
446
457
437
471,50
+ 34,50
4 % Central Pacific
386,50
577
365
385
+ 20
3 % Nord Espagne l^^ . . .
353
359
345
352
+ 1
3 % Saragosse 1"
352
366
352
341
—11
Tous ces cours sont maintenant dépassés. Ainsi, dans ces derniers jours, les
Chicago Milwaukee ont fait 485 francs; les New-York Haven 443 francs; les
Pensylvania 489 francs; les Central Pacific 390 francs. Ils sont suffisamment
élevés : ils permettent à ceux qui ont acheté ces titres après leur émission de
rentrer avec bénéfice dans leurs débours; s'ils les ont achetés lors de leur émis-
sion, les cours actuels s'en rapprochent ou les ont atteints. Ils peuvent ainsi
- 63 -
employer leurs fonds d'une façon patriotique, sûre et plus avantageuse en
mettant en portefeuille des bons et obligations de la Défense nationale.
Quant aux obligations des chemins de fer espagnols, elles sont arrivées au
même niveau que les obligations de nos premières lignes françaises, alors que,
pendant longtemps, elles se sont négociées 50 et 100 francs et plus, au-dessous.
La plus-value actuelle peut donc paraître suffisante, car ces obligations, comme
le fait remarquer V Économiste français, « n'offrent plus d'avantage particulier »
résultant de ces cours comparatifs.
*
* *
Valeurs à revenu fixe et à revenu variable.
Sur toutes les valeurs de placement les plus sérieuses et à revenu fixe, rentes
et obligations, la baisse a été, on le voit, très importante. Dans les moments de
crise comme ceux que nous avons traversés et traversons, chacun cherche à
se créer des disponibilités et des ressources nettes et liquides, hésite ou attend
pour les employer. Aux offres de titres qui se produisent n'est opposée aucune
demande, et les cours s'abaissent peu à peu.
Sur les valeurs à revenu variable, sur les actions des sociétés jouissant de la
plus grande confiance, la dépréciation des cours a été bien plus sérieuse. Cette
dépréciation sur les valeurs à revenu fixe, rentes et obligations, a été, en
moyenne, de 10 à 15 %. Sur les actions à revenu variable, elle s'est élevée
jusqu'à 20, 25, 30, 35% en supposant même que les réalisations auraient pu
et pourraient se faire d'après les cours inscrits à la cote. Or, sur quantité de
valeurs, aucune négociation n'a pu être faite, et, conséquemment, aucun cours
n'a été inscrit depuis le commencement de la guerre.
Aussi, dans toutes les statistiques et surtout dans celles concernant les
titres mobiliers ou les évaluations des stocks monétaires de tel ou tel pays ou
bien les statistiques douanières, il convient d'apporter une réserve et une pru-
dence même excessives. Les chiffres ne doivent dire que ce qu'ils disent et non
pas ce qu'on voudrait leur faire dire. Il faut les montrer tels qu'ils sont après
avoir recherché, sans aucun parti pris, les causes des différences qu'on peut
constater; comment les plus-values ou moins-values ont été établies, quelles
en ont été et en sont les raisons déterminantes, sinon la statistique induirait le
public en erreur et ne serait qu'un trompe-l'œil.
Ainsi, en ce qui concerne les fluctuations des valeurs mobilières, il faut se
rendre compte que ce que nous avons dénommé et défini (1) les « causes intrin-
sèques et extrinsèques de hausse et de baisse » : causes passagères ou durables,
causes provenant ou non de la marche des affaires sociales s'il s'agit de sociétés,
causes budgétaires, politiques, etc., intérieures ou extérieures s'il s'agit d'em-
prunts d'État ou d'affaires touchant à l'État ou en dépendant, etc.
(1) Voir Alfred Neymarck^ Que doit-on faire de son argent? Notions et conseils pratiques
sur les valeurs mobilères. 5« et 6« éditions. Marchai et Godds, ésliteurs. Prix 5 francs, car-
tonné.
- 64 -
XXIV
HAUSSE OU BAISSE -^ GAIN OU PERTE
ERREURS D'APPRÉCIATION
Quand on établit son bilan de tin d'année, comme- toute société le fait, comme
tout lentier ou porteur de titres doit le faire, on peut rechercher, à titre d'in-
dication, par exemple, ce que représente, en capital, la hausse ou la baisse de tel
•groupe de titres; mais faut-il conclure de cette indication que le public qui dé-
tient ces titres, que le pays qui les a créés, a gagné ou perdu tant et tant de
millions ou de milliards? Ce serait une erreur. Ce qui est vrai, c'est que, suivant
le prix d'un titre d'après le cours coté, le pouvoir d'achat ou de vente de ce
titre a augmenté ou diminué. C'est une erreur de dire que si un titre a haussé ou
baissé de 100 francs, on a perdu ou gagné 100 francs. Le gain ou la perte ne sont
effectifs et réels que lorsqu'ils sont réalisés. Nous l'avons expliqué bien souvent
et je l'ai rappelé plus haut en citant une historiette charmante que Léon Say
racontait avec tant d'e'sprit sur la bonne vieille femme qu'il avait connue.
Autre exemple que chacun peut vérifier comme nous l'avons fait nous-même :
Une personne a acheté ou possédait, avant la guerre actuelle, des obligations de
premier choix qui depuis ont baissé de 20, 25, 30, 40 francs. Cet obligataire a
reçu régulièrement les intérêts : les tirages d'amortissement ont eu lieu; les rem-
boursements se sont effectués ou se feront aux dates qui seront fixées. Il pour-
rait dire, en constatant les cours actuels, que ses valeurs ont baissé de X... francs
ou de tant pour cent, ce qui serait vrai : mais il ne pourrait dire qu'il a perdu
X..., francs. Tant qu'il conserve ses valeurs et qu'il n'est pas obbgé de les vendre
ou de les donner en paiement d'après leurs cours actuels, il ne peut dire qu'il
a subi une perte, pas plus que celui qui, après ou pendant la guerre de 1870,
ayant acheté des valeurs qui sont aujourd'hui même plus haut cotées qu'à
l'époque de leur achat, se figurerait qu'il a gagné tant par titre ! Il n'a rien gagné
ou perdu, tant qu'il n'a pas réalisé.
XXV
LES ÉPOQUES D'AMORTISSEMENT DES OBLIGATIONS DE CHEMINS DE FER
Pour compléter nos constatations précédentes sur les obligations de chemins
de fer, nous indiquons ci-après les échéances diverses de leur amortissement.
Nous indiquons le nombre d'obligations émises et celui des obligations amorties.
Nous prenons les chiffres des années 1911-1912.
Voici ce relevé :
Compdgnies
Ouest (en liquidation) :
Roueu 1845,4%
— 1849,5 %
Le Havre 1845, 5 %
— 1847, 5 %
Rouen 1847, 5 %
Le Havre 1848, 6 %
Rouen 1854, 5 %
Nombre
d'obligations
Nombre
d'obligations
amorties
Échéance
tiuale
de
l'amortiisemeut
1.656
1.195
6 juill. 1918
1.446
783
1" déc. 1924
:î.585
1.901
1er mars 1924
1.939
982
l«f mars 1925
1.852
943
1er déc. 1925
1.446
432
1" janv. 1936
6.684
1.973
1er déc. 1938
65
Compagnies
Ouest 5 %
— 4%
— 3 % l^e série 3
— 3 % 2c série 1
— 2,50 % 389.363
Nord :
Nord 3 % . 4.439.971
— 2,50 % 455.283
Picardie-Flandres 3 % 33.595
Nord-Est (5 premières séries' 3 % 135.000
— 6e série, 3 % 15.000
Midi :
Midi 3 % 3.824.125
— 2,50 % 256.021
Est :
Montereaii à Troyes 5 % 3.293
Est 5 % 292.828
— 3 % anciennes 1.399.820
Salines de Dieuzc 5.900
Est 5 % 76.000
Moselotte 3 % 2.400
Est 3 % anciennes 898.533
— nouvelles 2.639.013
Est 2,50 % 198.760
Ardennes 3 % 455.500
Orléans :
Orléans 4% (2^ emprunt) 13.333
— 3% (séries 1 à 17) 4.000.000
— 3% (séries A, B, C, Z, Y, X). . 2.000.000
— 3% (série V) 167.723
— 2,50 % (séries D et E) 500.000
— 2,50 % (série F) 62.673
Grand-Central 3% 272.264
Paris-Lyon-Méditerranée :
Rhône-et-Loire 4% (l^e série) 102.614
~ 3% (2e série) 63.643
Grand-Central 3% 131.007
Bourbonnais 3% 211.000
Grand-Central 3% 26.936
Lyon à Genève 3% 142.264
Paris à Lyon 3% 250.000
Lyon-Méditerranée 5% 120.000
— 3% 182.383
— 1855 3% 82.666
Bessèges à Alais ?y% 22.610
Victor-Emmanuel 3% 98.412
Dauphiné 3% 173.000
Dombes et Sud-Est 3 % 40 . 000
Paris-Lyon-Méditerranée 2,50 % 432.098
— 3% 11.668.287
Dombes et Sud-Est 3 % nouvelles. . . . 40.000
Xombre
d*obli|;ations
émises
Nombre
d'obligations
amorties
Echéance
Qnale
de
rarnortisscment
334
56
1" juin. 1951
5.493
938
—
886.606
87^.398
—
722.880
178.267
le^ oct. 1956
34.388
868.412
1950
38.199
1950
5.018
1964
11.933
1977
. 1.025
1980
625.451
1" oct
1957
28.557
1" nov.
1957
1 . 529
l^i- juili.
1927
57.695
1er jiiij^
1949
356.709
1*^"^ juin
1949
1.470
1er janv.
1950
13.504
ler juin
1952
214
\" mai
1954
172.020
lor juin
1954
315.600
1er sept.
1954
13.920
le-" juin.
1954
95.051
1er janv.
1955
4.078
1 er janv,
.1938
903.636
1er janv.
1951
209.100
1er oct.
1956
2.400
—
51.800
—
12.500
—
52.311
1er janv.
1958
18.019
1er janv.
1952
15.828
—
80.572
1er janv
1953
5.376
_
32.740
ler janv.
1954
57.382
ler avril
1954
66.261
—
40.621
lef juin.
1954
18.416
—
5 . 003
1er oct.
1954
20.915
—
33.823
\''^ juin.
1858
7.023
1er oct.
1958
39.196
1er nov.
1958
1.839.485
1er janv.
1959
3.740
lef oct.
1975
- 66 -
Autre mode de classement.
En procédant à un autre mode de classement, voici, en commençant à la
date la plus rapprochée et en finissant par la plus éloignée, l'époque du rem-
boursement des diverses obligations des compagnies de chemins de fer.
Aunées Qnalci
Obligations de
remboursement
Roueri4%1845 1918
Rouen 5% 1849; Le Havre 5% 1845 1924
Le Havre 5% 1847; Rouen 5% 1847. . .' . 1925
Montereau à Troyes 5% 1927
Le Havre 6 % 1848 . 1936
Orléans 4%; Rouen 5% 1854 1938
Est 5 %; Est 3 % anciennes 1949
Nord3% et2,50 %;S.alinesdeDieuze. 1950
Ouest 5%, 4% et 3% ire série; Orléans 3% (séries 1 à 17) 1951
Est 5 % ; Rhône-et-Loire 3 % et 4 % 1952
Grand-Central 3 %; Bourbonnais 3 % 1953
Moselotte 3 % ; Est 3 % anciennes et nouvelles; Est 2,50 % ; Lyon à Genève 3 % ;
Paris à Lyon 3%; Lyon-Méditerranée 3% et 5%; Bessèges à Alais 3%;
Victor-Emmanuel 3 % 1954
Ardennes3% 1955
Ouest 3 % (2f série); Ouest 2,50 %; Orléans 3 % (séries A, B, C, Z, Y, X); Or-
léans 3 % (série V); Orléans 2,50 % (séries D, E, F) 1956
Midi 2,50 %et3% 1957
Grand-Central 3%; Dauphiné 3%; Dombes et Sud-Est 3% anciennes; Paris-
Lyon-Méditerranée 2,50 % 1958
Paris-Lyon-Méditerranée 3 % 1959
Picardie-Flandres 3 % 1964
Dombes et Sud-Est 3 % nouvelles 1975
Nord-Est 3% (5 premières séries) 1977
Nord-Est 3 % (6P série) 1980
Cette question de l'échéance de l'amortissement final des actions et des obli-
gations des grandes compagnies de chemins de fer mérite donc, on le voit, une
grande attention, car elle intéresse tout à la fois l'État, les porteurs de titres, les
compagnies.
XXVI
CONCLUSIONS
Vous m'excuserez, mes chers Confrères, de vous avoir retenus aussi longtemps.
J'aurais eu beaucoup encore à vous dire, car le sujet « valeur mobilière » est
véritablement inépuisable et chaque jour des observations et des enseignements
sont à recueillir.
La baisse a été générale : très accentuée pour les titres à revenu variable,
moins accentuée sur les fonds d'Etat et titres à revenu fixe, mais, en somme,
il n'est pas un portefeuille dont la valeur vénale calculée d'après les cours de
/in décembre 1913 ou de fin juillet 1914 à la veille de la guerre, ii'ait éprouvé
- 67 -
une diminution sensible. Grand nombre de valeurs n'ont plus été cotées;
d'autres, les valeurs éruptives, ont disparu de l'horizon financier. Des place-
ments ou soi-disant tels faits à l'étranger sont bien compromis ! Les impru-
dents qui, pour fuir la fiscalité française, ont envoyé leurs fonds et leurs titres à
l'étranger ne peuvent plus aujourd'hui faire rentrer leurs capitaux et leurs
titres et ne savent ce qu'ils sont devenus.
Qu'on reliée nos avis et conseils dans nos communications sur les tempêtes
et sur les beaux temps de Bourse, et ce que, notamment, nous avons dit et
répété à satiété dans nos études pratiques {Que doit-on faire de son argent)
depuis le commencement de l'année 1914 jusqu'à la veille de la guerre, et sur
la fraude fiscale, et sur les dangers d'envois de fonds et de titres à l'étranger,
les placements géographiques et sur les seules valeurs qui convenaient à
l'épargne, etc. Que de fois avons-nous répété que, sans doute avec des titres de
placement à. revenu fixe on ne fera pas fortune, mais on ne se ruinera pas, ou
bien encore : avant de faire un placement quel qu'il soit, il faut consulter sa
bourse, ses moyens, et se demander si, en cas d'événements imprévus, on per-
drait tout ou partie de ce qu'on a placé, ce qu'il vous adviendrait. En se faisant
toujours cette réflexion, répétions-nous à chaque instant, nous ne disions pas
non plus qu'on fera fortune, mais on évitera les valeurs de pacotille, éruptives,
des placements ou soi-disant tels très dangereux des titres dont on ne saurait
même pas prononcer le nom, dont on ne connaît pas ni le siège de la Société,
ni les administrateurs, ni le pays, ni la législation fiscale de ce pays, etc. Nous
nous excusions de répéter ce que nous appelions nous-même de véritables an-
tiennes. Les faits, malheureusement, car nous aurions préféré nous tromper et
ne pas avoir à constater les pertes que les imprudents ont éprouvés, ont confirmé
et confirment nos prévisions et nos avis.
« La guerre est le temps de moisson des capitalistes. »
On voit apparaître par les relevés que nous avons établis sur les principaux
titres à revenu fixe et à revenu variable, un fait indéniable : c'est que, depuis
la guerre, toutes les valeurs sont en baisse, aussi bien les valeurs françaises que
les étrangères. Il en est de même dans tous les pays, sauf sur certaines valeurs
spéciales américaines, valeurs de guerre, qui ont bénéficié d'une plus-value
importante : mais cette simple constatation démontre combien est fausse une
vieille pensée allemande bien digne de la « kultur », pensée qui était la sui-
vante :
Au commencement du dix-neuvième siècle, un économiste allemand, Fré-
déric Nebenius, mort en 1857, et qui appartenait à une famille de fonctionnaires
badois, parvint aux plus hautes charges publiques. Il fut conseiller d'État, pré-
sident du Conseil d'Etat, ministre de l'Intérieur du grand-duché de Bade. Il
eut ses heures de célébrité en écrivant des ouvrages curieux sur les finances et
le crédit. Dans un de ses livres, il avait formulé cette pensée que la Kultur ne
désavouerait pas : La guerre est le temps de moisson des capitalistes. Pensée sau-
vage et odieuse, car Nebenius ne considérait que les bénéfices et profits ma-
tériels que des détenteurs de capitaux pouvaient retirer de leurs achats et pla-
cements effectués dans des pareils moments, à des conditions de prix exception-
- 68 -
nels. Il pensait aux spéculations qui pouvaient être faites et procurer des profits,
mais il ne tenait aucun compte des deuils, des malheurs irréparables, des dou-
leurs causés par de semblables bouleversements !
C'est certainement à cette pensée allemande exprimée par Nebenius qu'est
due une croyance généralement répandue à savoir que, en temps de guerre, il
y a de « bonnes affaires à effectuer » et qu'il faut « profiter de l'occasion » pour
effectuer des placements ou acheter des titres pouvant vous enrichir ou vous
procurer tout au moins de notables bénéfices.
Il faut reconnaître que parfois les faits ont confirmé ce qu'a dit Nebenius :
des capitalistes, des spéculateurs, des négociants hardis, ont pu s'enrichir; les
uns ont pu acheter des titres à bas prix après ou pendant une guerre et les
revendre ensuite plus cher; d'autres ont pu acheter des immeubles, des mar-
chandises, etc., qui, tôt ou tard, leur ont laissé de gros bénéfices; des détenteurs
de capitaux disponibles, quand les bourses étaient ouvertes et que les transac-
tions étaient aisées, ont pu acheter, puis revendre pour racheter ensuite plus
bas, puis revendre encore avec de gi'os profils, etc. Ce sont là des exceptions.
Or, les capitalistes et porteurs de titres qui depuis le commencement de la guerre
actuelle auraient suivi la maxime de Nebenius se seraient bien trompés. Dans
tous les pays, les fonds d'États, obligations à revenu fixe ont baissé. Toutes les
valeurs à revenu variable, quelles qu'elles soient, ont baissé à de rares excep-
tions près, dans de plus ou moins grosses proportions ainsi que l'indiquent nos
relevés.
Ce que les capitalistes, rentiers, porteurs de titres doivent faire et ce sera
aujourd'hui la même conclusion que celle que je formulais devant vous dans
ma communication du 16 février 1914 :
« Être prudent, toujours prudent, savoir et pouvoir se contenter de peu. »
Viennent les tempêtes : l'homme sage et prévoyant pourra les supporter et en
attendre patiemment la fin.
Et, il faut le dire bien hautement à l'honneur de nos capitalistes, de nos
petits épargneurs français : c'est que, au milieu de la plus grande tempête qui
ait bouleversé l'océan financier, alors qu'il leur était impossible de vendre une
valeur quelle qu'elle soit, tous les marchés étant fermés, ils sont restés calmes,
résolus, confiants. Ils ont encore puisé dans leur bas de laine et la France a pu
donner ce spectacle unique, c'est que sans gros emprunt public, sans création
d'impôts nouveaux ou augmentation d'impôts anciens, elle a fait face à des
dépenses formidables. L'épargne, les gros et les petits épargneurs, ont apporté au
Trésor, plus de 10 milliards en belles et bonnes espèces comptant sous forme
de bons et d'obligations de la Défense nationale, et lui en apporteront encore au
jour prochain où le grand emprunt national qui se prépare sera annoncé et
s'effectuera par voie de souscription publique, permettant à tout le monde
de s'y intéresser, ce que tout le monde fera, car c'est un devoir national.
La guerre n'est pas terminée. Notre pays. Dieu merci, s'appuyant sur son
incomparable armée de soldats et sur cette autre fidèle armée de l'épargne,
capitalistes petits et grands, peut en envisager la durée avec tranquillité et
conserver la foi la plus absolue dans la victoire finale.
Je- souhaite, mes chers Confrères, qu'après vous avoir entretenus ce soir
- 69 -
des valeurs mobilières et la guerre, je puisse alors devant vous traiter la ques-
tion des valeurs mobilières et la paix, comme après les tempêtes de Bourse,
j'ai parlé des beaux temps de Bourse. Ayons confiance dans la victoire finale et
dans un avenir heureux et réparateur ! Les beaux jours reviendront, c'est-à-
dire la reprise des cours de leurs valeurs par nos capitalistes et porteurs de titres,
gros, moyens et petits, nos chemineaux de l'épargne, qui ont eu une si admi-
rable conduite dans les temps que nous traversons, qui ont apporté et apporte-
ront encore, sans compter, leurs épargnes et fonds disponibles dans les caisses
de l'État pour subvenir aux besoins de la défense nationale.
Alfred Neymarck.
III
VARIÉTÉS
A PROPOS DE MILLIARDS
Les vastes opérations financières occasionnées par la guerre, par exemple
les récents emprunts émis en France et en Angleterre, ont familiarisé le public
avec les milliards. Il en parle avec une désinvolture parfois réjouissante.
Vous faites-vous une idée précise de ce que c'est? Pouvez-vous vous repré-
senter mentalement un milliard de pièces de monnaie, de fourmis, de minutes,
de mètres? Pour moi, j'avoue que je n'y réussis pas.
L'esprit s'accoutume assez vite aux représentations abstraites à la condition
qu'elles figurent des objets ou des groupes de choses qu'il peut résumer mentale-
ment avec facilité. Les enfants se rendent aisément compte des quantités ou
des volumes exprimés à l'aide de deux ou trois chiffres; mais déjà pour que leur
jeune intelligence comprenne ce qui est exprimé par 4, 5 ou 6 chiffres à la suite
les uns des autres, certaines études auront été nécessaires.
Pour les adultes, à part ceux qui ont pratiqué assidûment les opérations
arithmétiques, il en est peu, même parmi les gens ayant une bonne instruction,
qui soient aptes à discerner effectivement quel ordre de grandeur — ou de peti-
tesse — signifie l'alignement de nombres formés de plus de six chiffres. Faites-en
l'épreuve autour de vous.
Il est amusant de constater le véritable effarement où sont jetées les personnes
auxquelles on fait résoudre certains problèmes, bien connus, de progi'essions
géométriques. Par exemple, la vente d'un cheval à raison d'un sou pour le
premier clou de ses fers, de deux sous pour le second, de quatre pour le troi-
sième et ainsi de suite, en doublant pour chaque clou suivant. Un cheval,
ferré normalement, a 24 clous, et l'on trouve qu'il coûterait, ainsi payé,
16.777.21.5 sous ou 838.860^75. Un autre problème : celui de la récompense
demandée au roi par l'inventeur du jeu d'échecs : un grain de blé pour le premier
carré du damier, deux grains pour le second et ainsi de suite, en doublant
l^* 8BBIE. 57* VOL. — H» 2 S
- 70 -
jusqu'à la dernière des 64 cases, chiffre cette récompense (en comptant le blé
à 20 shellings le quart, c'est-à-dire à l'unité adoptée par les lois anglaises sur
les poids et mesures) au total fabuleux de £ 4.691.249.611.844 que nul trésor
royal ne contiendra jamais.
C'est que les effets des progressions géométriques, sauf pour quelques rares
mathématiciens, se conçoivent difficilement; au bout de dix termes, l'esprit
n'aperçoit plus la signification des bataillons de chiffres que dans un brouillard
qui s'épaissit rapidement au fur et à mesure que l'on s'éloigne des nombres
usuellement pratiqués.
L'intérêt composé, qui se calcule par une série de progressions géométriques,
donne, dès que le temps pendant lequel on le suppose agir dépasse une tren-
taine d'années, des résultats qui surprennent toujours, même les gens habitués
aux opérations de banque, comme je l'ai souvent constaté.
Récemment, à propos des 15 milliards de francs souscrits pour l'emprunt
national, j'avais demandé à un jeune comptable d'un établissement de crédit
de chiffrer le montant de un franc, à 5 % l'an, dans mille années. A l'aide de
tables d'annuités, il fit le calcul en quelques instants; mais le chiffre obtenu,
pourtant exact (1.546.171.017.369.562.960.192*) négligeons les fractions, lui
sembla si anormal et si extravagant qu'il dut refaire trois fois ses opérations,
assez simples d'ailleurs, pour finir par être assuré que son résultat était bon.
Cette impuissance générale de l'esprit à saisir de prime abord la signification
de nombres très grands sera sans doute surmontée par l'accoutumance. Les peu-
plades sauvages de certaines contrées arrivent encore actuellement très diffi-
cilement à compter au delà de dix; ce n'est que peu à peu que l'intelligence
humaine a pu concevoir la représentation de quantités supérieures à mille et,
pour beaucoup de nos contemporains, la notion d'une chose se comptant par
raillions et par milliards reste confuse et presque incompréhensible.
Même pour les personnes rompues aux calculs et aux abstractions des sciences
exactes, il est parfois assez laborieux de se faire une idée nette de quantités
numériques très élevées. Je me souviens de l'étonnement de plusieurs savants
quand on leur donna, au cours de la répétition d'une des plus célèbres expé-
riences de Crookes sur la matière radiante, les chiffres sur lesquels le physicien
anglais en basait l'exphcation. On avait réalisé à l'ancienne école de médecine
l'impressionnante fusion du platine uniquement par l'afïïux de la matière
gazeuse, réduite au millionième de la densité de l'air, mais ainsi animée d'un tel
mouvement de ses molécules que ce mouvement suffît à engendrer la chaleur
nécessaire à la fusion des métaux les plus réfractaires, comme le platine.
Les témoins de cette magnifique expérience exprimaient leur admiration
et manifestaient, aussi, leur étonnement. L'un des expérimentateurs — je
crois que c'était G. Pouchet — déclara que Crookes avait pris soin d'expliquer
d'avance que cet étonnement se manifesterait et qu'il viendrait de ce que les
spectateurs raisonneraient en partant d'une idée fausse, celle qui consiste à
croire que la pression d'un millionième d'atmosphère est voisine du vide. Cette
idée fausse découlait de cette autre erreur dont tout le monde est généralement
persuadé : qu'un nombre divisé par un million doit nécessairement ne donner
qu'un quotient très faible. Et, en effet, beaucoup parmi les assistants reconnu-
rent qu'ils avaient eu dans la pensée que le poids de l'atmosphère étant égal
- 71 -
à celui d'une colonne mercurielle barométrique de 76 centimètres, le millionième
de cette représentation de l'atmosphère devait être infime. Mais Crookes posait
en fait, d'après les meilleures autorités, que le ballon de verre de 13 centimètres
de diamètre qui servait à sa démonstration, pouvait contenir plus de 1 septillion
(1.000.000.000.000.000.000.000.000) de molécules gazeuses. Il observait qu'en
faisant le vide dans ce ballon à un millionième d'atmosphère, il contenait
encore le nombre énorme de un quintillion (1.000.000.000.000.000.000) de mo-
lécules gazeuses.
Entre ces deux grandeurs d'un septillion et d'un quintilhon l'esprit — même
celui d'un savant formé par la discipline des sciences exactes — ne perçoit
plus guère de différence; la seconde n'est pourtant que la millionième partie
de la première. Cette difficulté d'entendement est si réelle que les yeux même
ont besoin d'une certaine accoutumance pour voir rapidement la différence
de tels alignements de chiffres au tableau ou sur le papier.
Si, comme je le crois, les sciences naturelles utilisent dans un avenir prochain,
de plus en plus la statistique des recherches et des expériences comme moyen de
contrôle de travaux particulièrement délicats, les statisticiens devront s'ha-
bituer à ces vertigineux défilés de chiffres.
Afin de donner un aperçu de l'immensité des nombres où l'on arrive quand on
étudie, comme Crookes, comme nos modernes électriciens ou comme Curie, les
propriétés dernières de la matière, revenons à l'expérience dont nous venons
de parler. Crookes supposait qu'il avait fait, à son ballon de verre de 13 centi-
mètres de diamètre, une ouverture au moyen d'une étincelle électrique perçant
le verre, et que l'air se précipitait, par ce minuscule pertuis, sous forme de
molécules d'une telle petitesse qu'il en entrait cent millions par seconde dans
le ballon.
Et, demandait-il, combien de temps faudra-t-il, dans ces conditions suppo-
sées, pour emplir son ballon de 13 centimètres de diamètre? Sera-ce deux heures,
un jour, un mois, une année, un siècle? Il avait calculé qu'il faudrait une période
égale à... quatre cent huit millions cinq cent un mille sept cent trente et une
années. Je laisse aux amateurs incrédules le soin de refaire le calcul dont le
résultat est pour surprendre, mais absolument exact.
Et que direz-vous si j'ajoute que le septillion de molécules était rentré, par
l'orifice imperceptible fait par l'étincelle au ballon, en moins d'une heure;
c'est-à-dire à raison d'environ trois cents quintillions par seconde.
On voit que les opérations employant d'aussi prodigieux alignements de
chiffres ne constituent pas seulement d'amusantes curiosités arithmétiques
mais sont, maintenant, d'une application courante dans certaines branches de
la science où l'on ne songeait pas autrefois qu'elles dussent être utilisées.
Gaston Gadoux.
*
* *
NOTE SUR LA PETITE MONNAIE
La question de la petite monnaie donne naissance à de nombreux articles de iour-
nalistes en quête d'articles affolants...; on critique l'un, on critique l'autre, on
accuse celui-ci de remplir ses coffres... à tort et à travers.
- 72 -
La raréfaction constatée n'est pas générale; elle se manifeste surtout à Paris et
dans les grands centres; on en connaît les causes diverses : localisation dans la
zone du front; envois aux expéditions lointaines (Maroc, Dardanelles, Serbie), car
nos poilus blancs ou noirs trouvent avec raison que « le billet se vole... ou s'envole »;
envoi de quelque 800.000 francs de billon de Paris en province par le Métro au début
de la guerre : thésaurisation puérile de pessimistes... et enfin inertie de la Monnaie à
laquelle la question a été soumise en septembre 1914...
Mais il y a deux autres causes que seul un payeur de profession peut signaler :
Le gaspillage de monnaie, parce qu'on paie en utilisant mal à propos telle ou telle
catégorie de pièces ;
La mauvaise répartition des émissions par catégorie de pièces résultant d'erre-
ments anciens et des modifications plus ou moins heureuses apportées à la valeur
des pièces.
Il est facile de se rendre compte de la répartition la plus probable de la. nature de
monnaie nécessaire à effectuer des paiements, en raisonnant comme il suit :
Les paiements possibles inférieurs à 5 francs sont au nombre de 99, variant de
5 centimes à 4^95, et tous sont également probables quand il s'agit d'un grand
nombre de paiements — ce qui peut arriver par exemple pour la solde d'un nombreux
personnel.
En payant bien, c'est-âi-dire en utilisant rationnellement les pièces, on trouve
facilement que le paiement de toutes les sommes de 5 centimes à 4* 95, soit 247' 50
en tout, exigerait :
Francs
80 pièces de 2 francs 160 »
40 — 1 franc 40 »
50 — 0' 50 25 »
50 — Of 25 12 50
80 — OMO 8 »
40 — 0'05 2 »
Total 247,50
Soit, approximativement, une répartition pour 100 :
Pièces de 2 francs 65
— 1 franc 16
— 0^50 5
— 0*25 10
— OMO 3
— 0f05 1
L'expérienc(; vérifie que les payeurs d'une grande compagnie de chemins de fer,
payant 86.000 employés environ, ont trouvé empiriquement cette répartition théo-
rique et leurs demandes aux caissiers généraux ne s'éloignent pas beaucoup des pour-
centages ci-dessus, sauf la répartition des 2 francs et 1 franc; on prend naturelle-
ment plus de pièces de 1 franc, mais cela ne présente aucun inconvénient, au contraire,
comme on va le voir.
Quelle est, en effet, la répartition effective des pièces de monnaie en France? Il
est très difficile de répondre exactement, parce que nous ne savons pas ce que pos-
sède notre pays; on ne connaît que ce qui a été frappé et le montant des retraits
effectués; les 525 millions de monnaie divisionnaire et de billon qui pourraient
circuler se décomposent comme suit :
75>
Milhont de frano*
Pièces de 2 francs 124
— 1 franc 107
— 0'50 107
— 0^25 10
— O'IO 42
— 0^05 35
Total 525
soif, approximativement :
Pour 100
Pièces de 2 francs 24
— 1 franc 39
— Of 50 20
— 0^25 2
— 0' 10 . : 8
— 0^05 7
Total 100
La répartition vraie de la monnaie qui circule doit être un peu différente de celle
indiquée ci-dessus, car la France a cédé beaucoup de monnaie à ses colonies et notam-
ment du billon.
En 'tout cas, on paie d'autant plus facilement qu'on possède un plus grand nombre
de petites coupures.
Or, il suffît d'examiner le tableau de la répartition normale de la paie pour voir
que l'on possède beaucoup plus de petites coupures qu'il n'est nécessaire, sauf pour
la pièce de 25 centimes qui n'est d'ailleurs pas légale; mais si l'on considère l'ensemble
du billon, il faudrait prendre 9 % du billon sur l'ensemble tandis qu'on paraît en
posséder 17 %. Je répète que ce dernier pour 100 est certainement supérieur à la
réalité, mais je ne crois pas qu'il se soit effectivement abaissé à 9 %.
Gomjne conclusion, je dirai volontiers que la monnaie que nous possédons pour-
rait être mieux utilisée si l'on apprenait à payer correctement, mais, comme dans
toute chose..., il faut de la réflexion et un peu d'attention.
Il faut surtout se garder de répéter ce que j'ai entendu dire : les entreprises de
transport doivent rendre immédiatement la monnaie qu'elles reçoivent. Avec quoi
paieraient-elles leur personnel? La circulation normale est la suivante : public,
caisse, personnel, fournisseurs, public, etc. ; et ce n'est pas avec des lois qu'on décré-
tera une modification à cette circulation. Le seul remède se trouve dans la frappe,
mais on ne peut pas demander à la Monnaie plus qu'elle ne fait" actuellement; on
peut seulement lui reprocher de n'avoir pas commencé plus tôt quand on lui a signalé
le danger en septembre 1914.
A. B.
- 74 -
IV
BIBLIOGRAPHIE
La France aux États-Unis. Gomment concurrencer le commerce allemand, par
Louis ROUQUETTE (1).
Ce très substantiel opuscule se distingue par son caractère complet et précis, par
la méthode scientifique aussi qu'a suivie l'auteur, en ne puisant qu'aux sources les
plus sûres les informations qui servent de base à sa thèse au lieu de se contenter
d'une vague documentation de seconde main.
S'appuyant sur les excellentes statistiques du commerce extérieur publiées par
les États-Unis, dont il a d'ailleurs soin de signaler les inévitables lacunes, il rappelle
quelles ont été la part de la France et de l'Allemagne dans les échanges anglo-amé-
ricains. Il montre les progrès accomplis par notre commerce dans cette voie, et, à
ce sujet, analyse avec une rare précision la situation des divers districts consulaires.
Ses recherches faites dans un esprit pratique l'amènent à conclure, comme M. Jean
Périer l'avait fait pour l'Angleterre, que notre production, étant en général complé-
mentaire de celle des États-Unis, pourrait mieux que toute autre y étendre ses débou-
chés. Elle pourrait aussi se substituer à la production allemande, pour certaines
branches commerciales, que M. Rouquette détermine avec un esprit critique fort
judicieux. Dans le résumé qu'il présente des moyens propres à stimuler nos expor-
tations dans ce sens, il évite heureusement certaines exagérations naïves devenues
banales sous la plume de nombreux publicistes.
Eug. B. DUBERN.
La Question du crédit à l'exportation, par X... (2).
L'auteur de cette brochure paraît s'être efforcé particulièrement, et non sans succès,
de faire un exposé purement analytique et impartial sur une question qui présente
un intérêt national considérable et qui a été souvent traitée avec trop de parti pris
et trop peu de précision.
Après avoir rappelé l'état actuel de notre commerce extérieur et l'avoir com-
paré à celui des principales nations commerçantes, il décrit les formes que revêt chez
nous le crédit à l'exportation, puis les moyens dont disposent à cet égard nos concur-
rents étrangers (l'énumération en est détaillée et claire, appuyée sur deux tableaux
comparatifs des sommes figurant aux principaux comptes des banques coloniales
et des banques d'outre-mer anglaises, d'une part, des banques allemandes d'outre-mer,
d'autre part).
Puis vient un résumé critique des p.ijets destinés à développer en France le crédit
à l'exportation, soit avec l'appui de l'État, soit avec celui de tels ou tels établisse-
ments financiers existant déjà, soit sous une forme mutuelle et corporative. C'est
vers cette dernière combinaison que paraissent aller les préférences de l'auteur qui
cite à ce sujet l'exemple, à vrai dire encore très limité, du comptoir d'exportation
créé à Roubaix en 1910. Il fait remarquer avec raison que les groupements qui
viendraient à se former en vue de développer le crédit à l'exportation, ne sauraient
prétendre dès le début à faire des prêts en vue d'opérations commerciales réalisées
dans le monde entier : une certaine spécialisation s'imposerait. Dans cet ordre d'idées,
la brochure contient un tableau curieux, quoique comportant certaines réserves,
des pays acheteurs de produits français, ces pays étant rangés selon le degré de facilité
qu'ils présentent pour les opérations financières.
(1) Une brochure petit in-8 de 59 pages. Berger-Levrault, éditeurs, 1915. Prix : l'25.
(2) Un volume in-12 de 83 pages. Girard et E. Brière, éditeurs, 1915. Prix : 2 fr. 50.
- 75 -
Si quelques affirmations de cet intéressant opuscule nous paraissent Un peu abso-
lues, il réalise cependant un progrès dans l'étude du crédit à l'exportation. Nous
espérons que l'auteur en complétera les données dans un travail ultérieur, où il
pourrait introduire dans ces pages, à défaut de bibliographie détaillée, quelques réfé-
rences aux sources consultées.
Eug. B. DUBERN.
♦ *
Les Effets du blocus économique de l'Allemagne, par André E. Sayous (1).
Le sous-titre de cette brochure en indique bien le sujet : « l'organisation du com-
merce et de l'industrie allemands pendant la guerre ».
L'auteur énumère et analyse les mesures au moyen desquelles l'autorité allemande,
trompée dans ses prévisions par la longueur de la guerre et l'organisation progressive
des croisières, a voulu parer, souvent d'une manière préventive, à l'insuffisance des
ressources occasionnée par l'arrêt ou le ralentissement des importations. Ces mesures
dont on trouvera le détail et parfois le texte même dans le livre, sont devenues de
plus en plus rigoureuses èk mesure que la situation de l'ennemi empirait, ou se sont
légèrement atténuées quand les réquisitions en territoire envahi, les récoltes et l'im-
portation par les pays neutres ont fait entrevoir une amélioration possible : d'abord
fixation des prix de détail, puis des prix de gros, déclaration et réquisition des pro-
duits indigènes, puis des articles importés, rationnement, limitation des emplois de
stocks aux usages militaires. Elles visent èk un double but : économiser et bien répartir
les approvisionnements; en procurer de nouveaux. A ces deux points de vue l'auteur
étudie les efforts accomplis par les autorités allemandes : 1° dans le domaine de l'ali-
mentation; 2*^ dans celui de l'industrie.
Au sujet des denrées alimentaires les textes et documents sont assez nombreux
et explicites; concernant la production industrielle et la répartition des matières
premières, des recherches longues et délicates ont été nécessaires; encore ne pou-
vaient-elles être poussées aussi loin qu'elles l'eussent été par des techniciens spécialistes.
En revanche, M. Sayous a fait une large place à l'étude fort intéressante des organes
administratifs et privés qui dirigent la lutte économique.
Les conclusions de M. A. E. Sayous tendent à mettre en relief l'influence de plus
en plus déprimante pour l'Allemagne de l'encerclement économique. Elle a maintes
fois cherché à rompre celui-ci, elle y est presque parvenue, mais toujom-s un nouvel
échec l'a obligée à se tourner vers de nouveaux remèdes. Sans doute la multiplicité
des règlements, des inventions et des substitutions de succédanés ne prouvent pas
la pénurie : ce sont, dans beaucoup de cas, des précautions que suggère la prudence
plutôt que la nécessité. Mais certains résultats de ce qu'on nomme avec plus ou
moins d'exactitude le « blocus » économique paraissent incontestables.- Voici du
moins ce que M. A. E. Sayous a cru pouvoir retenir comme vérifié par informations
et comparaisons. Malgré des récoltes relativement bonnes la population reste ration-
née; la nourriture des animaux semble assez difficile à assurer. Il est vrai que la
quantité de pommes de terre, sans constituer le succès agricole proclamé par le Gou-
vernement, atténue la pauvreté en céréales et en fourrages, mais on peut se demander
si elle suffira pour rendre normale la production du lait et de ses dérivés. La même
cause jointe aux suppressions de bestiaux et aux mesures restrictives de l'importation
raréfient les corps gras dont le besoin est particulièrement sensible en temps de
guerre... Plusieurs des industries ennemies se trouvent dans un état de -gêne que de
récentes restrictions des Alliés rendront rapidement croissant. Au point de vue
commercial le gros des exportations allemandes est arrêté; les relations d'affaires
qui enrichissaient l'Allemagne se sont déplacées au profit des Alliés et surtout des
neutres. Quant aux importations, la partie qui en subsiste coûte fort cher à l'ennemi :
« il a obtenu peu de choses pour beaucoup d'argent .» Avec raison M. A. E. Sayous
(1 ) Payot, éditeur.
- 76 -
signale dans son avant-propos la perturbation (dont tous les peuples risquent de
subir le contre-coup, à moins de précautions prises à temps) qui se produira quand,
après la conclusion de la paix, l'Allemagne réapparaîtra sur les marchés mondiaux
pour reconstituer ses stocks. Dès à présent elle commence à intervenir en concluant
des achats « livrables après les hostilités », elle raréfie ainsi les marchandises dis-
ponibles pour les Alliés et en fait monter les prix à notre détriment. On pourrait
ajouter que, dans l'ordre financier, où la marche des événements est plus lente et
dont M. A. E. Sayous parle à peine, l'ennemi a suivi la même politique avec plus de
facilité, en raison de la fluidité des capitaux par ses ventes de titres et ses emprunts :
il cherche à aspirer les capitaux des marchés neutres et même une partie des sommes
que nous envoyons sur ces marchés lorsque nous réglons nos achats par voie
de remises ou de traites à courte échéance. Il n'a d'ailleurs pu mener à bien
aucune grande opération sur ce terrain. Ce que les Alliés doivent désirer le plus dans
le domaine économique, c'est isoler de toutes façons leurs adversaires et les priver
de matières premières. A cet égard le succès dépendra surtout de l'énergie et de la
perspicacité avec lesquelles on empêchera les neutres d'approvisionner l'Europe Cen-
trale. Quoique la politique restrictive contre l'ennemi n'ait pu devenir effective qu'à
une date assez récente, elle commence à porter ses fruits. « Quant à nous, écrit M. A, E.
Sayous, nous croyons que, si le conflit se prolonge, l'heure viendra où l'Allemagne —
et à, plus forte raison l'Autriche- Hongrie, — se trouveront en face des plus graves
difficultés. La restriction des approvisionnements qui est apparue d'abord comme une
question militaire est bien et restera une question surtout militaire, cependant le
«blocus » de l'Allemagne par les Alliés sera d'une très réelle utilité économique, car il
permettra d'atteindre l'Allemagne dans ses forces vives et de lui porter des coups
qu'elle ressentira même après la guerre... Seul un concours merveilleux de circons-
tances peut améliorer ses perspectives d'avenir... Il est vrai que, d'une façon générale,
les restrictions économiques ne paraissent pas encore avoir atteint très directement
l'armée ennemie; cependant, lorsque les Allemands parlent des magnifiques décou-
vertes dont la guerre a précisé l'application ou qu'elle a fait éclore, ils exagèrent : ce
n'a été le cas que pour un nombre très limité de produits. Ils ont dû surtout vivre
d'économies, réduire leur consommation, utiliser de vieux matériaux ou des matières
inférieures, dont les stocks eux-mêmes finiront par s'épuiser. » Sans doute l'expédition
balkanique fournira à l'ennemi des ressources indéniables quoiqu'elles ne soient pas
toutes d'un emploi facile ni immédiat; mais il ne faut pas oublier que les frais de
cette opération sont énormes et que le retard industriel et financier de l'Autriche
et de la Turquie pèsent lourdement sur l'Allemagne.
M. A. E. Sayous ne pouvait, vu la date à laquelle s'est achevée son étude, déve-
lopper ce côté important de la question; voici toutefois qu'elle était, au sujet du
pétrole, son appréciation provisoire : « Un des effets les plus notables du blocus a
été d'empêcher l'Allemagne de recevoir du pétrole d'Amérique et de Russie; de Rou-
manie, il n'en est venu que d'une façon intermittente. Aussi, lorsque les Russes ont
occupé la Galicie la situation est-elle devenue grave; elle l'est demeurée, après le
recul de nos Alliés, parce que ce pays a à fournir tout d'abord les quantités néces-
saires à l'Autriche et à la Hongrie. On estime à 20 % de sa consommation ordinaire
le pétrole qui peut être vendu au public allemand. » On peut se demander ce que
seront les résultats pratiques de faits plus récents pour l'ensemble des ressources
nécessaires à l'Allemagne. D'une façon générale, le livre de M. A. E. Sayous conduit
à considérer comme vraiment efficace, malgré ses points faibles, la pression écono-
mique exercée par les Alliés. ^^^ ^ Dubern.
Le Gérant: R. STEINHEIL
NANCY-PARIS, IMPRIMERIE UEROEK-LKVRAULT — FÉVRIER I916
ACHEVÉ d'imprimer APRÈS LE 4= BOMBARDEMENT DE NANCY
JOURNAL
SOCIETE DE STATISTIQUE DE PARIS
N° 3. — MARS 1916
I
PROCÈS-YERBAL DE LA SÉANCE DU 16 FÉVRIER 1916
ecDTs/Li^j^x:R:Ei
OUVERTURE DE LA SEANCE PAR M. MALZAC, PRESIDENT.— PROCES-VERBAL DE LA SEANCE DU 19 JAN-
VIER 1916.
NOMINATIONS ET PRÉSENTATION DE MEMBRES TITULAIRES.
COMMUNICATION DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ET PRÉSENTATION D'OUVRAGES.
COMMUNICATION DE M. D'EICHTHAL SUR L'ÉCONOMIE DES BILLETS DE BANQUE fNOTE SUR UNE TEN-
TATIVE FAITE PAR UNE COMPAGNIE DE CHEMINS DE FER POUR EN RESTREINDRE LE TRANSPORT
ET L'EMPLOI;.
COMMUNICATION DE M. YVES GUYOT SUR LE COMMERCE INTERNATIONAL PENDANT LA GUERRE.
OUVERTURE DE LA SÉANCE; — PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE DU 19 JANVIER 1916
La séance est ouverte à 17^^30, sous la présidence d? M. M.\lzac, président.
Le Journal de la Société n'ayant pu paraître en temps opportun à cause des
difficultés de transport, l'adoption du procès-verbal de la séance du 19 janvier
1916 est renvoyée à la prochaine séance.
NOMINATIONS ET PRÉSENTATION DE MEMBRES TITULAIRES
MM. Magnan et iXoetzlin, présentés dans la dernière séance, sont nommés
membres titulaires.
M. le Président annonce qu'il a reçu les demandes de candidatures suivantes,
à titre de membres titulaires :
M. Archdeacon (Ernest), vice-président de la Ligue aérienne, présenté
par MM. Bertillo>' et E. Berr;-
M. AuTERBE, actuaire de 1' u Union-Vie », présenté par MM. Barriol et
Brochu;
M. BuRAT (Jules), courtier de change, présenté par MM. Brizon et Barriol;
M. Grandjean (Georges), directeur de la Banque française pour le com-
merce et l'industrie, présenté par MM. Malzac et Raphaël-Georges Lévy;
irc 8ÉB1K. 57" VOL. — N« 3 6
- 78 -
M. Simon (Charles-Abel), courtier de change, présenté par MM. Cressaty et
Barriol;
M. SiREY (Charles), secrétaire de la rédaction de la Reçue du Jouet, avocat
à la Cour d'appel, présenté par M^^ A'fi'd Neymarck et Barriol.
Conformément à l'usage, il sera statué sur ces demandes dans la séance de
mars.
COMMUNICATION DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ET PRÉSENTATION D'OUVRAGES
Le Secrétaire général annonce que M. Matrat, notre trésorier, n'a pas pu
arrêter les écritures de 1915 et que, contrairement à l'article 24 du règlement
intérieur, les rapports sur la situation de la Société ne seront présentés qu'en
mars.
Le Secrétaire général indique qu'il a reçu les livres suivants :
Chili. — Bureau central de Statistique : Annuaire statistique de la Répu-
blique du Chili, vol. I, Démographie (année 1914), et vol. IX, l^e partie,
Mouvement maritime (année 1914).
Espagne. — Annuaire statistique de la ville de Barcelone (année 1913).
France. — Ministère de l'Instruction publique et des Beaux-Arts : Bulletin
du Comité des Travaux historiques et scientifiques (année 1911); Mémoire
sur le paupérisme (par A. de Tocqueville, publié sur un rapport de M. A. Ney-
marck, extrait du Bulletin du Comité de 1911).
Italie. — Annuaire statistique italien; Annuaire statistique de la province
de Florence.
Suède. — Collège du Commerce. Direction générale des chemins de fer :
Mouvements des chemins de fer de l'État en 1913. — Département des Fi-
nances : Statistique postale pour 1914. — Inspection des Assurances : Les
Assurances sur la Vie et les Accidents en 1913.
Il attire tout particulièrement l'attention de la Société sur un livre de
M. Pupin : La Richesse de la France devant la Guerre, qui pourrait faire l'objet
non seulement d'un compte rendu, mais d'une intéressante discussion.
COMMUNICATION DE M. D'EICHTHAL SUR L'ÉCONOMIE DES BILLETS DE BANQUE
(NOTE SUR UNE TENTATIVE FAITE PAR UNE COMPAGNIE DE CHEMINS DE FER
POUR EN RESTREINDRE LE TRANSPORT ET L'EMPLOI)
La parole est donnée à M. d'Eichthal pour développer sa communication
sur l'économie des billets de banque. M. d'Eichthal s'exprime en ces termes :
« On a souvent observé combien nous étions en France en retard sur d'autres
pays, Angleterre, États-Unis, Allemagne, pour l'usage des moyens de paiement
qui n'exigent pas une remise immédiate de numéraire ou de billets. L'importance
relative de notre circulation fiduciaire comparée à celle d'autres Etats confirme
actuellement cette observation, qui n'est pas sans entraîner de graves consé-
quences éventuelles financières et économiques, sur lesquelles il n'est pas utile
d'insister : mais il peut être utile de chercher, dans la mesure du possible, à
remédier au mal en essayant d'amener au moins une partie du public à des
habitudes s'accordant mieux avec la nécessité de ne pas étendre outre mesure
la circulation de nos billets de banque. Les administrations publiques et privées
n'ont peut-être pas fait encore dans cette voie toutes les tentatives qui pour-
raient être essayées : un exemple restr^^int que je voudrais citer et sur lequel
j'ai des données précises pourrait les encourager en leur fournissant la preuve
d'un succès rapide obtenu par une simple propagande faite auprès d'une clien-
tèle représentant assez bien la moyenne qui défile habituellement devant des
guichets pour toucher des sommes très variables comme importance, car il
s'agit ici d'une compagnie de chemins de fer et de ses paiements à ses fournis-
seurs, entrepreneurs, obligataires el actionnaires.
- 79 -
« La Compagnie du Midi — c'est à elle que j'emprunte un document dont la
précision fait tout l'intérêt — a depuis plusieurs années pris l'habitude d'effec-
tuer à Paris la presque totalité de ses paiements de fournisseurs et de coupons :
pour cela elle concentre à la Banque, par l'intermédiaire des succursales de
ceile-ci, toutes ses recettes, sauf ce qui reste ou ce qui est envoyé dans les gares
pour le paiement du personnel, et de:^ factures au-dessous de 500 francs.
H Jusqu'il y a quatre ans, les mandats de virement n'étaient donnés à Paris
qu'aux fournisseurs importants ou qu'aux sociétés de crédit ou banquiers pré-
sentant des coupons pour des sommes considérables et ayant des comptes à
la Banque. On peut dire qu'au-dessous de 3.000 francs chaque créancier, four-
nisseur, obligataire ou aciionnaiio, était payé en espèces.
(c On a tout d'abord étendu le plus possible l'usage des mandats rouges pour
les règlements qui concernent les titulaires de « Comptes à la Banque », même
quand il s'agit de sommes peu élevées.
« De ce chef, l'importance des paiements en espèces s'est déjà trouvée réduite.
« Depuis fin 191 f, la Compagnie a essayé d'aller plus loin : non seulement elle
paie, par la remise d'un mandat rouge, tous les titulaires de « Comptes à la
« Banque », mais elle propose aussi ce mode de paiement à ceux des créanciers
qui possèdent un compte courant, soit dans un établissement de crédit, soit
dans une banque quelconque ayant elle-même un « Compte à la Banque ». Le
virement remis est libellé au nom de l'établissement de crédit ou de la banque
qui sont désignés, et la partie prenante n'a plus qu"à le verser audit établisse-
ment de crédit ou à ladite banque pour faire créditer immédiatement son propre
compte courant ; le reçu de ce versement n'est pas soumis au droit de timbre,
qui serait exigible s'il s'agissait d'un versement en espèces. Un chèque barré
pourrait facilement être substitué au virement si le créancier le demandait.
« Les résultats obtenus ont dépassé l'attente.
« Dès les premiers mois, la proportion des paiements en espèces a sensible-
ment diminué et la conséquence a été qu'on a pu laisser en plus grande quantité
à la Banque les billets et le numéraire que lui avaient apportés les gares.
« Ainsi, du 16 décembre 1911 au 15 janvier 1912, sur un total de paiements
de 17.079.798 francs, il a été délivré 724 virements pour 14.936.710 francs, et
2.143.088 francs seulement ont été payés en espèces, alors qu'auparavant, sauf
les gros paiements, presque tout était soldé en espèces.
« Depuis, la Compagnie se plaçant à un point de vue nouveau, par suite de
l'accroissement exceptiennel du chiffre des billets émis par la Banque depuis
a guerre, a, per un redoublement d'insistance auprès des fournisseurs et
entrepreneurs et même auprès de la clientèle d'actionnaires et obligataires,
réussi à convaincre un grand nombre de ceux qui n'avaient pas, jusqu'à
présent, accepté le mandai rouge. Dans les dernières semaines, la proportion
des virements pour les fournisseurs était de 97 % sur le total des sommes
dues, et de 69 "„ pour les coupons. Pour les sommes inférieures à 3.000 francs
([ui sont les plus dilficiles à faire ï ccepter en mandats, ceux-ci ont été élans,
la proportion (pour 30 journées) de 394 (pour 456.600 francs) contre 0 il y a
quelques années.
« Ces chiffres ne sont pas bien importants par eux-mêmes, mais méritent ce-
pendant d'être cités à l'appui de la pensée ej[ue l'adoption, par un certain nombre
d'autics établissements, des mesures expérimentées avec succès dans une
seule compagnie de chemins de fer, dans un temps relativement court, aurait
une heureuse influence sur le dégagement de la circulation. Et si, comme cela
est éminemment désirable, les cai. .ses publiques étaient invitées à entrer dans
la même voie, les conséquences pourraient en être importantes au point de vue
de l'économie des billets de banque.
« La Compagnie dont je cite l'exemple n'a d'ailleurs éprouvé absolument
aucun mécompte dans la mise en pratique des simplifications en question.
Il y a bien une objection possible, pour ce qui touche le règlement des sommes
- 80 -
de faible importance : l'emploi d'un virement coûte 10 centimes de timbre. Mais,
si le ministre des Finances estimait que l'adoption des mesures préconisées pré-
senterait un réel intérêt, il n'hésiterait peut-être pas à provoquer la suppression
du timbre de 10 centimes pour les mandats rouges d'un montant inférieur à
3.000 ou à 5.000 francs, quitte à augmenter, s'il était nécessaire, le timbre des
virements supérieurs à 100.000 francs par exemple. Il convient de remarquer,
d'ailleurs, que l'usage des virements est, jusqu'à présent, demeuré exceptionnel
pour les petits paiements, et le fait que leur emploi prendrait une certaine
extension, favorisée par la dispense du timbie, n'entraînerait, par rapport à la
situation antérieure, qu'une perte de recettes relativement insignifiante pour le
Trésor.
« A côté de l'intérêt public, ajoutons que les établissements qui consenti-
raient à faire un effort pour développer l'utilisation des virements et restreindre
l'emploi des espèces, bénéficieraient, par là même, de précieux avantages qui
ont été appréciés dans le cas cité : diminution de risques de pertes ou de vols,
accroissement de sécurité dans les paiements, plus grande facilité de retrouver
et de réparer les erreurs, atténuation de la gêne occasionnée par la pénurie
de petite monnaie. »
M. le Président remercie très vivement M. d'Eichthal et dit que sa com-
munication présente un intérêt pratique considérable et qu'il est à souhaiter
de voir développer l'usage des virements dans la plus large mesure possible.
COMMUNICATION DE M. YVES GUYOT SUR LE COMMERCE INTERNATIONAL PENDANT
LA GUERRE
La parole est donnée à M. Yves Guyot pour développer sa communication
sur le Commerce international pendant la guerre.
M. Yves Guyot s'exprime en ces termes :
« On est loin d'avoir les chiffres du commerce de toutes les nations en 1915;
l'Empire allemand et l'Autriche-Hongrie sont remarquablement discrets à cet
égard. Il est inutile de dire que la guerre a apporté de profondes perturbations
dans les relations commerciales internationales. En 1915, les importations en
France représentent 8 milliards 74 millions, tandis qu'en 1913, dernière année
normale, elles montaient à 8 milliards 421 millions. Il y a cependant augmenta-
tion sur les objets d'alimentation et les objets fabriqués : mais il y a une dimi-
nution de 1 milliard 792 millions sur les matières nécessaires à l'industrie. Ces
importations représentent pour la plus gi-ande partie des objets nécessaires
aux besoins de l'armée. L'armée consomme pour détruire; elle ne rend rien
comme produits en échange de ce qu'elle absorbe; de là, la faiblesse de nos
exportations tombées de 6 milliards 880 millions à 3 milliards 22 millions.
« Les importations de Russie en France sont tombées de 458.500.000 francs
en 1913 à 50.700.000 francs en 1915; celles de la Grande-Bretagne ont aug-
menté de 1 milliard 115 millions, elles ont atteint 1 milliard 914 millions; celles
de l'Italie de 240.500.000 se sont élevées à 335 millions. Celles de deux pays
neutres se^ sont beaucoup élevées, l'Espagne de 281.600.000 francs à 461 mil-
lions; les Etats-Unis de 895 millions à 2 milliards 273 millions de francs.
« Notre exportation a baissé partout : dans la Grande-Bretagne, elle est
tombée de 1 milliard 453 millions à 862 millions de francs; en Italie, de 306 mil-
lions à 265 millions ; en Russie, de 83 à 50 millions ; en Suisse, de 400 à 254 mil-
lions; en Espagne, de 151 à 108; aux États-Unis, de 422 à 380, etc.
« Nous n'avons eu d'augmentation sérieuse que pour un seul objet.
« L'exportation des tissus de soie et do bourre de soie, y compris les colis
postaux, s'est élevée à 336.600.000 francs. Ce chiffre n'a été dépassé qu'en 1907,
où les exportations représentèrent 396.600.000 francs et en 1915 où elles attei-
gnirent 429 milHons de francs. Il dépasse de beaucoup la moyenne décennale.
« En quantité notre exportation aux États-Unis a passé de 3.827 quintaux en
- 81 -
1913 à 4.440 quintaux en 1914 et à 5.591 en 1915 pour les tissus de soie pure;
de 1.541 à 1.864 et à 2.471 quintaux pour les tissus de soie mélangés; de 173 quin-
taux à 407 pour les tulles de soie, etc. Il est évident que l'interception du com-
merce de l'Allemagne a été un facteur de cette augmentation de nos exporta-
tions aux États-Unis.
« Nos chiffres de douane comprennent les importations par l'État, tandis qu'elles
ne se trouvent pas dans les chiffres de la douane britannique. De là résulte le
gros chiffre de l'importation des viandes : 411.259.000 en 1915, tandis que le
chiffre de 1913 n'était que de 38.680.000 et celui de 1914 de 62.146.000 francs.
« Même pendant la guerre, aucun pays ne peut se suffire à lui-même ; il a besoin
d'acheter au dehors, et d'autres ont besoin d'acheter certains de ses produits.
« Ces chiffres de valeurs ne nous indiquent pas exactement l'augmentation
ou la diminution exacte des quantités qu'ils représentent. D'après VIndex
niimber de The Economiste la moyenne des prix de 45 objets en 1901-1905 étant
prise comme chiffre de base 100, les prix se sont élevés en 1915 à 165 et en jan-
vier 1916 à 174,5. Ils reviennent aux chiffres de 1850 et 1864.
« Dans la Grande-Bretagne, les importations de marchandises donnent en
1913, £ 875 milhons et en 1915, 854; les exportations, 529 et 606.
« La différence est de £ 241 millions, et comme les Anglais n'ont pas de capi-
taux à placer au dehors, il en résulte un embarras pour payer cet excédent d'im-
portations.
« Les protectionnistes ne manqueront pas d'en conclure que cela prouve
qu'ils n'ont pas tort de parler de la balance du commerce qui est favorable
si les exportations sont en excédent et défavorable si ce sont les importations ;
mais en état de guerre l'État achète et consomme, et ses consommations ne se
traduisent par aucune augmentation dans la production. En temps normal, il
en est autrement. Chaque année, les adultes produisent plus qu'ils ne consom-
ment. Au bout de l'année, ils ont augmenté leurs ressources le capital de la na-
tion. En temps de guerre, ils consomment plus qu'ils ne produisent, et au bout
de l'année, au lieu qu'il y ait augmentation d'actif, il y a diminution.
« Les interventions de l'État apportent de profondes perturbations dans le
commerce; un Order in Council du 3 août interdit l'exportation de la houille,
même dans les pays alliés. L'émotion fut profonde. Quelques jours après, le
Foreign Office faisait savoir que cette interdiction d'exportation n'avait pour
but que d'obliger chaque exportateur à se munir de licences spéciales d'expor-
tation pour les pays autres que les possessions britanniques.
« D'un autre côté, le Gouvernement anglais voudrait, dans le but d'alléger le
fret et dans l'intérêt du change, restreindre les importations. Il vient de nommer
une commission pour restreindre celle du papier et de la pâte à papier. Est-ce
une réponse à la Suède qui vient d'interdire l'exportation de la pâte du papier?
M. S.-C. Phihpps, dans une communication à ia Royal Society of Arts, a dé-
claré que, d'ici peu de temps, le Canada serait en état de fournir de la pâte à
papier pour le monde entier, et il exprime l'espoir que celle qui en provien-
dra serait exempte de toute restriction. INIais le papier ne sert pas seulement
aux journaux et aux livres; il sert aussi à la fabrication des obus. Cette restric-
tion portant sur l'importation de la pâte à papier n'est pas heureusement choisie.
« En Italie, les importations, en 1913, étaient de 3 milliards 645 millions de
lires; en 1914, elles sont tombées à 2 milliards 882 millions; les exportations, de
2 milHards 511 millions en 1913, tombèrent à 2 milliards 217 millions; mais,
à partir de septembre, les exportations dépassèrent chaque mois les importa-
tions :
ImportatiODi Eiportatioos
Septembre 102,3 123,2
Octobre 142,5 174,0
Novembre 166,6 182,8
Décembre 206,1 186,3
- 82 -
a En janvier 1916, les impi^rlations s'élevèrent encore à 169 millions et les
exportations à 180; mais à partir de ee moment l'excédent des importations
recommença.
« Nous n'avons pas les chiffres du commerce de l'Allemagne en 1914 et 1915;
l'AImanacli Gotha de 1916 s'arrête à ceux de 1913 : mais nous savons qu'elle
manque de 867 millions de francs que nous lui envoyions, et qu'elle manque
aussi des £ 60.500.000 que la Grande-Bretagne lui avait envoyés en 1913. Elle
avait acheté pour £ 2.267.000 de harengs, et elle n'en a pas eu un seul depuis la
guerre. Elle avait acheté pour £ 3.328.000 de houille anglaise, et elle n'en a
pas reçu depuis la guerre. Elle avait acheté £ 554.000 de laine, et elle n'en a
pas reçu pour un farthing depuis la guerre. Elle avait envoyé £ 80.411.000 à
la Grande-Bretagne, dont £ 16 millions de sucre. La Grande-Bretagne n'en a
certainement pas reçu d'Allemagne depuis la guerre.
« Les exportations d'Allemagne aux États-Unis sont tombées de S 189 mil-
lions à 91; celles de l'Autriche-Hongrie de 19 à 10. Le blocus s'est resserré
autour des empires du Centre; ils sont de plus en plus condamnés à se suffire
à eux-mêmes.
« Ils ont bien reçu quelque ravitaillement par les neutres. Les importations
d'or qui ont porté en Suède la réserve de la Riksbank à 123 millions de cou-
ronnes sont un indice. On a constaté les augmentations d'importations de
cuivre, de caoutchouc qui prouvaient que les neutres n'étaient que des agents
de transmission. D'un autre côté, pour le blé, on a fait observer que les excé-
dents d'importation de blés venant des États-Unis en Espagne, en Grèce, en
Italie, provenaient de la fermeture des Dardanelles aux blés russes.
« Nous n'avons pas encore les chiffres de l'année solaire 1915 du commerce
des États-Unis; mais nous avons ceux de l'année fiscale finissant au 30 juin,
et M. Lewis Sorrell les a analysés dans le Journal of Political Economy de jan-
vier sous ce titre : Dislocations in the joreign iradc of the United States resuUing
front the European war.
« On constate d'abord l'augmentation d'exportations aux pays neutres dont
je viens de parler :
1913 1915
Milliout de dollars
Danoiiiark . 18,6 79.8
Grèce 1/2 23,4
Hollande 125,9 143,2
Norvège 8,3 39,0
Suède 12,1 78,2
« Les exportations aux belligérants donnent les chiffres suivants :
France 146,1 369,3
Grande-Bretagne 597,1 911,7
Russie d'Europe 25,3 37,4
Russie d'Asie 1,1 23,3
« L'étude des éléments du commerce des États-Unis montre des transpositions
d'industries qui justifient le titre de l'article qui les indique : elles provoquent
certaines inquiétudes pour le lendemain de la guerre.
« Mais dans un discours tenu le 23 janvier au Republican-Club de New-
York, M. Jacob H. SchifT disait : « Rien ne peut arrêter le développement de
notre prospérité si ce n'est la renaissance d'une agitation protectionniste dans
la nouvelle campagne présidentielle. » Il en prévoyait, du resté, l'échec.
« Les frets sont chers; mais il faut se rappeler que la flotte de la Grand' -
Bretagne représente plus de la moitié du pouvoii' transporteur du mond'\
« Nous trouvons dans le Shipping World l'analyse d'un exposé de la situation
- 83 -
de la marine britannique fait par W.-S. Abell, chief ship surçeyor to LIoi/cVs
Registcr :
« Sur les 20.000 navires possédés par la Grande-Bretagne, 16.500 sont engagés
dans le Ho?ne Tradche Home Trade comprend les Iles Britanniques et la côte
continentale de Brest à Hambourg. Il n'en reste donc que 4.500 engagés dans
•e commerce étranger proprement dit, dont 3.600 d'un tonnage brut supérieur
à 1.000 tonnes.
« Un tiers de ces navires appartient à des lignes do navigation, les deux autres
tiers sont des gênerai Traders. La moyenne du tonnage brut des navires de la
première catégorie est de 5.000 tonnes, celle des navires de la seconde de 4.000.
« Le Gouvernement a réquisitionné 800 navires de plus de 1.000 tonnes;
42 steamers ont été retenus dans les ports ennemis; 78 dans la Baltique et la
Mer Noire. Voilà donc la suppression de 139 navires pour le commerce de
haute mer. Le nombre des steamers inutilisables pour des causes diverses a été
de 1.050. Ce chiffre a été réduit par les 100 navires allemands pris ou internés
qu'on a utilisés. Sur 3.600 navires, il y en a donc 950, soit 25 %, qui ont fait
défaut.
« La diminution du personnel a été également de 25 % sur 250.000 hommes
employés dans la marine britannique.
« Le nombre annuel de voyages par bâtiment a été réduit de 41/2 à 3, parce
que les navires ont dû aller chercher leur fret plus loin et ont subi diverses
causes de retard.
« Cependant, le poids de la cargaison fut augmenté, par 100 tonnes, de
115 tonnes à 145 tonnes.
« De plus, on a transformé les installations pour passagers de certains navires
en installations pour le transport des marchandises.
« Malgi'é ces efforts, on comprend que les frets se soient élevés ainsi que le
prix des navires, car la construction a été en grande partie arrêtée.
« En plus des frets, le change intervient comme élément perturbateur. Dans
son discours à l'assemblée de la London City and Midland Bank, sir Edward
Holden, parlant comme « un vieux banquier à un autre banquier », posa un
certain nombre de questions indiscrètes à M. Helfferich. Celui-ci a envoyé sa
réponse à un certain nombre d'entre elles, mais a trouvé plus prudent de ne
pas répondre à d'autres.
« La question suivante est restée sans réponse : « Si les Allemands paient en
«or le blé qu'ils ont acheté en Roumanie, comment n'y a-t-il pas trace
« d'une telle opération dans le bilan de la Reichsbank? »
« La question du change est très simple : si vous achetez, vous devez payer
en or, en marchandises ou en valeurs. »
« La guerre a transposé des courants commerciaux, a développé certaines
industries, en a frappé d'autres de stagnation. Elle a été un élément de cherté
dû en grande partie à la pénurie des transports. Les empires du centre, malgré
leurs ravitaillement; de contrebande, manquent de matières premières et
subissent une crise d'ahmentation. L'industrie est presque tout entière
consacrée à des objets destructifs. Au lieu d'une constitution annuelle de nou-
veaux capitaux, il y aura destruction de capitaux. Dans la plupart des pays,
le passif dépassera l'actif dans le bilan de 1915. »
Après quelques explications complémr>ntaircs demandées par MM. Meuriot
et Archdeacon, M. le Président remercie M. Yves Guyot de sa très intéres-
sante communication et la séance est levée à 19'i 20.
Le Secrétaire général, Le Président,
A. Barriol. Malzac.
84. -
II
LA QUEST[ON DES CHEMINS DE FER D'ALSACE-LORRAINE
EN d8'VO-18'71
Nous devons, dans la présente étude, répondre à une double question :
1° Comment s'est constitué et dans quel état se trouvait le réseau alsacien-
lorrain en 1870? 2^ Comment sa situation fût-elle réglée, en 1871, par le traité
de Francfort et les conventions subséquentes?
I
LES CHEMINS DE FER D'ALSACE-LORRAINE EN 1870
On ne s'étonnera point que, de toutes les régions de la France, l'industrielle
Alsace ait été une des premières à posséder un chemin de fer; on ne s'étonnera
pas davantage que l'initiative de cette création soit due à un représentant de
] 'intelligente bourgeoisie de Mulhouse. C'est, en effet, « au sieur Nicolas Koechlin »
que fut concédée la construction de la première ligne d'Alsace, celle de Mulhouse
à Thann par la loi du 17 juillet 1837. La Compagnie dont Nicolas Koechlin
était le mandataire s'engageait à construire la voie dans un délai de trois ans;
au bout de trente ans, elle revenait à l'Etat. Notons par curiosité le prix des
places : il était fixé à 8 centimes par kilomètre dans les « voitures fermées et
couvertes « et à 6 centimes dans les « voitures découvertes et non fermées ».
Cette ligne, d'une longueur de 20 kilomètres, fut ouverte le 12 septembre
1839, soit près d'un an plus tôt que la date fixée par la loi de concession; cette
ouverture suivait donc seulement de deux ans celle de la ligne Paris— Saint-
Germain-en-Laye (exactement. Le Pecq) qui est du 26 août 1837. Le chemin de
fer Mulhouse— Thann n'arriva pas du reste à l'expiration de sa concession; il
passa à la Compagnie de l'Est en 1858.
Mais, si intéressante qu'ait été, au point de vue industriel, cette première
ligne d'Alsace, elle n'avait encore qu'un caractère local. Il en était autrement
de la ligne Strasbourg— Bâle, concédée, par la loi du 6 mars 1838, à la même
Compagnie représentée par le même Nicolas Koechlin. Cette ligne avait une
longueur de 139 kilomètres et devait être prolongée jusqu'à Lauterbourg à la
jonction de la ligne bavaroise de Lauterbourg à Mannheim. Ici, nous entrons
dans le domaine des grandes voies ferrées d'intérêt national et international.
On le comprenait si bien que l'acte de concession stipulait que la ligne aurait
deux voies sur tout le parcours; l'État pouvait racheter au bout de quinze
années d'exploitation. La ligne devait être achevée en six ans; elle fut cons-
truite en une série de tronçons, dont les premiers furent ceux de Colmar à Ben-
feld et de Mulhouse à Saint-Louis près Bâle; le tout était achevé en 1844.
Jusqu'à cette date, l'Alsace seule possédait un réseau de chemins de fer;
mais la Lorraine, comme l'Alsace, allait avoir sa part de la grande Yignv Paris-
Strasbourg, dont la concession est du 27 novembre 1845. Sur la longueur totale
- 85 -
de cette ligne de 502 kilomètres, plus de moitié — 260 — revenaient aux deux
provinces. La construction de cette grande artère avait été vivement réclamée
par un député de la Meurthe (1), Marchai, lors de la discussion de loi de 1842 sur
les chemins de fer. Il montrait la nécessité pressante de cette ligne dans des
paroles que les événements ultérieurs n'ont rendues que trop vraies. La ligne
Strasbourg— Bâle fut construite en une série de tronçons et put être parcourue
dans toute sa longueur en 1852. En même temps, de 1850 à 1852, étaient ou-
vertes les lignes de Frouard— Metz, de Metz— Forbach à la frontière prussienne
(Sarrebriick). Ces voies avaient été concédées à la Compagnie Paris— Strasbourg,
qui devint la Compagnie des chemins -de fer de l'Est, le 21 janvier 1854. A cette
même date était entreprise la seconde grande ligne de l'Est, Paris— Mulhouse —
Bâle, qui fut construite de 1854 à 1858. Son parcours en Alsace était un peu
plus long que celui de la ligne de Strasbourg; il était de 68 kilomètres, dans le
département du Haut-Rhin tandis que, dans celui du Bas-Rhin, la première
ligne de l'Est avait un développement de 60 kilomètres.
Cette seconde ligne de l'Est qui rejoignait la voie de Strasbourg— Bâle à
Mulhouse constituait donc une grande artère de relation internationale. Il en
fut de même de la ligne Paris— Strasbourg prolongée au delà du Rhin à Kehl,
en 1861. Cette année vit donc l'inauguration du pont de Kehl entre l'Alsace
et le grand-duché de Bade; c'était un des principaux ouvrages d'art du réseau
alsacien, avec les viaducs do la Largue sur la ligne de Mulhouse (près Danne-
marie) et le tunnel d'Arswiller ou de Saverne, long de 2.800 mètres à travers
les Vosges sur la ligne Paris— Strasbourg. Les lignes d'Alsace furent complétées
successivement par une série de voies dirigées vers les Vosges et partant de la
voie centrale Mulhouse— Strasbourg: telles, celles de Thann à Wesserling, dans
la haute vallée de la Thur, vers le col de Bussang (1861), de Cernay sur la ligne
de Mulhouse— Thann à Sentheim et la vallée de la Doller (1869), de Schlestadt
à Sainte-Marie-aux-Mines (1864), de Strasbourg à Barr et à Molsheim — Mutzig
et Wasselonne, dans la vallée de l'Andlau, de la Brusche et de la Mossig(1864).
En Lorraine, étaient ouvertes les lignes de Metz à Thionville et toujours par la
vallée de la Moselle, de Thionville à la frontière prussienne (à Perl) de 1854 à
1859; de Thionville à Longuyon avec jonction, en ce point à la ligne des Ar-
dennes (Reims, Mézières, Sedan) en 1863; d'Avricourt à Dieuze (1864); enfin
de Sarreguemines à la frontière prussienne (à Sarrebriick), et ce fut avec la
ligne d'Avricourt à Cirey, celle-ci d'intérêt local, la dernière ligne ouverte
avant la guerre de 1870-1871 ; elle fut, en effet, livrée à l'exploitation le 1^^' juin
1870. De part et d'autre, plusieurs projets de jonction des lignes d'Alsace et de
Lorraine avaient été formés. D'abord au nord, une voie était concédée pour
relier Thionville à Strasbourg par Niederbronn et Haguenau; sur les 153 kilo-
mètres concédés, les deux tiers soit, 94 kilomètres, de Carling à Niederbronn
avaient été construits de 1866 à f869. Plus au sud, un chemin de fer d'intérêt
local avait été décrété (avril 1870), de Mutzig à Schirmeck et était ainsi une
M ^ <( Vingt-quatre heures suiïisent à nos voisins pour concentrer sur le Rhin les forces de
la Prusse, de l'Autriche et de la Confédération, et le lendemain une armée de 400.000 hommes
pourra franchir notre frontière par cette brèche de 40 lieues entre Thionville et Lauterbourg,
qui sont les avant-postes de Strasbourg et de Metz » [Moniteur officiel, 27 avril 1842).
- 86 -
amorce d'une ligne de jonction vers la haute vallée de la Meurtlie. Dans le
même sens, une voie d'intérêt local avait été ouverte de Colmar à Munster
vers le col de la Schlucht on 1868. Enfin, deux grandes lignes avaient été
concédées pour établir une relation entre les deux versants des Vosges; l'une
de Belfort à Cernay — Guebwiller -Bollwiller (L. 6 juill. 1862), dont le tronçon
Bollwiller— Guebwiller venait d'être ouvert (en 1870); l'autre de Remiremont
à Colmar par le col de Bussang (L. 3 avril 1870) devait rejoindre la voie de
Thann à Wesserling.
Ces projets étaient évidemment inspirés par des considérations d'ordre mili-
taire, mais aussi ils n'avaient été menés à exécution que d'une manière fort
imparfaite avant juillet 1870. A cette date, en effet, nous ne disposions de Paris
vers la frontière que de deux grandes voies soit : Paris —Mulhouse et Paris —
Strasbourg, auxquelles on peut ajouter la ligne des Ardennes, branchée de
part et d'autre vers le nord à Soissons et l'est à Epernay, de là à Reims,
Mézières, Sedan, Longuyon et Thionville. La ligne directe Paris — Châlons-sur-
Marne —Verdun à Metz n'était pas achevée; elle ne dépassait pas encore Ver-
dun. On ne pouvait donc aller à Metz que par Frouard ou le l<mg circuit du
nord, par Thionville. De plus, entre les principales lignes de l'Est et les
réseaux|jvoisins du Nord et de Lyon, les jonctions étaient encore rares.
Les deux lignes de l'Est ne communiquaient que par les voies de Chaumont —
Blesmes, et de Port-d'Atclier par Epinal à Blainville. Avec le réseau du Nord,
l'Est n'était relié que par les lignes d'Epernay et Châlons par Reims sur
Soissons et Laon et de là à Tergnier et Amiens, et celle de Mézières à Hirson.
Nos grandes voies transversales Revigny —Hirson et Lérouville —Sedan n'exis-
taient pas. Avec le réseau de Lyon, les relations de l'Est étaient simplement
constituées par les voies de Flamboin — Montereau, une de nos plus anciennes
lignes, et de Chalindrey par Gray à Auxonne, et de Belfort par Besançon à
Auxonne et de là à Dijon.
On n(! reconnaîtra jamais assez la perfection avec laquelle nos compagnies
de chemins de fer ont assuré la réconte mobilisation. Mais cela ne doit pas nous
faire oublier les services rcuidus par le réseau de l'Est en 1870, d'autant plus
que, pour effectuer le « passage à l'état de guerre » (c'était alors le terme officiel
qui désignait la mobilisation), il disposait de moyens restreints et dont l'Ad-
ministration militaire avait fort peu réglé l'emploi. On ne saurait dire à com-
bien de choses la Compagnie dut suppléer grâce à ses ressources propres et à
l'activité de son directeur d'alors, M. Sauvage.
Dans ces conditions, l'ensemble dos chemins de for de l'Alsaco-Lorraine
oK^surait un dévcîloppoinent do 746 kilomètres auxquels il faut ajouter 13 kilo-
mètres on construction et 81 concédés, mais à construire. C'était plus du quart
du réseau de l'Est 26% dont la longueur était de 2.876 kilomètres; la propor-
tion était do 51 kilomètres de voies ferrées par 1.000 kilomètres carrés de super-
ficie, tandis que, dans le reste du réseau, elle ne dépassait pas 40. En outre,
une portion relativement considérable des lignes d'Alsace et de Lorraine
était à double voie. Toute la ligne de Paris —Strasbourg était dans ce cas, de
même que celle de Strasbourg— Baie; il n'en était pas de môme do celle de
Mulhouse qui ne comptait encore que 318 kilomètres sur 492 à double voie.
- 87 -
Parmi les embranchements, il n'y avait à double voie que les lignes de Frouard
à Metz et à la frontière prussienne et celle de Bischwiller à Haguenau. Au
total, les chemins de fer de l'Alsace-Lorraine comptaient 410 kilomètres à
double voie sur un total de 746, soit une proportion de 55%, alors qu'elle
était de 50% pour le reste du réseau de l'Est et de 45% dans l'ensemble des
réseaux français en 1870.
A côté du réseau d'Alsace-Lorraine, il faut placer le petit réseau luxembour-
geois, qui ne communiquait avec l'ensemble de nos lignes que par la voie lor-
raine Metz— Thionville —Luxembourg. Par une convention conclue en 1857,
la Compagnie de l'Est s'était chargée de l'exploitation des chemins de fer du
Grand-Duché, moyennant une redevance variable selon le produit. Dix ans
plus tard, le Gouvernement grand-ducal réclama une redevance fixe. La
France craignant qu'il n'y eût là quelque intrigue prussienne — on était au len-
demain du conflit luxembourgeois — demanda à la Compagnie de l'Est d'ac-
cepter la proposition, mais lui garantit, en revanche, une subvention de 3 mil-
lions pendant quarante-cinq ans (Convention du 5 décembre 1868). La longueur
totale du réseau luxembourgeois était de 237 kilomètres; le revenu brut par
kilomètre était de plus de 24.000 francs en 1869 contre 19.000 en 1868. Il
était donc en progrès.
n
COMMENT A ÉTÉ RÉGLÉE LA QUESTION DES CHEMINS DE FER D'ALSACE-LORRAINE
EN 1871
La frontière que nous imposait le traité de Francfort allait donc englober
dans le territoire de l'Allemagne une portion considérable du réseau de l'Est.
Nous avons vu que cotte portion était de 746 kilomètres ; nous donnons
leur répartition dans le tableau suivant, en tenant compte de la distinction en
ancien et nouveau réseau, comme le font toujours nos grandes Compagnies.
Et cette distinction n'est pas ici qu'une question de forme. Comme le rappe-
lait le rapport fait à l'assemblée des actionnaires en 1873, l'ancien réseau était
surtout productif. En 1869, par exemple, la recette kilométrique brute était,
pour l'année, de 63.871 francs sur l'ensemble de lignes de l'ancien réseau; elle
n'était que de 27.722 pour le nouveau, tels que l'un et l'autre avaient été cons-
titués par les conventions do 1859. Ane considérer que les lignes exclusivement
alsaciennes et lorraines de l'ancien réseau, la recette brute annuelle par kilo-
mètre (exercice 1869) y atteignait un maximupi de 60.980 francs, tandis qu'il
ne dépassait pas 9.000 francs sur le nouveau réseau. Or, sur l'ensemble des
lignes perdues par la Compagnie de l'Est en 1871, la plus grande partie —
466 kilomètres sur'746 — soit 62,5% appartenait à l'ancien réseau. Celui-ci se
trouvait, pour l'ensemble dos lignes de l'Est diminué de près de moitié 46%,
tandis que cet amoindrissement n'était que de 19% pour le nouveau. Avant
1871 , le développement total des lignes de l'Est (non compris celles du Luxem-
bourg) était de 2.876 kilomètres dans lesquels les 973 kilomètres de l'ancien
réseau formaient une proportion de plus du tiers, soit 34%. Désormais, après
l'amputation subie en 1870, la Compagnie de l'Est n'exploitait plus que
2.130 kilomètres, dont moins du quart — 23,8% — appartenait à l'ancien
réseau. Cette simple constatation dit tout le dommage que supportait l'Est,
du fait du traité de Francfort.
A. Ancien roseau.
Strasbourg — Avricourt
Strasbourg — Kehl
Novéant — Forbach
Metz — Thionville et frontière prussienne
Vendenheim — Wissembourg
Strasbourg — Bâle
L.utterbach — Thann
Thann — Wesserling
Total. . . .
B. Nouveau réseau.
Montreux-Vieux- — Mulhouse
Cernay — Sentheim
Bollwiller — Guebwiller
Schlestadt — Sainte-Marie-aux-]\lines
Strasbourg— Barr
Avricourt — Dieuze
Haguenau — Niederbronn — Carling
Thionville — Audun-ie-Roman
Sarreguemines^ — Sarrebrtick
Total. . . .
Total général-
100
8
90
46
57
138
14
13
46 G
35
13
6
21
49
22
1Î5
18
1
280
746
Et ce n'était pas tout. En eiîet, l'Est se voyait encore enlever l'exploi-
tation des chemins de fer du Luxembourg, c'était une diminution de 237
kilomètres pour son exploitation totale. En réalité, la Compagnie était dépos-
sédée d'une concession mesurant 1.077 kilomètres; de ce total, 840 kilo-
mètres (réseau alsacien-lorrain) lui étaient assurés pour quatre-vingt-trois
ans; le reste (les 237 kilomètres du Guillaume —Luxembourg) pour quarante
deux ans.
Outre les lignes précitées, il y avait en construction :
13 kilomètres de Metz à Amanvillers (tronçon do la ligne Metz — Verdun — ChCUons,
et à construire (lignes concédées) :
59 kilomètres de TJiionville à Carling (ligne de Thionville — Niederbronn).
13 — au delà de Wesserling (ligne profilée de iNIuUiouse à Reniireniont).
9 — au delà de Guebwiller et de Sentheim (ligne profilée de Guebwil-
ler—Belfort).
Mais, à côté de ces lignes appartenant à la Compagnie de l'Est, il y avait
dans les pays alors annexés des chemins de fer d'intérêt local construits ou
- 89 -
concédés en vertu de la loi du 12 juillet 1865. De l'ensemble de ces lignes, deux
étaient achevées; c'étaient les lignes :
1 . Cohnar — Munster (19 kilomètres!, dont la ville de Munster était concessionnaire.
2. Avricourt — Cirey, concédée à la Compagnie de Saint-Gobain — Cirey (la majeure
partie de cette ligne demeurait française).
Les autres voies simplement concédées étaient :
1. Nancy — Ghâteau-Salins^Vic (36 kilomètres) 1 concédées
2. Sarrebourg — Sarreguemines (25 kiiomètresi /à la Société belge
3. Metz — Teterchen (31 kilomètres) 'de chemins de fer.
4. Colmar à Neufbrisach (20 kilomètres) : concédée à la ville de Colmar.
5. Steinbourg (ligne de Strasbourg — Avricourt à Bouxwiiler j concédées
(13 kilomètres) V à des compagnies
G. Mutzig à Schirmeck (20 kilomètres i ) particulières.
Tel était l'ensemble des voies ferrées qui passait sous la domination poli-
tique de l'Empire allemand. Nous n'avons rien à dire ici des conventions parti-
culières qui réglèrent le sort de ces différentes lignes et qui n'ont, du reste, aucun
intérêt. Nous ne retiendrons que ce qui concerne le chemin de fer d'Avricourt
à Cirey, parce que le règlement de cette question provoqua une modification
de la nouvelle frontière. Le tracé primitif était tel qu'il faisait une emprise
dans la partie demeurée française du département de la Meurthe et la portion
terminale de la ligne de Cirey étant allemande, les habitants de la région
étaient obligés de traverser deux lignes de douane pour aller de l'une à l'autre
région frontière. Les populations intéressées réclamèrent ainsi que la Compa-
gnie de Cirey —Saint-Gobain par l'organe de son président, l'ancien ministre
Chevandier de Valdrôme. La question fut réglée par une convention annexe
en date du 12 octobre 1871 (art. 10). L'Allemagne nous rétrocédait « la com-
mune d'Igney et la partie de la commune d'Avricourt située entre la commune
dTgney, jusque et y compris lé chemin de fer de Paris — Avricourt et le chemin
de fer de Cirey à Avricourt ». Seulement la France devait faire construire
à ses frais une nouvelle gare à Avricourt (ce fut Deutsch-Avricourt) de façon
qu'elle suffit «aux intérêts militaires et commerciaux autant que celle d'Avri-
court ». Ainsi la ligne Cirey-Avricourt redevenait française sur tout son par-
cours; la portion terminale servait dès lors de frontière.
Mais la question capitale était le sort réservé à la Compagnie de l'Est pour
toutes les lignes perdues dans le territoire annexé. Au point de vue du droit
international (peut-être est-ce une ironie d'en parler à l'heure actuelle), la
Compagnie en tant que société privée gardait la propriété de ses lignes et,
comme toutes les personnes civiles, ses droits étaient garantis par les préli-
minaires de la paix. Et dans le principe, il semble que la Compagnie ait
conservé l'espoir de continuer l'exploitation de son réseau alsacien-lorrain.
Une note rédigée dans ce but fut remise à M. Thiers; mais pouvait-on espérer
que l'Allemagne laisserait les choses en l'état? Les préliminaires de Versailles
(26 février 1871), adoptés par l'Assemblée nationale de mars, sont muets à cet
égard. Cependant le président du syndicat des Chemins de fer, alors M. Dele-
becque, fit remettre un mémoire au prince de Bismarck (4 mars) dans lequel
- 90 -
il demandait lu réintégration de la Compagnie dans hon réseau occupé et ex-
ploité par l'administration^^allemande. La convention de Ferrières restitua
bien à la Compagnie de l'Est ses lignes, mais à l'exclusion de celles comprises
dans le territoire annexé. 11 devenait donc nécessaire de régler la situation faite
à la Compagnie dans les négociations du traité définitif qui eurent lieu à
Bruxelles, puis à Francfort. Deux ingénieurs de l'Est, MM. Ledru et Regnay,
y fm^ent délégués pour suivre ces négociations, et elles firent l'objet d'une
convention annexée au traité de Francfort.
On voit ainsi quel caractère prennent nécessairement ces tractations.
Nous avons affaire sans doute à une société privée, mais cette société était
pom'vue d'une concession d'État, elle ne la pouvait céder de son plein droit à
l'Allemagne; il devait y avoir une substitution de l'État français à la Compa-
gnie et pour effectuer cette cession et pour traiter des effets qui en résultaient.
Les négociations concernant la Compagnie de l'Est aboutirent à un véritable
traité adjoint au traité du 10 mai 1871 sous le nom d' « iVi'ticles additionnels »,
et dont nous allons donner une rapide analyse. L'article 1 obligeait le Gouver-
nement français avant la ratification du traité de paix à «user de son droit de
rachat de la concession de l'Est», pour les lignes concédées en Alsace-Lorraine,
et l'État allemand était subrogé à l'État français dans tous les droits « acquis
par le rachat de la concession ». L'article 2 énumérait, dans le détail, toutes les
propriétés que la France transmettait à l'Allemagne par l'effet de ce même ra-
chat, soit les immeubles de la Compagnie, le mobilier des gares, les ateliers, les
matériaux et approvisionnements, les outillages de tout genre et, en outre,
toutes les sommes dues à la Compagnie, « à titre de subventions accordées par
des corporations (en l'espèce, communes, départements et chambres de com-
merce) ou personnes domiciliées dans les territoires cédés ». Par exception,
l'article 3 excluait de la cession le matériel roulant, c'est-à-dire la portion de
ce matériel qui n'avait pu être évacuée lors de nos premières défaites. Le Gou-
vernement allemand restitua, de ce chef, un total de lOU locomotives et d'en-
viron 3.500 wagons.
A l'article 4, l'État français s'engageait à libérer les chemins de fer cédés à
l'Allemagne de « tous les droits que des tierspourraientfaire valoir, notamment
des droits des obligataires ». La cession des voies de l'Est était donc effectuée,
nette de toute hypothèque, et les créanciers de la Compagnie n'auraient plus
affaire qu'à l'État français. De même, par l'article 5, la France prenait à sa
charge les réclamations « que la Compagnie de l'Est pourrait élever vis-à-vis
du Gouvernement allemand ou de ses mandataires ». En d'autres termes, l'Al-
lemagne déclinait à l'avance toute responsabilité à l'égard de la Compagnie
pour l'exploitation de ses lignes, l'usage de ses immeubles, ateliers, matériel
roulant pendant la guerre. Or, il faut rappeler que les Allemands avaient eu
alors entre leurs mains tout le réseau de l'Est sauf une infime partie et qu'en
vertu de la convention de Ferrières (11 mars 1871) la Compagnie de l'Est
avait dû mettre à leur disposition 100 machines et 7.500 wagons pour l'exploi-
tation de ses lignes occupées par l'Administration allemande.
L'article 6 fixait l'indemnité à payer par l'État allemand à la Compagnie
de l'Est par l'entremise de l'État français. Les négociateurs allemands avaient
d'abord offert 120 millions, tandis que l'indemnité réclamée était de 360.
- 9i -
L'Allemagne offrit ensuite 260 millions; finalement, on transigea à 330 puis
à 325 millions, à déduire sur nos 5 milliards. Nous allons revenir sur cette
question.
L'article 7 avait une particulière importance; il réglait la situation des
chemins de fei du Luxembourg. Les conventions du Guillaume-Luxembourg
et de la Compagnie de l'Est (juin 1857-janvier et décembre 1868) étaient
déclarées caduques « comme n'étant plus applicables à l'état de choses créé
par les stipulations précédentes «. Du reste, dans le courant même de la guerre,
le Gouvernement allemand avait accusé le Grand-Duché de laisser ses chemins
de fer aider au ravitaillement de la place de Thionville et s'était déclaré délié
des stipulations de 1867 (traité de Londres) garantissant la neutralité de l'État
luxembourgeois. Il n'y avait donc pas espoir que l'Allemagne respectât la
situation d'une société française dans le Grand-Duché, d'autant plus que, par
la perte de la Lorraine, la frontière du Luxembourg et de la France n'avait
plus qu'une minime étendue, 15 kilomètres au lieu de 60. Donc, par l'ar-
ticle 7, l'État français subrogé à la Compagnie de l'Est devait céder à
l'Allemagne tous les droits que cette compagnie tenait des conventions pré^
citées avec le Luxembourg. Et, à cette fin, les négociateurs ennemis usaient
insolemment du droit de la force. L'État français avait six semaines pour
effectuer gratuitement la cession exigée et il devait s'engager à user lui-même
de la force vis-à-vis de la Compagnie. Aucune concession ne lui serait doréna-
vant accordée si elle ne consentait pas à l'abandon du réseau luxembour-
geois : c'était l'éviction pure et simple.
Enfin, par le dernier paragraphe des « Articles additionnels », l'État fran-
çais consentait à abandonner les droits de la Compagnie de l'Est sur la partie
de son réseau située de Saint-Louis à Bâle. Cette cession serait effectuée dans
le délai d'un mois, et l'Allemagne paierait, en échange, une somme de 2 mil-
lions.
Tels furent les articles du traité de Francfort, relatifs à la Compagnie do
l'Est et ratifiés avec le traité, le 18 mai 1871. La question était donc réglée
entre l'État français et l'Allemagne; restait à la régler entre l'État français
et la Compagnie de l'Est. La tractation d'une affaire aussi considérable devait
provoquer dans l'Assemblée nationale de vives controverses. C'était toute la
question des chemins de fer qui allait se poser. Et en elîet, comme le remarque
M. Alfred Picard, une question de principe pouvait, au début, dominer le débat.
Le cahier des charges de nos Compagnies prévoyait bien le rachat des réseaux,
mais le rachat global et non partiel, comme celui que l'État allait imposer à
la Compagnie de l'Est.
Dès le 19 février 1871, l'Assemblée nationale avait décidé, sur la proposi-
tion de Barthélémy Saint-Hilaire, la nomination d'une commission destinée
à étudier les dommages subis par nos chemins de fer, durant la guerre.
Le rapport, dont l'auteur était M. Bastid, fut déposé le 11 mars; il
évaluait simplement le total des indemnités dues à l'ensemble de nos
Compagnies pour les destructions résultant de la guerre; mais le rapport
ne disait rien quant à la question du rachat éventuel. Le 14 juin 1871,
le député Raudot proposa d'accorder aux Compagnies la perpétuité do leurs
- 92 -
concessions; mais, en revanche, l'Etat ne leur ferait plus aucune subven-
tion. Cette proposition ne tut pas prise en considération. Quelques mois plus
tard — le 3 février 1872 — l'Assemblée rejeta une autre proposition, celle de
Clément Laurier, Gambetta, Tolein, etc., demandant le rachat total des
chemins de fer et leur utilisation comme gage hypothécaire privilégié de
l'emprunt de 3 milliards, celui qui eut lieu, on sait avec quel succès, le 27 juin
1871.
Mais, pendant que se poursuivaient ces discussions, le ministère des Travaux
publics avait entamé des négociations avec la Compagnie de l'Est, par l'entre-
mise de la Commission centrale des Chemins de fer. Ces négociations eurent
lieu à la fin de 1872 et furent conduites par une sous-commission dont le
rapporteur était l'inspecteur général des Ponts et Chaussées Droeling. La
Commission centrale discuta le rapport et formula un avis définitif, base du
projet de loi que le ministère porta à l'Assemblée, le 6 janvier 1873. Aussitôi
un député, M. de Janzé, proposa le rachat total de l'Est, rachat, en effet, qui,
suivant l'article 37 du cahier des charges, pouvait être effectué à partir du
l^r janvier 1870. Cet^e proposition fut rejetée et la Commission de l'Assem-
blée nommée à l'effet d'étudier le projet de loi poursuivit ses travaux. Ce pro-
jet se composait de deux parties : d'abord un projet de loi proprement dit en
deux articles : l'article 1 qui déclarait d'utilité publique dix lignes de chemin
de fer à construire par la Compagnie de l'Est; l'article 2 était une approbation
de la Convention passée entre le Gouvernement et la Compagnie, comportant
la concession des lignes énumérées à l'article 1 et l'indemnité à allouer à
l'Est, en raison des pertes subies par le réseau. Suivait, en annexe, le projet
de Convention réglant le détail de l'indemnité.
La Commission se trouvait en présence de questions fort graves à traiter
et intéressant avec une grande société une partie importante du territoire.
Aussi, presque tous les membres de cette Commission étaient-ils des députés
des départements de l'Est; M. Méline en est aujourd'hui le seul survivant.
L'examen du projet de loi demanda à la Commission près de trente séances,
et le rapport, œuvre de M. Krantz, fut déposé le 24 mars 1873. Mais, par suite
des vacances parlementaires de Pâques et aussi des événements politiques,
le rapport ne vint en discussion que le 27 mai, peu de jours après la chute de
M. Thiers. Cette discussion n'occupa pas moins de douze séances, du 27 au
30 mai, puis du 11 au 17 juin. Le projet de loi fut particulièrement attaqué
par MM. Clapier, de Ventavon, Tolain, le colonel Denfert et Pouyer-Quertier.
Il fut défendu surtout par M. de Fourtou qui, ministre des travaux publics,
avait présidé aux négociations avec la Compagnie de l'Est, par son successeur
au ministère, M. Deseilligny, par le ministre des Finances, M. Magne, par le
rapporteur, enfin par des députés de l'Est, notamment MM. George, Varroy
et Méline.
Quel était le principal argument des opposants? C'était, sous des prétextes
divers, que l'indemnité payée à la Compagnie était exagérée. L'État,
disaient-ils, va donner à la Compagnie un titre de rente de 20 millions et demi
représentant un capital de 325 millions, d'après le taux de la rente émise lors
du premier emprunt de libération (27 juin 1871). Ce taux était de 82^ 50, mais
- 93 -
en réalité de 79^ 25 et c'était celui qui avait servi de base à la fixation de l'an-
nuité. Mais avec le cours de la rente en 1873 (plus de 90 francs), ce titre de
20 millions et demi capitalisé dépassait 410 millions. En conséquence, parmi
les opposants, les uns proposaient de réduire le titre de rente au cours de
1873, soit à une somme de 17.560.000 francs; d'autres d'éteindre le capital
par voie d'annuités. L'ancien ministre Pouyer-Quertier admettait que l'État
versât à la Compagnie une somme de 300 millions au plus, en trois verse-
ments; mais cette somme serait déduite de l'annuité que devait l'État à la
Banque de France, en remboursement de ses avances et pour mettre fin au
cours forcé des billets. En admettant que les annuités à payer à la Compagnie
fussent productives d'intérêt, même au taux de 1871, comme l'État ne payait
à la Banque qu'un intérêt de 1 %, l'État réalisait un bénéfice considérable.
Oui, mais un tel bénéfice, prolestait M. Léon Say, ne manquerait pas de
servir d'exemple; il serait destructeur du crédit de la Banque comme de celui
de l'État et nous ramènerait au papier-monnaie. Et M. Magne concluait une
véhémente intervention par ce mot si souvent et si justement répété depuis :
« Le billet de banque est sacré ! »
Mais quelles étaient les réponses des partisans du projet de loi? Le Gouver-
nement d'abord se refusait à suivre ceux qui prenaient prétexte de la discus-
sion présente pour mettre en question tout le régime des chemins de fer ou
au moins le rachat de l'Est. Par le fait du traité de paix, l'État français était
interposé entre l'Allemagne et la CoiPipagnie de l'Est; il lui restait à exécuter
un contrat, rien de plus. Et puis, le moment était vraiment mal choisi pour
poser un problème aussi grave que celui du régime de nos voies ferrées et on
ne pouvait songer sérieusement à une opération comme le rachat de l'Est qui
aurait coûté 15 millions de plus que l'annuité à payer à la Compagnie. 11
semble bien que poser une pareille question, c'était la résoudre et, en effet,
elle ne fut que peu de chose dans l'ensemble de la discussion.
La grosse question était, du reste, le côté financier de l'opération. Le rap-
porteur et ceux qui soutenaient le projet de convention s'attachaient d'aboi d
à justifier le calcul de l'indemnité accordée à la Compagnie. Le produit net
des lignes de l'ancien réseau cédées à l'Allemagne était, en 1869, de 12.637.000
francs. Pour celles du nouveau réseau, leur valeur intrinsèque était estimée
à 50.915.000 francs, dont l'intérêt et l'amortissement au taux de 5,75 %
donnaient un total annuel de 2.927.000 francs. Cela faisait avec la somme
précédente un total de 15.565.000 francs. Que représentait donc la différence
entre cette somme et l'annuité de 20 millions et demi concédés à la Compa-
gnie? Cette différence de près de 5 millions était la compensation des pertes
considérables subies par le réseau de l'Est. C'était, notamment, le séquestre
des lignes de l'Est durant les hostilités, la reconstruction des ateliers et des
■ gares de la frontière, la réparation des destructions effectuées sur le réseau,
la perte des objets mobihers et des approvisionnements. Il y avait de plus la
diminution de recettes provenant du morcellement du réseau par suite de la
perte des lignes d'Alsace-Lorraine. Enfin, il y avait l'abandon forcé du réseau
luxembourgeois pour lequel l'Est recevait une subvention annuelle de 3 mil-
lions, et sur les quarante-cinq ans de la durée de la concession, quarante-deux
restaient à courir. L'ensemble de ces pertes était évalué à un total de
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98.700.000 francs qui, au taux de l'emprunt do 1871, donnaient bien la rente
de 4.935.000 francs, soit la différence entre la valeur du réseau alsacien-lor-
rain et le titre de 20 millions et demi remis à la Compagnie. Or, toutes ces
pertes, l'État s'était engagé, lors des premières négociations, à les compenser
en dehors de l'indemnité de 325 millions et, par le fait de la Convention de
1873, la compensation rentrait dans l'indemnité elle-même. Enfin, la Compa-
gnie ne recevait pas un centime pour la perte du bénéfice éventuel à retirer
des lignes d'Alsace-Lorraine et nous verrons que cela était une perte consi-
dérable. Ainsi, le quantum des 20 millions et demi d'indemnité annuelle
était-il amplement justifié.
Quant au capitaine cette annuité-rente, il était sans doute de 410 millions
en mai 1873. La Compagnie était dans le cas des souscripteurs du premier
emprunt de libération, celui de 1871, mais — on ne saurait trop le dire —
ce bénéfice était purement fictif, car le titre donné à la Compagnie était ina-
liénable, par conséquent non susceptible d'une négociation quelconque. De
plus, ce n'était pas une propriété, mais un titre conditionnel, puisque, en
fin de concession, il fait retour à l'État. C'était une promesse de 83 annui-
tés, égale à la durée à courir de la concession de l'Est. L'annuité partait du
18 mai 1871 et s'éteignait avec la concession de la Compagnie, en 1954.
Mais, à côté de la compensation des pertes de la Compagnie, il y avait une
question aussi à régler. C'était celle des sommes dues par la Compagnie à
l'État, en remboursement des avances à titre de garantie d'intérêt. Le total
de ces sommes s'élevait, en 1870, à 106 millions, d'après le rapport de
M. Krantz. Il était évident que l'Est perdant une des parties les plus pro-
ductives de son réseau ne pouvait être tenu au remboursement total de cette
somme. Elle fut réduite au prorata des lignes de l'ancien réseau perdues, soit
de 29 millions, réduction à peine sensible pour le budget, puisqu'il bénéficiait
du même coup de 27 millions, montant des subventions accordées aux lignes
d'Alsace-Lorraine.
Enfin, ce qui n'était pas un des moindres aspects de la question à débattre
entre l'État et la Compagnie, c'étaient les lignes nouvelles dont l'Est devait
accepter la construction. L'ensemble de ces lignes atteignait 358 kilomètres;
c'étaient les lignes :
1. De Sedan à la frontière belge.
2. De la-frontière belge près Longwy, la ligne de Nancy à Metz, près d'Arnaville par Audun-
le-RoniaR et Briey, avec embranchement sur Vilîerupt, sur la vallôede l'Orne et sur
Thiaucourt.
3. D'Aillevillers à Lure avec embranchement sur Le Val-d'Ajol.
4. De I5elfort à la frontière suisse, vers Porrentruy par Morvillars et Délie.
5. De Coulommiers à La Fertô-GarA-her.
6. De Remiremoni au Tillot et à Saint-Maurice.
7. De Bourbonne-les-Bains à la ligne Paris-Mulhouse.
8. De la gare de Langres à la ville de Langres.
9. De Chanijiignoullcs à Jarville, en contournant à l'est la ville de Nancy.
10. D'un pont situé entre Montmédy et Velosnes à la frontière belge près de Virton.
Toutes ces lignes étaient évidemment d'importance inégale; trois étaient
- 95 -
surtout d'un intérêt capital, c'étaient celles de Longwy à Arnaville, d'Aille-
villers à Lure et de Belfort à Porrentruy. En effet, soudées aux lignes Arna-
ville — Frouard —Nancy — Blainville —Lure —Belfort, elles constituaient une
ligne continue de la frontière belge à la Suisse et rétablissaient l'ancienne
ligne de Thionville à Bâle par Nancy —Strasbourg, ou, comme c'était en cons-
truction, par Haguenau— Strasbourg. Aussi pour l'achèvement de cette ligne
la Compagnie n'avait-elle qu'un délai de cinq ans. On sait comment cet en-
semble de lignes a été complété par celle de Longwy à Luxembourg, nous
permettant d'atteindre directement le Grand-Duché, comme la ligne Belfort —
Porrentruy atteint Bâle par Delémont et évite la traversée de l'Alsace méri-
dionale.
Pour la construction de ces lignes, l'État garantissait un intérêt de 4,65 %.
Mais cette garantie portait seulement sur un capital de 103 millions, soit
300.000 francs par kilomètre. Or, on sait que la construction d'un kilomètre
sur nos voies ferrées revient à plus de 400.000 francs.
Telle était dans son ensemble la loi du 17 juin 1873 qui réglait la situation
de la Compagnie de l'Est après la guerre de 1870-1871. Elle fut votée à une
très grande majorité par l'Assemblée, par 478 voix contre 120; le vote n'eut
pas de caractère politique, les voix des différents partis se confondant dans
la majorité et la minorité.
CONCLUSION
Il est superflu de faire remarquer l'importance de la Convention que nous
venons d'étudier; elle est sans précédent dans l'histoire des sociétés indus-
trielles. Ce sont les propres termes du rapport fait à l'Assemblée des actionnaires
de l'Est en 1873 et, s'adressant à ceux-ci, le rapporteur ajoutait : «Cette conven-
tion sauvegarde vos intérêts d'avenir, nous disons d'avenir, car nous ne sommes
pas replacés dans une situation compamble à celle que nous avions au com-
mencement de 1870. Au moment où la guerre a été déclarée, nos recettes
étaient telles que nous avions presque la certitude de ne plus avoir rien à
demander à l'Etat pour la garantie d'intérêt. Nous aurions, aussitôt nos
lignes achevées, pu commencer le remboursement de notre dette et nous aper-
cevions l'époque à laquelle, libres de tout engagement, nous aurions appliqué
à notre dividende la majoration de nos recettes. »
Tout cela, en effet, se trouvait éloigné. Et cependant, après quarante ans
écoulés et malgré l'énorme accroissement des charges, l'Est a aujourd'hui
totalement remboursé les avances de l'État pour la garantie d'intérêt; il a,
de ce chef, versé au Trésor (Convention du 6 septembre 1911) une somme de
près de 160 millions (exactement 158.980.000 francs). On se trouvait ramené à
riieureuse situation que n'avait pu qu'entrevoir la Compagnie en 1870. Sa
dette vis-à-vis de l'État était éteinte et, pour la première fois, les actionnaires
voyaient augmenter leur dividende, fixé, comme on sait, à un minimum de
35,50 pour les Conventions de 1884. En 1913, le dividende a été de 37,50.
Pour la première fois aussi depuis l'origine de la Compagnie, l'État entra en
- 96 -
partage des bénéfices, il reçut une somme équivalant aux deux tiers du béné-
fice total, soit 4.700.000 francs. Il est inutile de dire comment les événements
actuels constituent pour la Compagnie de l'Est une nouvelle et grave épreuve.
En somme, la Convention de 1873 avait sauvegardé, mais très strictement,
les intérêts de la Compagnie et c'était l'État qui en tirait le plus clair béné-
fice. D'abord le fait seul que l'Est était une société privée lui évitait pour
son réseau alsacien-lorrain le sort des biens domaniaux, routes, canaux,
forêts, cédés sans indemnité à l'État allemand, sort qu'il aurait eu, si FEst
avait été propriété de l'État. Et on peut être assuré que notre indemnité de
5 milliards n'en aurait pas pour cela été réduite. Au contraire, la somme de
325 millions par laquelle l'Allemagne rachetait partiellement la concession de
l'Est était déduite de l'indemnité de guerre; elle servit, nous l'avons dit, à
couvrir une partie de notre emprunt de 1871 et le projet de loi ratifiant le
traité de paix reconnaissait le service rendu par la Compagnie à l'État, dans
les termes suivants : « L'obligation qui nous est imposée de payer de lourdes
sommes est cependant atténuée dans une certaine mesure par la partie du
traité qui a trait au rachat du Chemin de fer de l'Est moyennant la somme
de 325 millions à imputer sur le deuxième et le troisième milliard que nous
paierons à l'Allemagne. » L'indemnité de guerre se trouvait, de ce fait, dimi-
nuée dans la proportion de 6,5 %.
Un autre avantage pour l'État était de s'acquitter par le paiement d'an-
nuités; nous avons dit que le titre de 20 millions et demi de revenu concédé
à la Compagnie ne lui appartenait que pour la durée de la concession. Bien
plus, la Compagnie n'avait pas le libre usage de cette somme. La majeure
partie, soit 18.200.000 francs, devait s'ajouter aux recettes nettes de l'ancien
réseau; le reste, soit 2.300.000, était prélevé au profit du nouveau réseau. De
part et d'autre, les avances de l'État étaient diminuées d'autant.
Enfin nous avons vu que l'indemnité accordée à la Compagnie représentait
les pertes faites par elle, mais seulement les pertes calculées en 1871, et qu'elle
n'avait aucune compensation pour bénéfices qu'elle aurait pu recueillir de
l'exploitation ultérieure des chemins de fer d'Alsace-Lorraine. Or, l'ensemble
des voies ferrées du pays annexé produisait, en 1912, un boni net de près de
40 millions de francs, soit 19.000 par kilomètre exploité. On peut tenir pour
certain que l'Est n'eût pas manqué de construire autant de voies — au moins
de voies productives — que le Gouvernement allemand. Nous en avons comme
preuve les nombreuses lignes déjà concédées en 1870. Quant à l'exploitation
de l'Est, on peut admettre aussi qu'elle eût bien valu celle de l'étranger. Dans
ces conditions, l'annuité de 20 millions touchée par la Compagnie ne repré-
sente donc guère plus de la moitié du bénéfice annuel qu'elle tirerait de ses
chemins de fer alsaciens-lorrains. Cela montre l'énorme dommage subi par
notre Compagnie de l'Est en 1871. Comme le ])ays, elle avait souffert grande-
ment du désastre; nous voulons espérer que, comme lui aussi, elle aura une
revanche réparatrice.
Paul Meuriot.
- 91 -
III
CHRONIQUE DES QUESTIONS OUVRIÈRES ET DES ASSURANCES
SUR LA VIE
La lutte contre le chômage en France. — L'Office départemental du Placement et
de la Statistique du travail, dont les services sont installés 50, rue de Rivoli, a publié,
sous le titre : Le Service du Placement général et les Services de placement profession-
nels paritaires, une très intéressante brochure de propagande qui fournit les rensei-
gnements suivants : historique de la création de l'OfficO; composition de l'Adminis-
tration de l'Office, organisation du service de placement général, organisation du
service de placement professionnel paritaire; cette brochure n'est, du reste, ainsi que
le fait prévoir le 11° 1 dont elle est afïectée, que la première d'une série; elle l'annonce
d'ailleurs dans les conditions les plus favorables au double point de vue de la valeur
intrinsèque et de la forme extérieure dont le caractère à la fois scientifique et pratique
porte la marque do l'intervention du président de l'Office, M. Edouard Fuster.
Le DalIoz et la guerre. — La collection du Dalloz dont j'ai, dans des chroniques
antérieures, signalé les précédents volumes, vient de s'enrichir de deux nouveaux
livres. Edités comme leurs aînés par la célèbre administration du n° 11 de la rue
Soufïlot, en petits volumes de 16 X 10 1/2 centimètres et au prix modique de 2 francs,
ils constituent la suite du tableau législatif de la guerre actuelle.
Le sixième volume, relatif à la période du 1^^ août au 1^^ octobre 1915, montre
les efforts accomplis pour développer l'application du principe de la nation armée
en vue de la mise en œuvre de la loi du 17 août 1915 (loi Dalbiez) qui garantit
la juste répartition et une meilleure utilisation des hommes mobilisés ou mobili-
sables. Pour s'en tenir au domaine des questions ouvrières et des assurances sur
la vie qui fait l'objet de cette chronique, il convient de citer le décret du 28 août
1915 portant prorogation des contrats d'assurance, de capitalisation et d'épargne
et les instructions ministérielles, l'une du 18, l'autre du 19 septembre 1915, qui ont
déterminé respectivement l'application de la loi susvisée, d'une part aux houillères
et d'autre part à tous les établissements qui travaillent pour la défense nationale.
Le septième volume, qui embrasse la période du 15 octobre au 15 novembre
1915, contient : la circulaire du 11 octobre 1915 par laquelle le ministre de la Guerre
a rédigé un guide indiquant pour chacune des pièces exigées dans la constitution
des dossiers de pensions de veuves de militaires les mentions nécessaires à la régu-
larité de celles-ci et fournissant la solution des difficultés d'ordre pratique; la cir-
culaire ministérielle du 18 octobre 1915 relative au non-cumul de la pension et des
délégations de solde ou allocation; le décret du 25 octobre 1915 qui institue pour
la durée de la guerre, dans chaque région de corps d'armée de la zone de l'inté-
rieur, un comité consultatif d'action économique chargé de soumettre des propo-
sitions au sous-secrétariat du ravitaillement et de l'intendance, en vue de rechercher
les mesures propres à maintenir et à développer l'activité agricole, industrielle et
commerciale, en particulier grâce à l'emploi rationnel de la main-d'œuvre civile et
militaire et à la mise en œuvre des ressources locales; le décret du 30 octobre 1915
qui proroge les contrats d'assurance, de capitalisation et d'épargne, le règlement
d'administration publique du 31 octobre 1915 qui définit la procédure de liquidation
des pensions militaires.
Les deux volumes qui viennent d'être analysés ne se recommandent pas seule-
ment par l'intérêt de leur documentation; ils ne méritent pas moins la faveur du
public en raison des facilités de recherche qu'ils offrent comme les tomes antérieurs,
grâce à la perfection de la typographie et à la clarté des tables dont la dernière
s'applique à l'ensemble des deux volumes.
Notre prochaine chronique rendra compte du liuitiènu^ volume de cette collection
dont la prolongation des hostilités semble devoir faire une véritable encyclopédie.
- 98 -
L'Annuaire du Bureau des Longitudes. — La collection de l'Annuaire du Bureau
des Longitudes est précieuse pour quiconque s'occupe d'assurance en raison de la
reproduction, qu'il présente à intervalles réguliers, des tables de mortalité. De plus,
lors même que le volume de l'année courante ne les contient pas, il offre un intérêt
par les renseignements généraux d'ordre statistique et monétaire qui rendent néces-
saire au statisticien la possession intégrale de cette inestimable série d'annuaires.
Celui d3 l'année 1916 (1) ne le cède en rien à ses devanciers : il atteste à la fois la
sérénité des savants qui y ont collaboré au milieu dos préoccupations des heures
tragiques ressenties jusqu'au sein de l'Institut et l'admirable vitalité de la maison
d'édition qui, en dépit de la mobilisation de son chef, n'a pas laissé soupçonner
aux lecteurs de l'annuaire les difficultés d'ordre pratique dont la réalisation d'un
tel volume est actuellement l'objet.
Les pensions à option des ayants droit de militaires fonctionnaires. — Dès le « Coup
de Tanger », j'avais, dans V Economiste français signalé une lacune de notre législa-
tion des pensions à l'égard du fonctionnaire mobilisé s'il était blessé ou de ses
ayants droit s'il était tué au cours de l'accomplissement de son devoir militaire :
la pension que la loi militaire attribuait aux intéressés était notablement inférieure
à celle qui leur était dévolue en cas de sinistre dont ils étaient victimes dans
l'exécution de leur service civil. Malgré une répétition de mon initiative après le
« Coup d'Agadir » et le dépôt d'une pétition au Parlement, je n'avais pu obtenir le
vote, ni même l'examen de la proposition de loi dont j'avais saisi la Commission
des pensions de la Chambre des Députés» Ce n'est qu'au cours de la guerre actuelle
que le législateur a cherché à régler la question, sur le rapport de M. Pierre Massé
du 14 janvier 1915, par une loi du 14 mars suivant.
Toutefois, d'une part, la multiplicité du nombre des intéressés et, d'autre part,
la complexité de la procédure à suivre rendaient d'autant plus indispensable la
rédaction d'un guide susceptible de les éclairer, que notamment les pièces à fournir
sont définies non seulement par la circulaire du ministre de l'Intérieur du 19 février
1915, mais encore par diverses notes que le ministère de la Guerre a publiée^ au
Journal officiel.
Nul n'était plus qualifié pour cette tâche à la fois ardue et minutieuse que
M. Edg. Trigant-Genesto, qui joint à sa longue expérience administrative, attestée
par son titre de sous-préfet honoraire, la science juridique dont il a donné la mesure
et la preuve comme professeur de pratique administrative à l'Institut pratique de
la Faculté de Droit de Poitiers. Il a donc rendu un véritable service en publiant un
Guide formulaire des demandes de pensiofis à option des veuves de militaires fonction-
naires tués à Vennemi ou morts de blessures ou maladies reçues ou contractées à la
guerre (2). Les intéressés y trouvent non seulement le texte de la loi, mais encore
les commentaires les plus détaillés, l'énumération complète des formalités à remplir
avec reproduction du modèle d'attestation exigée pour éviter le cumul d'une pen-
sion et d'une autre allocation.
Le complément de ce', indispensable opuscule est le Manuel formulaire des demandes
de pensions et de secours immédiats des veuves et orphelins des militaires non fonction-
naires tués à Vennemi ou morts de leurs blessures ou mcdadies reçues ou contractées à
la guerre (3). La réunion do ces deux précieux instruments de recherche évitera aux
ayants droit des victimes des démarches inutiles et des retards Cans l'entrée en
jouissance des pensions auxquo les ils ont droit; ils no peuvent donc qu'être très
reconnaissants à M. Edg. Trigant-Genesto do sa patriotique initiative qui revêt un
caractère particulièrement touchant d'assistance et de réconfort.
Ce n^est point, du reste, la seule dont ce dévoué fonctionnaire puisse s'honorer;
deux autres guides destinés, l'un aux réformés n^ 1, n° 2 et réformés temporaires et à
(1) In-1 6 de près de 700 pages avec 41 figures et 3 planches, Paris, Gauthier-Villars.
1 fr. 50.
(2) Une brochure, 11, rue Louis-Mie, Bordeaux, 0 fr. 75.
(3) Bordeaux, mémo adresse, 1 franc.
- 99 -
leurs familles (1), l'autre aux maires et officiers de l'état civil municipaux en cas de
décès aux armées ou dans les hôpitaux et en cas de disparitions (2), ce dernier guide
ayant été, d'ailleurs, gracieusement donné à l'État par l'auteur, attestent que celui-ci
a étendu sa sollicitude éclairée à toutes les victimes de cette lutte mondiale.
la Caisse nationale des retraites pour la vieillesse. — La législation en vigueur
n'autorisait la Caisse nationale des Retraites à constituer des retraites que jusqu'à
concurrence de 1.200 francs et à recevoir dans une année au compte d'un même dépo-
sant que des versements ne dépassant pas 500 francs.
Pour répondre au vœu exprimé par un certain nombre de déposants, une loi du
25 décembre 1915 vient de modifier ces conditions en élevant à 2.400 francs le maxi-
mum de la rente inscriptible au grand-livre de la Caisse nationale des Retraites et
en portant à 4.000 francs le maximum annuel de versement. Cette loi a également
facilité les constitutions de rentes viagères sur la tête de jeunes enfants en autori-
sant la Caisse nationale des Retraites à recevoir au profit de ces derniers des verse-
ments, non plus seulement à, partir de l'âge de trois ans, mais dès la naissance.
D'autre part, le taux de l'intérêt servant de base aux tarifs employés pour le
calcul des rentes viagères a été élevé pour l'année 1916 de 3 1/2 % à 4 1/4 %. Par
comparaison, il eu résultera, pour les versements effectués en 1916, une augmenta-
tion sensible dans le montant des retraites.
Il n'est pas sans intérêt de rappeler enfin qu'une loi du 4 avril 1914 a supprimé
l'obligation faite aux déposants mariés de partager entre eux et par moitié leurs
versements, établissant ainsi un régime d'entière liberté. Les déposants mariés
peuvent donc, de plein droit, effectuer des versements au profit exclusif de l'un
d'eux, ce qui leur était impossible sous le régime antérieur.
L'Office du travail du Massachusetts. — L'éminent directeur du bureau de Sta"
tistiquedu Massachusetts, M. Charles F. Gettemy, a eu l'excellente idée de présenter
à l'exposition de Panama-Pacific un volume intitulé : The Massachusetts Bureau
of Statistics 1869-1915, a sketch of its history, organization and junctions. L'ancien-
neté de ce bureau, qui a été le prototype des bureaux similaires des Etats-Unis et,
il n'est pas excessif de le dire, des autres pays du monde, justifiait pleinement cet
exposé historique et ce tableau actuel d'une institution qui peut être citée comme
un modèle. Le nom de M. le colonel Wright, devenu plus tard commissaire du tra-
vail du département de Washington pour l'ensemble des Etats-Unis, est attaché à
la fondation du bureau du Massachusetts qui, sous le nom de Bureau de Statistique,
comprend six divisions" : administration, travail, manufactures, questions munici-
pales, recensement, bureaux de placement publics. Une double liste des publications
du bureau, l'une classée par sujets, l'autre détaillée, et une série de 26 graphiques
complètent et illustren ce volume de plus de cent pages. Celui-ci aura eu le mérite
de faire connaître les travaux du Bureau de Statistique du Massachusetts o, ceux
qui, sans en ignorer l'existence, pouvaient ne pas en soupçonner l'importance et l'au-
torité; quant à ceux qui, comme moi, apprécient à leur juste valeur Tceuvre
patiente et remarquable par laquelle M. Charles F. Gettemy, digne successeur de
quatre savants doublés d'administrateurs consommés, enrichit le trésor dont il a
recueilli l'héritage, il leur procure la satisfaction de voir mettre en évidence sur
un vaste théâtre le résultat d 'efforts aussi consciencieux que féconds.
Les résultats d'iuie expérience américaine d'application du minimum de salaire.
— La guerre actuelle non seulement ne doit pas faire oublier les questions ouvrières
qui se posaient avant elle, mais commande au contraire de porter l'attention la plus
vigilante sur celles qui, posées au cours des hostilités, ne seront que plus brûlantes
au lendemain de la paix. Comme, du reste, les pays d'Europe ne se prêtent guère
à des observations de cette nature en raison du caractère anormal des conditions
(1) Bordeaux, même adresse, 1 franc.
(2) Bordeaux, même adresse.
- 100 -
du travail soit chez les peuples belligérants, soit chez les nations neutres affectées
par le voisinage de ceux-ci, c'est au Nouveau Monde qu'il est préférable de demander
des enseignements. A cet égard, les expériences dont le Bureau de Statistique du
Travail de Washington nous apporte les résultats sont particulièrement suggestives.
Au premier rang de celles-ci il convient de placer l'application du salaire minimum
dans l'État d'Orégon. Sous le titre Effect of minimum- w âge déterminations in Oregon
(fasc. no 176), le Bureau de Statistique du Travail a publié l'enquête effectuée par
Mmes Marie L. Obenauer et Bertha von der Nienburg, aux frais communs de ce
bureau et de la Commission des relations industrielles des États-Unis. Il s'agit d'une
enquête relative aux femmes travaillant dans les magasins de détail de Portland,
ville d'une population un peu supérieure à 200.000 habitants, et de Salem, ville d'en-
viron 14.000 âmes, dont les conditions sont celles des autres petites villes de l'Orégon.
L'étude comporte l'indication de l'effectif occupé après et avant la fixation du mi-
nimum de salaire, le taux de salaire et le gain hebdomadaire moyen avant et après
cette réforme, l'importance des ventes avant et après la réforme, à titre de critérium
de l'influence économique de celle-ci, le coût du travail, enfin une série d'indications
réparties selon la nature des magasins, le résultat d'un interrogatoire individuel de
femmes occupées dans ces établissements, dos tableaux statistiques et des docu-
ments réglementaires.
Les conclusions de l'enquête (p. 10) ont été les suivantes : « Toutes les modifica-
tions intervenues par suite de la réduction des affaires, de la réorganisation des
entreprises et de l'augmentation des taux de salaires se sont traduites par une éléva-
tion du coût du travail féminin et du coût dn travail total qui atteint 0,003 par
dollar de vente. Cette majoration du coût n'était pas répartie également entre les
établissements... Les modifications du coût du travail féminin rapporté à 1 dollar
de vente ont varié de O'^ 008 d'augmentation dans les magasins de la banlieue de
Portland, à 0'' 012 de^réduction dans les magasins de Salem. »
Le caractère monographique de cette enquête, loin d'en diminuer la valeur, ne
la rend que plus instructive par la précision de ses résultats : elle fait le plus grand
honneur à M. Royal Meeker, l'éminent commissaire du travail des États-Unis.
Les prix des aliments dans les pays d'Europe et en Egypte durant la guerre. —
La «vie chère» est une question trop grave et trop actuelle pour qu'il soit nécessaire
d'insister sur l'importance sociale des études qui s'y rattachent et qui en justifient la
mention dans une chronique des questions ouvrières. La valeur de ces travaux ne
réside pas seulement dans la compétence de leurs auteurs : elle dérive également
des garanties d'impartialité que les peuples étrangers à la lutte européenne et à ses
répercussions immédiates offrent aux lecteurs les plus prévenus. A ces titres divers,
l'élude intitulée Foreign food priées as affected hij ihe war) fasc. n» 170), publiée par
le Bureau de Statistique du Travail des Etats-Unis, mérite d'être signalée dans des
conditions spéciales. Les éléments en ont été surtout fournis par les consuls améri-
cains qui ont entrepris la recherche des efîets de la guerre européenne sur le prix d'ar-
ticles importants, spécialement les aliments, qui interviennent dans le coût de la vie.
La période considérée est, en général, celle du 1^^ août au l'^^ décembre 1914; toutefois,
dans certains cas, la limite extrême a été portée à une date ultérieure ; dans la
mesure du possible, les prix adoptés comme termes de comparaison ont été ceux de
juin ou de juillet 1914; toutefois, dans diverses circonstances, il a été nécessaire de
rapporter les prix de guerre à ceux de mois déterminés de 1913 ou 1914. Les prix
sont donnés pour dix-huit pays (Allemagne, Autrich(% Belgique, Bulgarie, Egypte,
Espagne, France, Grande-Bretagne, Grèce, Italie, Pays-Bas, Pays Scandinaves [Dane-
mark,|^Suède, Norvège], Russie, Serbie, Suisse, Turquie) : la mention de l'Egypte
résulte de la hausse attribuée non à une variation dans l'ofTre, mais k une panique
qui, lors de la déclaration de guerre, entraîna une majoration des prix de 10 %.
Ce simple exposé, que les limites d'une chroniciuc ne permettent pas, à mon vif
regret, de transformer en une analyse détaillée, fournit du moins des éléments d'ap-
préciation suffisants pour éveiller, non seulement l'attention, mais la curiosité. Un
- 101 -
rapide coup d'œil sur les conclusions (p. 15) qui terminent l'introduction ne fait
que justifier cette opinion : on y trouve, en effet, l'indication des idées fondamentales
qui se dégagent de l'ensemble du travail, telles que : diversité de la hausse selon les
conditions locales; aggravation de la rigueur de cette hausse par la réduction du
pouvoir d'achat que le chômage, d'une part, et la mobilisation des salariés, d'autre
part, imposaient aux familles des travailleurs militarisés et aux travailleurs non
mobilisés; intervention des gouvernements à la fois dans le placement par des organes
publics et dans l'assistance des familles de militaires par des allocations; action du
pouvoir législatif ou exécutif pour arrêter la hausse. Le doute émis au sujet de l'effica-
cité de cette dernière action ressort de la dernière phrase des conclusions du rapport
qui laisse au lecteur le soin de la juger d'après les documents placés sous ses yeux.
Je suis certain que quiconque aura parcouru cette précieuse mine de renseigne-
ments formulera le vœu d'en trouver la suite dans une étude qui continuerait le fasci-
cule actuel en le prolongeant jusqu'ct une date ultérieure. Ce vœu est, du reste,
superflu : l'esprit avéré et la sagacité avertie de M. le commissaire du travail Royal
Meeker donne par avance la certitude qu'il est exaucé avant même d'être émis.
Le Bulletin mensuel de la Commission industrielle de l'État de Kew-York. — Le
Bureau de statistique et d'enquête du département du Travail, c'est-à-dire la Com-
mission industrielle de l'État de New- York, a commencé le 1^^ octobre 1915 la publi-
cation mensuelle d'un Bulletin qui a pour objet de présenter en termes concis et
intelligibles à la majorité des citoyens les diverses formes d'activité des bureaux
et organes qui fonctionnent sous la direction de la Commission; en visant toutes ces
manifestations de tous ces organes, le nouveau Bulletin comble une lacune que lais-
sait subsister la publication, intermittente et réservée aux spécialistes, des études
particulières dressées par tel de ces bureaux.
Pour comprendre l'opportunité de ce nouveau périodique, il est essentiel de
connaître la constitution et le rôle de la Commission industrielle de l'État de New-
York. Elle n'est autre que la direction administrative du département du Travail
de cet État; elle représente la consolidation et la réorganisation du département
du Travail avec ses divers bureaux et branches : Commission d'indemnités d'acci-
dents du travail. Administration de l'établissement d'État d'assurance-accidents
{State Fund), Bureau de placement public. Ces départements et bureaux compren-
nent les subdivisions suivantes :
Bureau d'inspection, dirigé par M. James M. Lynch et chargé de l'inspection des
établissements industriels, commerciaux et autres, de la prévention contre l'in-
cendie, de la protection de la santé et de la vie, ainsi que de l'hygiène publique; il
comprend les subdivisions de l'inspection des fabriques, du commerce, du travail
à domicile, de l'hygiène industrielle et de l'inspection médicale;
Bureau de statistique et d'enquête, dirigé par M. Louis Wiard et comprenant les
divisions suivantes : statistique générale du travail, direction industrielle, acci-
dents et maladies du travail, enquêtes spéciales, impressions et publications;
Bureau de placement public, dirigé par M. W. H. H. Rogers, destiné à mettre en
rapport les chefs d'entreprise et les chômeurs pour leur commun profit : ce bureau
a des filiales dans tous les centres importants de l'État;
Bureau de conciliation et d'arbitrage, dirigé par M. Louis Wiard et chargé de
fournir une solution rapide aux conflits du travail;
Bureau d'indemnité d'accidents, dirigé par M. John Mitchell, président de la Com-
mission industrielle, et chargé d'appliquer la loi de réparation des accidents du travail
et d'administrer l'établissement d'État d'assurance-accidents, dirigé par M. E. P.
Lyon, qui constituait auparavant un département officiel distinct;
Bureau d'industrie et d'immigration, dirigé par M. W. H. H. Rogers et investi du
pouvoir de procéder à des enquêtes sur la condition, le bien-être et l'opportunité de
venue des étrangers qui arrivent ou se trouvent dans l'État.
De plus, la Commission industrielle succède aux pouvoirs et aux charges du
Bureau industriel dans la mission de rédiger un code industriel (mission qui incombe
- 102 -
à M, Louis Wiard) et de formuler pour la conduite des patrons et des ouvriers des
règles qui ont force de loi quand le Parlement n'est pas en session; elle succède éga-
lement à la plupart des pouvoirs et charges de l'Office public, désormais supprimé,
du service d'incendie (mission qui incombe à M. James M. Lynch).
Il convient d'ajouter que si le nom du Département du Travail, avec lequel se
confond la Commission industrielle, a dû être conservé dans la loi créant cette Com-
mission, c'est que ce département constitue une entité constitutionnelle.
Le simple énoncé des fonctions de la Commission atteste l'importance de son rôle :
il explique également l'opportunité de la publication du Bulletin dont les numéros
se succèdent régulièrement avec un intérêt soutenu. Pour n'en citer qu'un exemple,
je signalerai dans le n^ 4, date de janvier 1916, le résumé aussi succinct que complet
de la législation ouvrière dont les éléments doivent être, aux termes de la loi en
vigueur, affichés dans les usines : c'est un modèle non seulement pour les chefs d'en-
treprise new-yorkais, mais aussi pour les pouvoirs publics d'autres pays, dans la
mission qui leur incombe de faciliter aux intéressés l'application des mesures légales.
En un mot, le Bulletin qui vient d'être créé à New- York fait le plus grand honneur
à M. Louis Wi rd, qui en est le commissaire surveillant, et à M. Willard Marakle
qui en assure la rédaction et la publication.
Les rapports du commissaire des assurances du Massachusetts. — Les rapports
que le savant commissaire des assurances, M. Frank H. Hardison, adresse chaque
année à la Cour générale du Massachusetts ne se réduisent pas à des tableaux sta-
tistiques et à la reproduction des bilans et des comptes annuels des établissements
d'assurance. Ils contiennent, en outre, dans une très instructive introduction, une
série de chapitres d'intérêt général et d'études relatives à des espèces intéressantes.
Les deux derniers rapports relatifs l'un à l'année 1913, l'autre à l'année 1914, sont
particulièrement remarquables.
Le premier rapport consacre des développements étendus à la réparation des
accidents du travail au point de vue de l'assurance, question spécialement intéres-
sante à raison de l'entrée en vigueur d'une réforme législative intervenue depuis
deux ans. Le rapport examine tour à tour l'application de taux individuels aux chefs
d'entreprise selon les conditions de sécurité de l'établissement de chacun d'eux, l'éta-
blissement, par les compagnies d'assurances, d'un tarif de risques d'après une classi-
fication rationnelle, l'absence de l'élément moral dans l'appréciation du risque, la
surveillance des taux de primes par les pouvoirs publics, celle de l'application uni-
forme du tarif de risques par toutes les compagnies, la concurrence, en matière de
primes, des compagnies par actions et des sociétés mutuelles, la garantie du paiement
des indemnités, la statistique des accidents du travail dans l'Etat de Massachusetts.
Le second rapport expose la question fondamentale du rôle du commissaire des
Assurances dans ses relations avec les assurés. Sous le titre : « Un besoin du départe-
ment des Assurances », il expose que le Commissariat des Assurances reçoit les récla-
mations, explique les clauses des contrats, traite du règlement des sinistres et, en
général, fournit tous renseignements sur l'assurance; mais, comme il en résulte un
notable surcroît de travail, l'affectation d'un employé supplémentaire a été jugée
indispensable; toutefois la Cour générale, saisie de la question, a discuté la compé-
tence du commissaire des Assurances en cette matière : le rapport signale à cet
égard la mission analogue du Bureau des accidents industriels {Industrial Accident
Board) qui est chargé non seulement de reviser les constitutions de rentes, mais
encore d'examiner les réclamations des intéressés.
Ce même rapport mentionne, de plus, à titre de faits importants, la mutualisation
de deux grandes compagnies d'assurance, la « Prudential » et la « Metropolitan »,
et il expose la situation de l'assurance-accidents.
La brève analyse qui précède suffit à montrer la valeur de ces rapports qui font
le plus grand honneur à M. le commissaire Hardison et à son savant actuaire,
jyjme Emma Warren Cushman. De t(^ls documents sont la meilleure caution du
Commissariat dans l'exécution de la tâche qu'il accomplit pour l'intérêt commun des
assureurs et des assurés. Maurice Bellom.
- 103 -
IV
VARIÉTÉ
STATISTIQUE PENITENTIAIRE DE SUEDE — 1913
Le nombre total des individus arrêtés et condamnés, détenus dans les établisse-
ments pénitentiaires en 1913, s'est élevé à 25.049, se répartissant comme suit :
Hommes Femmes Total
Restants àla fin de 1912
Entrés pendant l'année 1913 . . .
2.639
20.634
311
1.465
2.950
22.099
Total
23.273
20.619
2.654
1.776
1.437
339
25.049
Sortis pendant l'année
Restants à la fin de 1913
22.056
2.993
Total
23.273
1.776
25.049
Le nombre des arrêtés pour crimes ou délits était de 4.317, dont 3.945 hommes et
372 femmes. Pour la période décennale de 1904-1913, il s'est produit dans ce nombre
une diminution de 6.944 à 4.317, soit 37,8%.
Les individus condamnés aux travaux forcés ont été :
Hommes Femmes Total
Entrés pendant l'année. . . . ' 1.813 167 1.980
Restants à la fin de l'année 1.368 119 1.487
Des 1.980 détenus pénitentiaires arrivés cette année-là, 695, soit 35,1%, ont subi
auparavant des travaux forcés.
Du même nombre, la condamnation à la perte des droits civiques a été appliquée
à 523 personnes pour un certain temps, et à 5 pour la vie.
Les condamnés des deux sexes se répartissent d'après les classes d'âge comme suit :
Hommes Femmes
Agés de moins de 20 ans 191 14
Agés de 20 ans et au delà 1.622 153
Du total des restants à la fin de l'année étaient :
Hommes Femmes
Détenus en cellule 1.193 104
Détenus en prison commune 175 15
Grâce parfaite de la peine entière ou d'une partie de la peine est accordée à 11 hom-
mes et 3 femmes. Libération conditionnelle est accordée à 46 hommes et 4 femmes.
Lls chiffres des individus condamnés à F emprisonnement ont été les suivants :
Hommes Feaimei
a) Condamnés à V emprisonnement simple :
Entrés pendant l'année 949 37
Restants à la fin de l'année 196 8
b) Détenus qui ont subi V emprisonnement faute de ressources pour payer l'amende :
Entrés pendant l'année 14.785 701
Restants à la fin de l'année 856 7
Des nouveaux détenus arrivés en 1913 ont été condamnés aux travaux forcés ou
à l'emprisonnement simple : 1.980 la première fois et 508 la deuxième fois. Il ressort
de ces chiffres que 508, soit 25,7 %, sont entrés dans la classe des récidivistes.
- 104 -
Les individus arrêtés en 1913 pour vagabondage ou mendicité ont été : 1.469 hom-
mes et 537 femmes.
Les détenus qui ont été assujettis aux travaux publics : Hommes Femmes
Entrés pendant l'année 665 272
Restants à la fln de l'année 455 180
Des nouveaux détenus ont subi auparavant : nommes Femmes
a) Des travaux forcés 304 66
b) Des travaux publics 442 199
Du même nombre étaient : Hommes
Femmes
En état de travailler 498 237
Peu capables de travailler 167 35
Par une statistique commencée en 1887, puis continuée dès lors, sur le nombre des
prisonniers qui ont commis leur infraction criminelle ou délictueuse en état d'ivresse,
ou qui, antérieurement à la perpétration, s'étaienc adonnés à Vivrognerie, il s'est
montré, d'année en année, que pour environ 70 % de toute la population mâle des
prisons, l'abus des boissons alcooliques avait été la cause plus ou moins directe de
leur culpabilité. A cet égard, les chiffres de 1913 sont les suivants :
Des 1.813 détenus pénitentiaires mâles arrivés cette année-là, 1.265, soit 69,7 %,
s'étaient rendus coupables sous l'influence de l'ivresse, ou s'étaient adonnés à, l'ivro-
gnerie avant la perpétration, tandis que des 167 femmes entrées pendant l'année
aux pénitenciers, 47, soit seulement 28,1 %, pouvaient être rapportées à ce groupe.
Au même groupe appartenaient, parmi les individus condamnés à, la prison simple,
64,6 % d'hommes et 32,4 % de femmes.
A l'égard des connaissances religieuses, les données recueillies ont fourni les résul-
tats suivants :
Possédaient des connaissances bonnes 13,4%
— — passables 68,4
— — faibles 17,1
— — nulles 1,1
Les bibliothèques des prisons ont possédé à, la fin de 1913 le nombre d'ouvrages sui-
vant :
De religion 19.603
D'histoire et de géographie 4 . 202
D'histoire naturelle 2 . 695
De sujets différents 19.913
Total 46.413
Des sociétés de patronage existent dans toutes les provinces. Il y a en outre une
société centrale à Stockholm pour le pays entier. Pendant l'année 1913, 2.791 libérés
dos établissements pénitentiaires ont été secourus.
L'avoir total des caisses d'épargne des établissements pénitentiaires s'élevait à la
fin de 1913 à 551.800 francs. Conformément au but qu'on a envisagé en créant ces
fonds, des sommes assez considérables sont versées annuellement pour porter secours
aux prisonniers libérés.
En 1913, le nombre des malades dans toutes les prisons se montait à, une moyenne de
2,52 %. Quant à la mortalité, elle s'élevait à 0,51 % en moyenne.
Les frais du service des prisons se sont élevés en 1913 à 3.544.000 francs.
Les recettes du travail étaient de 850.0000 francs. * b.rriol
Le Gérant : l\. STEINHEIL
SANCV, IMI'niSinUI-: HF.IUiEn-I.EVUAULT
/
JOURNAL
DE LA
SOCIÉTÉ DE STATISTIQUE DE PARIS
N» 4. — AVRIL 1916
PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE DU 15 MARS 1916
OUVERTURE DE LA SÉANCE PAR IVI. MALZAC, PRÉSIDENT, ET ADOPTION DES PROCÈS-VERBAUX DES
SÉANCES DES 19 JANVIER ET 16 FÉVRIER 1916.
NOMINATION ET PRÉSENTATION DE MEMBRES TITULAIRES.
PRÉSENTATION D'OUVRAGES ET CORRESPONDANCE.
COMMUNICATIONS DU TRÉSORIER ET DU RAPPORTEUR DE LA COMMISSION DES FONDS ET ARCHIVES.
COMMUNICATION OE M. PAUL MEURIOT SUR LE REVENU DOMANIAL DES ÉTATS ALLEMANDS.
OUVERTURE DE LA SÉANCE PAR M. MALZAC, PRÉSIDENT, ET ADOPTION DES PROCÈS-
VERBAUX DES SÉANCES DES 19 JANVIER ET 16 FÉVRIER 1916
La séance est ouverte à 17*^ 40, sous la présidence de M. Malzac, président,
qui met aux voix l'adoption du procès-verbal de la séance du 19 jan\'ier 1916,
inséré dans le Journal de février, et celui de la séance du 16 février 1916, inséré
dans le Journal de mars. Ces deux procès-verbaux sont adoptés sans obser-
vations.
NOMINATION ET PRÉSENTATION DE MEMBRES TITULAIRES.
M. le Président met aux voix les candidatures de :
MM. Archdeacon (Ernest), vice -président de la Ligue aérienne, présenté
par MM. Bertillon et E. Berr;
AuTERBE, actuaire de l'Union-Vie, présenté par MM. Barriol et Brochu;
BuRAT (Jules), courtier de change, présenté par MM. Brizon et Barriol;
Grand JEAN (Georges), directeur de la Banque française pour le Commerce
et l'Industrie, présenté par MM. Malzac et R.-G. Lévy;
Simon (Charles-Abel), courtier de change, présenté par MM. Cressaty et
Barriol;
1"^* SBBLB. 57* TOL. — ■• 4 8
- 106 -
vSiREY (Charles), avocat à la Cour d'appel, présenté par MM. A. Neymarck
et Barriol.
Ces candidatures sont acceptées à l'unanimité et MM. Archdeacon, Au-
TERBE, BuRAT, Grandjean, Simon et SiREY sont nommés membres titu-
laires.
Il présente la candidature de M. Fernand Maroni, chroniqueur financier
des Débats, demeurant à Paris, présenté par MM. Liesse et Barriol.
PRÉSENTATION D'OUVRAGES ET CORRESPONDANCE
M. le Président donne la parole à M. le Secrétaire général, qui fait part
à la Société de la réception d'un certain nombre d'ouvrages; il signale notam-
ment :
République Argentine. — Commerce extérieur pendant les neuf premiers
mois de 1914 et 1915.
Danemark. — Communications statistiques 1915, 4^ série (XLVII).
Communicati"ons statistiques 1916, 4® série (IL).
Massachusetts. — Rapport sur les statistiques du travail, 1915. •
Finlande. — Annuaire statistique de la Finlande pour 1914.
Statistique judiciaire et criminelle pour 1913.
Statistique médicale annuelle pour 1912 et 1913.
Mouvement de la population, 1911-1912.
Population de la Finlande au 31 décembre 1910.
Statistique des industries, 1913.
Statistique forestière, 1912.
Commerce, 1913.
La Banque de Finlande, les banques privées et les établissements hypo-
thécaires en 1913 et 1914.
Aperçu statistique de l'état des établissements d'instruction secondaire
en Finlande pendant l'année scolaire 1913-1914.
Statistique des arts et métiers.
Statistique annuelle des chemins de fer, 1913.
France. — Statistique du commerce dans les colonies françaises en 1913.
Rapport à l'Assemblée générale des actionnaires de la Banque de France
du 27 janvier 1916.
Statistique sanitaire de la France, 1912,
Japon. — Annuaire financier et économique du Japon pour 1915.
Russie, — Commerce extérieur de la Russie par la frontière d'Europe pen-
dant l'année 1915.
Suède. — Statistique générale annuelle des chemins de fer, 1913.
Statistique des caisses d'épargne et de certains établissements de crédit
analogues pour 1914.
La Société royale de Géographie d'Espagne a fait connaître qu'elle était
sur le point de célébrer le quarantième anniversaire de sa fondation; invo-
quant les excellentes relations qu'elle a toujours entretenues avec la Société
de Statistique de Paris, elle a invité cette dernière à participer, par l'envoi
d'une délégation, aux fêtes projetées. M. le Président propose à l'Assemblée
d'adresser à la Société royale de Géographie d'Espagne l'expression des féli-
citations et des remerciements de la Société de Statistique de Paris et de
prier M. Barthe, membre titulaire de la Société en résidence à Madrid, de la
représenter aux séances solennelles qui auront lieu les 26 et 27 mars prochain;
ces propositions sont adoptées à l'unanimité.
- 107 -
COMMUNICATIONS DU TRÉSORIER ET DU RAPPORTEUR DE LA COMMISSION DES FONDS
ET ARCHIVES
M. le Président donne la parole à M. Matrat, trésorier, pour présentation
à la Société du bilan au 31 décembre 1915, des comptes de l'exercice écoulé
et du budget de prévision pour 1916. On trouvera ci-après la copie de ces
documents.
M. Paul Meuriot, vice-président, présente au nom de la Commission des
Fonds et Archives le rapport sur les comptes de la Société. Conformément à
ses conclusions, la Société décide, sur la proposition de M. le Président, d'ap-
prouver les écritures présentées par M. le Trésorier et de lui adresser de cha-
leureux remerciements pour le dévouement avec lequel il s'acquitte de sa
gestion.
M. le Président exprime également la gratitude de la Société à son secré-
taire général pour les soins attentifs qu'il donne à la composition du Journal;
sans dépasser les crédits qui lui étaient alloués, il a fait en sorte que cet organe
de la Société reste plus attachant et plus vivant que jamais.
COMMUNICATION DE M. PAUL MEURIOT SUR LE REVENU DOMANIAL DES ETATS ALLE-
MANDS
M. le Président donne la parole à M. Paul Meuriot.
M. Paul Meuriot fait d'abord observer que c'est bien à dessein qu'il a
intitulé sa communication : Revenu domanial « des Etats allemands » et non
« de l'Empire d'Allemagne ». L'Empire n'a pas, en effet, d'autre revenu
domanial que ceux qui proviennent d'Alsace-Lorraine; il rappelle en quelque
sorte pour mémoire l'existence de Fonds d'Empire qui ont aujourd'hui disparu
le trésor de guerre de la Tour de Spandau, créé en 1871 et doublé en 1873, et
le Fonds des Invalides; le canal de Kiel, qui est propriété d'Empire, offre
une valeur militaire plutôt qu'économique.
L'orateur divise l'étude des revenus domaniaux des Etats allemands en
trois grandes parties, se rattachant : la première aux domaines proprement
dits et aux forêts, la seconde aux mines et industries qui s'y rattachent, la
troisième enfin aux chemins de fer.
L'Etat prussien en particulier possède, surtout dans la partie orientale de
son territoire, des vastes domaines (436.000 hectares environ), qui sont soit
affermés, soit en régie, et dont le revenu de 17 millions de marks représente
un produit moyen de 40 marks à l'hectare; il est en outre propriétaire de
forêts dont l'étendue croissante dépasse 3 millions d'hectares et qui lui donnent
des revenus variables mais importants (78 millions de marks de revenu net
en 1913, produits de la chasse et des tourbières compris).
M. Meuriot examine ensuite la composition et le revenu des domaines de
la Bavière, de la Saxe, du Wurtemberg, des grands-duchés et des autres
petits Etats.
La superficie de l'ensemble du domaine foncier des États allemands est de
5.700.000 hectares environ, soit plus du dixième de la superficie totale desdits
Etats; dans cet ensemble, les domaines proprement dits n'entrent que pour
770.000 hectares; tout le reste représente les forêts domaniales dont l'étendue
correspond au tiers de la surface forestière de l'Europe.
La Prusse, la Bavière, la Saxe possèdent des mines; on peut même dire que
l'exploitation minière constitue l'une des richesses de domaine de l'État prus-
sien, puisqu'elle porte, en 1913, d'une part sur une production de plus de
19 millions de tonnes de houille et de 4 millions de tonnes de lignite et, d'autre
part, sur une production assez importante de fer (90.000 tonnes), de plomb,
cuivre et zinc (67.000 tonnes), de sels de potasse (452.000 tonnes), de sel
1
- 108 -
gemme (120.000 tonnes) et même d'ambre (390 tonnes) ; la valeur de l'ensemble
de cette production représente une somme d'environ 315 millions de marks.
D'autres États allemands encore, le Wurtemberg, le grand-duché de Bade
et le Brunswick, sont propriétaires d'un domaine minier; ce dernier exploi-
tant d'ailleurs en commun avec la Prusse.
Quelques établissements industriels fonctionnent comme annexes à ces
exploitations minières, usines métallurgiques, usines de couleurs, fours à
chaux et l'on peut y joindre la manufacture royale de porcelaine de Saxe.
Le conférencier expose enfin le grand rôle que jouent, même au point de
vue fiscal, les chemins de fer allemands.
C'est en effet à l'Empire et aux États particuliers qu'appartiennent la plu-
part des voies ferrées allemandes,^ plus de 58.000 kilomètres sur 63.000, soit
environ 94 %. Dans ce réseau d'État la Prusse arrive naturellement au pre-
mier rang avec une longueur de plus de 37.000 kilomètres, puis viennent la
Bavière avec 8.000, la Saxe, le Wurtemberg, le grand-duché de Bade, la Hesse
et le Mecklembourg-Schwerin avec des longueurs variant de 3.400 à 1.100
kilomètres et, pour mémoire, l'Oldenbourg avec 600 kilomètres seulement.
L'Empire enfin possède 2.000 kilomètres de voies ferrées.
Les recettes brutes des chemins de fer représentent environ 3 milliards
294 millions de marks et les recettes nettes 786 millions de marks.
■"■ Récapitulant ces diverses sources de revenus, M. P. Meuriot fait ressortir
que l'ensemble des revenus bruts que les États allemands tirent de leur
domaine proprement dit, des forêts domaniales, des exploitations minières et
I des industries annexes et enfin des chemins de fer dépasse 4 milliards de
marks, c'est-à-dire 5 milliards de francs. Sur un budget total qui, en 1913,
était de l'ordre de grandeur de 7 milliards 300 millions de marks, les revenus
bruts domaniaux correspondent donc à une proportion de plus de 54 %. Si,
en faisant usage d'un taux raisonnable, on capitalisait ce revenu, on arrive-
rait à une valeur d'ensemble de l'ordre de grandeur de 80 à 100 milliards.
"''"M. le Président donne la parole à M. Colson.
M. Colson s'excuse de prendre la parole pour ainsi dire à l'improviste et
sans être à même de fournir des chiffres précis. Comme suite à la communica-
tion si intéressante de M. Meuriot, il croit devoir appeler l'attention de la
Société sur la médiocrité relative du revenu des chemins de fer allemands.
On fait, en effet, bien souvent remarquer que les chemins de fer allemands
rapportent à l'Empire ou aux États propriétaires des revenus élevés qui
représentent, bon an, mal an, plus de 5 % du capital engagé et atteignent
même, en Prusse, 6 à 7 % de ce capital : on ajoute que le revenu des chemins
de^ fer prussiens est très supérieur au montant des charges de la dette de
l'État, résultat qui semble merveilleux si on le compare au rendement de nos
chemins de fer français.
Faut-il expliquer ce succès apparent par une particulière habileté dans
l'exploitation? Ést-il le fruit de la gestion d'État? Assurément non. La vérité
est que les chemins de fer allemands bénéficient, par rapport aux chemins de
fer français, d'avantages considérables, parmi lesquels il faut signaler les
conditions topographiques particulières de l'Allemagne, la grande densité de
la population et la prospérité de la situation industrielle.
Le territoire de l'Allemagne en général et notamment celui de la Prusse
comporte de vastes plaines; c'est dire que la constructidn des chemins de
fer y a été singulièrement plus facile qu'en France, non seulement par compa-
raison avec les voies du Plateau Central ou des régions alpines, mais avec
celles de l'ensemble du pays. Les voies ferrées allemandes ont d'ailleurs été
rachetées par les États avant le grand essor industriel de la nation et, par
suite, à très bon compte.
D'autre part, le trafic est bien plus élevé en Allemagne qu'en France, non à
cause d'une meilleure gestion des chemins de fer, mais à cause de la densité
— 109 —
de la population (67 millions dliabitants en 1913, au lieu de 40 pour une
même surface) et du développement de la grosse industrie dû à l'abondance
de la houille (279 millions de tonnes extraites au lieu de 41).
Les recettes kilométriques des deux réseaux allemand et français sont sen-
siblement dans le rapport de 3 à 2. Il y a donc là une première cause d'abais-
sement du coefficient d'exploitation, puisque, plus les transports sont concen-
trés, plus leur prix de revient diminue suivant la loi générale de la production
en grand.
Le rapport est à peu près le même entre les quantités transportées qu'entre
lt»s recettes, car dans l'ensemble les tarifs sont sensiblement les mêmes; en ce
qui concerne les voyageurs, ils sont un peu moins élevés en Allemagne (2,96
au lieu de 3,48 par kilomètre) du fait de l'existence de quatre classes; mais
les tarifs de marchandises sont supérieurs aux nôtres. En 1912, la taxe
moyenne par tonne kilométrique était de 4,28 en Allemagne et de 4,20 en
France. Mais l'écart réel des taxes appliquées aux mêmes marchandises est
bien plus grand car, dans l'ensemble du trafic, le pourcentage des marchan-
dises pondéreuses est bien plus élevé en Allemagne que sur nos réseaux. Par
exemple en 1908 le tarif moyen était pour la houille de 3,06 en France et de
3,25 en Prusse, pour les autres marchandises de 4,69 en France et de 4,75 en
Prusse, et pourtant la moyenne générale était de 4,28 en France et 4,14 en
Prusse, parce que le pourcentage de la houille atteignait 40 % en Prusse et
24 % seulement en France.
Ainsi les écarts de tarifs pour les voyageurs et pour les marchandises sont
de sens inverse et se compensent à peu près. Le travail répondant à une même
recette est donc à peu près le même dans les deux pays; mais l'importance
relative du trafic marchandise moins coûteux à exploiter est plus grande en
Allemagne; cette différence de composition du trafic, jointe à sa densité plus
grande, devait déjà rendre l'exploitation moins coûteuse. En outre, le carac-
tère peu accidenté du pays diminue les frais de traction. Le fait que la houille
coûte de 20 à 25 % moins cher qu'en France, que, par voie de conséquence,
le coût de l'acier, celui des travaux de constructions mécaniques, présente un
écart à peu près égal, procure aux chemins de fer des économies considé-
rables.
Parlant ensuite des conditions d'exploitation. M, Colson fait ressortir
qu'elles sont beaucoup plus favorables aux chemins de fer qu'en France. La
législation commerciale dégage en Allemagne la responsabilité des chemins
de fer dans une foule de cas, alors que toute clause qui tendrait à l'atténuer
est nulle en France. Les délais donnés par les tarifs sont moins longs; mais
ces délais ne courent pour les wagons complets que du moment où le chef de
gare a promis les wagons : le caractère protestatif de ce point de départ fait
qu'en pratique le chemin de fer n'a aucune indemnité à payer dans les cas
très fréquents où les wagons demandés sont refusés. Enfin, la tarification ne
comporte pour les expéditions de détail qu'un seul tarif presque aussi élevé
que celui que nous appliquons aux marchandises de la 2^ série. Il n'y a de
tarifs réduits que pour les wagons complets. Dans ces conditions, les expédi-
teurs de détail ont intérêt à s'adresser à des groupeurs, qui paient le wagon
complet et leur demandent un prix intermédiaire entre le prix par wagon
complet et le prix de détail. Il résulte de là une grande simplification, pour
l'exploitation, dans les écritures, dans la composition, le chargement et le
déchargement des wagons. Le tarif par wagon complet représente 95 ou 96 %
de l'ensemble du trafic en Allemagne et il en résulte une réduction de frais
considérable.
Les commodités données aux voyageurs ne sont pas plus grandes en Alle-
magne qu'en France. Il y a sans doute plus de trains puisqu'il y a plus de trafic;
mais si l'on en rapproche le nombre de celui des voyageurs kilométriques, on
constate que la moyenne des voyageurs par kilomètre de train en Allemagne
— 110 —
est supérieure d'environ 10% à ce qu'elle est en France. L'utilisation des trains
est donc meilleure.
En résumé, si les chemins de fer allemands dépensaient par rapport à leurs
recettes, ou — ce qui, en fait, revient à peu près au même — par rapport au
trafic, 10 ou 20 % de moins que les réseaux français, on pourrait considérer
qu'ils sont à peu près aussi économiquement exploités et que l'écart résulte
des avantages de leur situation. Or, l'écart existe bien, mais en sens inverse. En
1905, le coefficient d'exploitation était de 65% en Allemagne et de 53% en
France; en 1908, de 74% en Allemagne et 58% en France. Il est vrai qu'en
1912 l'écart est bien moindre, 66% en Allemagne, 63% en France.
Jusqu'en 1908, la comparaison entre les chemins de fer allemands et les
chemins de fer français était en même temps une comparaison entre les che-
mins de fer d'État et les chemins de fer concédés. M. Meuriot a bien montré
qu'en Allemagne la concession tenait une place aussi restreinte que la régie
directe en France. Depuis le rachat de l'Ouest réalisé à la fin de 1908, la partie
du réseau français où se pratique la coûteuse exploitation par l'Etat n'est plus
négligeable. Mais, jusque-là, que l'on prenne le coefficient d'exploitation ou
que l'on prenne la dépense par unité kilométrique de transport (voyageur ou
marchandise) on constate que les chemins de fer allemands auraient dû dé-
penser de 10 à 20% de moins que les nôtres et dépensaient 10 à 20% de plus.
Comment s'expliquer ce résultat? L'Administration des Chemins de fer est,
en Allemagne comme en France, foncièrement honnête; le personnel est dis-
cipliné; la main-d'œuvre, un peu plus coûteuse peut-être aujourd'hui en Alle-
magne qu'en France, l'était bien moins il y a dix ans. Les charges imposées
aux chemins de fer pour les retraites y sont bien moindres. On ne peut donc
expliquer le surcroit de dépenses que par le coulage, la surabondance du per-
sonnel, le manque de soins dans l'exploitation. Il y a là un fait qu'il paraît
intéressant de bien mettre en relief. Le revenu industriel des chemins de fer
est considérable en Allemagne, comme l'a montré M. Meuriot. Mais l'impor-
tance de ce revenu n'est pas le fruit d'une bonne exploitation, elle est la consé-
quence des conditions topographiques, démographiques et minéralogiques
particulièrement favorables qui ne peuvent que laisser de grands profits.
En France, jusqu'à ces dernières années, les chemins de fer, tout compte fait,
procuraient à l'État plus de recettes qu'ils ne lui imposaient de charges de
toute nature. Aujourd'hui, il y a presque égalité. C'est grâce à la gestion
remarquablement' économique de nos compagnies que ce résultat a été obtenu.
Une première extension de l'exploitation en régie a déjà sensiblement rapproché
ces résultats moyens de ceux de l'Allemagne. Il est probable que, si on la géné-
ralisait, on arriverait très vite à une exploitation plus <'oùteuse qu'en Alle-
magne, dans la proportion répondant à la dilîérence des conditions techniques
et commerciales et un déficit considérable retomberait en grande partie sur
le budget par le jeu des conventions financières.
M. Alfred Neymarck s'associe aux si justes observations que vient de pré-
senter M. CoLSON : il ajoute qu'une grande différence existe entre la situation
de^ nos grandes compagnies de chemins de fer et celle de chemins de fer de
l'État prussien. Nos compagnies amortissent tandis que l'État prussien, sauf
par des chiffres infinitésimaux, n'amortit pas.
Si, par exemple, on se reporte aux statistiques annuelles de M. Alfred Ney-
marck sur les émissions et remboursements d'obligations de chemins de fer,
on voit que nos compagnies françaises, depuis 1883 seulement, ont amorti plus
de 5 milliards.
Que l'on fasse le même travail pour les compagnies allemandes, on verra
l'énorme différence qui existe entre les nôtres et elles, au point de vue financier.
Les charges de l'amortissement des emprunts de nos compagnies augmentent
d'autant les dépenses, en sorte que les conditions d'exploitation des unes et
des autres ne sont point assimilables.
— m —
A ce sujet, M. Alfred Neymarck dépose sur le bureau de la Société la statis-
tique annuelle qu'il établit chaque année depuis plus de trente ans, sur les
émissions et remboursements d'obligations de grandes compagnies de chemins
de fer, pendant l'année 1915.
Après une brève discussion relative aux conditions d'amortissement du
capital des chemins de fer allemands, discussion où interviennent notamment
MM. Neymarck, Colson et R.-G. Lévy, M. le Président remercie M. P. Meu-
RiOT de son excellente communication et M. Colson des si intéressants
commentaires dont il l'a fait suivre.
La séance est levée à 19^ 15.
Le Secrétaire général, Le Président,
A. Barriol. Malzac.
ANNEXES AU PRO CES- VE R B AL
RAPPORT DU TRESORIER
SUR
LKS COMPTKS DK L'ANNKK 1915
LA SITUATION FINANCIÈRE ET LE BUDGET POUR L'EXERCICE 1916
Chers Collègues,
Par application de l'article 24 du Règlement de la Société de Statistique de
Paris, j'ai l'honneur de vous soumettre les comptes des recettes et des dépenses
effectuées pendant l'année 1915, auxquels est joint un relevé, permettant de
comparer la marche financière de chacun des chapitres les plus importants pen-
dant les cinq dernières années écoulées.
Un projet de budget pour l'exercice 1916 est également présenté.
Le rapprochement des chiffres énoncés pour 1915 avec ceux des années pré-
cédentes depuis 1911 vous permettra de constater immédiatement que, malgré
la guerre sanglante que notre cher pays a soutenue pendant tout le cours de
1915 et qu'il soutiendra tant qu'il sera nécessaire, les différents services de
notre Société ont été régulièrement assurés, dans des conditions qu'on peut à
bon droit déclarer normales dans leur ensemble.
Un seul d'entre eux, celui des cotisations, accuse une différence notable :
les recettes effectuées à ce sujet présentent le total de 4.182 francs, contre celui
d'un peu plus de 5.000 francs inscrit régulièrement depuis 1911 (5.045 francs à
5.018 francs).
L'écart en moins avec 1914 est de 836 francs. Il ne pouvait en être autre-
ment, et nous devons même constater que cette diminution temporaire est
bien moindre que celle qu'on pouvait craindre.
- 112 -
En effet, en 1914, la presque totalité des cotisations était encaissée lorsque
la guerre survint, tandis que toute l'année 1915 a supporté les graves
conséquences des événements militaires, qui atteignent tout le monde et qui
ont éloigné de nos tangs près de quarante de nos collègues, mobilisés à tous
les degrés, et dont le plus grand nombre n'a pu dès lors remettre la contribution
annuelle résultant du titre de sociétaire.
Ils ont rempli et accomplissent toujours les devoirs supérieurs ou héroïques
que leur demande la défense de la patrie. Nous les saluons donc. Plusieurs ont
été grièvement blessé^, nous les saluons avec émotion. D'autres ont été tués
à l'ennemi. Nous portons leur deuil en notre mémoire.
Ces hommages rendus au dévouement de nos collègues, nous descendons
maintenant au modeste rôle de la présentation de quelques détails des comptes.
Les recettes se sont élevées au total de 12.141* 50, somme presque équivalente
à celle de 12.117 francs de l'exercice précédent.
Cet équilibre provient de trois sources : d'abord la parité avec les chiffres
antérieurs des intérêts effectivement reçus pour les valeurs de la Société
(3.457f54);
Ensuite les abonnements à notre Journal ont été inscrits à la valeur moyenne
(1.442 francs) des dernières années;
Enfin la troisième source a pour heureuse cause les subventions qui nous
ont été accordées par les Pouvoirs publics (administrations de l'État, Conseil
"municipal de Paris et Conseil général de la Seine).
Ces allocations sont un témoignage des plus précieux pour la Société, tant
sous le rapport des ressources indispensables à l'exécution de ses services que
pour l'appui moral donné à son œuvre.
La Société est donc vivement reconnaissante pour ces soutiens.
En ce qui concerne les rachats des cotisations, huit sociétaires seulement ont
versé leurs annuités, soit 480 francs.
Deux de nos collègues n'ont pu effectuer cette année leurs versements de
cette nature, l'un étant mobilisé et l'autre surpris en pays envahi ; il en résultera
simplement un retard dans leur libération définitive.
D'ailleurs la diminution du nombre des rachats ne constitue en aucune
manière une perte ou un amoindrissement pour notre compagnie. Les contribu-
tions personnelles de ce chef sont remplacées par les cotisations annuelles.
Les dépenses du service courant ont été un peu plus élevées en 1915 que
pour l'exercice précédent : 13.285 francs contre 11.704 francs. Cela tient au
montant plus soutenu — et nous ajoutons normalement supérieur — fixé à
8.353* 96 pour les impressions, y compris les graphiques et les honoraires de
rédaction.
En effet, le crédit ouvert était de 8.500 francs et, si l'année dernière la dépense
était de 6.745 francs seulement, elle a atteint et dépassé 9.000 francs anté-
rieurement.
Certes les dépenses d'impressions ont besoin d'être réglées comme les autres,
mais peut-être un peu moins toutefois, parce qu'elles ne sont pas stériles.
Le Journal est l'outil de travail, d'étude et de propagande pour la Société»
- 113 -
son moyen essentiel d'action et de relations, et on pourrait dire sa vie et
son âme.
Les fonds libres au Crédit Foncier et dans la Caisse ont donc permis, par
leur emploi presque intégral, de régler les impressions comme il vient d'être dit.
Les autres dépenses — administration, annuaire, bibliothèque et loyer —
se présentent dans les conditions moyennes, un peu inférieures aux crédits
attribués à leur sujet.
Il est enfin une somme de 1.745 francs sur laquelle j'ai le devoir agréable
d'appeler spécialement l'attention. Ce n'est pas une dépense proprement dite,
moins encore un affaiblissement financier. C'est au contraire une sortie d'es-
pèces réconfortante, rentrant sous une autre forme, sortie dont on doit en
quelque sorte s'enorgueillir un peu, parce qu'elle représente un devoir accompli-
C'est un acte de solidarité, une participation à la défense de notre chère patrie,
dans la mesure et la forme qu'une société d'étude et de science peut employer;
c'est en un mot, et ce mot dit tout, la souscription à l'emprunt de 1915 pour
la défense nationale.
Outre le titre financier de 100 francs de rente 5 % qui s'y rapporte, la Société
a reçu, comme tous les souscripteurs, un certificat spécial à son nom constatant
sa participation et qui prendra rang parmi ses titres et aura, par sa nature
même, sa place en tête.
Le projet de budget pour l'exercice 1916 présente des conditions particu-
lières, en raison des circonstances que notre pays traverse actuellement.
Les cotisations prévues ont été ramenées de 4.800 francs à 4.200 francs»
valeur très rapprochée du total de 4.182 francs récolté en 1915.
Par contre, pour la même raison de fait, le taux du revenu des titres du
portefeuille général a été porté de 3.300 francs à 3.500 francs, et celui du legs
Geste est élevé de 100 francs et fixé à 1.500 francs.
Les annuités pour le rachat de cotisations figurent pour 420 francs, d'après
le nombre des sociétaires qui suivent cette voie.
Du côté des prévisions de dépenses, 50 francs ont été prélevés sur la dotation
des frais d'administration, 150 francs sur celle des frais extraordinaires et
de représentation, qui seront aussi restreints que possible dans la situation
générale actuelle, et 180 francs ont été déduits des honoraires de rédaction
ramenés à 1.500 francs, ce qui donne pour l'ensemble du Journal la somme de
7.300 francs, à laquelle s'ajoute d'ailleurs, dans la deuxième partie du budget, un
supplément éventuel de 1.100 francs, formant un disponible total de 8.400 francs,
qui correspond aux dépenses réglées pour l'exercice même qui vient de s'écouler.
J'ai donc l'honneur, avec l'appui du Conseil, de la Commission de contrôle
et de son rapporteur, de vous soumettre, chers Collègues, les comptes et le
budget dont les états et relevés sont entre vos mains.
Le Trésorier,
Paul Matrat.
114
RAPPORT PRÉSENTÉ
AU NOM DE LA
COMMISSION DES FONDS ET ARCHIVES
Par m. Paul MEURIOT
VICE-PRÉSIDENT
A la séance du 15 mars 1916
Messieurs et chers Collègues,
Le vendredis mars 1916,1a Commission des Comptes s'est réunie au domicile
de M. Paul Matrat, trésorier-archiviste de la Société. Étaient présents : MM. Mal-
zac, président, Meuriot, vice-président, Barriol, secrétaire général, et Borel,
membre du Conseil. M. Neymarck, ancien président, absent, s'était excusé.
La réunion avait pour objet, d'après l'article 24 de notre règlement intérieur,
l'examen des comptes de 1915 et du budget de 1916. Le rapport que j'ai l'hon-
neur de vous présenter a donc trait à trois éléments : le compte proprement
dit de l'année écoulée, le bilan de la Société arrêté au 31 décembre 1915, enfin
le budget de l'exercice en cours.
Pour le compte, dont le tableau suivant vous donnera le détail, le total des
dépenses ordinaires est inférieur d'un millier de francs à celui de l'exercice
1913, l'année 1914 ne permettant pas une comparaison normale. Cependant,
malgré cette diminution, notre Journal a repris sa vie ordinaire, troublée
quelque peu en 1914, lors des premiers mois de la guerre. Les frais que nous
coûte notre Journal sont la portion la plus considérable de notre dépense
annuelle. Cela est tout naturel, vu l'importance de cet organe vital de notre
Société, sans lequel son mouvement scientifique serait presque lettre morte.
Aussi ce chapitre absorbe-t-il près des deux tiers de nos dépenses. Si nous
pouvons y faire face, c'est que d'autres dépenses sont très limitées. Nos frais
d'administration ne prennent guère que le quart de notre dépense totale;
ils sont, pour 1915, inférieurs au total des trois années précédentes, surtout
de 1914, et aux prévisions budgétaires. L'an passé, une dépense exceptionnelle
vous était signalée; c'était notre contribution à la formation du Bureau perma-
nent de l'Institut international de Statistique. Cette année aussi nous enregis-
trons une dépense extraordinaire à notre compte, c'est notre souscription de
100 francs de rente 5% à l'Emprunt national de 1915. Cette souscription, que
nous avons faite d'un même cœur, n'a légalement qu'un caractère exceptionnel;
mais ai-je besoin de dire que, dans la mesure de nos modestes ressources, nous
ne demandons qu'à la renouveler?
/
- 145 -
Tableau I
EXERCICE 1915
Ire Partie.
Cotisations
Journal
Revenu de titres sans affectation
spéciale
Subventions
Totaux . . .
2^ Partie.
Rachats de cotisations . . .
Revenu des legs Coste et Mercet .
TOTADX
Totaux géskbaux. .
RECETTES
Prévues
Eftectives
4.800 ..
4.182 »
1.440 ..
1.442 «
3.458 ■>
3.458 »
3.360 »
3.060 »
13.058 «
12.142 ..
900 »
480 <.
1.716 »
2.012 a
2.(;i6 ..
2.492 "
15.674 »
14.634 »
1" Partie.
Administration
Loyer
Journal
Aunuairfi
Bibliothèque
Frais extraordinaires
Totadx
2« Partie.
Dépenses extraordinaires. . .
Revenus des annuités ; diver
reliquat
Totaux
Totaux géxéraux. .
DEPENSES
Prévues
3.530
1.000
8.580
300
380
200
13.990
1.684
15.074
3.357,70
1.000,80
8.353,96
267,65
305,75
13.285,86
1.745
Parmi nos recettes, celles qui proviennent de notre portefeuille n'ont subi
aucune réduction, ce qui témoigne une fois de plus de l'excellence de nos place-
ments. La diminution affecte exclusivement nos cotisations et les subventions.
Le prodtiit des abonnements et de la vente du Journal demeure le même. Nos
subventions marquent un recul sur 1913, correspondant à la réduction effectuée
dans l'allocation de la Ville de Paris, mais nous espérons que cette réduction
n'est que temporaire. D'autre part, nous avons encaissé la subvention du
ministère de l'Agriculture qui, l'an passé, nous avait fait défaut. La régression la
plus sensible de nos recettes provient du chapitre des cotisations (cotisations
et rachats de cotisations). Il est inutile d'en chercher la cause, trop évidente.
Mais cette situation n'a rien d'inquiétant. La recette, de ce chef, est à peine
inférieure d'un sixième à ce qu'elle a été dans le précédent exercice : elle reste,
du même taux, au-dessous des prévisions pour 1915.11 faut, croyons-nous, nous
estimer heureux de subir cette régression relativement faible, alors que de
si nombreux collègues sont mobilisés et que tant d'œuvres de guerre nous
sollicitent de façon si pressante.
L'examen de notre bilan (Voir le tableau II) nous a donné une fois de plus
l'occasion de constater la bonne situation de notre Société. Évidemment son
avoir est modique et elle ne saurait se passer des concours qu'elle a rencontrés
jusqu'ici. Mais chaque année vos rapporteurs vous disent que notre meilleure
richesse est de n'avoir pas de dettes; j'ai l'agréable mission de vous répéter la
même chose. Ce qui n'est pas moins utile pour nous, c'est la valeur de notre
actif qui, espèces mises à part, ne se compose que de titres de tout premier
ordre. Nos placements « de père de famille » comprennent en efïet de la rente
française, des obligations de la Ville de Paris, du Crédit Foncier, du Couver-
- 116 -
nement de l'Indo-Chine, des obligations de chemins de fer de la métropole
et des colonies. Le rendement, nous l'avons éprouvé, ne nous donne aucun
mécompte. Leur valeur globale a sans doute diminué à l'heure actuelle; mais,
pour nous qui ne sommes pas tenus de réaliser, il n'y a, de ce fait, aucun souci
à avoir. Avec de tels titres, nous sommes certains, comme on dit, de revoir
nos cours. Et puis, sauf la rente française, toutes nos valeurs sont rembour-
sables avec prime, et, si nous n'avons pas la témérité d'escompter un gros
lot, nous pouvons être assurés que le remboursement à 500 francs de la plu-
part de nos valeurs augmentera automatiquement notre capital.
Tableau IT
BILAN
Espèces en caisse
Titres sans affectation spéciale.
Titres avec affectation
Disponibilités
Totaux
ACTIF
au 31 décembre
1914 1915
4.433,99
100.728,47
55.902,60
4.605,85
X65.670,91
4.036,67
102.473,47
55.902,60
4.605,85
167.018,59
Capital de legs
Réserve sur cotisations raclietées.
Fonds sans affectation spéciale .
Cotisations on cours de rachat .
Provision (Médaille Bourdin) . .
Comptes courants (Legs Coste et
Mercet)
Totaux
PASSIF
au 31 décembre
1914 1915
56.197,85
29.226,93
72.414,33
1.380 »
36 «
6.416,30
165.670,91
197,35
023,03
773,91
560 »
108 .
8.356,30
167.018,59
De ce côté, dussè-je me servir d'une expression très — ou trop — courante,
le temps travaille pour nous; mais il est aussi prudent de travailler, sinon pour
lui, du moins avec lui. C'est ce que fait votre Administration en apportant
tous ses soins tant à la gestion de notre capital qu'à la préparation de notre
budget. Ce capital atteint aujourd'hui 167.018^ 59, dont 102.473^47 pour les
titres sans affectation spéciale, 55.902^ 60 pour ceux qui sont affectés à un
objet déterminé, le reste étant constitué par les espèces en caisse et disponibilités.
Nos espèces en caisse marquent une diminution de près de 400 francs. Cette
diminution, avec l'augmentation de 1.347^ 68 aux titres sans affectation spéciale,
représente intégralement le prix de nos 100 francs de rente du 5 % National.
Au passif, il n'y a aucune variation au' capital des legs; il y a diminution de
203"f 90 sur la réserve des rachats de cotisations et de 641 ^ 42 sur les fonds sans
affectation spéciale. L'augmentation porte sur les cotisations en cours de
rachat, 180 francs; sur la provision pour la médaille Bourdin à distribuer cette
année, 72 francs; enfin sur les comptes courants des legs Coste et Mercet,
1.940 francs. Il reste, au passif, un accroissement total de 1.347^ 68 correspon-
dant exactement à l'accroissement de l'actif.
Avec le bilan, votre Commission s'est fait présenter les espèces en caisse,
ainsi que les récépissés de nos titres déposés au Crédit Foncier et au Comptoir
d'Escompte. Nous avons reconnu le tout conforme aux écritures.
- Ii7 -
Enfin, nous avons examiné le projet de budget pour 1916. Les prévisions ont
été arrêtées d'après les indications que fournissait le compte de l'an passé. Le
chapitre des cotisations a été prudemment maintenu au chiffre des recettes
nettes de 1915 et, comme nous espérons bien ne rien perdre du côté de nos
revenus, ni de nos subventions, nous n'aurons pas de déception quant à nos
recettes. Aux dépenses, la plus forte part est toujours, — comme cela est juste,
— affectée au Journal. Ne voulant pas diminuer son intérêt, nous continuons
à lui réserver un supplément. Une diminution assez sensible a été faite sur les
frais généraux et une somme disponible a été gardée pour les besoins imprévus
ou les dépenses extraordinaires.
Une fois de plus, au cours de ses opérations, votre Commission a eu à cons-
tater la scrupuleuse exactitude des comptes de notre trésorier, M. Matrat, et
les améliorations incessantes qu'il s'ingénie à apporter dans la gestion de notre
budget. Il fait mentir le proverbe : le mieux est l'ennemi du bien. Aussi prions-
nous notre cher trésorier de recevoir ici l'expression de notre sincère et affec-
tueuse reconnaissance, avec l'espoir de la lui pouvoir renouveler ad multos annos.
Nous vous proposons, en conséquence :
1° D'approuver la gestion du trésorier pour 1915;
2° D'arrêter le bilan au 31 décembre 1915, tant au passif qu'à l'actif, au
total de 167.018^59;
3° D'établir le budget de 1916 à 14,894 francs aux recettes et à la même
somme aux dépenses.
Le Vice- Président rapporteur,
Paul Meuriot.
Tableaux
118 -
SOCIÉTÉ DE STATISTIQUE DE PARIS
BILAN AU 31 DECEMBRE 1915
ACTIF
ESPÈCES
lin caisse 355' iJO )
Au Crédit Foncier de France IH 27 / 4036' 67
Au Gomploir National d'Escompte 3 570 20 )
PORTEFEUILLE
(prix d'achat)
1° Titres sans affectation spéciale
. Déposés au Crédit Foncier :
100 fr. de rente 5 "/o de l'emprunt de 1915 pour la Défense nationale (Certi-
ficat nominatif de la souscription) 1745' »
•ioi fr. de rente 3 "/o (résultant de la conversion de
306 fr. de rente 4 1/2 "/o réduits à 238 fr. de rente
3 1/2 "/o). [Récépissé nM26913]
70 obligations foncières 3 °/o 1883 (Récépissés n<"
263990, 275268 et 995736)
4 obligations communales 2,60 "/o 1892 (Récépissé
n* 275 269) [N"' des obligations à lots 164 789 à
1647921
1/4 obligation Ville de Paris 2 °/o 1898 (Récépissé n"
314960) [^° de Tobligation à lots 557 7(
\
7 163' »
29 317 90
2014 65
64067 38
111 03
1400 85
13039 15
?60 2« quart].
3 obligations cliemin de fer du Sud de la France 3°/o
(Récépissé n« 297 568)
26 obligations du gouvernementgénéral de l'Indo-Cliine
3 l/2°/o 1898 1 Récépissés n"' 322 939 et 406 536).
25 obligations des chemins de fer de l'Indo-Cbine et
du Yunnan 3^/0 (Récépissé n° 409390) 11020 80/ [ 93 587 38
30 obligations cliemins de fer T. -L. -M. (fusion) S^ j
anciennes (Récépissé n« 620 607) 12 926 » „,j.jg ^
20 obligations chemins de fer de Paris à Orléans 3"/o ( "
nouvelles (Récépissé n» 620 608) 8 620 » )
18 obligations chemin de fer Paris à Orléans 3 »/o
nouvelles (Récépissé n° 741 565) 7 974 »
2 obligations chemins de fer de Paris ù Orléans 3 "/o nouvelles
(Récépissé n« 789.486) 860 20
3 obligations chemins de fer P.-L.-M. 3 °/o (fusion) nouvelles
(Récépissé n" 789485) 1285 75 . 2 936 49
2 obligations Ville de Paris 3 "/o emprunt 1910, libérées (n"' \
des ^jbligations à lots 51 7 51 7 et 517 522) [Récépissé n° 849461] 790 54 '
4 obligations Foncières 3 o/o 1883 (Récépissé n" 823 295) 1 685 »
3 obligations chemins de fer P.-L.-M. 3 °/o (fusion) nouvelles (Récépissé
n» 916459) 1228 80
R. Déposés au Comptoir National d'Escompte de Paris:
2 obligaiions du chemin de fer de l'Est Algérien 3 "/o (Récépissé )
n» .501926) 852 80 1 290 80
1 obligation Foncière 3 °/o 1883 (Récépissé n° 427 725) 438 • )
Montant des titres ci-dessus 102473' 47
Total des litres ci-dessus et des espèces . . Â reporter. . . 106510' 14
- 119 -
ACTIF (Suite)
Report 10651(1' 14
2" Titres affectés à la représentation des legs suivants
C. Déposés au Crédit Foncier :
Legs Bourdin : 36 fr. de rente 3 °jo (Récépissé n" 172 226). . . 997^60 \
Legs Bresson : 25 fr. de rente 3 °/o (Récépissé n° 670 765) . . . 805 » f i-nt en
Legs Hancock: 7 obligations chemins de fer P. -L. -M. (fusion) (
3 7o nouvelles (Récépissé n» 789 485) 2 989 » ?
D. Déposés au Comptoir National d'Escompte de Paris :
Legs Coste : 98 obligations du chemin de fer de l'Est Algérien 1
3 °/o (Récépissé 501926) 41789 » /
Legs Mercet : 19 obligations Foncières 3 % 1883 (Récépissé > 51111 »
n" 427 725) 8 322 » l
Legs Levasseur : 33 fr. de rente 3 "/o (Récépissé n° 743712) . 1000 « :
3" Titres d'arrérages du legs Coste en compte courant
E. Déposés au Comptoir National d' Escompte de Paris :
2 obligations chemins de fer P.-L.-M. 3 °/o (fusion) nouvelles
(Récépissé n" 732 507) 857 50 )
3 obligations semblables (Récépissé n" 504246) 1283 40 > 4605 85
6 obligations semblables (Récépissé n" 721551) 2464 9.^ )
DIVERS
Bibliothèque :
Pour mémoire ^ ^^'^"'' ^^^ ''^''®^
lour mémoire. , Numéros du Journal en magasin
Total dk l'actif 167 01 8' 59
PASSIF
Capital des legs suivants :
Legs Bourdin 997' 60 \
Legs Bresson 805 » j
Legs Coste 41934 75 '
Legs Mercet 8460
Legs Hancock 3U00
Legs Levasseur 1 OOO
««'.«erre sur cotisations rachetées (') 29023 03
Fonds sans affectation spéciale, dont 22000 fr. provenant de Tatlri-
bution faite à la Société de Statistique, sur le legs fait à lÉtat par
M. Giffard, et 20 580' 32 montant de l'indemnité des assurances
pour l'incendie des collections du Journal de la Société 71 773 91
6'o^«sa^/o/is ert cowrs ûfe racAaM Reçu 26 annuités de 60 fr.). . . . 156a »
Provision pour médaille Bourdin 108 »
Comptes courants des legs Coste et Mercet :
Legs Coste : Titres d'arrérages disponibles 4 605 85 j
— Fonds d'arrérages disponibles 3 032 25 *
Legs Mercet: Fonds d'arrérages disponibles . 718 20
Total du passif 167018' 59
56 197' 35
(1) Cette réserve s" est réduite en 19 l.j par suite du décès de deux membres perpétuels et augmentée par
rinscription d'un membre ayant racheté ses cotisations.
im -
COMPTES DE 1915
RECETTES
Espèces au 1"^ janvier 1915 :
En caisse 681' 61
Au Crédit Foncier 1 163 43
Au Comptoir National d'Escompte 9 588 95
1" Partie
Recettes effectuées pendant l'année pour le service courant
4433' 99
Cotisations: Membres titulaires *. . 3998' » ) limi
— Membres correspondants 184 » )
Journal: Abonnements et vente de numéros 1442 »
Intérêts non réservés sur les titres du portefeuille général, sur ceux des
legs Bresson. Hancock et Levasseur, sur les fonds au Crédit Foncier,
et divers. 3457 54
Subventions reçues en 1915 :
Ville de Paris : année 1914 700 »
Conseil général de la Seine : 1914 500 » j
Ministère de FAgriculture : 1914 1200 « 3060 •
Ministère de l'Instruction publique : 1915 300 » \
Ministère du Travail et de la Prévoyance sociale : 1915 360 »
Recettes effectuées en 1915 (1" partie) 12 141' 54
2" Partie
Recettes spéciales et Règlements d'ordre
.^nnMe^eA- ; 8 annuités de (iO Ir. pour rachats successifs de cotisations 480' »
LegsMercei: Reçu net en 1915 en compte courant au Comptoir
d'Escompte 288' » i
Legs Caste: lîeçu net en 1915 en compte courant au Comptoir / 1940 »
d'Escompte 1652 » '
Legs Bourdin : Intérêts de ce legs en 1914 et 1915 inscrits en provision
pour la médaille 72 »
Recettes spéciales de la 2" partie 2 492' »>
Total de la 1'» ei de la 2» partie 14 633' 54
Total GÉNÉRAL 19067' 53
121 -
COMPTES DE 1915
DEPENSES
1" Partie
Paiements effectués pendant l'année pour le service courant
Administration :
Secrétariat général, correspondance, frais de bureau, etc 1822' 10 i
Frais de convocations 388 15 | 3 357' 70
Trésorerie et archives, frais de recouvrement, correspondance, etc. i U7 -45 )
Loyer: payé en 1915 1000 80
Journal: Impression et frais d'envoi 7090 46 \ „o-o na
— Rédaction en 1915, tableaux et grapliiques 1263 50 S ^^'^^ ^^
Annuaire: Impression et envoi 267 65
Bibliothèque : ,
Allocations mensuelles au bibliothécaire 300 »
Reliures et imprimés 5 75 ' oO /
Frais extraordinaires et de représentation. » »
Dépenses réglées en 19U (1" partie) 13285' 86
2* Partie
Dépenses spéciales, placements et règlements d'ordre
Souscription à lOO fr. de rente 5 »/o de l'emprunt 1915 de la Défense nationale . 1 7i5' »
Total de la 2* partie 1 745' »
Total de la 1" et de la 2« partie 15030'86
Espèces au 31 décembre 1915
En caisse 355' 20 ]
Au Crédit Foncier 111 27 [ 4036' 67
Au Comptoir National d'Escompte. . 3 507 20 )
Total GÉNÉRAL égal 19 067' 53
IfC 8ÉEIE. 57« VOL. N» 4 9
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Prosipio oxcliisivement par abonnomoMis. Vente de numéros détachés variant de 37 à <')8 fr. au total.
La subvention du niiniston! de l'Agriculture a été do 1 000 l'r. en 1907, 1908 et 1909 et do 1 200 Ir. on 1910, 1911, 1912 ot 1913. Celle de 1914 sera concédée en 1915
seuloinont. — En outre, les subvoutious n'ont pas toujours été [layées |)ondaut les années auxquelles elles se rapportaient. La subvention de 1 000 fr., on 1914, do la Ville
de Paris, et celle du Conseil général de la Seine, do 500 fr. en 1914, ne seront mandalées qu'en 1915.
Hachais do cotisations plus nombronx : 4 rachats complets et 17 annuités en 1910 ; 2 rachats coiiqilets et 15 annuités en 1911 ; 2 rachats complets et 17 annuités en 1912 et 1913,
14 annuités en 1911, H seiilomoiil on 1915.
A partir do 1907, l'amuiité du romhourscment d'un prêt fait à l'IIôtcl des Sociétés savantes est restée seule. En 1912, dernière annuité.
Une indomiiité roçuo on espèces, on 1907, pour l'incendie des collections du Journal de la Société. En outre, un crédit de 7 000 fr. a été ouvert par la Maison Berger-
Lovrault ot O, à tilro d'indemnité complémentaire au sujet de cet incondio (suite voir n» 14).
Fouilles ou plus pour rimpressiou du Journal eu 1909, 1910, 1911 ot sui'lont 1912 ot 1913. Tableaux et graphiques spéciaux en 1912. Réduction du Journal en 1914 par
suite (le la guerre.
En 1911, 1 280 l'r, pour l'impressitm do la table alphabétique et analytiqno du Journal do 1800 à fin 1910. Pins 2 362 fr. 41 pour placements en obligations Ville de Paris et Crédit
Foncier. En 1912, |ilacoment 1 228 l'r. 80 en 3 obligations P.-L.-M. pour lo portefeuille général et 2 464 l'r. 95 en 6 obligations semblables pour le compte courant du legs Costo.
Hemboui'somont de 30 l'r. de rente amortissable (998 l'r.). — Cotisations spéciales (1020 fr.) et constitution de ressources ot de crédit [wur lo Cinquantenaire de la Société,
suivant détail au compte de 1909, et allocation gracieuse de 8 000 fr. par l'Institut international do Statistique, |)Our participation de la Société aux réceptions de la
\ll« session d(! l'Institut. En 1910, montant \w\. du legs Mercot, 8 460 l'r., et du legs Hancock, 3 000 l'r. En 1912, legs Levasscur, 1000 fr.
Uomj)loi do !I78 l'r. 57 ou 30 fr. de rente auiorlissable. — Absorption du .solde du crédit ouvert par MM. Berger-Levrault ; frais de réception des membres et invités de
1 luslilut iiiloriiatioual et placomoiit do 7 974 l'r., le tout suivant compte do 1909.
Achat do la médaille du prix Bourdin on 1910 et 1913. — Médaille de Foville en 1914.
En 1910: placements legs Mercot, 8 322 fr. ; legs Hancock, 2 989 tr. ; placomonts divers, 5 702 fr. 80. Bomboursement de 3 242 fr. 30 sur les 8 000 fr. ci-dessus, pour
improssions supplenienlaires.
Portefeuillo déposé au Crédit Foncier et au Comptoir National d'Escompte de Paris, y compris les valeurs des legs, capital et comptes courants. Placement, eu 1907, de
l'indomnité payée pour l'incendie des collections du Journal et d'un relupiat. Accroissements de 1908 à 1911, notamment par suite des placements du montant des legs.
Réductions progressives des annuités restant dues par l'Hôtel dos Sociétés savantes pour cession de corps de bibliothèques et pour prêt fait par la Société ; à partir d'avril 1907,
les annuités sur le prêt restent seules dues. En 1912, dernier trimestre reçu pour solde.
Partie roslant due par la Maison Berger-Levrault sur la créance de 7 000 l'r. pour indemnité comnlémenlaire concédée par cette Maison pour l'incondic des collections du
Journal do la Société (1 394 l'r. 30 ont été alïeclés à l'inipressiou du catalogue de la Bibliollicque). Solde de 5 605 l'r. 70 employé en 1909 lors du Ciniiuantenaire de
la Société et de la XI 1" session de l'Institut international pour l'impression de l'ouvrage La Statislifiue à Paris, et pour la publication des comptes rendus (Journal
d'aont 1910 spécial).
15. Par suite do la guerre, et do l'envoi de leurs archives en province, le Crédit Foncier et le Gomittoir National d'escompte n'ont jias pu indiquer à temps pour les comptes les
détails exacts de leurs encaissements des revenus des valeurs en dépôt dans leurs caisses. Il y a élé suppléé par des évaluations approximatives très strictes.
1(). Comme ci-dessus pour les revenus des legs. — Certains n'ont pas été encaissés en 1914 aux époques ordinaires, mais le seront eu 1915.
17. Bonification sur une obligation foncière remboursée et remplacée par une semblable. — Légère réduction du portefeuille en 1914 par suite do ce remboursement.
18. Contribution de la Société en 1914 pour la formation du Bureau permanent de l'Institut international de Statistique.
19. Cotisations non réalisées, en partie seuloiiiont, par suite de la guerre, dos mobilisations do sociétaires et do l'iiitorriiption des relations avec diverses contrées.
20. Souscription à l'emprunt do 1915, à ronipriuit do la Défonse nationale (100 fr. de rente 5 "/o).
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124 -
BUDGET DE PREVISION POUR 1916
RECETTES
1" Partie
Cotisations 4 iOu f »
Journal : abonnements et ventes . 1 44.0 »
Hevenus des titres du portefeuille et
des comptes courants au Crédit
Foncier et au Comptoir National
d'Escompte 3,)U0 »
Subventions :
Ville de hris 1 000^ » \
Ministère de l'Agricuilure . . 1 200 » 1
Hinislère de l'Instruction pu- |
blique (abonn. au Journal) 300 » ' y "jpA
Ministère des Traraui publics . Mémoire |
Conseil général de la Seine 500' » l
Ministère du TraTail et de la 1
PréTOjance(abon.attJourn.) 360 » '
ToTAi, de la p
■emière par
lie
12 500'
»
2" Partie
7 annuités en 1916 p'' rachats
de cotisations
en cours .
420'
»
Kcvenus du legs
Coste. .
1 ôOO
»
—
Mercet .
280
»
—
Bourdin.
36
1)
—
Bresson.
25
»
—
Hancok .
100
i>
—
Levasseur .
33
»
Total de la seconde partie
2 ;J94f
»
Total généra
,
MS'J.lf
DEPENSES
1^" Partie
administration :
Secrétariat général, \
frais de bureau, j
correspondance, f
etc 1950' » f
Frais de convoca - / 3 500'
lions 400
Trésorerie, archives,
frais de recouvre-
ment 1 15U » '
Loyer :
Salles des réunions
et bibliothèque. . looo
Journal :
Impression et envoi. 5 500 » j
Rédaction 1500 » > 7 300
Graphiques .... 300 » )
^nnicaire:
Impression et envoi. 300
Bibliothèque :
Livres, reliures et frais divers. 3.ô0
Dépenses diverses :
Frais extraordinaires et de re-
présentation .tO
Total de la première partie. 12 500'
2* Partie
Supplément éventuel d'impres-
sion pour l'extension
du journal :
Le journal . .1000
Les graphiques 100
Réserve des annuités ci-contre.
— des revenus du legs
Bourdin pour sa mé-
daille
— des revenus des divers
legs pour les prix
et publications con-
cernant ces legs, dé-
penses imputables et
frais s'y rapportant
Total de la seconde partie.
1 1 00'
420
36
838
2 394'
Total général
14 81)4.'
Le Trésorier,
Paul MATRAT.
- 125 -
II
LA PROSPÉRITÉ ÉCONOMIQUE DE L'ALLEMAGNE
SA « PLACE AU SOLEIL .. ET LA GUERRE
Le rêTe pangermanique. — On ne proclamera jamais trop, à mon avis, les
faits précis démontrant la fausseté des allégations au moyen desquelles les
pangermanistes ont perverti la mentalité allemande.
Jamais les économistes et les statisticiens ne dénonceront trop hautement
les mensonges accumulés pour faire croire à la masse des Allemands que
l'Empire était acculé à Y impérieuse nécessité de combattre poar obtenir sa place
au soleil, de rompre par la force des armes un encerclement politique et éco-
nomique devenu insupportable, de conquérir les territoires, en Europe et dans
les colonies, devenus indispensables à l'existence de trop nombreuses popula-
tions.
La série de fables imaginées poiu* justifier la guerre doit être réfutée pour
les neutres non informés à présent, et, plus tard, après le triomphe de notre
juste cause, pour les Allemands eux-mêmes. Car, si nous pouvons espérer que
le mensonge, véritablement trop grossier, d'une agression préméditée des
nations de la Triple Entente contre la paisible Germanie ne résistera pas à
l'examen de nos ennemis eux-mêmes, quand ils connaîtront enfin les actes
des Empires allemand et autrichien qui ont déchaîné les hostilités, nous
devons redouter qu'un trop grand nombre d'Allemands n'admettent alors,
comme excuse de l'attaque injustifiable des Austro-Allemands, cette soi-
disant nécessité de faire, par la violence, à la laborieuse Allemagne « sa place
au soleil ».
Pour montrer qu'elle avait cette place au soleil avant la guerre, j'ai réuni
un certain nombre de données statistiques, tirées en totalité de publications
allemandes. Ces chiffres fourniront, je le crois, l'irréfutable démonstration de
la fausseté des affirmations des pangermanistes, que les gouvernants ont fini
par prendre à leur compte.
C'est la répétition inlassable de ces allégations pangermanistes qui a fini
par persuader les masses de la nécessité de conquérir pour les Allemands
leur place au soleil, qui les a amenées au parti de la guerre.
Au début des menées pangermanistes, Bismarck et le groupe politique des
fondateurs de l'Empire avaient tenté de résister à leurs injonctions, de
réagir contre leur dessein de dominer les gouvernants, en s'appuyant sur
une opinion publique par eux préparée.
Mais l'instinctive répulsion des fondateurs de l'Empire allemand contre ces
surenchères ne pouvait maintenir longtemps le pouvoir hors des atteintes
des pangermanistes après leurs succès électoraux sur les socialistes avec
lesquels l'Empereur avait inutilement fleureté. Tout le système d'éducation,
issu de l'éveil du patriotisme allemand, et édifié par les universités, foyers
- 126 -
toujours actifs do patriotisme, est resté imprégné de l'esprit de Kant, procla-
mant la supériorité de la volonté sur l'intelligence, de Fichte, répudiant ses
anciennes théories de patriotisme européen pour demander à une mâle édu-
cation la régénération de la nation allemande, de Stein et de Gneisenau, de
Scharnhorst et du fondateur de l'Académie militaire de Berlin, Clausewitz.
Tout ce système d'éducation poussait l'ensemble de la nation vers les pan-
germanistes, surtout depuis une cinquantaine d'années.
Les écoles allemandes, dans ce dernier demi-siècle, ont voulu remplacer
les rêveurs et les poètes par des hommes positifs, affamés de bien-être maté-
riel et libérés de cette sentimentalité qui faisait le charme de l'ancienne
Allemagne. En même temps qu'une technique avisée, s'emparant des décou-
vertes de tous les pays, industrialisait la science allemande, l'école et les
associations d'anciens militaires exaltaient à tout propos la vanité native
des bourgeois et surtout l'orgueil des hobereaux. Chaque étudiant, si mince
que fût son bagage intellectuel, s'est tenu, dans les trente dernières années,
pour un surhomme, futur dominateur du monde. Les familles nombreuses de
hobereaux, généralement restées étrangères aux affaires, s'aigrissaient de leur
médiocrité, sentant, plus ou moins confusément, que l'expansion économique
de l'Allemagne, enrichissant les bourgeois et émancipant les travailleurs,
menaçait, par l'évolution démocratique, conséquence de cette prospérité
économique, l'antique suprématie de leur caste agrarienne et militaire. Elles
se désolaient de l'insuffisance de plus en plus pénible des revenus de leurs
domaines ruraux et s'indignaient de la diminution d'influence du clan des
officiers nobles. La guerre devait relever leur prestige.
Cet état d'esprit a été naïvement exposé dans une lettre, adressée par
un noble allemand à l'un de ses amis habitant la Roumanie. Le joui'nal
Aderverul l'a publiée, dans son numéro du 8/21 août 1915, en accompagnant
sa publication de fac-similés reproduisant certaines parties de cette curieuse
épître. L'autem-, Karl von H..., écrit notamment : « Nous ne pouvons rien
perdre par la guerre, au contraire, nous avons tout à gagner... Nous allons
être les maîtres du monde. Toutes les chimères et les bêtises, comme la
démocratie, seront chassées de l'univers pour un temps indéfini... En fin de
compte, nous avons à purger notre propre pays de toutes les idées révolu-
tionnaires, afin que notre noblesse puisse recouvrer sa splendeur, sa puis-
sance et son autorité anciennes... »
C'est ce clan militaire, uni aux agrariens dont il émane, qui constitua le
parti de la guerre dans un esprit de conquête. Ce parti fut, au début, tenu
en défiance par les libéraux et les socialistes; il devint puissant quand il eut
pour chef le prince héritier, de médiocre intelligence, mais de vanité insa-
tiable et que ni les sentiments de famille ni les scrupules n'embarrassent
guère.
Tout en abaissant son idéal vers des buts réalistes et utilitaires, le système
d'éducation, que l'influence prussienne imposa partout en Allemagne, suscita
une sorte de croyance mystique en la prédestination de la race allemande.
Cette conception, favorisée par les dispositions ataviques au merveilleux et
par l'empreinte de la Bible sur les luthériens, est pourtant récente. Elle s'est
nourrie surtout des paradoxes de VEssai sur Vlnégalité des Races humaines,
- 127 -
de Gobineau, qui, édité d'abord en 1853-1855, passa alors presque inaperçu
et ne devint célèbre, en Allemagne même, qu'après sa mort, vers 1884, et
de La Théorie du Surhomme, de Nietzsche, qui fut propagée vers la même
époque, sans que la perte de la raison de cet écrivain, on 1889, ait amoindri
son succès.
C'est ainsi que chaque Allemand formé par les universités se croit un
surhomme et tient pour évident que l'Allemagne est la nation élue, son
peuple, le peuple-roi.
11 eût semblé hasardé (et surtout ridicule) de professer de telles idées avant
la création de l'Empire.
Les guerres de 1866 et de 1870-1871 leur préparèrent les voies. Une propa-
gande tenace, qui dure depuis trente ans, donna crédit à tel point à cette
notion, à cette foi en la supériorité physique, intellectuelle et morale de la
race allemande, la rendit si générale, qu'elle put être exploitée comme moyen
de gouvernement. L'Empereur y fit d'abord des allusions timides, invoquant
pour la fonction impériale une sorte de mission divine, vaguement analogue
au sacerdoce des rois-prophètes d'Israël; puis ne craignit pas de se proclamer
ouvertement chargé en personne par le « vieux Dieu allemand » de conduire
les peuples de l'Empire au combat, afin que la race élue assurât la rénovation
de l'univers, après l'avoir conquis et subjugué.
Ces extravagances eussent soulevé par toute l'Allemagne une hilarité géné-
rale à l'époque de Heine et même aux temps de Schiller et de Goethe. Le
chantre de Guillaume Te^l et de Jeanne d'Arc, après avoir splendidement
glorifié le patriotisme des Suisses et celui des Français, s'était écrié :
« Vous espérez en vain, AUemMuds, former une nation. Contentez- vous d'être
humains. » Le calme olympien de l'auteur de Faust tenait pour fantaisies
de diplomates les idées de réunion en une nation unique des éléments
disparates de la vieille Allemagne. La brutale énergie de la Prusse a réalisé
cependant cette unité et agrégé, de force ou de bonne volonté, des duchés,
principautés et royaumes que la politique traditionnelle de l'Autriche
n'avait jamais voulu souder en un tout homogène. Et le troisième empe-
reur allemand, enivré de sa situation prééminente, a pu croire que tout lui
serait possible, en exaltant l'instinct guerrier de ses millions de sujets, en
les enivrant, à leur tour, d'un orgueil colossal.
Par les écoles et par les casernes l'élément prussien, essentiellement brutal
et réactionnaire, a fait revivre, en plein vingtième siècle, l'esprit dur et
dominateur de l'ordre teutonique, après qu'il eut étouffé, par son influence
politique, assise sur un système électif excluant la masse des travailleurs, les
aspirations démocratiques et humanitaires de 1848. Les Prussiens ont ainsi
dressé l'ensemble des Allemands contre l'Europe, en décrétant qu'ils consti-
tuaient, comme race élue et supérieure, un peuple-roi, dont l'Empereur est
le prophète.
S'il est difficile de comprendre comment une telle régression a pu s'opérer
dans le cerveau des libéraux allemands, il est inexplicable qu'une concep-
tion, frappant d'excommunication tout homme qui n'est pas véritablement
d'origine germanique, soit acceptée par les nombreux sémites, artisans prin-
cipaux de l'expansion économique de l'Empire, aussi bien que par l'ensemble
- 128 -
des peuples austro-hongrois, où, sur 51.500,000 habitants, 11.740.000, soit à
peine un quart, représentent l'élément ethnique allemand.
Laissons aux études des philosophes, et surtout des médecins spécialistes
des affections mentales, l'examen de cette redoutable folie collective et reve-
nons modestement à notre tâche de simple statisticien.
*
* *
Les faits démographiques et économiques, résumés dans les statistiques
allemandes que nous allons examiner, mettent en pleine lumière une vérité,
d'ailleurs évidente : le rapide et merveilleux développement de l'Allemagne au
cours des trente années qui précédèrent son agression. Leur constatation : de
l'accroissement de la population — attachée au sol natal ou émigrée, —
de l'élévation des salaires, de l'augmentation de l'épargne, de la prospérité
admirable des entreprises industrielles, commerciales, maritimes et finan-
cières, ne constituera-t-elle pas la négation irréfutable de la prétendue
oppression des pacifiques Germains par l'envieuse Angleterre, la turbulente
France et la barbare Russie?
Ces succès ininterrompus ne montrent-ils pas que l'homme d'affaires alle-
mand avait su conquérir une des meilleures places au soleil?
En réalité, partout dans le vaste monde : dans l'Amérique du Nord et du
Sud, en Afrique, en Asie, dans la partie orientale de l'Europe et même chez
ces peuples qu'ils accusent de vouloir leur ravir leur place, les Allemands
avaient pu s'installer librement, faire prospérer leurs entreprises et trouver
l'écoulement de leur grandissante production. Partout on a vu s'implanter
leurs essaims prolifiques, évinçant insidieusement les uns, rachetant ou absor-
bant les autres, formant en peu d'années des groupes si puissants que nombre
de commerces, d'industries, de banques et d'entreprises maritimes anglais,
français, belges ou russes se sentaient sous la menace d'expropriation pour
cause d'expansion allemande.
*
* *
Importance relative de la race allemande. — Quand on examine objecti-
vement, en dehors des considérations du droit et de la morale, en regard de
l'importance numérique des diverses races composant les peuples européens,
la prétention des Allemands de l'Empire à la suprématie en Europe (prélude
de leur domination du monde), on constate que, si prolifique soit-elle, la race
allemande est en sensible minorité. Cette infériorité numérique existe non
seulement par rapport à l'ensemble des autres races, mais aussi par compa-
raison avec quelques-unes considérées isolément.
Cette première constatation montre que la prétention à l'hégémonie s'ap-
puie non sur une supériorité numérique, attestant tout au moins une vitalité
supérieure à celle des autres nations de l'Europe, mais simplement sur une
injustifiable vanité de caste et de race.
En effet, d'après l'Atlas universel de A.-L. Hickmann, sur un total de 423 mil-
- 129 -
lions d'Européens, les races purement allemandes ne figuraient en 1910 que
pour 73 millions, soit pour 17,25%. Si infatué qu'il soit de sa supériorité sur
le Slave, le Grec, le Latin et autres misérajDles races dégénérées, le groupe
allemand ne peut espérer qu'il imposera sa suprématie aux 350 millions
d'hommes des autres races sans provoquer une certaine opposition. Leur
résistance, dictée par l'instinct de conservation, sera plus ou moins gênée par
le fait que quelques nations sont gouvernées non par des dynasties natio-
nales, mais par des princes issus d'Allemagne et apparentés à la famille
impériale; mais cette résistance des peuples s'accentuera d'autant plus que
les actes des armées allemandes et des oppresseurs allemands des populations
sous le joug, connus et divulgués, apparaîtront comme de plus cyniques vio-
lations des traités, garantie des droits des peuples, et comme l'absolu mépris
des conventions internationales, garantie du droit des gens. Et quoi qu'entre-
prendront les Allemands, ils ne pourront pas faire qu'il n'y ait en Europe
que 17,25% d'Allemands contre 82,75% d'autres populations.
Voyons maintenant si les statistiques allemandes — nous insistons sur
cette origine de nos renseignements — montrent, dans les mouvements de la
population de l'Empire, dans les résumés chiffrés de son activité commerciale,
industrielle, maritime et financière, la marque de l'oppression économique qui
aurait, dans le passé, empêché le peuple allemand d'occuper sa place au soleil.
Mouvements de la population. — En 1910, d'après Les Forces économiques de
V Allemagne^ étude très intéressante publiée, à l'occasion du quarantième
anniversaire de sa fondation, par un des plus importants établissements
financiers berlinois, la Dresdner Bank, voici quelle était la situation compara-
tive de l'Allemagne, de la Grande-Bretagne et Irlande et de la France pour
le mouvement de la population de 1875 à 1910.
Superficie Accroissement .
en kilomètres Population de
carrés 187b à 1910
DaibsaDces
en 1910
Milliers Pour 100 Pour 1. 000
Allemagne 540.858 64.926 52 13,6
Grande-Bretagne et Irlande . . . . 313.607 44.902 37 11
France 536.463 39.600 8 1,8
Certains économistes allemands ont pu déduire, du taux élevé d'accroisse-
ment de la population de l'Empire de 1875 à 1910, que l'iillemagne était
menacée de surpopulation. La preuve que cette déduction est mal fondée
nous est fournie par plusieurs faits. En premier lieu, le ralentissement très
marqué de l'émigration; en second lieu, l'emploi, par l'agriculture et l'in-
dustrie, d'une très importante main-d'œuvre étrangère; en dernier lieu, le
mouvement, véritablement infime, vers les colonies allemandes.
L'émigration. — D'après l'édition de 1911 de l'Atlas d'A.-L. Hickmann,
sm* 100.000 habitants il en émigra annuellement en moyenne, au cours des
dix dernières années : 1.960 d'Irlande, 610 d'Ecosse et 450 d'Angleterre,
700 d'Italie, 610 de Norvège, 530 du Portugal, 460 de Suède, 420 d'Espagne,
250 du Danemark, 160 de la Suisse, 138 de l'Autriche-Hongrie, 9i de V Alle-
magne, 50 des Pays-Bas et 22 de la France.
- 130 -
Suivant ce même document, alors que 1.362.400 Allemands ont émigré
d'Europe de 1880 à 1890, il n'y en a eu que 530.000 de 1890 à 1900, tandis
que, pour l'Autriche-Hcngrie, il y a eu 428.600 émigrants de 1880 à 1890 et
650.000 de 1890 à 1900; pour l'Italie, 652.900 émigrants de 1880 à 1890
et 2.265.000 de 1890 à 1900; pour l'Espagne, 367.500 émigrants de 1880 à
1890 et 756.300 de 1890 à 1900. En 1912, le nombre des émigrants allemands
n'a été que 18.500. On sait les facilités que rencontrent les Allemands pour
s'installer aux États-Unis. Or, le mouvement allemand vers la grande Répu-
blique Nord-Américaine, qui s'est chiffré par 1.232.000 émigrations de 1881 à
1890, s'est abaissé à 32.310 de 1891 à 1900.
Cette diminution de l'émigration allemande n'est-elle pas un indice certain
que l'Allemagne ne souffrait nullement, au cours de la période qui a précédé
la guerre, ni de surpopulation ni d'une gêne économique de sa classe ouvrière?
Le recours aux étrangers. —On sait que l'agriculture et l'industrie allemandes
ont pris l'habitude d'employer temporairement chaque année d'assez forts
contingents d'ouvriers et de manœuvres étrangers. Ces auxiliaires, leur« saison»
terminée, retournaient en Pologne -russe, en Autriche, en Italie, en Belgique,
sans que les recensements ou les statistiques conservassent trace de leurs
mouvements périodiques. Mais on a évalué au-dessus de 700.000 les ouvriers
agricoles régulièrement occupés sur les grands domaines de l'Est, et dont les
propriétaires ont maintes fois déclaré, quand la Russie a eu des velléités de
s'opposer à ces migrations, ne pouvoir plus se passer. Je ne connais pas
d'évaluation des ouvriers industriels étrangers.
D'après le recensement de 1910, le nombre des étrangers habitant l'Alle-
magne était de 1.259.873. Il n'était en 1905 que de 1.028.560, et seulement
de 778.737 en 1900. Voilà encore une contre-indication d'un état de surpopu-
lation et de gêne économique due à la surpopulation acquise ou prochaine.
La population allemande du domaine colonial. — Suivant V Annuaire statis-
tique de VEmpire allemand édité par l'Office impérial de Statistique pour 1914,
nous avons établi quelle était, à cette date, la situation du domaine colonial,
alors que la population de l'Empire était de 67.812.000 habitants.
Cette situation se trouve résumée dans le tableau de la page suivante.
On voit, par ces constatations des documents officiels, que l'effort allemand
de colonisation, bien que remontant à trente ans, n'avait encore attiré, dans
les colonies remontant à 1884-1885, que 19.108 Allemands en 1914.
La faiblesse d'une telle population coloniale est d'autant plus remarquable
que ces anciennes colonies allemandes obtenaient, au point de vue de leur
réussite matérielle, de très bons résultats. Il n'est pas moins démonstratif de
voir qu'à Kiao-Tchéou, où les Allemands avaient dépensé d'énormes capitaux
en vue d'en faire un très important centre industriel et commercial, l'élé-
ment allemand ne comptait que 4.256 coloniaux (1).
(1) L'expansion coloniale comptait si peu dans la politique de l'Allemagne de 1870 à
1900 que ce ne fut qu'après 1906 qu'un office indépendant colonial fut créé dans l'admi-
nistration impériale. Peu d'étrangers savent, et peu d'Allemands se souviennent, sans
doute, que le premier sous-secrétaire d'État colonial, le D^ Dernburg, n'a été nommé
qu'en 1907.
/
- 134 -
! DÉSIGNATION DES COLONIES
1
i
allemandes
DATE DK PRISE
de
possession
ou de
protectorat
SUPERFICIE
en
kilomètres carrés
POPCliATION
totale
en 1913
POPU1.ATIOH
blanche
y compris
la population
allemande
POPULATION
allemande
1885
1884
1884
1884
1884
1889
1900
1897
995.000
790.000
87.200
835.100
240.000
2.476
2.572
552
7.661.000
2.651.000
1.0.32.000
81.400
«02.000
3a. 000
190.000
5.336
1.871
368
14.830
968
459
544
4.470
4.107
1.643
320
12.292
746
259
329
4.256
Togo
Carolines (avec les îles Palaous et Ma-
rianes et les îles Marshall)
Totaux
2.9.52.900
12.255.400
28.846
23.952
S'il y avait eu simplement menace de surpopulation, croit-on que l'exode
vers les colonies nouvelles, où les situations avantageuses s'offraient nom-
breuses, se fût limité à un total de moins de 24.000 Allemands ; et quelle
signification peut avoir un aussi petit total par rapport à une population de
67.812.000 habitants que possédait alors l'Allemagne?
On pourrait objecter aux divers indices que nous venons d'examiner que,
se référant aux mouvements de la population, ils ne démontrent pas, d'une
manière suffisamment concluante, que la masse laborieuse allemande ne
ressentait pas, de la double influence du rapide accroissement de la popu-
lation et de l'antagonisme de rivales puissantes, une gêne persistante, de
plus en plus accentuée jusqu'à devenir vraiment intolérable.
Pour répondre à cette observation, voyons donc à présent, à l'aide des
statistiques officielles impériales, si le nombre des sujets allemands tirant
leurs moyens d'existence du commerce et de l'industrie a augmenté, au cours
de la période que nous considérons, non seulement d'une façon absolue, mais
encore par rapport aux accroissements de la population de l'Empire.
Rapport entre le nombre des travailleurs allemands occupés et la popula-
tion de l'Empire. — En 1882, l'Annuaire statistique officiel a constaté l'exis-
tence en Allemagne de 3.005.457 entreprises industrielles et commerciales,
occupant 7.340.789 personnes, pour une population totale d'environ 45.700.000
habitants.
En 1895, on relève 3.144.977 entreprises, faisant vivre 10.269.269 personnes,
sur une population recensée de 52.280.000 habitants.
En 1907 (date du dernier relevé officiel connu), il y avait 3.448.378 entre-
- 132 -
prises industrielles et commerciales, occupant ensemble 14.435.922 personnes,
pour une population qu'on peut évaluer, en se basant sur le recensement de
1905, à 60.700.000 habitants.
Je pense que ces constatations démontrent que le nombre des travailleurs
occupés normalement en Allemagne par l'industrie et le commerce n'a pas
simplement progressé d'une façon remarquable au cours de ces vingt-cinq ans,
mais que ce nombre s'est élevé sensiblement plus que celui des habitants au
cours de tout ce quart de siècle.
Le tableau suivant, établi par nous à l'aide des relevés de l'Annuaire de
statistique do l'Office impérial, permet de voir comment se répartissaient,
entre la petite, la moyenne et la grande industrie et entre !es divers groupes
de professions, les travailleurs allemands en 1882, 1895 et 1907.
1882.
1895.
1907.
1882.
1895.
1907.
PETITE INDUSTRIE
(de 1 à 5 personnes)
Nombre
des
exploitatioDs
1907.
2.882.768
2.934.723
3.146.134
Nombre
ries
persoiincs
4.335.
4.770.
5.383,
MOYESNB INDUSTRIE
(de 6 à 50 personnes)
Nombre
des
cxploitatioDS
112.715
191.301
270.122
Nombre
des
personnes
1.391.720
2.454.333
3.688.838
GRANDE INDUSTRIE
(au-dessus de 50 personnes)
Nombre
des
exploitations
9.074
18.953
32.122
Nombre
des
personnes
1.613.247
3.044.267
5.3G3.851
SITUATION GÉNÉRAT.E
des industries
\ombre total
ries
personnes
occupées
7.340.789
10.269.269
14.435.92i
OBSERVATIOHS
REPARTITION PAR GROUPES DE PROFESSIONS
I. Horticulture. — Élevage et pêche.
30.673
51.437
1.183
11.422
30
4.559
31.886
67.418
39.698
70.091
2.571
25.853
52
7.184
42.321
103.128
49.200
96.378
3.970
40.820
146
16.913
53.316
154. ai
II.
Industrie
(y compris
mines et entreprises
de construction).
1882.
2.175.857
3.270.401
85.001
1.109.128
9.481
1.554.131
2.270.339
5.933.663
1895.
1.989.572
3.191.125
139.459
1.902.049
17.941
2.907.329
2.146.972
8.000.503
1907.
1.870.261
3.200.282
187.074
2.714.664
29.033
4.937.927
2.086.368
10.852.873
ni.
Commerce et transport (y compris hôtelleries et débits).
1882.
676.2.38
1.013.981
26.531
271.170
463
54.557
703.232
1.339.708
1895.
905.453
1.509.453
49.271
526.431
960
129.754
955.684
2.165.638
1907.
1.204.737
2.056.916
76.366
888.931
2.828
395.185
1.283.931
3.341.032
21.936
IV. Théâtres. Concerts. Musique et spectacles.
2.712 44.4231 115 13.826] 24.763 S7.906|
PupaUlion (1880) :
45.236.000.
PopaUliuD recensée ;
52.280.000.
Popnlalion (1905) :
60.641.000.
P«r rapport i 1882, le
mbre des persunnes em-
ploj.es en 1907 s «ag-
meolc de 86.693.
P»r rapport à 1882, le
ployées en 1907 a aug-
.te de 4.919.210.
Pat rapport à 1882, le
nombre des personnes em-
ployées ta 1907 a aug.
mente de 2.001.324.
Celle catégorie
On voit qu'en 1907, la différence en plus du total des personnes occupées
normalement par les entreprises industrielles et commerciales était, par rap-
port à 1882, de 7.095.133 travailleurs, ainsi répartis d'après les groupes des
professions :
Personnes occupées en plus :
Par rhorticulture, l'élevage et la pêche
Par l'industrie, les mines et la construction
Par le commerce, les transports, les hôtels et les débits.
Par les théâtres, concerts, musique et spectacles. . .
86.693 personnes
4.919.210 —
2.001.324 —
87.906 —
L'accroissement est, de 1882 à 1907, de presque 100 % (14.435.922 occupés
en 1907 contre 7.340.789 en 1882), alors que l'augmentation de la population
- 133 -
au cours de cette même période n'a pas atteint 35 % (en 1882, 45.236.000
habitants contre 60.641.000 environ en 1907).
Je tiens cette comparaison pour très concluante, car elle fournit la preuve
que, si rapide qu'ait été l'augmentation du nombre des habitants dans
l'Empire allemand, l'augmentation du nombre des occupations normales et
régulières a été considérablement plus rapide et plus importante.
Cette preuve, très forte, qu'aucune crainte venant des menaces de gêne
économique due à la surpopulation n'était fondée, se trouve d'ailleurs corro-
borée par les constatations suivantes qui sont relatives aux accroissements
de la consommation par tête d'habitant, et à la hausse des salaù-es quotidiens
pendant la période qui va de 1879 à 1910.
Les salaires et la consommation des substances alimentaires. — Si l'acti-
vité pacifique des sujets de l'Empire avait réellement été contrariée par les
nations concurrentes, les salaires auraient eu une tendance à s'immobiliser,
sinon à baisser. Or, voici, d'après Les Forces économiques de V Allemagne, des
prix moyens de salaires joiu-naliers qui indiquent la hausse de ces salaires
au cours des dernières années :
Salaires Salaires
quoti- quoli-
.,,..., - . , . dieus , . liifns
DesigDation des professions Années Années
" "^ moyens moyens
en eu
marks marks
Mineurs (charbonnages du district de Dortmuiid). 1890 3,98 1910 5,37
Maçons et charpentiers (Berlin) 1882 3,00 1908 6,75
Peintres en bâtiment (Berhn) 1888 3,50 1908 5,85
Appareilleurs (Berhn) 1883 3,50 1908 5,85
Menuisiers (Berhn) 1887 3,00 1905 5,00
Ouvriers des usines Krupp (Essen) 1880 3,19 1906 5,35
Un autre indice caractéristique de la prospérité générale d'une nation est
l'accroissement de la consommation de substances alimentaires. L'ensemble
de la population allemande a accru sa consommation des principales denrées
alimentaires, de 1879 à 1910, dans les proportions considérables qu'indique le
tableau suivant, tiré de l'étude publiée par la Dresdner Bank,
Consommation
par tète d'habitant ^
Désignation des substances Moyennes annuelles .
(en kilos)
alimentaires pendant pendant °
la période la période ^^^^ ^^^
1879 à 1883 1906 à 1910
Froment et seigle 188,6 233,6 23,9
Pommes de terre 337,7 608,0 80,0
Viande (en Saxe) 32,4 47,6 46,9
Sucre 6,1 17,6 188,5
Café-cacao-thé 2,5 3,6 44,0
Fruits du Midi (exotiques) 0,8 3,2 300,0
Sel 14,1 23,4 66,0
Donc le pouvoir d'achat des salaires gagnés par la masse des travailleurs
allemands a progressé très sensiblement; le bien-être de l'ensemble de la
population s'est accru d'une manière que ce tableau permet de mesurer.
- 134 -
i'ousomniatioii des matières premières. — Quant à la prospérité générale,
un indice, non moins probant que les deux que nous venons d'examiner, est
l'accroissement de la consommation par tête d'habitant des matières pre-
mières nécessaires à l'industrie. De la même source nous tirons les renseigne-
ments suivants :
Consommation
par tète d'habitant „.
Désignation —
Moyennes annuelles .
, (en kilos)
des ^ '
■ . , . l'aiixmentation
pendant pendant "
malières premières industrielles la période la période ,„„
' de de pour 100
1879 à 1883 1906 à 1910
Houille 976,0 2.152,0 120,5
Lignite 354,0 1.160,0 227,7
Fer brut 66,0 200,5 203,8
Zinc, plomb, cuivre 2,7 8,8 225,9
Coton 3,3 6,6 100,0
Pétrole 8,5 14,6 71,8
Ces indices me semblent étayer solidement ma thèse.
D'autres s'ajoutent encore pour prouver que rien n'a contrarié l'essor
économique du peuple allemand, que rien ne l'a empêché d'occuper sa
place, une des meilleures places, au soleil.
Développement de la fortune privée et de l'épargne. — L'étude écono-
mique publiée par la Dresdner Bank et qui résume les données de statis-
tiques officielles et les renseignements émanant des économistes allemands
les plus notoires, proclame : « Depuis la fondation de l'Empire, la fortune
nationale de l'Allemagne s'est considérablement accrue. On évalue cette
majoration à 4 milliards de marks par an. 9 % des contribuables, en Prusse,
paient l'impôt sur les fortunes dépassant la somme de 100.000 marks. Tandis
qu'il y a vingt ans, sur 100 habitants de la Prusse, 30 payaient l'impôt sur
le plus petit revenu imposable (1), le nombre des contribuables de cette caté-
gorie s'élève à présent à 60% de la population... »
En 1911, si nous nous en référons à cette étude, l'impôt sur les fortunes a
été payé en Prusse :
Pour des fortunes de :
Par 54, 6% 6.000 à 20.000 marks.
— 36,4 20.000 à 100.000 —
— 8,5 100.000 à 1 million de marks.
— 0,5 supérieures à 1 million de marks.
L'épargne. — Au point de vue de l'épargne, le tableau suivant (page 135)
montre, d'après les relevés des Annuaires officiels de statistique, quelle a été.
(1) Le chiiïre du revenu annuel au-dessus duquel le contribuable prussien esl imposé est
de 900 marks. Les communes peuvent être autorisées à percevoir aussi une taxe sur le
revenu, généralement établie sous forme d'impositions additionnelles à l'impôt d'Etat;
mais, à titre exceptionnel, cette taxe communale peut atteindre tous les revenus, par consé-
quent ceux au-dessous de 900 marks (Note de l'auteur).
- 135 -
au cours des sept dernières années mentionnées par ces documents, la pro-
gression des opérations des caisses d'épargne officielles ou privées.
1
ANNÉES
1
NOMBRE
des livrets ou comptes
CAPITAUX
des déposants
(en milliers de marlts)
vei:sem!:nts
opérés
dans l'armée
(en milliers di- marks)
IKTÉIÎÊTS ACQUIS
ilaos l'année
(en milliers de marks)
KETKAITS OPÉKÉS
dans l'année
(en milliers de marks'
1912 . . ,
1911 . . .
1910 . . .
22.979.254
22.349.570
21.531.034
20.616.699
19.845.329
19.291.320
18.658.460
18.679.973
17.821.684
16.780.568
15.672.121
14.552.555
13.920.609
13.411.271
5.248.706
4.951.759
4.548.950
4.177.792
3.549.491
3.332.008
3.257.729
578.878
542.506
504.549
473.402
441.811
407.412
383.177
4.973.851
4.453 621
3.946.307
3.530.838
3.357.449
3.241.457
2.907.060
1909 . . .
1908 . . .
1907 ....
1906 . . .
Or, non seulement les classes laborieuses allemandes ont vu grossir, au
couiTS des derniers vingt-cinq ans, et surtout au cours des dix dernières
années, la masse de leurs capitaux d'épargne; mais encore, ce qui est plus
démonstratif pour ma thèse, le total de leurs capitaux épargnés était devenu,
dès 1910, sensiblement supérieur au total des capitaux des caisses d'épargne
réunies de la France et du Royaume-Uni.
D'après Les Forces économiques de V Allemagne, l'épargne possédait en 1910 :
en Allemagne 16.780.568.000 marks, en France 4.514.500.000 marks et
dans le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et Irlande (en 1909) 4.422.300.000
marks. Nous prenons toujours, pour ces comparaisons, les chiffres adoptés
par les statisticiens allemands.
On voit que tous les précédents indices de prospérité économique du peuple
allemand se trouvent confirmés par la majoration ininterrompue de la masse
des capitaux épargnés.
Soit, pourront dire des contradicteurs allemands, nous avons bénéficié large-
ment, tant en Allemagne que chez nos voisins, de notre activité industrielle, de
notre organisation commerciale et de notre esprit d'entreprise. Mais, préci-
sément à cause de nos méthodes de production, nous étions dans la néces-
sité d'exporter de plus en plus, de devenir, par conséquent, l'une des plus
grandes nations maritimes. Et, chaque fois que nous avons voulu étendre
notre activité sur les mers, nous assurer de nouveaux débouchés importants,
la jalousie des nations rivales, particulièrement de l'Angleterre, a entravé,
sinon empêché notre expansion. Si cette plainte — maintes fois répétée —
était fondée, le taux d'accroissement du commerce extérieur de l'Allemagne
- 136 -
serait moins élevé que celui de ses grandes concurrentes maritimes : la
Grande-Bretagne, les États-Unis et, si l'on veut, de la France.
Le commerce extérieur. — Or, voici, d'après les statisticiens qui ont rédigé
l'étude de la Dresdner Bank, les taux d'accroissement, de 1891 à 1911 du
commerce extérieur (importations et exportations) des trois nations considé-
rées :
En 1911
par rapport il 1891
Pour la Grande-Bretagne, il est de 65,9%
— les États-Unis, il est de 69,8
— la P'rance, il est de 105,1
— l'Allemagne, il est de 143,1
D'après les mêmes sources, pendant que le total des exportations de l'.'Ule-
magne passait de 3 milliards 175 millions de marks en 1891 à 8 milliards
106 millions en 1911, le total des exportations d'Angleterre, Ecosse et Irlande
passait de 5 milliards 51 millions de marks en 1891 à 9 milliards 264 mil-
lions de marks en 1911.
L'aveu que, fidèle aux doctrines libérales en matière commerciale, l'An-
gleterre avait ouvert librement aux Allemands ses marchés intérieurs et
extérieurs est d'ailleurs facile à trouver dans les travaux de leurs princi-
paux économistes au moment des projets de J. Chamberlain. Dan-s son
ouvrage Der Englische Imperialismus, le professeur von Scliulze-Gaevernitz
établit que, si l'Angleterre avait admis ce néo-protectionnisme en rejetant le
libre-échange, ou plutôt si la politique préconisée par Chamberlain, ou même
celle de M. Balfour avait triomphé, le commerce allemand aurait subi un
redoutable recul.
Marine de commerce. — Mais serrons encore la question et examinons,
enfin, si le développement de la marine marchande allemande s'est trouvé
gêné ou ralenti par la rivalité jalouse de l'Angleterre.
Le tableau suivant, copié à la page 25 de l'édition française des Forces
économiques de V Allemagne, démontre que là encore l'Allemagne a su prendre
sa large place au soleil et qu'elle ne peut invoquer aucun motif de plainte.
TONNAQB DES NATIBES MAKOHANDS
(net)
I>e l'Allemagne . . . .
De la Grande-Bretagne
Do la France
TAUX
PART
de
de chaque (lolte
l'accrois-
marchande
sement
dans la marine
BN 1891.
K.V 1911
du
tonnage
en 1911
de
commerce mondiale
par
rapport
à 1891
en 1891
en 1911
(1.000 Ion.
de rfgislre)
pour 100
pour 100
pour 100
1.416,3
2.882,2
103,90
"i,*
10,1
8.933,.^
12.240,7
37,00
46,8
43,0
786,6
1.325,1
68,50
4.1
4,16
Ainsi l'augmentation soit du tonnage général, que l'Allemagne a pu
- 137 -
doubler dans ce laps de temps, soit du taux de majoration qui, poui' l'Alle-
magne, est à peu de chose près égal aux taux réunis de l'Angleterre et de
la France, soit enfin de la part revenant à chaque flotte marchande dans la
marine de commerce universelle, a été nettement en favem- des entreprises
maritimes allemandes, et il est évident que nulle part leur libre trafic n'a
été gêné ni entravé jusqu'à l'ouverture des hostilités.
Progrès financiers. — L'expansion de l'Allemagne au point de vue des
finances privées a été tout aussi rapide et importante, bien que les finances
des divers États (et celles de l'Empire) aient pu, à certains moments, ren-
contrer d'assez grandes difficultés quant aux réalisations de leurs budgets.
Le nombre des établissements financiers et des banques (sans compter la
Banque de l'Empire) ayant un capital d'au moins 50 millions de marks
était, en 1912, de dix-neuf.
La Banque de l'Empire, fondée en 1876, et dont le capital est de 180 mil-
lions de marks, ressemble assez, comme rôle, sinon comme importance, à la
Banque de France. EUe est dirigée par des fonctionnaires de l'État et ses
principales opérations consistent en escompte d'efîets de commerce sur
deux signatures, en avances sur titres et en émission de billets de banque
dont le montant, en période normale, doit être garanti, pour un tiers au
moins, par des espèces ou des lingots. Cet établissement a servi à ses action-
naires, de 1876 à 1911, des dividendes dont la moyenne annuelle est de
6,92%. Les bénéfices sont partagés avec l'État. De 1876 à 1911, les
actionnaires ont reçu 336.400.000 marks et le Trésor 323.500.000 marks.
Il y aurait matière à d'intéressantes observations sur les bases qui servent
à calculer la part de l'État dans les bénéfices et surtout sur la manière dont
est chiffrée, depuis la guerre, l'encaisse or de la Banque; mais cela nous éloi-
gnerait trop de notre sujet.
En 1912 existaient en Allemagne plus de 3.500 maisons de banque privées,
quelques-unes d'une réelle importance.
Les neuf grands établissements financiers de Berlin et les dix grandes
banques dont le siège social est situé dans d'autres villes, traitent la plupart
des affaires de crédit et d'émission de valeurs mobilières. Beaucoup d'entre-
prises industrielles et commerciales se trouvent ainsi — en Allemagne et même
à l'étranger — dans la dépendance financière de ces banques. Par exemple
la Dresdner Bank est représentée dans les conseils d'administration d'envii'on
200 sociétés anonymes par actions.
Afin de donner une idée précise du développement des grands établisse-
ments de banque en Allemagne, fonctionnant à côté de la Banque de l'Empire
en 1912, nous en donnons l'énumération en faisant suivre leur titre de l'in-
dication de leur capital social.
I. Établissements dont le siège est à Berlin.
UiiliOD* dt aarkt
1. Deutsche Bank 200
2. Disconto-Gesellschaft 200
3. Dresdner Bank 200
1" sksiE. 57' yOL. — so 4 10
- 138 -
Millions de marks
4. Bank fur Handel & Industrie 160
5. A. Schaaiïhausenscher Bankverein 145
6. Berliner Handels-Gesellschaft 110
7. National-Bank fur Deutschland 90
8. Commerz & Disconto-Bank 85
9. Mitteldeutsche Credit-Bank 60
•
II. Établissements dont le siège est dans d'autres villes allemandes.
1. Allgeineine Deutsche Credit-Anstalt 110
2. Rheinische Credit-Bank. 95
3. Rheinische-Westfàlische Disconto-Gesellschaft 95
4. Barmer Bankverein 88,75
5. Bergisch-Màrkische Bank • 80
6. Essener Crédit- Anstalt . 72
7. Mitteldeutsche Privat-Bank 60
8. Norddeutsche Bank 50
9. PfâlzischeBank 50
10. Schlesischer Bankverein 50
En plus de ces 19 grands établissements, il existait, en 1912, 139 autres
banques allemandes dont le capital social était d'au moins 1 million de
marks. L'ensemble du capital social des 158 banqu(!S, dont nous venons de
parler, était en 1912 de 2.928.894.000 marks et leurs réserves atteignaient à
la même époque 801.663.000 marks.
Les bénéfices nets de ces 158 banques pour l'exercice 1912 se sont élevés
à 307.401.000 marks.
On voit que, là encore, la situation de l'Allemagne laborieuse était satis-
faisante et prospère.
Cette impression est d'ailleurs confirmée quand, toujours en se référant aux
statistiques allemandes, on examine l'importance du marché des valeurs
mobilières. L'importance nominale des émissions de valeurs faites en Alle-
magne de 1883 à 1911 se totalise à près de 52 milliards 500 millions de marks
(exactement 52.424.600.000 marks), dont environ 13 milliards (exactement
12 milliards 968 millions de marks) de valeurs étrangères.
Les bénéfices accusés par quelques-unes de ces entreprises sous forme de
sociétés par actions ont été quelquefois modestes; mais, pour un nombre
important, ils ont été, dans la période que nous examinons, tout à fait
remarquables.
Pour les fabriques de produits chimiques, voici les dividendes distribués
pour les deux exercices 1910 et 1911 :
Badische Anilin .'^^ Sodafabrik (au capital de 36 millions de marks) : 25 %.
Hôchster Farbwerke( au capital de 36 millions de marks) : 27 et 30%.
Farbenfabrik Fried. Bayer & C° (au capital de 36 millions de marks) : 25 %.
Aktiengesellschaft fiir Anilin-Fabrikation (au capital de 14 millions de marks) : 20 %.
Trois autres sociétés de produits chimiques, d'importance comparable, au
- 139 -
capital de 4.300.000, 6 millions et 16.500.000 marks, ont donné des dividendes
de 12 à 18%.
Les entreprises d^ électricité ont été presque toutes absorbées par deux
groupes : l'Allgemeine Elektricitâts-Gesellschaft et la Société Siemens et
Halske. Elles ont distribué à leurs actionnaires des dividendes de 9 à 14 %
tout en réalisant de forts amortissements et en constituant d'importantes
réserves.
Les quatre principales fabriques de machines ont distribué de 12 à 25%.
Les treize compagnies de mines et de charbonnages, dont le capital-
actions se totalise à 775.300.000 marks, ont donné des dividendes variant
entre 8 et 24%.
Enfin les compagnies de navigation maritime, dont les trois principales
sont : la Hamburg-Amerika Paketfahrt, de Hambourg, le Nord-Deutscher
Lloyd, de Brème, et la Hansa Dampfschiffahrt, ont donné, la première 8 et
9 %, la seconde 3 et 5%, et la dernière 19 et 15% de dividendes.
*
* «
Parvenu à la fm de mon exposé, j'espère avoir fait la démonstration que,
dans les vingt-cinq ou trente années qui ont précédé l'agression de l'Alle-
magne, cette nation a bénéficié, parallèlement à l'accroissement de sa popu-
lation, de progrès économiques si continus et si considérables, que ce fait
réduit à néant l'assertion que les nécessités de leur existence obligeaient
inéluctablement les Allemands à une guerre. Ils pouvaient continuer leur
expansion sans conquête de nouveaux territoires, européens ou -coloniaux.
Dans son livre admirablement documenté et quasi prophétique, Le Problème
anglo-allemand, publié en anglais en 1912, un professeur belge établi en
Ecosse, M. Saroléa, écrivait : « C'est aujourd'hui un lieu commun univer-
sellement accepté en Allemagne que l'Angleterre, de propos délibéré, a fait
obstacle à l'expansion allemande ou, pour se servir d'une métaphore employée
journellement par la presse populaire, qu'elle a pris à V Allemagne sa place
au soleil... ^) On a pu constater la valem' de cette affirmation allemande.
Le tableau que nous venons d'esquisâer prouve encore qu'il est inexact
que la jalousie de ses concurrentes, notamment de l'Angleterre, ait jamais
entravé la libre action pacifique de la nation allemande sur terre ou sur mer.
La tendance innée du groupe germain, développée sous l'influence prus-
sienne, vers tous les monopoles et vers la prédominance, a fini par faire
désirer, jusqu'à l'exaspération, à toute la nation, depuis l'Empereur et sa
camarilla jusqu'à la bourgeoisie (autrefois libérale) et à la masse des ouvriers
(qu'on croyait démocrate-socialiste), l'établissement, par la guerre, de la
domination allemande, d'abord sur l'Europe et ensuite sur toute la terre.
Et nous avons constaté que cet appétit insatiable de domination, incompa-
tible avec les idées d'égalité des droits et de justice, ne trouve pas même
- 140 -
l'ombre d'un prétexte dans une prépondérance numérique du groupe ethnique
allemand sur les autres races européennes. Nous avons, surtout, reconnu
quel puissant faisceau de preuves de l'entière liberté d'action économique
dont les Allemands ont bénéficié se trouve constitué par les statistiques
allemandes résumant leurs progrès industriels, commerciaux, maritimes,
financiers, etc.. Nous avons comparé l'importance de ces rapides progrès
à l'augmentation de la population, et démontré que la quantité et la qualité
du travail en Allemagne avaient augmenté dans des proportions beaucoup
plus considérables que le nombre de ses habitants. Et nous avons vérifié
que la masse plus grande des travailleurs allemands, ayant reçu de son labeur
une rétribution plus considérable, avait pu, tout en bénéficiant de condi-
tions d'existence matérielle très améliorées, tout en consommant infiniment
plus, épargner des capitaux dont l'importance a notablement dépassé celle
des épargnes en France et en Angleterre.
Dans toutes ces manifestations de son activité, nous avons enfin pu nous
convaincre que l'avance de l'Allemagne sur ses concurrentes s'était de plus
en plus accentuée, et que c'était avec raison que ses économistes et ses
statisticiens déclaraient que les Allemands de l'Empire avaient atteint une
ère de splendide développement économique.
A moins d'être follement insatiables, les industriels, les commerçants, les
financiers allemands ne pouvaient donc que se tenii' pour satisfaits des succès
continuels de leurs entreprises, tant chez eux qu'à l'extérieur. Par suite de
quelle aberration ont-ils pu se laisser halluciner par les hobereaux, les junkers
et autres pangermanistes, et, par leiu' adhésion au parti impérialiste, le
rendre maître de leur destinée et de celle de millions de travailleurs, alors
que ce parti ne se cachait pas de vouloir la guerre?
C'est que certains, enivrés de leurs richesses si promptement acquises,
ont cru qu'ils augmenteraient sans mesure leurs gains en ruinant ou sup-
primant les concurrents belges, français et anglais, si peu gênants qu'ils
fussent. L'âpreté de ces incroyables convoitises s'étale dans le Mémoire secret
que le chancelier de l'Empire a reçu des comités des six grandes associa-
tions industrielles et agricoles allemandes. Cet esprit de rapine s'est géné-
ralisé et est corroboré par le Manifeste dit des annexiojiistes, signé de profes-
seurs et d'intellectuels allemands. Ces deux documents ne sont, en réalité,
qu'un appel cynique et stupéfiant au vol à main armée, comme l'ont pra-
tiqué les hordes barbares. La mentalité de leurs auteurs indique, chez des
gens se disant civilisés, une effroyable régression vers le brigandage des temps
anciens.
Telle est, malheureusement, la redoutable folie que l'influence de la
noblesse de Prusse dans la culture allemande, que cinquante ans d'excita-
tions et de mensonges pangermanistes, ont fini par inoculer à presque tous
les cerveaux allemands.
C'est contre ce péril d'odieuse et mortelle domination que luttent héroïque-
ment les braves des nations alliées. Nous sommes convaincu qu'ils vaincront.
Mais, après la victoire, combien d'œuvres difficiles de reconstitution et d'apai-
sement resteront à accomplir ?
L'une des plus délicates sera de convaincre, et les Alle;nands désillusionnés
- 141 -
et les peuples que leurs mauvais bergers auront envoyés nous combattre à
leurs côtés, du néant des prétextes au moyen desquels on a réussi à les jeter
contre nos alliés et contre nous; notamment, du mensonge relatif au refus
de laisser, aux Allemands, comme à tous les peuples, leur place au soleil.
J'espère qu'un temps viendra où l'immense majorité de nos ennemis
actuels se rendra compte qu'elle a été cyniquement sacrifiée, non à la réali-
sation d'un grand idéal national, mais aux intérêts matériels et à la féroce
vanité d'une minorité infime de dirigeants réactionnaires.
Je souhaite que, grâce, aux efforts suivis des hommes d'Etat et à l'action
persévérante des publicistes des peuples alliés et des nations neutres M'ai-
ment indépendantes, la vérité soit connue de nos ennemis revenus à la raison.
Je souhaite qu'ils demandent compte aux fauteurs de la guerre, à ceux qui
sont, avec eux mais avant eux, responsables de tant de vies sacrifiées, de tant
de ruines irréparables, et de si déshonorantes atrocités, qu'ils leur demandent
compte d'ime accumulation de forfaits si monstrueuse que rien de ce qu'on
pourrait imaginer comme châtiment ne sera jamais capable de l'expier.
De tels crimes peuvent-ils rester impunis? Ne doit-on pas aux mânes des
millions de victimes d'en dénoncer et d'en poursuivre les auteurs?
Et si cette contribution, bien modeste, à la proclamation de la vérité venge-
resse, pouvait inciter des orateurs ou des écrivains, des économistes ou des
statisticiens, mieux qualifiés que moi, à poursuivre cette propagande néces-
saire, ce serait, pour mon labeur, une magnifique récompense et, peut-être,
pour mon cœur, le début de l'apaisement.
Gaston Cadoux.
III
VARIÉTÉ
LA PRODUCTION FRUITIÈRE FRANÇAISE ET SES DÉBOUCHÉS
Tandis que le Midi de la France a vu, par suite des intempéries et des mala-
dies cryptogamiques, s'évanouir les belles espérances de vendange qui s'annon-
çaient au printemps dernier, notre Nord-Ouest a fait une récolte de pommes
surabondante. Il s'agit là d'une production intéressante au point de vue éco-
nomique général, non seulement à cause de la place que le cidre tient parmi les
boissons hygiéniques, mais encore parce que notre climat est généralement
favoreible à la culture fruitière. M. le Colonel Edmond Théry, en a mis l'im-
portance et le progrès en relief par le tableau suivant qu'il a inséré dan^ son
étude si documentée sur La Fortune publique de la France (44) :
Tableau.
142 -
Valeur des fruits récoltés en France de 1892 à 1908.
Espèce!
1892
1908
Différences
en
1908
Milliers de francs
14.557
34.769
+
20.212
10.819
24.881
+
14.062
5.853
3.107
—
2.746
21.591
34.028
+
12.437
6.658
14.085
+
7.427
13.739
35.502
+
21.763
6.686
8.130
+
1.444
34.656
25.934
—
8.722
2.686
892
—
1.794
117.245
181.328
+
64.084
Oliviers
Noyers
Amandiers
Pommes et poires à couteau
Pêches et abricots
Prunes
Cerises
Châtaignes
Oranges, citrons, cédrats. .
Même en reconnaissant avec M. le colonel Edmond Théry le caractère
approximatif de ces évaluations, on voit que notre production fruitière
n'est nullement négligeable. La mauvaise récolte de 1913 a encore donné en-
viron 140 millions de francs de fruits, non compris les raisins, fraises, fram-
boises, poires à poiré et pommes à cidre, d'après la statistique agricole de la
France pour 1913. Quant à celles-ci, dont la valeur en 1912 atteignait près
de 200 millions de francs et qui ont fourni environ 17.664.000 hectolitres
de cidre la même année (30 millions d'hectolitres en 1913 et 17 millions
d'hectolitres en 1914, d'après le Statesman's yearbook), elles constituent évi-
demment une ressource digne d'attention.
L'exportation française doit au pommier et au poirier un contingent modeste
mais encore appréciable qui se mesure par les chiffres suivants :
Cidre et poiré (hect.)
Pommes et poires fraîches de
table (quint, met.)
Pommes et poires fraîches à
cidre et à poiré (quint. met.) .
Pommes et poires séchées (q. m.)
Total
1913
1912
1913
1912
Quantités
Valeurs
en francs
22.956
24.525
574.000
613.000
385.859
390.699
12
.155.000
12.307.000
2.093.826
240.921
9
.422.000
1.205.000
292
653
22.000
50.000
»
»
22,
.173.000
14.175.000
Il faudrait y ajouter les quantités d'eau-de-vie de cidre et de poiré qui
tiennent vraisemblablement une certaine place dans les quelque 13 mil-
lions de francs d' « autres eaux-de-vie » figurant sans être détaillés dans la
plus récente statistique de nos exportations publiée par la Direction générale
des Douanes.
L'exportation varie naturellement beaucoup d'une année à l'autre selon la
production française et selon les besoins de l'étranger, dépendant en particulier
de ses propres récoltes. Dans l'intérêt des producteurs, qui, pour l'arboriculture
- 143 -
fruitière, sont le plus souvent de petits propriétaires ou de petits fermiers, il
n'est pas sans importance que tout fléchissement notable de l'exportation soit
compensé par un accroissement de la consommation intérieure, surtout lorsque
la récolte française est très forte. Les Documents statistiques sur le commerce
de la France indiquent les principaux débouchés extérieurs pour l'ensemble de
notre production fruitière :
Exportation de fruits de France (Commerce spécial).
fieitinatioD 1914 1913 1912 1914 1913 1912
Quintaux Milliers de francs
Angleterre 505.128 394.167 537.521 27.532 25.333 29.375
Allemagne. ........ 97.329 2.207.356 587.275 3.735 21.031 15.017
Belgique 49.864 209.250 312.933 1.742 8.645 9.405
Suisse 83.848 194.064 123.107 3.503 5.012 5.249
États-Unis 49.134 52.783 42.212 5.473 6.564 3.544
Brésil 3.062 5.120 8.644 252 427 656
République Argentine. . . 6.455 8.869 14.177 496 736 1.058
Algérie 26.906 33.816 26.476 1.398 1.830 1.414
Maroc 1.651 1.234 » 94 81 r,
Cette branche de notre exportation est une de celles qui avaient le plus
progressé avant la guerre, grâce aux heureuses initiatives prises par nos com-
pagnies de chemins de fer.
La décroissance accusée pour 1914 s'est accentée pour 1915 par suite de la
rupture des relations avec certains clients antérieurs et à cause de la hausse
du prix des frets sans laquelle les achats d'outre-mer prendraient une plus
forte extension. Aussi doit-on souhaiter que la consommation nationale des
fruits ou de leurs dérivés (boissons, confitures, compotes, pâtes, confiseries),
qui fut de tout temps considérable en France et incomparablement supérieure
à l'exportation, se développe rapidement. Les circonstances s'y prêtent
d'ailleurs en ce qui concerne les produits du pommier et du poirier. Le déficit
des vendanges a ouvert un débouché temporaire au cidre et au poiré, qui se
vendraient peut-être et, en tout cas, se conserveraient encore mieux, si les
producteurs, au lieu d'en diminuer le degré, rehaussaient celui-ci par une très
légère addition d'eau-de-vie de cidre. Il faut espérer que la viticulture sera moins
éprouvée dans l'avenir; mais alors l'exportation aura repris son cours; d'autre
part la consommation des fruits à couteau pourrait en France progresser sous
diverses formes pour les usages ménagers. L'hygiène moderne fait une plus
large place que celle des précédentes décades à l'alimentation lacto-végéta-
rienne; on a reconnu qu'au point de vue de la santé comme à celui de l'écono-
mie les menus virgiliens comprenant du lait caillé, du miel et des châtaignes
avaient du bon, surtout pour les personnes qui ne fournissent pas de grands
efforts musculaires. Sans revenir au brouet Spartiate, les milieux où l'on s'a-
donne à la culture physique, notamment les pays Scandinaves et anglo-
saxons, ont sensiblement développé depuis quelques années leur consommation
de fruits et de légumes. Les fruits séchés y sont souvent employés comme succé-
1913
1912
Tonnes
440.000
197.000
;}8.500
58.500
14.700
13.600
41.000
24.500
45.000
35.000
9.000
8.600
215.600
222.400
803.800
559.600
_ [U -
danés de ces derniers; la consommation en est grande aussi sous forme de confi-
tures; l'armée allemande faisait naguère des expériences à ce sujet; la cherté
du sucre dans l'Europe occidentale supprime pour le moment les avantages
économiques des denrées dans lesquelles il entre; toutefois le sucre peut être
remplacé à certains égards par du moût de cidre. En tout cas, les statistiques
allemandes nous révèlent quel élément considérable les fruits peuvent être
dans la nourriture d'un peuple moderne. Outre sa production indigène, relati-
vement plus faible que celle des pays méridionaux, l'Allemagne importait :
Pommes fraîches ....
Poires
Pommes et poires séchées
Pruneaux
Bananes
Figues sèches
Autres fruits
L'Allemagne achetait aussi pour 2.600.000 marks de miel en 1912 et pour
2.400.000 en 1913, outre une quantité mal connue, mais non insignifiante,
de confitures. La consommation de fruits du Midi s'est développée chez elle
encore plus vite que celle du thé et du café.
Les exportations étant à peu près nulles, ces quantités se sont ajoutées à la
production de l'Allemagne pour y être consommées. Une partie des pommes
importées étaitemployée, non à l'état naturel, mais après avoir été transfoimée
en boissons plus ou moins authentiques ; elles entraient dans la composition de
certains « champagnes » allemands. Bien entendu la place faite aux fruits dans
l'alimentation varie selon les régions de l'Allemagne et les catégories sociales,
les produits importés étant relativement -chers. Quoique le chifîre par tête
d'habitant ne soit pas encore très élevé, si l'on considère l'ensemble du pays,
il y a sensible accroissement dans les grandes villes où les progrès de l'hy-
giène et des facilités commerciales sont le plus rapides. On peut noter le
chiffre assez considérable des importations de pommes et poires séchées au
four, denrée de conservation facile. L'Allemagne les recevait surtout des
États-Unis ainsi que ses pruneaux; la France, la Hollande, l'Autriche et
l'Italie étaient ses principaux fournisseurs do pommes fraîches. Quant à F Au-
triche-Hongrie, elle importait en 1913 environ 198.600 tonnes de fruits et en
exportait 134.500 tonnes.
n se pourrait qu'avec un peu d'ingéniosité de la part des intéressés, en par-
ticulier des commerçants, la consommation des pommes et poires augmentât
beaucoup en France comme l'a fait celle des bananes dans ces dernières années.
L'organisation de la cueillette, de la conservation et de l'apport des produits
sur le marché est tout à fait rudimentaire dans la plupart de nos provinces,
en particulier dans le Sud-Ouest où cependant les fruits les plus variés mû-
rissent sans culture, mais où l'éducation des agriculteurs et intermédiaires à
cet égard n'a pas achevé de se propager loin des villes. H y a là un \Tai gas-
- 145 -
pillage de ressources naturelles, qu'une propagande active dans les écoles, les
mairies, les syndicats agricoles et les centres de consommation pourrait réduire.
Aujourd'hui moins que jamais rien n'est à dédaigner dans cet ordre d'idées.
L'économie, dans le sens étymologique du mot, et l'art des ménagères ont un
rôle d'intérêt public. Il est à remarquer d'ailleurs que les progrès réalisés par
l'organisation en vue de la récolte et du commerce intérieur se répercuteraient
heureusement sur l'exportation quand les circonstances permettraient à celle-ci
de reprendre son essor.
Eug. B. DUBERN.
IV
BIBLIOGRAPHIE
ha. Guerre de 1914 vue en son cours, par Paul Leroy-Beaulieu,
membre de l'Institut (1).
Parmi tant de récits instructifs qu'aura inspirés la grande lutte européenne, celui
que rédige, semaine par semaine, le savant directeur de U Économiste Français, restera
comme un monument imposant de patriotisme éclairé. Dans un de ses premiers
ouvrages, M. Paul Leroy-Beaulieu écrivait que pour réussir en affaires, l'optimisme
était une condition favorable. La confiance importe encore plus pour le succès d'une
guerre que pour celui d'une spéculation. Notre éminent collègue a donné de cette heu-
reuse disposition le plus bel exemple malgré l'épreuve douloureuse que le sort des
combats lui a imposée. Constamment il a affirn-vé sa conviction touchant l'issue glo-
rieuse d'une lutte dont il connaissait les éléments avec précision.
S'étant attaché depuis tant d'années à étudier par les méthodes les plus scienti-
fiques tous les aspects de la vie politique il se trouvait préparé à comprendre et à
juger sur des bases sérieuses les événements qui se déroulent depuis août 1914.
Gomme il le dit, lui-même : « L'histoire qui ne s'élabore que tardivement aura sans
doute des corrections à opérer dans cet exposé des faits. Il répond en tous cas aussi
exactement que possible aux données qui se sont révélées au cours de la guerre. »
A titre documentaire et par l'intensité de vie avec laquelle il présente les faits, la
hauteur de vues avec laquelle il les commente, ce livre, en dehors de son intérêt
d'actualité, méritera toujours d'être consulté.
E. B. D.
(1) Delagrave, édit. 1915.
- 140
V
LISTE DES DOCUMENTS PRÉSENTES DANS LES SÉANCES DES 15 DÉCEMBRE 1915, 19 JANVIER,
16 FÉVRIER ET 15 MARS 1916 ET DES PUBLICATIONS PÉRIODIQUES PARVENUES PENDANT
L'ANNÉE 1915
ORIGINE ET NATURE
des
DOCUMENTS
DOCUMENTS OFFICIELS
Argentine
Direction générale de Statistique. — Com-
merce extérieur pendant les neuf
premiers mois de 191.')
Com-
ujir,,
Chili
Bureau central de Statistique. — An-
nuaire statistique de la République
du Chili. — Vol. I, Démographie.
Année ioi4
— Vol. IX, ir<- partie. Mouvement ma-
ritime. Année 1914
— Institut central météorologique et
géograpliique du Chili. — Annuaire
météorologie] ue du Chili. 1918
(i" partie)
— Quantité d'eau tombée en 1913 . .
Danemark
Bureau de Statistique de l'Etat. ■
munications statistiques.
4'= série, tome XLVH
— igiO, 4*" ^iérie, tome IL
Espagne
Ville de Barcelone
Bureau de la Municipalité. — Annuaire
statistique de la ville de Barcelone
pour 191,3
États-Unis
DÉPARTEMENT DU TllAV Ait. — Bulle-
tin 169. — Décisions des tribunaux
concernant le travail. 1914 ....
- Bulletin 174. — Index des sujets des
publications du bureau des statis-
tiques du travail juscju'au if-r mai
1915
— BuUeti!) \ii'>. — Les effets de la
détermination du salaire minimum
dans rOrégon. 191,5
-- Bulletin 179. — Les poisons indus-
triels dans l'industrie du caout-
chouc. 1915
DÉPARTEMENT DE l'-VgUICULTURE. —
Farmer's Bulletin (hebdomadaire).
Année 1915
ETAT DU MASSACilOSETTS
INDICES
de
f : L A s s E M E N T
dans la
Bibliothèque
Apa3 S4.15
Chfi 13
Chf' 13
Dfi'î 85 XLVl!
Dainae IL
Esba >i !3
ïuciiti 15
:ui'67 15
Eu''»« 15
Eu'>i-'s 15
Bureau de Statistique. — Neuvième rap-
port annuel sur les bureaux gra-
tuits de placement de l'État. i9i.">.
— Rapport sur les statistiijues du
travail. 191.')
— Quatorzième direction annuelle des]
organisations du travail. igiT) . . . lEuma'j'-'- 15
— Bibliographie du travail. 1914 . . . Euma'''-'> 14
— Législation du travail. 1915 JEurT»a'"'l5
Eumai'i 15
!Eumai'-i m
ORIGINE ET NATURE
des
DOCUMENTS
Finlande
Bureau central de Statistique. — .\nnuairc
statistique de Finlande pour 1914 .
— Commerce. 191,3
— Mouvement de la population. 191 1-
1912
— Recensement de la population de
Helsingfors au 7 décembre 1910
(tableaux)
— Recensement de la population de
Viborg au 7 décembre 1910 (ta-
bleaux)
— Recensement de la population de
Tammerfors au 7 décembre 1910
(tableaux)
— Recensement de la population de
Bjôrneborg au 7 décembre 1910
(tableaux)
— Recensement de la population de
Aboau 7 décembre r9io(tableaux).
— Recensement de la population de
Nikolaistad au 7 décembre igio
(tableaux) . .
— Recensement de la population de
Uleaborg au 7 décembre 1910 (ta-
bleaux)
— Texte se rapportant aux divers
tableaux ci-dessus
— Compte rendu officiel sur l'état et
l'administration des caisses d'é'
pargne de Finlande en 1918. . . .
— La Banque de Finlande, les banques
privées et les établissements hypo-
thécaires en I9i8eti9i4 ...
— A|)erçu statistique de l'état des éta-
blissements d'instructi(m secon^
daire en Finlande pendant l'année
scolaire 1918-1914
— Sliitistique médicale annuelle. 1912
et 1918
— Statistique des établissements pénl
tentiaires. 1918 .
— Stalistifiue des industries. 1918. . .
— Statistique annuelle des chemins de
fer. 1918
— Statistique judiciaire et criminelle
pour 191 8
— ]\Ionts-de-piété. 1918
— Comi)te rendu de l'étal de l'assu
rance en 1918
— .Vssistance piddiquc des communes
de la Finlande. 191 1
— Rapport sur l'état des associations
de bailliage et de paroisse pour
assurances contre Fincendie. 1912.
— Kuiigration pendant les années 1918
et 1914
— Contrats de fermiige. 1912 et 1918
INDICES
de
CLASSEMENT
dans la
Bibliothèque
Fia27 14
Fiala 13
Fiac BO b
FiaS 10 cl
Fiae 10 c2
Fiao JO c3
Fiao 10 d
Fia'; JO e
Fia6 10 g
FiaG BO f
FiaTa i3
FiaT.l 13 14
Fia-Jc 13-14
Fiall 12-13
Fiai2 13
Fial8a 13
Fia-'O 13
Fia--!:' 13
Fia-'S 13
Fi«-"-' 13
Fia21a 11
Fia3.<i 12
Fia35 13-14
Fia.i7 12-i3
— 147 —
ORIGINE ET NATURE
des
DOCUMENTS
INDICES
de
CLASSEMENT
dans la
Bibliothèque
Statistique forestière. 1912
Statistique des Arts et Métiers pour
1918
Maatalous. 1918
Population de la Finlande au 3i dé-
cembre 1910 (selon les registres
ecclésiastiques)
France
-Ministère de l'Intérieur- — Direction
de ^Assistance et de F Hygiène pu-
bliques. ■ — Bureau de la prophy-
laxie et des épidémies. — Statis-
tique sanitaire de la France. —
2e partie. — Communes de moins
de 5.000 habitants et France entière
Année 191 2
Ministère de l'Instruction publique et
DES Be.^u-x--Vrts- — Comité des:
travaux; historiques et scienti
fiques. — Section des Sciences éco-
nomiques et sociales. Bulletin du
Comité. Années igri et 1912. .
— Mémoire sur le paupérisme (par
-\. de Tocque\-ille, publié sur un
rapport de M. -\. .Neymarck) extrait
du bulletin du Comité de 191 1. . .
— Congrès des Sociétés savantes de
1912 tenu à Paris
Ministère des Fin-^nces. — Conseil gé-
néral de la Banque de France. —
Rapport à l'-A-Ssemblée générale
des actionnaires du27Janvier 1916.
Ministère des CoLONaEs. — Statistique
du commerce dans les colonies
françadses. — Tomes l et II. -A.nnée
1913
Fia..-' i2
Fia63 13
Fia3 13
Fiae 10 b
Grande-Bretagne
Dép.vrtement du Tr-Wail. — Labour
Gazette. — La gazette du travail.
.\nnée 1915
FHcbi 12 b
1112
F<iaa^; ||
F«aa2b |2
HoUande
Bureau central de Statistique. — Revue
mensuelle du bureau. -\nnée 191 5.
Italie
Direction générale de Statistique. — .\n-
nuaire statistique italien pour 1914.
Ministère de l'.A.gricclture, de l'Indus-
trie ET du Commerce. — Bulletin
de l'Office du Travail. -Année 1915.
— Conseil supérieur du Travail. —
Les spectacles publics et les pré-
voyances de la législation sociale.
I9i5
Ville de Florence
Bureau statistique de la Ville. — -Vnuuaire
statisticpie pour 1914
Japon
Ministère des Finances. — Annuaire
financier et économique du Japon
pour 1915
Norvège
Ministère de l'Intérieur. — Bureau
central de statistique. — Statistique
des boissons alcooliques. — Arres-
tations par suite d'ivresse en Nor-
vège de 1896 à 1912
Fl-«i» 13 i-ii
GBaaS 15
HdlTb 15
|ual 14
"11 I&
|Bd31 15
Iflaa 14
J-ii 15
NAa.39 96-12
ORIGINE ET NATURE
des
DOCUMENTS
Roumanie
Ministère de l'Industrje et du Com-
merce. — Le Moniteur du Com-
merce roumain (bi-mensuel). -4.n-
née 1910
Russie
DÉPARTEMENT DES DOUANES. — CoinmCrCC
extérieur de la Russie par la fron-
tière d'Europe. 191. 5
Suède
DÉp.\RTEMENT CIVIL. — Bweau central
de Statistique. — Élections aux
conseils municipaux. 1918-1914
— Statistique des Caisses d'Épargne
et de certains établissements de
crédit analogues pour 1914 •
— Direction générale des chemins de
fer. — Statistique généraleannuelle
des chemins de fer pour igiSet 1914
— Mouvement des chemins de fer de
l'Etat pour 1918
— Direction générale des Ponts et
Chaussées. — Routes et Canaux
— Statistique annuelle pour 1914 .
— Direction générale des Télégraphes,
— • Statistique des Télégraphes et
Téléphones en 1914
— Bureau général géodésique. — Rap-
port annuel sui" l'arpentage. 1914.
— Inspection des assurances. — L'Of-
fice des assurances de l'État sur
les accidents du travail en 1914. ■
— Les Assurances sur la vie et les
accidents en 1918
DÉPARTEMENT DES FINANCES. — Statis-
tique postale pour 1914
DÉPARTEMENT DE LA Marine. — Le Ser-
vice sanitaire et les soins donnés
aux malades dans la Marine du
i" octobre 1914 au 80 septembre
1915
Suisse
Conseil fédéral. — Rapport du Conseil
fédéral à l'-lssemblée fédérale sur
la gestion et le compte de régie
pour l'année 1914
— Données statistiques concernant la
gestion fédérale des alcools en 191
DOCUMENTS PRIVÉS
PupiN. — La richesse de la France devant
la guerre
Verri.in Stuart. — Inleiding tôt de
beoefening der statistiek
LNDICES
de
CLASSEMENT
dans la
Bibliothèque
Ron 15
Rf^"' 15 b
13-14
PUBLICATIONS PÉRIODIQUES NON OFFICIELLES
France
Société de Statistique de Paris. — Jour-
nal mensuel. -Ajinée igiô
— Annuaire de la Société (liste des
membres). -Ajinée 1915
Le Rentier (Altred NejTnarck). —Journal
hebdomadaire. .Année 1913. . . .
La Revue économique et financière (Ker-
gall). — Journal hebdomadaire.
-\nnée 1915
Société d'Économie politique. — Bulletin.
-Année 191.5
Sia'J 14
SAfiii, 1314
Sidla 13
Sa 1 14
SAdl 14
S^el 14
Siali- 14
SAfi 13
S*-fi 14
SEbi 14-15
Subi 14
Su»' 14
-P66
-V 90
QFla 15
OFlb 15
i^W 15
QF 19 15
QFSb 15
— 148 —
ORIGINE ET NATURE
des
DOCUMENTS
INDICES
de
CLASSEMENT
dans la
Bibhothèque
ORIGINE ET NATURE
des
I) 0 c U it E N T s
INDICES
de
c L A s s E M E NT
dans la
Bibliothèque
Société nationale d'Horticulture. — Jour-
nal mensuel. Année igiû
Annales du Midi {h., ieaxivoy et Pognon).
Année 1916
fjFôSa 15
'2'"-i^ 15
des questions économiques, finan-
cières et sociales. Année i()i5. . .
Union italienne de l'éducation populaire.
— « La Coltura popolare ». Revue
bi-mensuelle. Année 1916
L'École positiviste dans lu jurispru-
dence. — Revue mensuelle. Année
ir)l5
û'« 15
Q« 15
Qil 15
Grande-Bretagne
Société royale de Statistique de Londres.
— Journal, année igiB
f2<iBla 15
L'Economiste. — Journal hebdomadaire,
commercial des banques, chemins
de fer, etc. Année lyiS
Italie
La Réforme sociale. — Revue mensuelle
Q«c2 15
Russie
L'École et la Vie
li"3|5
VI
AVIS DE MISE EN VENTE
DES
OUVRAGES PUBLIÉS PAR LA SOCIÉTÉ DE STATISTIQUE
A L'OCCASION DE SON CINQUANTENAIRE
Nous rappelons que la Société a publié, à l'occasion de son Cinquantenaire et de la
réunion de la XIP session de l'instilul international de Statistique, un ouvrage intitulé :
LA SOCIÉTÉ DE STATISTIQUE - NOTES SUR PARIS
Cet ouvrage, dont il a été rendu compte dans le Journal de la Société (numéro d'août
1909, page ^^81), a été adressé par la poste le 2 août à tous les membres de la Société.
Il est mis en vente, au prix de 5 francs, à la Librairie Berger-Levrault, 5-7, rue
des Beaux-Arts, à Paris.
Le numéro exceptionnel du Journal (août 1909), consacré presque entièrement au
compte rendu du Cinquantenaire de la Société et composé de 156 pages, est également
mis en vente à la même librairie, au prix de 3 francs Texemplaire.
Le Gérant: R. STEINHEIL
NAMCY, IMPIUMEBJB BERGER-LEVRAULT — AVRiL IQIÔ
JOURNAL
DB LA
SOCIÉTÉ DE STATISTIQUE DE PARIS
N° 5. — MAI 1916
I
PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE DU 19 AVRIL 1916
s 0 1^ nVE-A-I RE
OUVERTURE DE LA SÉANCE PAR M. MALZAC, PRÉSIDENT.— PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE DU 15 MARS
1916.
NÉCROLOGIE.
NOMINATION ET PRÉSENTATION DE MEMBRES TITULAIRES.
COMMUNICATION DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ET PRÉSENTATION D'OUVRAGES.
COMMUNICATION DE M. JOSEPH GIRARD SUR « LE JAPON, NOTRE AMI ET NOTRE ALLIÉ (NOTES DÉMO-
GRAPHIQUES ET FINANCIÈRES) >.
OUVERTURE DE LA SÉANCE — PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE DU 15 MARS 1916
La séance est ouverte à 17^ 40, sous la présidence de M. Malzac, président,
qui fait connaître à la Société que- le Journal n'a pu être distribué, les événe-
ments militaires ayant retardé la réception des épreuves, qui doivent d'ailleurs
être soumises à la censure.
L'adoption du procès-verbal de la séance du 15 mars 1916 est donc remise
à une date ultérieure.
NÉCROLOGIE
M. LE Président l'ait part à la Société du décès de notre collègue, M. Mu-
TEAU. Il rappelle que M. Muteau, député de la 2^ circonscription de Dijon de
1898 à 1914, officier de la Légion d'honneur, était venu à nous en 1904, attiré
vers la statistique par l'application qu'il avait été appelé à en faire dans sa
carrière de commissaire de la Marine et dans les congrès internationaux d'as-
sistance et de protection de l'enfance auxquels il a pris une part active comme
secrétaire général et vice-président de 1889 à 1900. M. Muteau nous laissera
le souvenir d'un collègue plein d'affabilité, attentif aux travaux de notre So-
ciété et très attaché à nos réunions mensuelles.
M. LE Président adresse au fils du défunt et à son frère, M. le général
Muteau, l'expression de nos plus sympathiques condoléances.
M. le Président fait ensuite mention de la mort de notre autre collègue,
M. LoDiN de l'Épinay, inspecteur général des Mines et professeur de métal-
l'*" SÉKIE. 57° VOL. — n" 5 11
— 150 —
lurgie à l'École nationale des Mines, décès qui remonte au 15 juin 1914, mais
qui n'avait pas encore été officiellement annoncé à la Société. Une notice nécro-
logique paraîtra au Journal de la Société.
NOMINATION ET PRÉSENTATION DE MEMBRES TITULAIRES
La candidature de M. Maroni est mise aux voix et adoptée à l'unanimité,
et M. Maroni est nommé membre titulaire.
M. le Président annonce qu'il a reçu les demandes d'admission suivantes :
M. BÉZARD (Hubert), attaché aux études financières de la Banque de l'Union
parisienne, 68, rue de l'Aqueduc (X^), présenté par MM. Lustgarten et
Barriol;
M. Godard, directeur de la Compagnie générale du Maroc, 1, avenue de
l'Opéra (I^^), présenté par MM. Malzac et Barriol;
M. PiERSON, ingénieur-constructeur, consul général de la République Sud-
Africaine, 6, rue Anatole-de-La-Forge (XVII^), présenté par MM. Schélle
et Neymarck.
Conformément à l'usage, il sera statué sur ces demandes à la séance de mai.
COMMUNICATION DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ET PRÉSENTATION D'OUVRAGES
M. le Secrétaire général donne connaissance à la Société des lettres qu'il
a échangées avec M. Barthe y Barthe, notre correspondant de Madrid, qui a
bien voulu accepter de représenter la Société de Statistique de Paris aux
fêtes par lesquelles la Société royale de Géographie d'Espagne a célébré le
quarantième anniversaire de sa fondation.
M. le Président propose à la Société, qui accepte à l'unanimité, d'adresser
à M. Barthe y Barthe une lettre de remerciements pour la manière dont il
s'est acquitté de sa mission.
M. le Secrétaire général annonce qu'il a reçu pour la Société un assez grand
nombre d'ouvrages, parmi lesquels il signale : ''
Australie. — Navigation et migration d'outre-mer pour 1915.
Ile de Cura. — Commerce extérieur, premier semestre 1915 et année fiscale
1914-191^ .
France. — Résultats statistiques du recensement général de la population,
efîectué le 5 mars 1911. Tome II : Population présente, résultats géné-
raux par départements.
Italie. — Statistique annuelle des causes de décès pour 1913.
Suède. — Naissances illégitimes et mortalité. 1915.
Statistique agricole (1915).
Tables de mortalité et de survie. Période 1901-1910.
Fabrication et vente de l'eau-de-vie et fabrication du sucre de betterave
(1914-1915).
Rapport annuel sur les prisons (1914).
Ville de Stockholm. Annuaire statistique pour 1914.
Uruguay. — Mémoire présenté à la Direction générale de l'Instruction pri-
maire par M. Abel Perez, inspecteur national pour 1911 à 1914.
Documents privés :
Chambre de commerce de Marseille. — Les zones fi'aiiches et réexportation
française. • ;
Simon (André). — Une période transitoire sera-t-elle nécessaire lorsque TAl-
sace-Lorraine fera retour à la France (agriculture et viticulture ?
COMMUNICATION DE M. JOSEPH GIRARD SUR <■ LE JAPON, NOTRE AMI ET NOTRE
allié .(NOTES DÉMOGRAPHIQUES ET FINANCIÈRES) >
La parole est donnée à M. Joseph Girard pour le développement de sa com-
munication :
Qu(>lques jours après que la guerre s'était déchaînée sur l'Europe, le 15 août
— 151 —
1914, le Gouvernement japonais, allié de l'Angleterre et ami de la France,
faisait remettre au Gouvernement allemand un ultimatum dont le ton de hau-
taine impertinence dut provoquer à Berlin stupeur et colère.
Aveuglée par le fol orgueil de sa force matérielle, sûre du prompt succès de
ses armes, comment l'Allemagne aurait-elle pu croire qu'une nation qui, comme
le Japon, semblait pouvoir demeurer impunément à l'écart du conflit, oserait
ainsi la braver en face? Le texte même de l'ultimatum montrait que, en se ran-
geant aux côtés de ses alliés et de ses amis, le noble Japon n'entendait point
seulement servir ses propres intérêts, mais aussi donner au peuple allemand
l'insultant exemple de la fidélité aux engagements consentis.
Tout le monde, en France, connaît et apprécie les qualités de la grande nation
moderne, laborieuse et forte, qui s'est épanouie là-bas, dans l'archipel aux cinq
cents îles. M. Girard a pensé qu'il n'était pas sans intérêt de présenter à la
Société quelques indications et quelques chiffres susceptibles de caractériser
son développement actuel, notamment au point de vue de la démographie et
des finances publiques.
Après avoir rappelé en quelques mots la constitution géographique du Japon
proprement dit, dont la superficie de 382.000 kilomètres carrés est un peu infé-
rieure aux trois quarts de la surface de la France continentale, et l'extension
qu'a prise l'Empire par l'acquisition ou la conquête des trois colonies de For-
mose (Taïwan), de la Sakhaline japonaise (Karafuto) et de la Corée (Chôsen),
d'une superficie totale de 288.800 kilomètres carrés, l'orateur expose les condi-
tions de la répartition très inégale de la population entre ces différentes con-
trées.
Le Japon proprement dit compterait actuellement environ 54 millions d'ha-
bitants, soit plus d'une fois et un tiers la population de la France continentale;
la densité est donc fort grande : 142 têtes en moyenne par kilomètre carré, très
supérieure à celle de l'Allemagne; elle atteint son maximum dans la partie
méridio lale de la Grande Ile, où se sont développées des villes comme Tôkyô,
l'une des plus grandes cités du monde, dont la population dépasse largement
2 millions d'âmes, Osaka, l'ancienne capitale Kyoto, Yokohama, Nagoya et
Kobe. On trouverait en Corée et à Formose (îles Pescadores comprises) des
populations s'élevant respectivement à 17 millions et 3.500.000 habitants;
celle de Karafuto est au contraire négligeable. Ainsi la population globale de
l'Empire atteindrait environ 75 millions d'habitants et serait presque double
de celle de la France; son développement est actuellement encore très rapide.
Le nombre des mariages est d'ailleurs fort élevé, du moins au Japon pro-
prement dit, 442.000 en chiffre rond pour l'année 1910, dernier exercice pour
lequel le dépouillement des recensements ait été complètement effectué — ce
qui fait ressortir un coefficient de nuptialité de 87 pour 10.000 habitants; par
contre, l'usage et même l'abus du divorce s'y est depuis longtemps établi;
on n'a pas relevé en 1910 moins de 60.000 divorces en chiffre rond, soit un
coefficient de 11,8 pour 10.000 habitants, alors que le coefficient français corres-
pondant — que nous jugeons, et non sans raisons, déjà bien trop élevé — reste
voisin de 3,8.
M. Girard donne ensuite quelques indications concernant les coefficients
de natalité et de mortalité, en faisant observer que ces éléments ne doivent
être utilisés qu'avec la plus grande prudence et il insiste sur la mortalité infan-
tile et l'importance du nombre des suicides.
Les statistiques officielles japonaises ne fournissent pas d'indications com-
plètes sur la répartition professionnelle. L'orateur examine successivement
les principaux groupes de travailleurs et donne incidemment quelques caracté-
ristiques économiques à propos des diverses professions envisagées : agriculture,
qui absorbe environ 60 % de la main-d'oîuvre, pêche, exploitation de salines
et de mines, usines et ateliers, manufactures de l'État et chemins de fer.
Le tableau du budget du Japon ne comporte pas de recettes et de dépenses
— 152 —
de l'importance de celles qui figurent — même en temps de paix — sur les
budgets des grands États européens; celles-ci atteignent cependant pour l'exer-
cice actuel des chiffres de l'ordre de grandeur de 1 milliard 600 millions, et
encore sont-ils inférieurs aux chiffres correspondants des années immédiate-
ment antérieures à la guerre. M. Girard rappelle les conditions toutes particu-
lières dans lesquelles ont été établis les budgets des deux exercices 1914-1915
et 1915-1916; ce dernier fait notamment état, au titre des recettes ordinaires,
des revenus suivants :
Million de francs
Impôt foncier 189.251
Impôt sur le revenu 91.092
Impôts sur les boissons alcooliques 233,902
Droits de douane 103.289
Revenu du timbre 78.603
Autres impôts 199.869
Recettes provenant des exploitations et domaines de l'Etat . . 392.502
Les dépenses de la guerre et de la marine ont été aussi fortement comprimées
que le permettaient les circonstances.
Le Gouvernement japonais n'a pujassurer le développement si rapide du
pays, tant au point de vue économique qu'au point de vue militaire, qu'en
recourant largement à des emprunts, intérieurs et étrangers. M. Girard donne
les éléments essentiels du tableau de la dette japonaise, les conditions de son
amortissement, qui comportent généralement une période de non-rembourse-
ment de cinq à vingt ans, consécutive à l'émission de chaque emprunt.
L'orateur termine sa communication par un aperçu de la législation fiscale
japonaise. Il examine tout à tour, d'une manière succincte, l'impôt foncier
l'impôt sur le revenu, les patentes, les droits de succession, les impôts sur les
boissons alcooliques et la sauce japonaise dite shôyu, l'accise :-ur le sucre, les
impôts sur le pétrole, sur les spécialités pharmaceutiques, sur les mines, sur
l'émission des billets de banque, sur les placers, sur les tissus et sur les voyages,
les droits de douane et de tonnage, le revenu du timbre et les divers monopoles
institués tant au Japon proprement dit qu'en Corée ou à Formose, tabac, sel,
camphre, gin-seng et opium.
Les indications et évaluations ainsi présentées ne sauraient évidemment
être considérées comme constituant les caractéristiques essentielles de la situa-
tion économique du Japon; celle-ci est infiniment complexe, et M. Girard
énumère quelques-unes des grandes questions qui pourraient faire ou ont déjà
fait l'objet d'études attentives de la part des .spécialistes. Les précisions four-
nies permettent cependant de juger le degré d'activité et la faculté d'organisa-
tion d'un peuple qui a donné au monde, depuis cinquante ans, l'un des plus
étonnants exemples de conscience de sa propre valeur et de persévérante vo-
lonté; le Japon participe à la crise qui 1 ouleverse aujourd'hui toute l'humanité,
mais il aura sa part de récompenses légitimes le jour où la cause du droit aura
triomphé.
Après un échange de vues sur les conditions d'amortissement de la Dette
japonaise, M. R.-G. Lévy fait observer que la prospérité du Japon tient certai-
nement pour une bonne part à la sagesse de la politique monétaire suivie par
son Gouvernement, lequel, vers la fin du dix-neuvième siècle, a adopté l'étalon
d'or; M. R.-G. Lévy signale que des dispositions spéciales ont été prises par le
Japon pour le maintien du change et qu'elles ont obtenu un plein succès.
M. Fernand Faure, s'attaohant à quelques aspects caractéristiques et par-
fois un peu âpres des mœurs japonaises, insiste sur la situation inférieure qui
est faite à la femme dans la société et montre qu'on peut expliquer ainsi dans
une certaine mesure le nombre anormalement élevé des divorces. Il tient d'autre
part à rendre hommage au soin et à la clarté avec lesquels sont rédigés les docu-
ments statistiques officiels japonais, tant en ce qui concerne l'Empire en gé-
— 153 —
néral que la Corée et Formose ; on doit placer au premier rang de ces documents
l'Annuaire financier et économique du Japon, édité par les soins du ministère
des Finances — et publié en langue française — ; nous ne saurions d'ailleurs
oublier que l'influence française s'est fait sentir au Japon dans maint domaine
de l'activité de l'esprit et notamment dans la préparation des lois relatives à la
propriété foncière : un professeur de la Faculté de Paris, M. Boisson ad e, a été
pendant trente années le conseil du Gouvernement japonais; il Ant aujourd'hui
retiré dans le midi de la France, mais son œuvre a été et sera poursuivie.
Après une courte discussion à laquelle prennent part MM. Alfred Ney-
MARCK, Yves GuYOT, Cadoux et Godard, MM. d'Eichthal et Meuriot
signalent à l'attention de leurs collègues l'importance de deux des questions
économiques auxquelles M. Girard a fait allusion, celle de l'évolution indus-
trielle, qui s'est effectuée malgré la rareté relative du fer, et celle de l'accroisse-
ment très rapide de la population qui pose le problème de l'émigration.
M. le Préside>t remercie M. Girard de sa communication et les membres
de la Société qui ont pris part à la discussion qui a suivi.
La séance est levée à 19^ 15.
Le Secrétaire général. Le Président,
A. Barriol. Malzac.
II
CHRONIQUE DE DÉMOGRAPHIE
MOUVEMENT DE LA POPULATION EN FRANCE EN 1914
1" Résultats du premier semestre 1914 (1) comparés à ceux du premier semestre
1913 pour 82 départements (1) (manquent les résultats de 5 départements : Aisne,
Meuse, Nord, Pas-de-Calais, Somme). Population correspondante : 35.243.232 habi-
tants en 1911.
Enfants
I«r lemestre
Hariagei
Divorces
déclarés
Mort-nés
Décès
vivants
1914 ....
. . 134.113
6.44.5
331 .39i^
15.293
357.256
1913 ....
. . 136.124
6.723
335.369
15.190
336.411
2o Résultats du 2^ semestre 1914 (2) comparés à ceux de la période correspondante
en 1913; manquent les résultats de 7 départements : Aisne, Ardennes, Meurthe-et-
Moselle, Meuse, Nord, Pas-de-Calais, Somme et des arrondissements de Reims et de
Sainte-Menehould (Marne), Compiègne (Oise) et Saint-Dié (Vosges). Population cor-
respondante : 33.915.231 habitants en 1911 (2).
Enfants
semestre
Miriages
Divorces
déclarés
Mort-nés
Décès,
vivants
1914 ....
. . 43.585
2.014
293.628
12.704
323.018
1913 ....
. . 122.754
6.307
300.304
13.591
280.804
30 Résultats de Vannée 1914 comparés à. ceux de l'année précédente pour 77 dépar-
tements (non compris : Aisne, Ardennes, Marne, Meurthe-et-Moselle, Meuse, Nord,
Oise, Pas-de-Galais, Somme, Vosges) avec rappel dos chiffres de 1913 pour la France
entière.
(1) Journal officiel du 14 avril 1915.
(2) Journal officiel du 10 novembre 1915.
— 154 —
ANNÉES
POPULATION
en
milliris
MAKIAGH.S
DIVORCES
ENFANTS
déclarés
vivants
MORT-NÉS
DÉCÈS
EXCÉDENTS
de
uaibsances (-|-)
ou de
dHCé.(-)
1914 (77 départements)
1913(77 — )
1913 (France entière)
3:!. 079
33.079
39.602
i6;t.oii
247.7.'J3
298.760
17.864
12.344
15.07<)
594.222
604.454
745.539
26. 551
27.404
34.119
647.540
588.809
703.638
— 53.327
+ 15 615
+ 41.901
MOUVEMENT DE LA POPULATION EN PRUSSE EN 1914
Le Times du 21 mars 1916 a fait connaître, d'après un journal allemand, les résul-
tats du mouvement de la population pour le royaume de Prusse en 1914. Voici les
chiffres, comparés à ceux des années précédentes :
Naissances,
Décès,
Excédent
.innées
M ariagcs
mort-nés
Mort-nés
mort-nés
dos
compris
compris
naissances
1914 . . .
286.197
1.202.528
»
802.776
399.752
1913 . . .
328.709
1.209.518
35.975
656.490
553.028
1912 . . .
328.340
1.222.168
35.925
672.228
549.940
De 1913 à 1914, le nombre des naissances n'a pour ainsi dire pas varié, tandis que
celui des décès augmentait de 146.286 unités, soit de 21 %. Il est d'ailleurs certain
que ce nombre de décès est très incomplet. La guerre a fait baisser le chiffre des ma-
riages de près de 38.000 unités.
On sait que la population de la Prusse représente environ les deux tiers de celle
de l'Empire allemand : 40.165.000 habitants sur 64.926.000 d'après le recensement le
plus récent (l^r déc. 1910).
MOUVEMENT DE LA POPULATION EN ANGLETERRE EN 1915
Le Regisfrar gênerai a publié, le 31 janvier 1916, la statistique sommaire des actes
de l'état civil enregistrés, au cours de l'année 1915, en Angleterre et dans le pays de
Galles. Voici ces résultats, comparés à ceux des années précédentes :
Popuktion
Naissances
Proportion
pour 10.000 habitaats
Années
milliers
d'habitants
Mariages
vivantes
Décès
Nouveaux
mariés
Nés
vivants
Décédés
1915. . .
»
360.026
814.527
562.326
193
2^8
151
1914. . .
37.303
294.087
878.822
516.778
158
236
139
1913. . .
36.919
286.583
881 .890
504.975
155
239
137
1912. . .
36.540
283.834
872.737
486.939
155
238
133
1911. . .
36.164
274.943
881.138
527.810
152
244
146
On remarquera l'augmentation du nombre d(>s mariages, déjà sensible en 1914,
considérable en 1915. Il n'est pas sans intérêt de suivre cet accroissement par tri-
mestre, ce que permet le tableau ci-après :
Mariages par trimestre.
1 *•■ trimestre
2e _
3e —
4e _
1913
55
.406
51
.016
60
.926
97
038
81
.096
65
.904
102
567
82
.024
83
63 6
1 05
01 5
79
951
76
117
— 155 —
La diminution du nombre d( s naissances, insignifiante en 1914, devient très
notable en 1915. Pendant cette année, le nombre des naissai^ces enregistrées est en
défieit de 64.000 unités par rapport à l'année précédvnte; le nombre des décès, au
contraire, a augmenté de 55.000 unités environ.
TABLES DE MORTALITÉ : ANGLETERRE ET GALLES
[English lije table, 11° 7, 1901-HilO et n» 8, 1910-1912.)
Tous les dix ans, le Registrar gênerai des naissances, décès et mariages en Angle-
terre et dans le pays de Galles, publie un supplément (1) à son rapport annurl, spécia-
lement consacré à l'étude détaillée de la mortalité par âge, par causes et par profes-
sions pendant une période de dix années.
Le premier de ces suppléments décennaux, publié en 1864 par W. Farr, était relatif
à la décade 1851-1860; vers la fin de 1914 a paru la première partie du 5^ volume de
la série, consacrée aux tables de mortalité, calculées, d'une part pour la décade 1901-
1910, conformément aux pratiques antérieures, et, d'autre part, pour la période trien-
nale 1910-1912.
Cette innovation a été introduite pour deux mo'ifs : 1^ à cause de l'abaissement
progressif de la fréquence des décès pendant ces dernières années; on obt'ent une
mesure plus précise de la mortalité en prenant pour base une période courte; 2° le
classement des décès pendant les années 1910 à 1912 et le class ment des vivants au
recensement de 1911 ayant été effectué année par année, au lieu d:- l'ê're par groupes
d'âge quinquennaux ou décennaux comme précédemment, on disposait de matériaux
spécialement appropriés au calcul d'une table de mortalité pour la période 1910-
1912.
L'état matrimonial des femmes décédées de 1910 à 1912 ayant été relevé pour la
première fois dans les statistiques anglaises, on a pu CalcuUr des tables de morta-
lité séparément pour les femmes célibataires, mariées et veuves. Malheureusemtnt
le même travail n'a pu être exécuté pour le sexe masculin.
Pour les décades 1881-1890 et 1891-1900, des tables de mortalité spéciales avaient
été construites pour des selected healthy districts, le critérium choisi étant un taux
do mortalité n'excédant pas une certaine limite. Cependant, les décès étaient alors
enregistrés au lieu où ils se produisaient, ce qui aggi^avait indûment le taux de mor-
talité dans les circonscriptions où se trouvaient des hôpitaux, hospices, etc., recevant
des personnes venues d'autres districts. Le mode de dépouillement adopté depuis 1911
pour le mouvement de la population aurait permis de corriger les résultats en attri-
buant chaque décès au lieu du dernier domicile. On a cependant jugé préf rable
de renoncer aux selected hecdthy districts un peu arbitrairement constitués et l'on
a calculé, pour 1910-1912, des tables de mortalité pour les groupes suivants : comté
administratif de Londres, ensemble des county boroiighs, ensemble des districts
urbains, ensemble des districts ruraux, qui correspondent à des degrés différents
d'agglomération de la population.
Le calcul de ces diverses tables a été effectué sous la direction de M. Georges King,
ancien président de l'Institut des actuaires anglais, qui a rédigé le rapport dans
lequel sont exposées les méthodes employées :
1° Tables de mortalité n^ 7 [1901-1910). — ■ La population moyenne prise pour
base des calculs de mortalité n'est pas la simple moyenne arithmétique des populations
recensées en 1901 et 1910 et classées par groupes d'âge quinquennaux. On a utilisé
une formule (le M. A. C. Waters, qui permet le calcul exact des années vécues dans
un intervalle déterminé par une population qui s'accroît suivant une proportion géo-
métrique.
(1) Supplément to the secenty-fifth annunl report of the Registrar gênerai nf hirlhs, deaths
and marriages in En gland and Wales. Part 1. Life tables. London, 1914.
— 156 -
Les décès enregistrés pendant les années 1901 à 1909 sont connus par année d'âge
jusqu'à 5 ans, par groupes quinquennaux de 5 à 24 ans, par groupes décennaux de
25-34 ans jusqu'à 75-84 ans, puis pour les groupes 85-99 ans, 100 et plus. En tablant
sur la statistique des décès enregistrés par année d'âge en 1910, 1911, 1912, on a pu
répartir aisément par groupes quinquennaux tous les décès de la décade 1901-1910.
Ayant ainsi respectivement pour la population et pour les décès lo classement par
groupes d'âges 5-9, 10-14, etc., jusqu'à 100-104, on a déterminé la population et les
décès pour les àges-pivots 12, 17, 22... jusqu'à 97 ans, à l'aide d'une formule déduite
d'un calcul de différences finies. Ensuite, en divisant le nombre des décès par la popu-
lation, on a obtenu le taux annuel moyen de mortalité ou taux central de morta-
lité m_^ à chacun des âges 12, 17,... 97; on en a déduit la probabilité de mort q^ par
la formule connue :
2 m»
2 + mx
Les valeurs de la probabilité de mort correspondant à chacune des quatre années
intercalaires entre les âges-pivots, ont été déterminées ensuite à l'aide d'une formule
d'interpolation basée sur l'emploi de courbes du troisième degré, avec la condition
que, à leurs points de raccordement, c'est-à-dire aux âges-pivots, ces courbes soient
tangentes. Les calculs ont été effectués à l'aide des formules établies par M. le D^ Spra-
gue. Celui-ci avait à l'origine indiqué une méthode d'interpolation basée sur l'em-
ploi de courbes du cinquième degré, avec la condition qu'à leurs points de raccorde-
ment ces courbes fussent osculatrices, c'est-à-dire aient même tangente et même rayon
de courbure. Mais l'expérience a montré que, pour l'interpolation de tables de morta-
lité, il était très suffisant de s'en tenir à des courbes du troisième degré simplement
tangentes aux points servant de pivots.
En réalité l'interpolation n'a pas été effectuée directement sur les valeurs de q^
mais avec celles de l'expression log {q^ + 0,1) qui a paru plus commode pour les cal-
culs. Ceux-ci ont donné en définitive les valeurs de q^ avec 7 décimales, année par
année de 17 à 92 ans et, en dehors de ces limites, q^ était connu pour les âges-pivots
12 et 97. Il restait à compléter la table pour les enfants de moins de 17 ans et pour
les vieillards de plus de 92 ans.
Pour chacune dos cinq premières années de la vie, les probabilités de mort ont été
calculées à l'aide des naissances enregistrées de 1896 à 1910 et des décès de 0 à 1,
1 à 2, 2 à 3, 3 à 4, et 4 à 5 ans constatés de 1897 à 1910. Ayant ainsi-la probabilité
de mort pour chacune des années 0 à 4 et pour les âges 12, 17 et 18 précédemment
calculées, on en a déduit les valeurs de cette probabilité aux âges intermédiaires
5 à 11 et 13 à 16 en appliquant la méthode d'interpolation de Lagrange, qui convient
aux cas d'intervalles inégaux.
Pour compléter la table aux âges élevés, on a déterminé les valeurs de la fonction
log p^ aux âges 89, 90, 91, 92 et 97, on a formé les différences quatrièmes de cette
série et par sommation de ces différences on a prolongé la table de mortalité.
20 Tables de mortalité n» 8 [1910-1912). — La population recensée le 2 avril 1911
était classée par année d'âge; on en a déduit la population au point central de la
période 1910-1912, c'est-à-dire au l^^ juillet 1911, en admettant qu'à chaque âge
l'accroissement pendant les 90 jours considérés a été proportionnellement le même
qu'entre les deux census de 1901 et de 1911.
Les décès enregistrés en 1910, 1911 et 1912 étant également classés par année d'âge,
on aurait pu effectuer directement le calcul des taux: annuels moyens de mortalité
et ajuster ensuite les valeurs brutes ainsi obtenues. On a préféré former pour la
population et les décès les groupes quinquennaux 4-8, 9-13, etc., jusqu'à 99-103,
calculer les valeurs du taux aiuuiel moyen de jnortalité aux âg» s-pivots 11, 16, etc.,
jusqu'à 96 et déterminer les valeurs de ce taux aux âges intermédiain s de 16 à 91 ans
par interpolation comme pour la table n^ 7.
Pour les six premières années de vie, le taux de mortalité a été calcidé d'après
— 157 -
les naissances enregistrées de 1904 à 1912 et les décès des années 1910 à, 1912, exacte-
ment d'après les mêmes principes que pour la table n^ 7. On a ensuite employé les
taux correspondant aux âges 4, 5, 11, 16 et 17 pour la détermination des taux inter-
médiaires par la méthode d'interpolation de Lagrange, comme ci-dessus.
Enfin, à l'aide des différences quatrièmes des taux calculés pour les âge^ 88, 89,
90, 91 et 96, on a prolongé la table de mortalité vers ks âges élevés.
Les chiffres ci-après sont extraits des tables n^^l et 8 et de la table spéciale calculée
pour les filles, femmes mariées et veuves en 1910-1912,
Angleterre et Galles.
i an
10 ans
20 —
25 —
30 —
40 —
50 —
60 —
70 —
80 —
90 —
100 —
Nombre de survivants pour 1.000.000 nés vivants
Nombre de siirrivan
pour 100. 000 femmes de
(1910-1912)
les
25 ans
Table n« 7
(1901-1910)
Tahlc D" 8
1910-1912)
Hommes
Femmes
Hommes
Femmes
Femmes
célibataires
Femmes
mariées
Veuves
855.657
852.565
879.559
902.330
»
»
»
780.829
807.556
812.414
835.983
»
»
»
761 .125
787.558
793.435
816.814
))
»
»
745.453
773.909
778.699
804.126
100.000
100.000
100.000
727.407
757.789
762.227
789.536
98.333
98.064
97.389
676.684
713.082
716.727
749.881
93.722
93.079
90.918
599.032
647.424
643.333
688.808
86.252
85.696
81.337
475.637
541 .572
521.103
586.599
74.080
73.553
66.981
298.983
376.459
334.308
416.875
53.939
53.385
45.922
106.076
155.445
121.935
180.863
25.113
24.765
19.029
11.116
21 .580
13.608
27.641
3.911
3.886
2.846
125
427
298
674
94
94
66
La comparaison des tables 7 et 8 dénote une diminution notable de la mortalité,
que faisait prévoir l'abaissement du coefficient de mortalité calculé chaque année
pour la population totale de 1900 à, 1912.
D'après les tables relatives aux femmes, à partir de 25 ans la mortalité des
femmes mariées est à peine plus rapide que celle des célibataires; celle des veuves
est plus considérable. A 60 ans, il ne reste plus que 67.000 veuves au lieu de 74,000
célibataires et 73.500 femmes mariées, sur 100.000 femmes de 25 ans dans chaque
catégorie.
\ Michel HuBER.
III
LA POPULATION
LES LOIS ÉLECTORALES EN FRANCE
DE 1789 A NOS JOURS
Nous nous proposons dans le présent travail de rechercher quel a été le crité-
rium de répartition des sièges parlementaires dans nos assemblées, delà Révo-
lution française à nos jours, et cela nous conduit naturellement à examiner la
part plus ou moins grande que les différentes parties du pays ont eue dans la
représentation politique. Cette étude, comme celles que nous avons déjà
consacrées à des sujets analogues, rentre donc dans le domaine démographique :
c'est de la démographie politique et encore historique. Mais, avant de parler de
— 158 —
la base adoptée par nos différentes constitutions pour la fixation du chiffre des
mandats parlementaires, il sera nécessaire de rappeler le rfgime électoral établi
par ces constitutions elles-m^mes (1). C'est ce que nous ferons pour chacune
des quatre périodes entre lesquelles nous divisons ce travail : 1° époque révo-
lutionnaire (1789-1799); 2° Consulat et pr,-mier Empire (1799-1815); 3» la mo-
narchie censitaire (1815-1848) ; 4° enfin, la période du suffrage universel, de 1848
à nos jours. Dans chacun de ces chapitres, nous donnerons une partie spéciale
au département de la Seine, vu l'importance exceptionnelle de Paris dans
l'histoire politique de la Franc:'.
PREMIERE PARTIE
ÉPOQUE RÉVOLUTIONNAIRE (1789-1799)
I — BASE STATISTIQUE DE LA REPRESENTATION PARLEMENTAIRE
Il importe d'abord de relever ici une erreur assez commune qui fait dater
le suffrage universel de la Révolution française. Des deux constitutions qui
furent alors appliquées, — celle de 1791 et celle de l'an III — aucune ne l'admet.
Après le 10 août, un décret de la Législative supprime bien la distinction entre
citoyens actifs et passifs, mais exclut du droit de suffrage les domestiques
(Décr. du 12 Août 1 792); seule, la (]Jonstitution de 1793 proclame le suffrage uni-
versel, mais cette constitution demeura lettre morte. Le suffrage universel est
donc bien l'œuvre de la Révolution de février 1848 et de la deuxième Répu-
blique, et la première assemblée ainsi élue est notre Constituante de 1848. Dans
la Constitution monarchique de 1791, comme dans la Constitution républicaine
de 1795, œuvre finale de la Convention, le droit électoral n'appartient qu'aux
(( citoyens actifs » (la chose et le mot sont de Sieyès), c'est-à-dire payant une
contribution évaluée à trois journées de travail (4^ 50). Ces citoyens actifs
nommaient les « électeurs » à raison de 1 par 150 citoyens actifs (200 d'après la
Constitution de l'an III); on exigeait des « électeurs » une contribution égale
à 200 journées de travail dans les villes de plus de 6.000 habitants et à 150 dans
celles de moins de 6.000, et dans les campagnes. L'âge requis pour 'être citoyen
actif était de vingt et un ans; il fut élevé à vingt-cinq ans en l'an III. Pour les
députés, l'âge exigé était de vingt-cinq ans on 1791 ; il fut, en 1795, de trente ans
pour les membres des Cinq-Cents et de quarante ans pour les Anciens.
Dans les conditions que nous venons de dire, le pay^s légal était, en 1791,
constitué par 4.300.000 citoyens actifs (exactement 4.298.000), qui nommaient
eux-mêmes près de 44.000 (43.800) « électeurs ». C'était une proportion de
16,50 citoyens actifs (nou'-' dirions aujourd'hui : électeurs) par 100 habitants.
Cette proportion est, dans la France actuelle, de 28,32 %. Qu'aurait-ellc été alors
si la Constituante avait adopté le suffrage universel, c'est ce qu'il est assez diffi-
(1) Au point de vue politique et Juridique, notre législation électorale a fait notamment
l'objet d'\ine substantielle élude de M. Weii.i. : l.rs Élections législatives depuis 1789. Paris,
1 895.
— 159 —
cile de déterminer, vu l'insuffisance de renseignements statistiques. Il y a bien
eu, à l'époque révolutirmnaire, deux plébiscites, le premier sur la Constitution
de l'an I, le second sur celle dé^l'an III. Mais aucun document ne fixe le total
dés électeurs inscrits. Même, lors du plébiscite de Juillet 1793, les résultats de
nombreux cantons (424 sur 4.944, soit près du douzième), ne parvinrent pas
à la Convention. Les procès-verbaux des assemblées primaires recueillis aux
Archives nationales indiquent rarement — et de façon approximative — le chiffre
des inscrits. La récapitulation des suffrages, département par département,
ne peut donc donner que le total des votants qui fut de peu au-dessus de 2 mil-
lions. En 1795, il ne fut guère que la moitié de ce chiffre : 1.107.000. De l'un et
l'autre plébiscite, on ne peut donc rien conclure quant au total des électeurs
d'alors et de leur rapport à la population.
Si cependant, ces réserves faites, nous voulons établir la proportion des élec-
teurs — en l'espèce, des citoyens actifs — à la population, nous constaterons que,
en raison du cens exigible des citoyens actifs, il n'y a pas de corrélation entre
les deux éléments. Nous en avons la preuve par le rapprochement (Voir le
tableau I) des dix départements les plus peuplés et des dix les moins peuplés en
1791 avec le total respectif de leurs citoyens actifs. Dans le premier groupe,
le rapport des citoyens actifs à la population n'es,t que de 13,4%, tandis qu'il
est de 17,2 dans le second. La faible proportion du département de la Seine est
particulièrement intéressante : moins de 10%. Étant donné que la proportion
pour l'ensemble de la France est 16,50%, on remarquera que, dans les départe-
ments les plus peuplés, ce taux n'est dépassé que dans un seul département, le
Nord ; par contre, parmi les départements les moins peuplés, deux seulement sont
au-dessous de cette moyenne : les Pyrénées-Orientales et les Hautes-Pyrénées,
Nous avons à voir maintenant quelle base on prit, en 1791 et plus tard, pour
déterminer le nombre des représentants et leur répartition. C'est dans le « Rap-
port au Roi » de Necker qu'il faut chercher sans doute l'origine du critérium
complexe que la Constituante devait adopter, pour la distribution des sièges
dans la future Assemblée nationale législative appelée plus brièvement la Légis-
lative. Dans ce document, le ministre de Louis XVI partait d'un double élément
pour fixer le nombre des représentants : la population et les contributions di-
rectes. Le total des mandats d'un territoire dépendait donc de la somme de ses
habitants et de celle de ses impôts directs, celle-ci étant considérée comme le
signe de la richesse publique. Remarquons que la richesse étant surtout immo-
bilière, Necker était ici l'écho des économistes d'alors; son opinion fut, du reste,
soutenue, dans l'Assemblée, par Dupont de Nemours. Dans le Comité de Cons-
titution, ce fut un des députés les plus connus du parti constitutionnel, Thouret,
qui fit d'abord adopter le principe de la double base. Mais Sieyès intervint
pour faire ajouter un troisième élément, le territoire (1). Dans ce cas, il eût été
juste que, pour la base territoriale, un département eût un chiffre de députés en
rapport avec sa superficie. Il n'en fut rien. Le Comité décida que, sous le rapport
du territoire, la part de tous les départements — sauf celui de Paris — serait
égale. Pour comprendre cette anomalie, il importe de se souvenir que le même
(1) Cf. E. Lebègue, Thourri, chap. XI. Chapitre excellfiU sur l'adaptation des trois basr-s
à la nouvelle division administrative de la France.
— 160 —
Sieyès, l'homme aux constructions géométriques, avait proposé de donner aux
départements — sauf ceux de Paris et des frontières — la même superficie.
Dans sa pensée, la France devait être divisée en 80 départements (Paris à part)
et chacun d'eux devait mesurer 324 lieues carrées. L'Assemblée Constituante
avait accepté en principe cette formule, mais on sait qu'elle fut sensiblement
corrigée par la suite.
Tableau I
État comparé de la population et des citoyens actifs dans deux groupes
extrêmes de population.
, . Combien
P°P"''"°° Citoyens de
Départements (évaluée citoyens actifs
lorjQs actifs par
''" '■'^'^> 100 habitants
A. Les dix départements les plus peuplés.
Seine 950.000 89.700(1) 9,48
Rhône (avec Loire) .... 578.000 92.000 16
Nord 560.000 97.000 17,1
Puy-de-Dôme 546.000 82.600 15,4
Pas-de-Calais. ...... 532.000 81.300 15,3
Côtes-du-Nord 525.000 55.700 10,4
Ille-et- Vilaine 520.000 64.700 12,5
Manche 513.000 77.200 15,1
Gironde 508.000 73.800 14,6
Calvados 485.000 61.000 12,8
Total 5.717.000 775.000 13,6
B. Les dix départements les tJioins peuplés.
Haute-Marne 223.000 41.400 17
Haute-Loire 216.000 37.200 17,4
Cher 207.000 35.000 17,2
Loir-et-Cher 200.000 34.200 17,1
Ariège 198.000 35.600 18,1
Hautes-Pyrénées ..... 189.000 28.300 15
Basses-Alpes 168.000 31.300 19,4
Lozère 146.000 24.400 17
Hautes- Alpes 120.000 23.000 19,1
Pyrénées-Orientales. . . . 115.000 17.000 15,7
Total 1.782.000 307.400 17,2
Le projet du Comité fut discuté par la Constituante, les 17 et 18 novembre
1789, et il ne semble pas qu'il ait soulevé une bien vive opposition. Il fut com-
battu par Pétion et par Montlosier, par le premier surtout. La combinaison des
(1) Sur les 89.700 citoyens actifs de la Seine, Paris en comptait à lui seul 77.370. Los
chiffres les plus élevés se trouvaient dans les sections du centre : 3.252 aux Graviiliers,
2.653 aux Quatre-Nations (Institut), 2.504 aux Lombards, 2.395 au Palais-Royal. Au
contraire, il n'y avait qu'un nombre restreint de citoyens actifs dans les sections de la péri-
phérie d'alors : 873 aux Champs-Elysées, 834 au Faubourg Poissonnière, 774 aux Gobelins,
763 aux Invalides et 687 au Faubourg Montmarl ri" (D'après L'État des eitoyens de Paris, au
6 juin 1791. —Bibliothèque Nationale, Lb*" 125'i).
— 161 —
trois bases lui paraissait ingénieuse, mais plus subtile que solide; il se pronon-
çait notamment contre la représentation donnée à la contribution directe comme
avantageant la fortune, et il trouvait anormal qu'on fit le silence sur les contri-
butions indirectes. Pétion n'admettait que la base de la population avec répar-
tition nouvelle des sièges tous les dix ans, d'après la population recensée elle-
même par périodes décennales. Nous retrouverons cette idée dans la Constitu-
tion de l'an III. Pour Montlosier, ce qui lui paraissait surtout injuste, c'était
la base territoriale. « La sixième partie de l'Auvergne, disait-il, ne produit rien,
sera-t-elle représentée comme les autres? » Le projet du Comité fut soutenu
par le comte de Castellane. « Il est équitable, déclara-t-il, que ceux qui contri-
buent le plus soient le plus représentés, et cet avantage, ajoutait-il, provoquera
une rentrée plus active des contributions. «Argument qui n'est pas sans valeur
assurément, mais à condition de remarquer que l'avantage dans la représenta-
tion était accordé non à des individus plus riches, mais à un territoire peuplé de
gens de conditions sociales très diverses. D'autre part, l'objection de Montlosier ne
se comprend bien que si l'on tient toujours compte de la distribution géomé-
trique du sol d'après la méthode de Sieyès et qui, en effet, eût pu constituer un
département entier d'un sol absolument improductif. Quoi qu'il en soit de ces
arguments, le projet du Comité de Constitution fut voté ; il était ainsi conçu :
« Les représentants seront distribués entre les 83 départements selon la propor-
tion du territoire, de la population et des contributions directes. »
Le total des députés à la Législative devait être de 745, ainsi répartis :
Territoire 247
Population 249
Contribution directe 249
Total 745
Pour le territoire, chaque département avait uniformément trois représen-
tants (nous venons d'indiquer les raisons de cette égalité), sauf le département
de Paris à qui on n'en accordait qu'un. Pour la population et les contributions
directes, le royaume était divisé en 249 parts respectivement, et autant un
département avait de ces parts, autant il lui était attribué de représentants
pour l'une et l'autre base.
Mais le terme de population appelle une observation importante; il fut,
en effet, précisé, en un sens restrictif, par la Constitution elle-même et par
le décret relatif à l'élection de l'Assemblée législative. Dans la Constitution de
1791, il n'est plus question de la population prise dans son ensemble, mais de
la « masse totale de la population active ». De cette façon, la part de repré-
sentation attribuée à la population de chaque département est déterminée
par le total de ses citoyens actifs et le décret du 27 mai 1791 — décret trop peu
connu — s'exprime ainsi à l'article 3 : « La population active de tout le Royaume
se trouvant de 4.298.360 citoyens, la quotité de 17.262 donnera un député et les
fractions seront divisées en 36^s_ Tout département, dont la fraction de popu-
lation active excédera de 17-y36^sigg quantités complètes du diviseur commun,
aura un député de plus pour la population. «Cette façon de comprendre la base
de la population favorisait nécessairement les départements les moins peuplés
~ 462 —
ou les plus riches, puisque, comme nous venons de le voir, le nombre des citoyens
actifs n'était pas en relation directe avec celui de la population.
Bien entendu, avec un pareil système, le scrutin de liste était seul possible.
On totalisait la part des députés revenant à chaque département d'après les
trois bases, et les « électeurs ». avaient à voter pour l'ensemble ainsi constitué.
11 y avait trois tours de scrutin. La législature devait avoir une durée de
deux ans.
C'est d'après ce système que lurent élues l'Assemblée législative et la Conven-
tion; mais avec celle-ci triomphait le parti démocratique, et c'était ce parti qui
avait le plus combattu le système électoral de la Constitution de 1791. Aussi,
dans le projet de constitution aussi bien des Girondins que des Montagnards,
n'est il plus question des « trois bases y de la Constituante. Les uns et les autres
n'admettent que la base de la population. Dans le projet girondin, oeuvre de
Condorcet,il y a un député par 50.000 âmes, et le projet montagnard devenu
la Constitution de l'an I stipule (art. 21) que « la population est la seule base
de la représentation nationale ». Cette fois, il s'agit bien de l'ensemble de la
population. Mais quel quantum de population adopterait-on par siège ? Des
Girondins, comme Ducos et Fonfrède, demandaient que le nombre des députés
lut réduit de moitié, qu'en conséquence il y eût un député par 100.000 habi-
tants. A l'inverse, d'autres députés voulaient qu'on élargît encore l'effectif de
l'Assemblée; il y aurait eu un siège par 25.000 habitants. Ramel-Nogaret dou-
blait ce quantum et réclamait 50.000, mais à condition que ces 50.000 fussent
représentés de façon distincte; c'était demander le scrutin uninominal. Thuriot
fit adopter le chiffre de 40.000, ce qui devait donner, d'après lui, un total de
600 députés, donc sensiblement inférieur à l'ensemble des députés à la Légis-
lative et à la Convention.
La Constitution de l'an I comportait donc un changement complet dans le
régime électoral de la République : le suffrage censitaire faisait place au suf-
frage universel, le scrutin de liste au scrutin uninominal et l'élection à deux
degrés à l'élection directe. La Convention compléta cette réforme par le décret
du 11 août 1793 (1) qui demandait aux autorités départementales de faire dres-
ser par les communes un « état de leur population effective avec mention du
nombre des citoyens ayant droit de vote )>. Dans chaque département, les direc-
toires étaient invités à découper des « arrondissements » de 39.000 à 41.000 ha-
bitants, c'est-à-dire se rapprochant le plus possible de la moyenne admise par
la Constitution. L'arrondissement électoral était donc différent du district ou
arrondissement administratif.
Cette grande réforme électorale de l'an I fut sans doute inappliquée et la
Constitution de l'an III revint au suffrage censitaire de 1791, mais c'en était
fait désormais du système des « trois bases « et l'article 49 de cette constitu-
tion établit que « chaque département concourt, à raison de sa population seu-
il) Ce décret préparait un véritable recensement de la population globale et électorale
par départements, districts, cantons et communes. Les tableaux envoyés aux municipalités
devaient indiquer les foires et marchés, le mouvement de l'état civil pour l'année 1792, etc.
Malheureusement, Tes renseignements conservés aux archives (D iv bis 50-53) sont fort
ineomplets.
- 108 —
lement, à la nomination des membres des conseils '\ La base de la population
triomphait donc, et de façon exclusive. -
Nous avons vu plus haut que le total des députés à la Législative était de 745.
Il aurait pu être accru par suite de l'annexion d'Avignon et du Comtat, mais
les élections de ce pays furent ajournées (Décr. du 5 Mars 1792) : il n'eut donc
pas de représentants à l'Assemblée législative.
A la Convention, le nombre des députés fut, en principe, le même que dans
la précédente assemblée (Décr. du 12 Août 1792). Mais, en réalité, ce total
s'accrut pour des causes diverses. Ce fut d'abord l'adjonction de deux députés
nouveaux à chacun des deux départements des Bouches-du-Rhône et de la
Drôme, auxqnels avaient été annexés, au premier Avignon, au second le Com-
tat (district de l'Ouvèze). Puis les départements formés de nos conquêtes re-
çurent une députation particulière. Le département du Mont-Blanc (Savoie)
eut dix représentants (Décr. du 27 Nov. 1792); celui des Alpes-Maritimes en
eut trois (Décr. du 31 Janv. 1793) et deux furent accordés à celui du Mont-Terrible
(Décr. du^23 Mars 1793). Enfin, pour la première fois, les colonies furent dotées
d'une députation par le décret du 23 Août 1792. Elle devait être de 34 membres,
mais ce chiffre fut sensiblement restreint et les colonies comptèrent à la Con-
vention 18 députés ainsi répartis :
Saint-Domingue (partie française) 6 députés
Guadeloupe 4 —
Martinique 3 —
Guj'ane 1
Ile Bourbon (La Réunion) 2 —
Ile de France ; ' . . . . 2 —
Total 18 députés
Avec toutes ces additions, le total des Conventionnels fut donc de 782, dont
764 pour la France métropolitaine, effectif du reste purement théorique, puis-
qu'un grand nombre de députés ne siégeaient pas.
Sous le Directoire, d'après la Constitution de l'an III, les membres des
Conseils étaient au nombre de 750 (250 Anciens et les Cinq-Cents), se décom-
posant ainsi : 697 aux départements, primitifs (y compris la Vaucluse, formée
en 1793 aux dépens des Bouches-du-Rhône et de la Drôme); 14 aux nouveaux
départements (Mont-Blanc, Alpes-Maritimes et Mont-Terrible), soit 711 pour
la France continentale; enfin, 39 aux colonies.
Les membres des Conseils, appelés ofTicielleiPxent députés. au Corps législatif,
étaient élus sur une même liste, c'est-à-dire sans affectation particulière à l'un
ou à l'autre Conseil. En 1795, ce fut la Convention qui répartit les membres du
Corps législatif entre les deux Conseils. Mais, en 1797, lors du renouvellement
de l'an V, un changement considérable fut opéré dans le recrutement des
Conseils. Cette fois, il y eut élection distincte pour leurs membres sortants et,
en même temps, une répartition nouvelle des sièges fut effectuée. Cette redistri-
bution était rendue nécessaire par l'annexion de la Belgique. Elle avait été
prononcée, il est vrai, par la Convention (Décr. du i^"^ Oct. 1795), mais ceUe-ci
avait laissé au futur Corps législatif le soin de déterminer le nombre des repré-
— 164 —
sentants que les neuf départements, formés de la Belgique (avec le Luxembourg),
devraient élire à l'époque du renouvellement de l'an V. La loi du 27 Pluviôse
an V accorda aux départements belges un total de 67 représentants, soit 45 aux
Cinq-Cents et 22 aux Anciens. Comme on ne voulait rien changer au chiffre
de 750 membres établi par la Constitution pour le Corps législatif, il fallut
nécessairement procéder à une répartition nouvelle des sièges. Ainsi, 53 dépar-
tements perdirent chacun un député au Corps législatif, sauf le Nord qui en
perdit deux; la députation coloniale fut diminuée de treize unités. On gagna
ainsi les 67 sièges accordés aux neuf départements nouveaux.
Dans le système électoral de l'an III comme dans celui de 1791, les députés
sont nommés au scrutin de liste à deux degrés. Seule de nos constitutions
d'alors, celle de l'an I (non appliquée) avait établi l'élection directe et le scrutin
uninominal. Mais ni cette Constitution ni celle de 1791 n'avaient rendu obliga-
toire le scrutin secret. On pouvait voter à haute voix; le scrutin secret ne devint
obligatoire qu'en l'an III. Enfin, un autre caractère original de la Constitution
de 1793, c'est qu'elle admettait les élections partielles, tandis que, dans le
système de 1791 et de 1795, des députés suppléants élus en même temps que les
députés eux-mêmes remplaçaient ceux-ci en cas de mort ou de démission.
Il — RÉPARTITION TERRITORIALE DES SIÈGES PARLEMENTAIRES
{^Assemblée législative et Convention. — Le premier résultat de l'adoption des
« trois bases » fut la nécessité de recourir à la statistique pour les établir suivant
chaque département. Pour la superficie, cela allait sans difficulté et cela, du
reste, était superflu, chaque département ayant trois députés pour son terri-
toire. L'Assemblée nationale ordonna, d'autre part, aux directoires des départe-
ments de dresser l'état respectif de leur population et de leurs contributions
directes (Décr. 28 Juin 1790).
Le tableau des contributions directes a été arrêté pour chaque département
par le décret du 27 mai 1791 .(!)• Ce décret fixait à 3()0 millions de livres en
principal la somme des contributions foncière et mobilière, destinée à servir
de base « pour déterminer le nombre des députés de chaque département en
raison de ses contributions directes )>. Le quotient de représentation (soit
300 millions divisés par 249) était donc d'environ 1.200.000 livres. Cela avan-
tageait singulièrement le département de la Seine qui payait plus de 20 mil-
lions de livres d'impôts directs; la Seine-Inférieure avec 9.500.000; la Seine-et-
Oise, le Rhône-et-Loire avec plus de 8 millions, etc. Par contre, parmi les
départements les moins riches, sept n'avaient aucune part de représentation
du chef de la contribution directe; c'étaient les Basses-Alpes, les Hautes-
Alpes, l'Ariège, la Corse, les Hautes-Pyrénées, la Lozère et les Pyrénées-Orien-
tales.
Pour la population, l'Assemblée (en l'espèce, son Comité de division) reçut
les états de population (>nvoyés par les administrations départementales,
mais elle n'en ordonna aucune publication officielle. Seulement les rensei-
(1 ) Sur ce total, la part de la contribution mobilière n'était que de 60 millions.
— 165 —
gnements concernant la population ont été insérés par Arthur Young dans
ses Voyages en France (chap. XVI). Ce dénombrement, qui ne saurait évidem-
ment être une garantie, donnait au royaume 26.363.000 habitants, dont
5.709.000 pour les villes et bourgs et 20.654.000 pour les campagnes. Dans un
autre ouvrage, le Nouveau Dictionnaire géographique de la France^ le consti-
tuant de Pinteville-Gernon a utilisé aussi les renseignements parvenus au
Comité de division. La population de la France est évaluée par lui à 27.400.000
âmes. Nous nous arrêterons ici au chiffre donné par Young, quelques réserves
qu'il appelle; mais «'esT; à l'ouvrage de de Pinteville que nous empruntons
tout ce qui regarde le nombre et la répartition des citoyens actifs (1).
Le total des député's a été de 745 à la Législative comme à la Convention,
abstraction faite ici des députés des nouveaux départements et des colonies.
Naturellement, le chiffre minimum par département était relativement élevé,
puisque, rien que pour le territoire, il y avait déjà trois sièges. Mais, dans les
départements pauvres et peu peuplés — au moins à cette époque — ce total
ne devait que s'accroître légèrement. Neuf départements ne comptaient que
6 représentants : les Basses-Alpes, l'Ariège, le Cher, la Corse, le Doubs, l'Indre,
les Landes, les Hautes-Pyrénées et les Basses-Pyrénées. Trois départements,
les Hautes-Alpes, la Lozère et les Pyrénées-Orientales n'avaient que 5 députés;
c'était le minimum. Par contre, un grand nombre de départements, le tiers ~
27 exactement — avaient 10 députés ou davantage. C'étaient les Bouches-du-
Rhône (qui comprenaient alors une partie de Vaucluse), la Côte-d'Or, la Dor-
dogne, riUe-et-Vilaine, le Lot, la Marne et la Sarthe, chacun 10 — la Cha-
rente-Inférieure, l'Eure, le Maine-et-Loire, le Pas-de-Calais, Saône-et-Loire et
Seine-et-Marne, chacun 11 — l'Aisne, la Haute-Garonne, la Gironde, le Nord,
l'Oise et le Puy-de-Dôme, chacun 12 — le Calvados, la Manche et la Somme,
chacun 13 — Seine-et-Oise, 14 — Rhône-et-Loire (leur scission fut effectuée
en 1793), 15 ^la Seine-Inférieure 16, et enfin la Seine (on a dit le département
de Paris, jusqu'en 1795), 24.
Mais le point le plus intéressant pour notre étude c'est de marquer l'avantage
que cette répartition des sièges donnait aux départements les moins peuplés.
Si nous reprenons les deux catégories de départements que nous avons considé-
rées plus haut, nous voyons que les dix plus peuplés sont représentés par 130 dé-
putés, les dix plus petits par 60. Dans le premier groupe, il y a 44.000 habitants
par siège législatif; dans le second, un peu moins de 30.000. Les termes extrêmes
sont fournis par les départements des Côtes-du-Nord et des Pyrénées-Orientales;
celui-ci avec 115.000 âmes compte 5 députés, soit un par 23.000 habitants; le
premier avec 525.000 âmes n'en compte que 8, soit un par 65.600 habitants.
Les petits départements compensaient donc, en partie, le côté déficient de leur
population par leur minimum territorial (3 sièges) et leur part dans la popu-
lation « active ». D'autre part, la base de la contribution directe provoquait
des différences considérables parmi les départements les plus peuplés. La Seine
avec une population d'un tiers supérieMre à la Gironde avait le double de repré-
sentants — 24 contre 12 — ; les Côtes-du-Nord avec une population presque
égale à celle de la Manche, — 525.000 contre 513.000 — ne détenaient que
(1) Noui^au Dictionnaire géographique, p. 512.
!'« SBRIK. 57« VOL. N» 5 12
— 166 —
8 sièges contre 13 dans la Manche. La différence de la richesse, par conséquent
—de la contribution directe entre ces deux départements, peut s'exprimer par
ce seul fait que la Manche comptait 15,1 citoyens actifs par 100 habitants, que
ce taux n'était que de 40,4 % dans les Gôtes-du-Nord; ce dernier dépar-
tement payait à peine 2 millions et demi d'impôts directs, tandis que la Manche
en payait plus de 6 millions. Ainsi la proportion des citoyens actifs à la popu-
lation e^t un indice de la condition sociale des divers départements.
20 Le Directoire et les Conseils. — Il n'y a rien à dire de la répartition territo-
riale des sièges à la Convention, les départements ayant conservé le même nom-
bre de députés qu'à la Législative (Décr. 12 Août 1792)*. Il en est tout autre-
ment, sous le Directoire, des Conseils formant le Corps législatif. Le total des
députés aux Conseils était, nous le savons, de 750; mais dans ce chiffre étaient
compris les 14 représentants des nouveaux départements (Alpes-Maritimes,
Mont-Blanc et Mont-Terrible) et les 39 députés des colonies. On fut donc obligé,
pour ne pas dépasser le taux de 750 unités, de réduire le quantum départemen-
tal de la députation tel qu'il avait été fixé en 1791. Au lieu de 745 sièges, les
départements constitués en 1790 (y compris Vaucluse) n'en comptèrent plus
que 697, total qui se réduira-à 643, lors de la redistribution des sièges effectuée
en 1797.. Le tableau III permet, pour l'ensemble des départements, de com-
parer les deux listes, celle des députés à la Législative et à la Convention d'une
part, et, d'autre part, celle des membres des Conseils du Directoire. Mais, pour
ceux-ci, nous prenons comme terme de comparaison, l'année 1795 et non 1797,
car la répartition des sièges faite à cette dernière date restreignait —quoique
légèrement — la députation de nombreux départements que la Constitution
de l'an III avait rendue aussi adéquate que possible à la population. Dans
ce but, en effet, le Gouvernement avait demandé aux municipalités un état de
la population et, suivant l'article 50 de la Constitution, cet état devait être
revisé tous les dix ans pour dresser à nouveau une répartition des sièges, s'il y
avait lieu, d'après le mouvement de la population. On se rappelle que cette
proposition avait déjà été faite à la Constituante par Pétion. La population
totale de la France telle qu'elle fut fixée d'après les rapports des municipalités
était, en 1795, de 28.900.000 habitants. Le total des sièges métropolitains
étant de 711, le quotient par siège était donc d'un peu plus de 40.000 âmes;
c'était, nous l'avons vu, le quantum proposé par Thuriot à la Convention, lors
de la discussion de la Constitution de l'an I.
Comparons donc les listes de notre tableau, soit la répartition des sièges
d'après la Constitution de 1791 (système des trois bases) et d'après celle de
l'an III (base unique de la population). La minorité des départements — seule-
ment, 16 — conserve le même nombre de représentants. Pour la majorité,
soit 52, il y a diminution et, dans cette catégorie, huit départements perdaient
3 sièges ou plus : les Basses-Alpes, l'Aube, Eure-et-Loir, la Marne, l'Oise,
Seine-et-Oise, Seine-et-Marne et la Seine, Dans la Seine, il n'y avait plus que
18 députés au lieu de 24. Parmi ces départemen+s, les uns devaient leur dimi-
nution à la disparition de la base « territoire »; c'était le cas des Basses-Alpes et
de la Marne ; les autres, à celle de la base des contributions directes, par exemple,
Seine-et-Marne, Seine-et-Oise et surtout la Seine qui était le plus atteint de
— 167 —
tous les départements par la législation nouvelle. En somme, la représen-
tation ne s'accroissait que dans 15 départements. Cette augmentation était
de 3 sièges dans cinq départements : Bouches-du-Rhône (avec Vaucluse),
Finistère, Ille-et-Vilaine, Loire-Inférieure et Basses-Pyrénées. La plus-value
était de 5 sièges dans les Côtes-du-Nord et de 8 dans le Nord. La base unique
de population favorisait ainsi ces départements plus particulièrement peuplés.
Les cinq départements bretons bénéficiaient globalement de 16 mandats et
étaient représentés par 58 députés au lieu de 42, soit 8,3 % du total de la repré-
sentation nationale au lieu de 5,7 % à la Législative et à la Convention. Une
autre conséquence de la base unique de la population était nécessairement de
diminuer la députation des départements peu peuplés, le coefficient territorial
ayant disparu, et par conséquent d'abaisser le taux minimum de la représen-
tation départementale. Ainsi les cinq départements des Hautes-Alpes, Basses-
Alpes, Lozère, Hautes-Pyrénées et Pyrénées-Orientales voyaient réduire leur
députation globale de 27 à 18 unités; les Basses-Alpes et les Pyrénées-Orien-
tales n'avaient plus que 3 représentants chacun (c'était le quantum le plus
faible), au lieu de 6 et 5, respectivement à la Convention.
On remarquera la nombreuse représentation que détenaient, dans nos assem-
blées de la Révolution, certains départements dont la population a beaucoup
diminué depuis et dont la députation a été ainsi réduite. Tel est le cas, dans le
Midi, du Lot, Lot-et-Garonne, Haute-Garonne et des départements normands
(excepté la Seine-Inférieure). Les quatre départements de la Manche, de l'Orne,
du Calvados et de l'Eure comptaient ensemble 47 députés à la Convention
et 45 au Corps législatif du Directoire, soit 6,3% de l'une et l'autre Assemblée.
Aujourd'hui, leur députation législative n'est plus que de 23 unités et ne forme
que 3,8% de la Chambre des Députés.
On trouvera dans notre tableau III, outre la liste des siègeg en 1791-1792
et en 1795, celle qui résuite de la redistribution de 1797, dont nous avons parlé
plus haut. En général, elle afîecte surtout les départements les plus peuplés.
Sur les 41 départements ayant une population supérieure à 300.000 habitants,
36 voyaient diminuer leur représentation; par contre, dans les 45 départements
comptant moins de 300.000 âmes, la diminution n'en affectait que 17.
Tableau III
Etat comparé de la députation de chaque département d'après la Constitution
de 1791 (Législative et Convention) et d'après la Constitution de l'an III
(Conseils du Directoire en 1795 et 1797; (1).
Xombre des députés
à la Législative auit Conseils du Directoire
Dé|.artements et (base unique de la population)
à la Convention _ i, .^^
(système ^^ 1,95 gj, 1,97
des trois bases) ,ct\ /a\
1. Ain 6 7 (2) 7 (2)
2. Aisne 12 10 (3) 9 (3)
3. Allier 7 7 (2) 6 (2)
(1) Voir KucziNSKi : Les Députés au Corps législatif, 1795-17^97.
(2) Le chifîre entre parenthèses ( ) désigne le nombre îles Anciens.
168
Nombre des députii
Département»
4. Hautes-Alpes . i .
5. Basses-Alpes . . .
6. Ardèche
7. Ardennes
8. Ariège
9. Aube
10. Aude
11. Aveyron
12. Bouches-du- Rhône.
13. Calvados .....
14. Cantal
15. Charente
16. Charente-Inférieufe
17. Cher
18. Corrèze
il Corse (1)
20. Côte-d'Or
21. Côtes-du-Nord. . .
22. Creuse
23. Dordogne
24; Doubs
25; Drôme
26. Eure
2l Eure-et-Loir . . .
26. Finistère
29. Gard
30. Haute-Garonne . .
31. Gers
32. Gironde
33. Hérault
34. Ille-et- Vilaine . . .
35. Indre
36. Indre-et-Loire. . .
37. Isère
38. Jura
39. Landes
40. Loir-et-Cher. » . .
41. Loire
42. Haute-Loire. . . .
43. Loire-Inférieure . .
44. Loiret
46. Lot .
46. Lot-et-Garonne . .
47. Lozère
48. Maine-et-Loire. . .
49. Manche
50. Marne ......
51. Haute-Marne . . .
52. Mayenne
53. Meurthe
54. Meuse
55. Morbihan
& Il Législative
et
à la ConTPDtion
(système
des troii bases)
5
6
7
8
6
9
8
9
10
13
8
9
11
6
7
6
10
8
7
10
6
7
11
9
8
8
12
9
12
9
10
6
8
9
8
6
7
9
10
9
5
11
13
10
1
S
8
8
8
aux CoDieils du Directoire
(base unique do la population)
en 1795
en 1797
4
1)
3(1)
7(2)
6(2)
5(2)
6(2)
6(2)
8(3)
8(3)
12(4)
6(2)
8(3)
10(3)
5(2)
6(
2)
6i
2)
8
3)
13
4)
6(
2)
11
4)
5
2)
6
2)
6
3)
6
2)
11
4)
8
3)
10
3)
7
2)
14
(5)
7 (2)
13 (4)
5 (2)
7 (2)
11 (4)
7 {2)
6 (2)
5(2)
6 (3)
6 (2)
11 (4)
7 (2)
10^3)
8 (3)
4(1)
11 (4)
13 (4)
7 (2)
5 (2)
8 (3)
8 (3)
6 (2)
10
(3)
3 (
1)
3 (
1)
6 (
2)
6(
2)
4 (
1)
5 (
2)
5
2)
8
3)
7 (
2)
11
4)
5
2)
7
2)
10
3)
5 (
2)
6
2)
6
2)
8
3)
12
4)
5
2)
10
3)
5
2)
5
2)
9
3)
6
(2)
10
3)
7
(2)
9
(3)
7
(2)
13
(4)
6
(2)
12
(4)
5
(2)
6
(2)
10
(3)
6
(2)
6
(2)
5
(2)
7
(2)
6
(2)
10
(3)
7
(2)
9
(3)
8
(3)
3
(1)
10
(3)
12
(4)
7
(2)
5
(2)
7
(2)
7
(2)
6
(2)
9
(3)
(1 ) Nous comprenons sous ce nom les deux départements du Golo et du Liamone, qui par-
tagèrent la Corse de 1793 à 1811.
Département!
56. Moselle
57. Nièvre .
58. Nord
59. Oise
60. Orne
61. Pas-de-Calais
62. Puy-de-Dôme
63. Hautes-Pyrénées
64. Basses-Pyrénées
65. Pyrénées-Orientales
66. Haut-Rhin
67. Bas-Rhin
68. Rhône (avec Loire jusqu'en 1 793)
69. Haute-Saône)
70. Saône-et-Loire
71. Sarthe
72. Seine
73. Seine-et-Oise
74. Seine-Inférieure
75. Seine-et-Marne
76. Deux-Sèvres
77. Somme ,
78. Tarn -
79. Var
80. Vaucluse ,
81. Vendée
82. Vienne
83. Haute-Vienne
84. Vosges
85. Yonne
Départements nouveaux :
86. Alpes-Maritimes
87. Mont-Blanc
88. Mont-Terrible
— 169 —
à ia Législative
et
& la CoQTeatioa
(syitème
dei trois baies)
8
7
12
12
40
11
12
6
6
5
7
9
15
7
11
10
24
14
16
11
7
13
9
Nombre des dépatis
aux Conieils du Directoire
(base unique de la population)
en 1797
9
3)
6
(2)
20
(6)
9
(3)
10
(3)
13
(4)
12
(4)
4
(1)
9
(3)
3
1)
7
2)
11
(4)
14
6)
7
2)
11
4)
9
3)
18 (
6)
11
(4)
16
5)
7
2)
6
2)
11 (
4)
u
2)
6(
2)
5(
2)
U
2)
6(
2)
6(
2)
7(
2)
8(
3)
2(1]
10(7)
2(1)
9
(3)
5
(2)
18
(6)
8
(3)
9
(3)
12
(4)
11
(4)
4
(1)
8
(3)
2
1)
10
3)
7
)2)
7
2)
6
2)
10
3)
9
3)
17
6)
10
3)
15
5)
7
2)
6
2)
11 (
4)
6
2)
6 (
2)
5 (
2)
7
2)
6 (
2)
6 (
2)
7 (
2)
^ (
2)
2(1)
9(3)
1
France continentale
( Législative
) Convention
745
764
711
724
Saint-Domingue .
Martinique , . .
Guadeloupe. . .
Sainte-Lucie . .
Guyane
Réunion . . . .
Ile-de-France . .
Indes Orientales .
Colonies . .
Total général.
Législative
Convention
18
745
782
22
3
4
2
2
2
2
2
13(5)
2(1)
4(1)
1
1
2(1)
2(1)
1
26 (9)
750
— 170 —
DEUXIÈME PARTIE
LE CONSULAT ET LE PREMIER EMPIRE (1799-1815)
1° Constitutions de Van VIII et de Van X. — Avec le Consulat et l'Empire,
le suffrage universel reparaît dans nos Constitutions, mais c'est plus une appa-
rence qu'une réalité. En effet, d'après la Constitution de l'an VIII, tout Fran-
çais, à l'exclusion des domestiques (ce qui est déjà une restriction au suffrage
universel) est électeur à vingt et un ans et après un an de domicile. Voilà pour le
droit théorique, mais, dans la pratique, l'exercice de ce droit est annulé. Et
d'abord, en matière plébiscitaire. Il y a eu, de 1799 à 1815, quatre consulta-
tions populaires :1a première en l'an VIII pour approuver la première Consti-
tution^ consulaire ; la seconde en l'an X pour confirmer sa transformation; la
troisième en l'an XII, pour ratifier l'établissement de l'Empire, enfin la der-
nière en 1815 pour approuver sa nouvelle constitution dite l'Acte additionnel.
Les trois premiers plébiscites réunirent successivement 3.012,500, 3.577.000 et
3.375.000 votants; il n'y en eut que 1.537.000 en 1815. Aces diverses dates, les
votes négatifs ne furent qu'en nombre infime, oscillant de 1.562 (en l'an VIII)
à 8.376 (en l'an X). Mais ces plébiscites ne sont pas, à vrai dire, des votes. Il n'y
avait pas de scrutin. Deux registres étaient déposés dans les mairies pour rece-
voir les votes affîrmatifs et négatifs. Les électeurs devaient signer à l'un ou à
l'autre, et ceux qui ne pouvaient signer donnaient leur nom que l'officier muni-
cipal inscrivait. Aussi, dans l'immense majorité des communes, la feuille des
votes négatifs est-elle blanche. De plus, le total des votants ne nous indique
rien quant au nombre des inscrits. Les procès-verbaux conservés aux Archives
n'indiquent que le total des votants; on ne peut donc rien formuler sur le
rapport des électeurs à la population. Si on estime le total des électeurs aux
environs de 7 millions, le nombre des abstentions était, on le voit, considé-
rable. Ce qui s'explique autant par le mode de votation que par l'état anormal
de la France à ce moment. Encore faut-il remarquer que, même en tenant
compte des annexions effectuées depuis 1792, les trois premiers plébiscites
impériaux réunirent un ensemble de votes bien supérieurs à ceux de 1793 et
1795.
Si étrange que fût le procédé de vote en matière plébiscitaire, il y avait au
moins une consultation directe du peuple; il n'en était plus de même en matière
législative. Ici, l'élection était, en fait, supprimée. En effet, les électeurs de
chaque arrondissement devaient d'abord désigner le dixième d'entre -eux pour
former la liste des « notabilités communales ou d'arrondissement » de cette
liste; le dixième élu par ces mêmes notabilités formait « les notabilités de dépar-
tement »; enfin, ces derniers élus élisaient le dixième d'entre eux : c'étaient les
« notabilités nationales ». Parmi ces notabilités et seulement dans cette liste,
le Sénat choisissait les membres du Corps législatif et on les appelait avec
raison «, législateurs », car le terme de député ou de représentant n'avait plus
aucun sens dans un pareil système. L'élection des « législateurs » était donc
— 171 —
soustraite à la nation et son droit à la confection des listes de notabilités lui
était en fait confisqué. D'abord, les listes devaient être dressées pour toujours;
Seules les vacances causées par décès devaient être comblées, et seulement
tous les trois ans. Enfin, la formation des listes étant reculée à l'an IX (1800-
1801), ce fut l'Administration qui les dressa au début. Le système des listes
de notabilités était déjà par lui-même assez compliqué; mais le décret du
13 Ventôse an IX (4 Mars 1801) le compliqua encore bien plus; aussi fut-il
sans succès auprès de l'opinion et, en 1802, la Constitution de l'an X établit
un nouveau régime électoral, qui devait durer jusqu'en 1814. Sans doute,
c'est toujours le Sénat qui nomme les législateurs, mais le sufîrage populaire
peut les désigner d'une manière plus précise qu'auparavant. Désormais il y
avait deux sortes de collèges électoraux, ceux d'arrondissement et ceux de
département, innovation importante et qui, avec des modalités difîérentes
et sauf une courte interruption, devait subsister jusqu'en 1830. Les membres
des uns et des autres étaient élus par le suffrage universel (toujours à l'exclu-
sion des domestiques). Les membres du collège d'arrondissement dont le total
variait de 120 à 200 étaient élus sans aucune condition de cens; ceux du collège
du département, donf l'effectif était fixé au moins à 200 et au plus à 300, de-
vaient, au contraire, être choisis parmi les 600 plus imposés du département.
Ces listes, d'après l'arrêté du 18 Fructidor an X, durent être établies par les
préfets; elles l'étaient par ordre alphabétique sans indication du chiffre des
impôts payés. Mais les listes expédiées par les préfets au Gouvernement ne con-
tiennent que 550 noms, les 50 autres devant être ajoutés en l'an XI. Enfin, à
chaque collège d'arrondissement, le chef de l'État avait le droit d'adjoindre
10 membres et 20 à chaque collège de département; en 1806,-ce contingent fut
porté à 25 et à 30, respectivement. Une partie du corps électoral était donc
ainsi entre les mains du Gouvernement; en outre, les membres des collèges
étaient élus à vie, et il ne devait y avoir de nouvelles élections pour remplacer
les décédés que quand les deux tiers des places seraient vacantes. Les collèges
électoraux ainsi constitués dressaient une liste de noms triple du nombre des
législateurs attribués à chaque département et le Sénat choisissait sur cette
liste. C'est cela qui sembla une amélioration sur les listes de notabilités et sé-
duisit d'abord l'opinion publique. Les législateurs étaient élus pour cinq ans
et renouvelables par cinquième, chaque année.
2° Répartition des sièges au Corps législatif. — Au point de vue du recrute-
ment régional du Corps législatif, il y a une différence absolue entre la Consti-
tution de l'an-VIII et celle de l'an X, devenue Constitution de l'Empire, en
l'an XII. Dans la première, il n'y a aucun rapport entre la population des dépar-
tements et leur représentation au Corps législatif. La Constitution de l'an VIII
fixe à 300 membres âgés d'au moins trente ans le total des législateurs, mais
elle est muette sur leur répartition par département; elle stipule simplement
qu'il devra y avoir toujours parmi eux au moins « un citoyen de chaque dépar-
tement de la République ». Réserve faite de cette obligation, le Sénat pouvait
choisir à sa volonté les législateurs parmi les quelques milliers (6.000 à 7.000)
de notabilités nationales. Si nous consultons la liste des membres du Corps
législatif à la fin de 1801 (d'après l'Almanach national de 1802), nous consta-
- m -
tons qu'il n'y a aucune proportion entre la population des départements et le
nombre des législateurs y afférent. A cette date, le Corps législatif comptait
297 membres en fonction, il était donc ou à très peu près au complet. De ce
total, 263 appartenaient au territoir(3 français de 1792, et rien n'était plus dis-
proportionné que leur répartition géographique. Les dix départements les
moins peuplés avaient 24 législateurs pour moins de 1.600.000 habitants (en
1801), soit un pour 69.000 et les dix plus peuplés, 43 pour 5.500.000 habitants,
soit un par 128.000. Il y avait, il est vrai, 9 législateurs pour la Seine, sans doute
en raison de l'abondance des sujets que fournissait ce département, mais il n'y
en avait que 4 pour le Nord, alors plus peuplé que la Seine. Seize départements
n'étaient «représentés» que par un membre au Corps législatif et leur population
globale était de 4.120.000 habitants; c'était un législateur par 256.000. Dans
cette catégorie se trouvaient des départements peu peuplés comme les Hautes-
Alpes et la Lozère, aussi bien que des départements à forte population, tels
que les Côtes-du-Nord et la Gironde, qui avec plus de 500.000 âmes chacun
venaient au sixième et septième rang de nos départements d'alors. Le Nord
avec 765.000 habitants ne comptait, nous l'avons dit, que 4 législateurs, pas
plus que l'Indre avec 206.000 et beaucoup moins que le Jura qui en avait 7
avec 288.000 habitants. A considérer le répartition géographique des sièges, il
semble bien que le Sénat, par ses choix, ait avantagé la région parisienne et ses
environs immédiats : le quart des sièges au Corps législatif se trouvait distribué
entre l'Ile de France, la Normandie, la Picardie et l'Artois.
Avec la Constitution de l'an X, nous avons une plus juste répartition des
législateurs. Il est dit, en effet, à l'article 69 de cette Constitution que « chaque
département aura, dans le Corps législatif un nombre de membres proportionné
à l'étendue de sa population «. Cela devait tout naturellement amener une redis-
tribution départementale des sièges. En même temps, le total des sièges s'accroît
par la formation de nouveaux départements; de 300, en 1802, l'effectif des légis-
lateurs fut porté à 386, en 1810, lorsque l'Empire de Napoléon atteignit sa
plus grande extension avec 130 départements. Mais, abstraction faite des terri-
toires conquis et à ne considérer que la France de 1792, le Corps législatif eût
compté 257 membres, chiffre qui doit être retenu, car il sera presque exacte-
ment celui du Corps législatif, dans la Constitution de 1852.
En l'an X, la Constitution n'avait, il est vrai, fixé aucun chiffre précis pour
déterminer le nombre de sièges de chaque département; il avait été établi par
décret et ce décret, suivant le principe proclamé par la Constitution même,
avait proportionné le nombre des législateurs à la population. Nous venons de
voir quelle disproportion existait, dans le Corps législatif de l'an VIII, entre
la population des départements et leur « représentation » au Corps législatif.
Il en est tout autrement en l'an X et cela aussi est une satisfaction donnée au
principe démocratique. Les dix plus petits départements qui, en 1800, comp-
taient 23 législateurs, n'en ont plus dorénavant que 15 et les dix plus peuplés
en ont 51 au lieu de 43. De part et d'autre, il y a également 106.000 habitants
par siège. Il n'y a plus cette fois entre les petits et les grands départements
cette inégalité que nous avons constatée plus haut. Les deux départements les
plus peuplés, la Seine et le Nord étaient également représentés par huit mem-
bres; la Seine-Inférieure et la Gironde, par six et cinq respectivement. Les
— ^73 —
22 départements ayant une population de 400.000 à 500.000 ^mes, sauf deux
ou trois exceptions, avaient 4 législateurs. Trois représentants étaient attribués
à ceux qui comptaient de 280.000 à 400.000 habitants; il y en avait 20. Les dé-
partements ayant de 150.000 à 270.000 âmes (il y en avait 36) avaient deux
représentants et les 4 de moins de 150.000 n'en avaient qu'un : c'étaient les
Basses-Alpes, les Hautes-Alpes, la Lozère et les Pyrénées-Orientales. La création
de Tarn-et-Garonne, à qui 2 membres furent accordés, ne diminua pas la
représentation des départements dont il fut formé, soit ceux de la Haute-
Garonne, Lot, Lot-et-Garonne et du Gers.
3° L'Acte additionnel de 1815. — Aux Cent- Jours le régime napoléonien subit
une transformation ponstitutionnelle et, avec l'Acte additionnel du 22 avril
1815, la dictature impériale fit place, à ijne monarchie parlementaire. Cette
constitution nouvelle, dont Chateaubriand a pu dire qu'elle était une Charte
améliorée, introduit un régime électoral nouveau, plus libéral assurément que
les précédents. L'Acte additionnel établit (art. 8) que «la Chambre des Repré-
sentants (on ne dit plus Corps législatif, mais on reprend l'expression de la
Charte de 1814) est élue par le peuple ». Elle devra se composer de 629 membres,
âgés d'au moins vingt-cinq ans; elle est élue pour cinq ans et se renouvelle en
totalité. Les collèges électoraux d'arrondissement et de département sont main-
tenus, mais leurs vacances sont remplies chaque année par les électeurs du
permier degré et ces collèges (c'était là la réforme essentielle) élisent directe-
ment les représentants.
Cette Assemblée de 629 membres est donc la plus nombreuse que présente
notre histoire constitutionnelle de 1795 à 1848; sur ce total, 23 sièges étaient
attribués à une représentation spéciale du commerce et de l'industrie, de la
manière que nous verrons tout à l'heure. Quant à la répartition des 606 sièges
ordinaires, l'Acte additionnel ne prescrit rien, mais un décret annexe avait
pour objet de régler « la proportion des députés à la Chambre des Représen-
tants ». Ce règlement fut établi de la façon suivante : les collèges électoraux de
département nommaient 238 députés et les collèges électoraux d'arrondisse-
ment élisaient un député par arrondissement, quelle que ftit sa population,
soit 368. Chaque arrondissement administratif formait ainsi un collège élec-
toral, mais à Paris, les douze arrondissements se réduisaient à quatre collèges.
H ne pouvait donc pas y avoir, pour cette raison, une distribution de sièges
proportionnée à la population et ce mode d'élection favorisait surtout les petits
arrondissements. Les Basses-Alpeç, comme aujourd'hui, grâce à leurs cinq arron-
dissements, nommaient cinq députés d'arrondissement, soit un pour moins de
30.000 âmes. Le Rhône n'avait que deux députés d'arrondissement, soit un
pour plus de 180.000 habitants.
Mais par la représentation des collèges de département, les populations plus
nombreuses reprenaient l'avantage. Les petits départements n'avaient chacun
qu'un député de département, tels les Basses-Alpes, les Hautes-Alpes, l'Ariège,
la Lozère, les Pyrénées-Orientales, etc. Le collège de département de la Seine
élisait 6 représentants ainsi que celui du Nord; celui du Pas-de-Calais en nom-
mait 5 et on en attribuait 4 aux départements de plus de 400.000 âmes. Mais
pourquoi le Maine-et-Loire avec plus do 400.000 habitants aussi n'avait-il
^ 174 —
que 3 députés de département? Est-ce parce qu'il avait déjà 5 députés d'ari-oh-
dissement? Cela est vraisemblable, car si on rapproche la répartition des sièges
d'arrondissement et de département de la population des départements, on
saisit un effort visible de compenser l'insuffisance numérique des représentants
d'arrondissement par une augmentation des sièges accordés au département.
Par exemple, le Morbihan avec même population que le Maine-et-Loire n'a
que quatre arrondissements : il reçoit quatre députés de département, ce qui
rétablit l'égalité. Les Bouches-du-Rhono et le Gers avaient alors presque la
même population; mais le Gers avec ses cinq arrondissements ne détient que
deux sièges de département, tandis que les trois sièges d'arrondissement des
Bouches-du- Rhône sont augmentés do quatre sièges do département : ici,
encore l'égalité recevait satisfaction. Mais la Seine-et-Marne avec le même
nombre d'arrondissements que le Maine-et-Loire et une population dépassant
à peine 300.000 habitants se voyait attribuer 4 sièges de département. Ce n'était
là, il est vrai, qu\m cas isolé. Dans l'ensemble, la représentation accordée aux
collèges de département diminuait la disproportion entre la population et
sa représentation parlementaire. Par exemple, les dix départements les moins
peuplés nommaient 36 députés d'arrondissement, soit un par 45.000 habitants;
les dix plus peuplés en élisaient 56, ou un par 100.000. Mais, tandis que les pre-
miers ne recevaient que 15 sièges départementaux, les autres en détenaient 45.
Cela donnait donc aux petits départements un total de 51 sièges, soit un par
32.000 âmes et aux plus grands un total de 100, soit un par 54.000 habitants;
la disproportion, quoique toujours réelle, se trouvait cependant sensiblement
réduite. Mais cette concession au principe démocratique était amplement com-
pensée par l'élévation du cens exigé des membres des collèges électoraux de
département; ils ne pouvaient être choisis, comme en l'an X, que parmi les
600 plus imposés du département. Dans la Seine, par exemple, le collège électoral
de département comptait, en 1815, 216 membres : de ce total, 11 seulement
figurent sur la liste électorale comme ayant moins de 10.000 francs de revenu;
la majorité, 130, ont de iO.OOO à 25.000; 57, de 25.000 à 50.000; 16 ont un revenu
de 50.000 à 100.000 et 2 jouissent de plus de 100.000 francs de revenu. C'était
donc, en fin de compte, la fortune qui tirait le plus clair bénéfice des collèges
électoraux de département.
Nous donnons ci-dessous (tableau IV) la répartition des sièges législatifs
par département, d'après la Constitution de l'an VITI, de l'an X et de l'Acte
additionnel de 1815 :
Tableau IV
Répartition par département des sièges au Corps législatif du premier Empire
et à la Chambre des Représentants de 1815.
Sifgps au Corps législatif Siegis
„ -_ ^^.p- à la
Dpjiarti-niPnts d'après d'après Ohan.bre des Représentants
la Coiistitiitioii la Constitution d'après
dcTauVIlI de l'an X l'Acte additionnel (1)
Ain 2 3 7 (2)
Aisne 4 4 9 (4)
Allier 3 2 6 (2)
(1 ) Les chiïïres entre parenthèses indiquent le nombre des députés élus par le collège éleC'
toral de département.
— 175 —
Départinients
Basses-Alpes . . .
Hautes-Alpes . . .
Ardèche
Ardennes
Ariège
Aube
Aude
Aveyron
Bouches-du-Rhône .
Calvados
Cantal
Charente
Charente-Inférieui'e.
Cher
Gorrèze
Corse
Côte-d'Or
Côtes-du-Nord . . .
Creuse
Dordogne
Doubs
Drôme
Eure
Eure-et-Loir. . . .
Finistère
Gard
Haute-Garonne . .
Gers
Gironde. ..'...
Hérault
llle-et- Vilaine . . .
Indre
Indre-et-Loire . . .
Isère
Jura
Landes
Loir-et-Cher. . . .
Loire
Haute-Loire. . . .
Loire-Inférieure . .
Loiret
Lot
Lot-et-Garonne . .
Lozère ......
Maine-et-Loire. . .
Manche
Marne
Haute-Marne . . .
Mayenne
Meurthe
Meuse
Morbihan
Sièges au C
or|is législatif
d'après
la Constitution
de l'an X
Sièges
à la
Chambr* des Rcpré
d'après
l'Acte addition
d'après
la Constitution
de l'an VUI
sentant
nel
3
1
6
(1)
1
1
4
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3
2
- 4
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2
2
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(2)
3
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2
2
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2
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(2)
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3
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2
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2
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(2)
5
4
8
(4)
^ 176 —
Sièges au Corps législatif Sièges
' "^ --^^ à la
J)éparten)enls d'après d'aiiroe Chambre des Représentants
la CoDstitulion laConslitution d'après
de l'an VIII de l'au X l'Acte additionnel
• — ___
Moselle 1 4 7 (3)
Nièvre 1 2 6 (2)
Nord 4 8 12 (6)
Oise 3 3 7 (3)
Orne 6 4 7 (3)
Pas-de-Calais 7 4 11 (5)
Puy-de-Dôme 4 4 9 (4)
Basses-Pyrénées 4 2 8 (3)
Hautes-Pyrénées 3 2 5 (2)
Pyrénées-Orientales 2 1 4 (1)
Bas-Rhin 3 4 8 (4)
Haut-Rhin 4 3 6 (3)
Rhône 2 3 5 (3)
Haute-Saône ' 1 2 6 (3)
Saône-et-Loire 2 4 9 (4)
Sarthe 3 4 7 (3)
Seine 9 8 12 (&\
Seine-et-Marne 5 3 7 (2)
Seine-et-Oise 5 4 10 (4)
Seine-Inférieure 7 6 10 (5)
Deux-Sèvres 3 2 6 (2)
Somme 6 4 8 (4)
Tarn 2 2 6 (2)
Tarn-et-Garonne (*) » 2 5 (2)
Var 2 3 5 (1)
Vaucluse 2 - 2 6 (2)
Vendée 5 3 5 (2)
Vienne 4 2 7 (2)
Haute- Vienne 1 2 6. (2)
Vosges 1 3 8 (3)
Yonne 4 3 8 (3)
Total 261 257
Départements hors la France de
1792 36 (**) 129 5 (***) (2)
Total général 300 (en 1802) 386(enl810) 606 (238)
Députation professionnelle 23
629
(*) On sait que ce département ne fut créé qu'en 1808.
(**) Plus 3 sièges vacants.
(***)Ces cinq députés étaient ceux du département du Mont-Blanc perdu au second traité
de Paris (nov. 1815).
Une représentation professionnelle en 1815. — Mais le caractère le
plus original de l'Acte additionnel, c'est que pour la première fois — et la
seule — il a établi une représentation professionnelle en France. C'était évidem-
ment une satisfaction accordée à la bourgeoisie que Napoléon restauré cherchait
à se concilier; ce qui est étrange c'est que cette innovation n'a été que très peu
ou même pas remarquée du tout par les historiens; elle vient seulement d'être
l'objet d'une étude spéciale (1). Cette représentation professionnelle est établie
(1) Cette étude a pour auteur M. P. Vinson (Bévue de la Révolution française, iniUetidii)
— 177 —
par l'article 33 de l'Acte additionnel ainsi conçu : « L'industrie et la propriété
manufacturière et commerciale auront une représentation spéciale. L'élection
des représentants commerciaux et industriels sera faite par le collège électoral
de chaque département sur une liste d'éligibles dressée par les chambres de
commerce et les chambres consultatives réunies. » Un décret annexe à l'Acte
additionnel réglait le mode d'élection des 23 députés professionnels. Ils devaient
être choisis : 1° parmi les négociants, armateurs ou banquiers; 2° parmi les
manufacturiers et fabricants. A cette fin, la France était divisée en 13 régions
ou arrondissements. Dans chacune d'elles, les chambres de commerce et les
chambres consultatives de commerce dressaient une liste d'éligibles de 60 per-
sonnes (120 pour l'arrondissement de Paris). Sur cette liste les électeurs de dé-
partement choisissaient les députés. Ainsi les chambres techniques ne faisaient
que présenter une catégorie d'éligibles; c'était le collège électoral de départe-
ment, chef-lieu de l'arrondissement régional qui élisait les députés. Ses mem-
bres étaient donc à la fois électeurs politiques et professionnels. Cependant,
quand on réfléchit que ces électeurs étaient pris parmi les plus imposés du dépar-
tement, la chose paraît moins étrange, car beaucoup d'entre eux appartenaient
au haut commerce et à l'industrie. Des 23 députés professionnels, il étaient
attribués au commerce et 12 à l'industrie; leur répartition par région était, du
reste, fort arbitraire et nous ne la donnons qu'à titre de curiosité (Voir tableau V).
L'élection de ces représentants eut lieu, comme ceile des députés des collèges
de département. Dans la Seine, la représentation professionnelle de « l'arron-
dissement de Paris » fut composée, pour le commerce, de Jacques Laffîtte et
Hottinguer, le premier, gouverneur, le second, régent de la Banque de France;
pour l'industrie, du baron Chaptal et de Delessert.
Cette représentation professionnelle fut, on le sait, sans lendemain. Elle
figurait encore dans le projet de constitution que le parti libéral aurait voulu
imposer aux Bourbons restaurés (projet de Constitution du 29 juin 181.5);
mais ce ne fut là qu'un projet, et Louis XVIII rétablit la Charte de 1814.
Tableau V
Division de la France en 13 arrondissements régionaux pour l'élection
des députés destinés à représenter la propriété commerciale et l'industrie.
Chtft-lim
dei
arrondfMtmenti
1. Lille.
2. Rouen.
3. Nantes.
4. Bordeaux.
5. Toulouse.
Départements comprii dtnt lei trroadiiseineats
Nord, Aisne, Pas-de-Calais
Seine-Inférieure, Eure, Somme, Calvados, Orne,
Manche
Lotre-Inférieure, Ille-et-Vilaine, Côtes-du-Nord,
Finistère, Morbihan, Mayenne, Vendée. , . .
Gironde, Charente, Charente-Inférieure, Deux-
Sèvres, Dordogne, Lot-et-Garonne, Corrèze,
Landes
Haute-Garonne, Tam-et-Garonne, Tarn, Bas-
ses-Pyrénées, Hautes-Pyrénées, Pyrénées-
Orientales, Aude, Lot, Ariège, Gers
Députés à élire parmi le»
négociants, maoufactorieri
armateurs, ou
benquieri fabricanti
Chefs-lieux
des
arrondissemcnta
6. Nîmes.
7. Marseille.
8. Lyon.
9.
Strasbourg.
10.
Troyes.
11.
Paris.
12.
Orléans.
13. Tours.
— 178 —
Déparlements compris daus les arrondissements
Gard, Vaucluse, Aveyron, Hérault, Lozère . . .
Bouches-du-Rhône, Var, Corse, Basses-Alpes,
Hautes- Alpes '
Rhône, Mont-Blanc, Allier, Haute-Loire, Ar-
dèche, Cantal, Loire, Puy-de-Dôme, Isère,
Drôme, Ain, Jura, Saône-et-Loire
Bas-Rhin, Haut-Rhin, Meurthe, Meuse, Moselle,
Vosges, Haute-Saône
Aube, Seine-et-Marne, Marne, Haute-Marne, Ar-
dennes, Oise, Seine-et-Oise, Côte-d'Or, Doubs.
Seine
Loiret, Nièvre, Cher, Creuse, Eure-et-Loir,
Yonne, Vienne, Haute-Vienne
Indre-et-Loire, Loir-et-Cher, Indre, Sarthe,
Maine-et-Loire
{A suivre.)
Députés à élire parmi les
négociants, manufacturiers
armateurs, ou
banquiers fabricants
11
12
23
P. MÉURIOT.
IV
BIBLIOGRAPHIE
Filippo ViRGiLii.
// costo délia guerre Europea
Mezzi di fronteggiarle
Spese e perdue.
Cet ouvrage sur le coût de la guerre comprend, comme le titre l'indique, deux par-
ties : 1° les dépenses et les pertes; 2» les moyens d'y faire face. Dans un premier cha-
pitre, qui est une sorte d'introduction, l'auteur rappelle le coût des guerres, depuis
1815 jusqu'à la guerre mondiale actuelle. Il en estime approximativement, est-il besoin
de le dire, les pertes en argent à 88 milliards et en hommes à, 3.600 millions environ.
Pour les dépenses de la guerre, M. Virgilii considère les éléments suivants : entretien
des armées, réduction de la production, paralysie du commerce mondial, perte des
vaisseaux de guerre et des navires de commerce, valeurs des maisons et des édifices
publics détruits, des industries ruinées et des récoltes perdues, perte du capital
humain. On sait quelle énorme quantité de soldats ont levé et lèvent constam-
ment les puissances belligérantes; M. Virgilii l'estime à une vingtaine de millions
d'hommes, dont l'entretien, pour un an et demi de guerre, serait de 129 milliards. La
réduction de la production a atteint aussi toutes les nations belligérantes; elle a
affecté l'industrie par la mobilisation de la majeure partie des ouvriers et, du même
coup, déterminé une énorme dépression de salaires, comme l'a démontré M. Yves
Guyot. Les pertes résultant de la réduction de la production sont estimées par
M. Virgilii à plus de 60 milliards. C'est à une moindre somme, mais forte encore
de 50 milliards, que s'élève la perte due à la paralysie du commerce; après avoir
montré de quelle régression la guerre affecte le mouvement des échanges dans les
différents pays, M. Virgilii estime que, dans l'ensemble, le commerce mondial a
— 179 —
diminué tlo moitié. Le total des vaisseaux de guerre et des navires de commerce
perdus ou détruits est estimé à 3 milliards. Quant à la valeur des propriétés dé-
truites, elle est évidemment bien supérieure. Povero piccolo grande Paese, écrit
M. Virgilii à propos de la Belgique, avant de rappeler, d'une part, la grande
valeur économique de ce noble pays et, d'autre part, les dévastations dont il a été
l'objet. En mai 1915, la somme des pertes en résultant était estimée à plus de 6 mil-
liards. Edopo? ajoute mélancoliquement l'auteur. II faut y ajouter les pertes subies
par la France, la Pologne, la Serbie, etc., on arriverait à une somme d'environ 20 mil-
liards. Beaucoup plus lamentable encore est la perte du capital humain. Quelle est
à cette heure, cette perte totale? Vers la fin de l'an passé, on l'estimait à 4 millions
de morts et autant de blessés. C'était là la perte réelle du capital humain. Mais pour
chiffrer cette diminution, il faut établir la valeur humaine, variable selon les pays.
Sur cette question, M. Virgilii suit les travaux de Pareto et Alfred Barriol et arrive
à, un total de 114 milliards pour six pays belligérants : Allemagne, France, Russie,
Angleterre, Autriche- Hongrie et Belgique. En résumant ces différents chapitres, les
pertes causées par la guerre mondiale donneraient une somme de plus de 330 milliards
pour une seule année 1
Dans la seconde partie de son ouvrage, M. Virgilii examine le côté financier de la
guerre, c'est-à-dire les moyens avec lesquels les belligérants se sont procuré les res-
sources nécessaires : en Angleterre, les emprunts et les impôts nouveaux, en France,
les bons et obligations de la Défense et le récent emprunt de décembre 1915; en
Russie, les bons de guerre et les trois emprunts réalisés d'octobre 1914 à mai 1915; en
Allemagne et en Autriche- Hongrie, les emprunts successifs, soit trois pour la première
de ces puissances et six pour la seconde; enfin en Italie, les trois appels au crédit effec-
tués depuis le mois de mars 1915. Dans sa conclusion, M. Virgilii fait le total général
des dépenses de la guerre en supposant qu'elle doive durer jusqu'en juillet prochain.
Le total serait de 216 milliards, dont 132 pour les alliés et 84 pour nos ennemis.
Mais ce qui n'est pas moins intéressant c'est de comparer les dépenses de guerre
pour Une année avec le revenu annuel des différents Etats. Pour les Alliés, le rap-
port pour 100 est le suivant : Italie, 33; Angleterre, 36; France, 57, et Russie, 60.
Pour les Empires centraux, le rapport est de 65 en Allemagne et de 87 en Autriche-
Hongrie. Le savant professeur de Sienne tire de ces données une conclusion favo
rable aux Alliés. Est-d besoin de dire que nous nous y associons pleinement?
Paul Meuriot
V
NÉCROLOGIE
M. ALFRED MUTEAU
Notre collègue Alfred Muteau est décédé à Paris le 15 avril 1916 après une très
courte maladie.
Il était né à Dijon le l^i" mars 1850 et appartenait à une famille de magistrats.
M. Alfred Muteau faisait, dans sa ville natale, ses études de droit, lorsque éclata
la guerre franco-allemande. Il s'engagea dans la garde mobile de la Côte-d'Or, devint
sous-lieutenant et lieutenant et prit part au siège de Paris. Sa conduite au combat
de Bagneux lui valut la croix de la Légion d'iionneur.
— 180 —
Pourvu du diplôme de licencié en droit, il entra en 1872, au concours, dans le
commissariat de la marine, et obtint deux ans plus tard le grade d'aide-commissaire
avec le n» 1 de sa promotion. Après plusieurs années de navigation et de stations
dans l'Amérique du Sud et dans l'Afrique occidentale, il quitta le service actif et
se consacra à la littérature et aux études économiques et sociologiques.
Persuadé que la solution du grand problème social qui agite et trouble les nations
civilisées depuis le dernier quart du dix-neuvième siècle ne pouvait être obtenue que
par le progrès de la solidarité humaine et par l'application, aussi large que possible,
mais sage et méthodique, de la prévoyance et de l'assistance sous toutes leurs formes,
M. MuTEAU se joignit, dès le début, à tous les mouvements qui eurent lieu en ce sens
dans notre pays. En 1888, il apporta son concours à la constitution du Conseil supé-
rieur de l'Assistance publique. En 1889, il fut membre et secrétaire du premier Congrès
international d'assistance, tenu à Paris sous la présidence de M. Théophile Roussel,
avec qui, à l'issue du Congrès, il fonda la Société internationale pour l'étude des ques-
tions d'assistance dont il fut d'abord secrétaire, puis secrétaire général pendant plu-
sieurs années, et enfin président.
Vice-président de section du Congrès national de Lyon (1894), président de section
du Congrès de Rouen (1897), M. Muteau eut l'honneur, en 1896, d'être désigné par
la Suisse comme secrétaire général des deux congrès internationaux d'assistance et
de la protection de l'enfance tenus à Genève. En 1900, il était vice-président du
Congrès international tenu à Paris sous la présidence de M. Casimir-Périer.
En 1895, M. Alfred Muteau succéda, comme conseiller général de la Côte-d'Or,
à son père, qui se retirait après trente-six ans d'exercice» En 1898, les électeurs de-
la deuxième circonscription de Dijon l'appelèrent à les représenter à la Chambre des
Députés où il fut réélu en 1902, 1906 et 1910.
M. Muteau était membre du Conseil supérieur de l'Assistance publique, du Conseil
supérieur de Statistique, du Comité du contentieux et de la justice militaire au minis-
tère de la Guerre et du Comité des travaux historiques et scientifiques (section des
sciences économiques et sociales).
Ses collègues de la Chambre des Députés l'avaient élu membre des commissions
d'assurance et de prévoyance sociales, de la marine et des colonies.
Il était officier de la Légion d'honneur, de l'Instruction pubhque et du Mérite
agricole.
M. Muteau appartenait à notre Société depuis décembre 1904; il avait eu pour
parrains MM. Levasseur et Chervin; il apportait dans ses relations une aménité par-
faite et venait assidûment, à nos séances où il prenait trop rarement la parole. Sa
perte sera vivement ressentie par la Société qui conservera un affectueux souvenir de
l'homme de bien qui disparaît.
M. M.
Le Gérant : R. STEINHEIL
NANCT-PAIUS, IHPHIMKRIE BBRGER-LSVRAULT — MAI I^lT)
JOURNAL
DE LA
SOCIÉTÉ DE STATISTIQUE DE PARIS
N° 6. — JUIN 1916
I
PKOCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE DU 17 MAI 1916
s O IS^Ils^^A-IRB
UVERTURE DE LA SÉANCE PAR M. MALZAC, PRÉSIDENT. — PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DES
15 MARS ET 19 AVRIL 1916.
NÉCROLOGIE.
NOMINATION ET PRÉSENTATION DE MEMBRES TITULAIRES.
COMMUNICATION DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL. — PRÉSENTATION D'OUVRAGES.
ATTRIBUTION DU PRIX BOURDIN.
COMMUNICATION DE M. MAGNAN SUR - LA DOUANE ET LA GUERRE».
OUVERTURE DE LA SÉANCE PAR M. MALZAC, PRÉSIDENT — PROCÈS-VERBAUX DES
SÉANCES DES 15 MARS ET 19 AVRIL 1916
La séance est ouverte à 17^30 sous la présidence de M. Malzac, président,
qui met aux voix l'adoption du procès-verbal de la séance du 15 mars, inséré
dans le Journal d'avril; le procès-verbal est adopté à l'unanimité.
Le Journal de mai, qui contient le procès-verbal de la séance du 19 avril,
n'ayant pu être distribué, l'adoption de ce dernier est remise à une date ulté-
rieure.
NÉCROLOGIE
M. le Président fait part à la Société du décès de notre collègue, M. le D^" Sixte
NoRMAND-DuFiÉ. DocteuT eu médecine, médecin-major en retraite, M. NoR-
MANb-DuFiE était officier de la Légion d'honneur, officier de l'Instruction
publique et officier du Mérite agricole.
M. le Secrétaire général annonce à la Société le décès de M. Burat, qui
venait d'être tout récemment admis en qualité de membre titulaire; fils de
l'ancien professeur au Cogiservatoire des Arts et Métiers, M. Burat était l'un
des courtiers de change les plus connus et les plus estimés de Paris; M. Bar-
riol se fera aliprès de M"^*^ Burat l'interprète 'des sentiments de condoléances
de la Société.
l'^ SÉBIE. 57® VOL. N" 5 IJ
— 182 —
NOMINATION ET PRÉSENTATION DE MEMBRES TITULAIRES
M. le Président met aux voix \q^ candidatures de MM. Hubert Bezard,
attaché aux études financières de la Banque de l'Union parisienne, Godard,
directeur de la Compagnie générale du Maroc, et Pierson, ingénieur construc-
teur, consul général de la République Sud-Africaine.
Ces candidatures sont acceptées à l'unanimité et MM. Bezard, Godard et
PiERSON sont nommés membres titulaires.
M. le Président annonce qu'il a reçu les demandes d'admission suivantes :
M. Laurent, directeur général des Forges et Aciéries de la Marine, 19, rue de
Bourgogne, présenté par MM. Brizon et Barriol; M. Lacroix, secrétaire
général de la Chambre de Commerce de Paris, 2, place de la Bourse, présenté
par MM. Bellom, Cadoux et Barriol; M. Maurice Évesque, docteur en
droit, 8, rue des Canettes, présenté par MM. Desroys du Roure et R.-G.
LÉVY.
Conformément à l'usage, il sera statué sur ces demandes à la séance de juin.
COMMUNICATION DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL — PRÉSENTATION D'OUVRAGES
M. le Secrétaire général annonce qu'il a reçu pour la Société un certain
nombre d'ouvrages, parmi lesquels il signale :
Australie. — Recensement de la Confédération des États d'Australie du
3 avril 1911.
Danemark. — Communications statistiques. 4^ série.
Etats-Unis. — The boot and shoe industry in Massachusetts as a vocation
for women. 1915.
Community sickness survey Rochester N. Y. Septembre 1915.
France. — Travaux des commissions mixtes départementales pour le main-
tien du travail national. 1915.
Japon. — Résumé statistique de l'Empire du Japon. 1916.
Mouvement de la population de l'Empire du Japon pendant l'année
1912 (nombres absolus et proportions).
Suède. — Banque de Suède. Situations. Rapports annuels pour l'année 1915.
Uruguay. — Annales de l'Instruction primaire. Juillet 1914. Décembre 1915.
Documents privés.
Dublin (Louis-L). — Vital statistics in relation to life insurance.
Frankel (Lee-K.). — Heights and weights of IN ew- York city children
14 to 16 years of âge.
M. le Secrétaire général appelle enfin l'attention de ses collègues sur l'im-
portant et intéressant article paru d^ns Le Rentier de ce jour.
M. le D^Chervin fait connaître à la Société que V Association française pour
Vavancement des sciences Ta chargé d'aller à Lyon faire une conférence sur les
Yougo-Slaves (Serbes, Croates, Slovènes) au point de vue ethnique. Il s'est
efforcé de dégager, le plus clairement possible, les quatre points suivants :
1° Les populations de la Slovénie, de l'Istrie, de la Croatie et de la Dalmatie
forment, avec la Bosnie-Herzégovine, la Serbie et le Monténégro, une même
nation de langue et d'origine slaves, absolument distincte des Austro-Alle-
mands et des Magyars (Hongrois);
2» Ces populations veulent s'unir pour former la Serbie de demain et leur
union nationale est accomplie moralement;
3*^ La France et les Alliés ont le plus grand intérêt à ce que cette union se
réalise effectivement;
40 Cette union ne peut se réaliser que par le démembrement de l'Autriche-
Hongrie.
— 183 —
M. Chervin présente une brochure contenant cette conférence et insiste
sui' la partie vraiment originale de son travail, à savoir : la création d'une
marche slave destinée, d'une part, à faire communiquer les Slaves du Nord
avec ceux du Sud et, d'autre part, à sé'parer les Autrichiens des Hongrois.
Cette marche sert à la fois de région-tampon et de corridor de communication
entre les pays tchèques et les pays yougo-slaves. Elle est absolument indis-
pensable à l'union des Slaves, que les pangermanistes s'efforcent au contraire
de séparer; elle fournit, de plus, un débouché facile et sûr vers la mer aux
Tchèques qui en ont le plus grand besoin. Enfin, en séparant l'Autriche de la
Hongrie par un territoire de 100 kilomètres de Inrge sur 200 kilomilres de
long, elle assure la tranquillité de l'Europe. On ne saurait donc trop en réclamer
la création par la disjonction des comitsts de Moson, Sopron, Vas et Zala du
territoire actuel de la Hongrie.
ATTRIBUTION DU PRIX BOURDIN
M. le Président donne la parole à M. A. Neymarck, rapporteiu- de la Com-
mission chargée de statuer sur l'attribution du prix Bourdin (Voir annexe au
procès-verbal, page 186).
M. le Président met aux voix les conclusions du rapport de la Commission
et, sur assentiment unanime des membres de la Société, il proclame M. Paul
Matrat lauréat du prix Bourdin pour 1916, ajoutant que cet événement
constituera l'un des plus agréables souvenirs de sa présidence et regrettant
que les circonstances ne lui permettent pas de remettre immédiatement à
M. Paul Matrat la médaille qui lui est destinée. M. Matrat remercie la
Société en termes émus de l'honneur qui lui est fait.
COMMUNICATION DE M. MAGNAN SUR « LA DOUANE ET LA GUERRE »
M. le Président donne la parole à M. Magnan pour le développement de
sa communication.
M. L.-J. Magnan constate tout d'abord les difîérences qui séparent notre
situation commerciale au début de la guerre actuelle de celle que nous occu-
pions-avant 1870. Le commerce spécial total de la France en J869 représen-
tait une valeur de 6 milliards 228 millions de francs, alors qu'il atteignait en
1913 une valeur globale de plus de 15 milliards.
Aussi ne trouve-t-on trace, parmi les actes gouvernementaux remontant à
l'époque de la première guerre franco-allemande, que d'un petit nombre de
mesiu-es douanières proprement dites. Au cours de la guerre actuelle, au
contraire, l'intervention" du Gouvernement et du Parlement en matière éco-
nomique n'a cessé de se manifester. Les mesures prises ont eu pour but de
mettre obstacle à tout acte de commerce avec les sujets ennemis ou avec les
personnes résidant en pays ennemis, d'empêcher la sortie des marchandises
utiles à la défense nationale ou à notre industrie, d'accorder des facilités pour
l'importation des produits indispensables à l'alimentation de l'armée et de la
population civile.
Après avoir énuméré ces actes dont l'exécution a singulièrement accru la
tâche du personnel des douanes, notablement affaibli par la mobilisation,
M. L.-J. Magnan s'attache à en rechercher l'influence dans nos échanges avec
l'extérieur. Ces échanges sont évidemment affectés dans une mesure très sen-
sible par les événements actuels. Mais les actes du Gouvernement n'en ont
pas moins exercé une influence considérable sur le mouvement de nos impor-
tations et de nos exportations.
Importation. — En comparant les deux années 1915 et 1913, on constate qu'à
l'importation il y a augmentation sur les objets d'alimentation (2.549.371.000
francs au lieu de 1.817.579.000 francs). On note par contre une diminution
(3.153.534.000 francs au lieu de 4.945.732.000 francs) dans les entrées de
— 184 —
matières nécessaires à l'industrie. Il y a excédent sur les objets fabriqués
(2.371.587.000 francs contre 1.658.021.000 francs). Pour apprécier ces résul-
tats, il faut tenir compte de l'occupation de nos départements les plus riches
en industries de toute sorte, ainsi que de l'insuffisance de la main-d'œuvre natio-
nale. Cette situation nous rend pour une large part tributaires de l'étranger
et nous oblige à des exportations de numéraire dont on n'a pas besoin de sou-
ligner l'influence déplorable sur notre change et sur l'état général de nos
finances.
Exportation. — A la sortie, le chiffre des produits d'alimentation a diminué
dans une forte proportion (543.687.000 francs en 1915 au lieu de 838.898.000
en 1913). Celui des matières nécessaires à l'industrie a fléchi de 1.858.091.000
francs en 1913 à 636.929.000 en 1915). Quant aux produits fabriqués, le déficit
a été considérable (1.662.397.000 francs en 1915 contre 3.617.046.000 francs
en 1913). Ces chiffres traduisent bien les effets' de la guerre et nous montrent
la voie à suivre pour les conjurer, en restreignant nos importations de produits
de luxe et en augmentant autant que possible les sorties de produits qui réu-
nissent la double condition de n'être pas nécessaires à la défense nationale et
de ne pouvoir être réexportés dans les pays ennemis.
M. L.-J. Magnan constate que les recouvrements de droits de douane ont
atteint, en 1915, un chiffre (871.504.000 franers) supérieur en apparence aux
recettes les plus fortes qu'ait jamais effectuées à ce titre le Trésor français.
Mais il faut remarquer que ce total comprend les versements opérés pour le
compte de l'État, à l'occasion des importations d'articles destinés à l'armée.
En réalité, les recettes douanières de 1915 doivent être ramenées à 576 mil-
lions, soit environ 166 millions de moins qu'en 1913.
Les mesures d'ordre économique qui devront être prisés-après la guerre ne
ressembleront en rien à celles que la douane eut à appliquer à la suite de nos
désastres de 1870. Nous aurons à conclure des accords commerciaux non seu-
lement avec les pays ennemis, mais encore avec les pays alliés, et sans doute
aussi avec les pays neutres. Cette tache se compliquera probablement de la
revision de notre régime douanier.
Pour que la France soit en mesure de compléter sa victoire militaire en la
portant dans le domaine du commerce et de l'industrie, il importe qu'elle
recouvre sans retard son indépendance douanière, quelque peu entravée
aujourd'hui par divers traités comportant des consolidations de droits. En
tout cas, nos relations économiques avec l'étranger devront être réglées dans
un esprit pacifique, de manière à nous maintenir le bénéfice de la fixité des
tarifs douaniers, condition indispensable de la sécurité et du développement
des transactions commerciales.
M. Fernand Faure demande à M. Magnan s'il peut faire connaître approxi-
mativement la portée des interdictions d'importation prononcées, c'est-à-dire
l'ordre do grandeur de la diminution qu'on est en droit d'escompter dans les
envois de fonds à l'étranger. M. Magnan répond que les interdictions ne joue-
ront sans doute que d'une manière relativement restreinte : du fait des cir-
constances mêmes, les importations ont, en effet, déjà considérablement
diminué pour certains articles de luxe, visés ou non dans le décret de prohi-
bition.
M. Fernand Faure, appréciant les mesures prises, déclare leur donner son
entière approbation. 11 ne faut pas prêter, comme on l'a fait dans un récent
article de doctrine, à des mesures économiques qui ont pour but de restreindre
les consommations françaises le caractère de mesures protectionnistes : les
exigences de la guerre conduisent le Gouvernement à prendre les dispositions
nécessaires au salut public et l'on doit seulement regretter que les décisions
récemment arrêtées ne l'aient pas été un an plus tôt : on eût conservé ainsi,
pour la défende nationale, d'appréciables ressources. M. Fernand Faure ajoute
— 185 —
qu'il ne faut pas se tenir pour satisfait avec ces mesures, qu'il faut encore
faire appel à la réflexion et à la volonté de tous les Français pour leur demander,
non pas seulement de désirer la victoire, mais de la mériter en supportant les
privations, la gêne même qui permettront de l'obtenir.
M. Yves GuYOT reconnaît qu'en état de guerre le Gouvernement peut
prendre des mesures de prohibition comme celles du décret du il mars. Mais
il y en a de ridicule, comme la prohibition des volailles truffées, des pâtés de
foies gras, des huîtres. L'importation en était insignifiante et la saison en est
finie. On a prohibé des objets d'alimentation comme les bananes, les conserves
de homard, qui ne sont pas des objets de luxe. On a prohibé certains tapis
de coton, de laine, tous les tissus de soie; cette prohibition atteint la Suisse et
l'Italie. On a prohibé les automobiles même de commerce, alors que nos cons-
tructeurs d'automobiles sont occupés par la guerre. C'est une mesure prise contre
les États-Unis. Le décret ne contient pas de date d'échéance et un précédent
peut inspirer quelque crainte. En 1814, la Restauration devait tout aux alliés;
cependant M. Féray, représentant des fabricants de coton, demandait le main-
tien de la prohibition comme depuis 1806, date du blocus continental. Les
Cent jours ont lieu. Les Anglais gagnent la bataille de Waterloo. Le protec-
tionnisme, en contradiction avec la politique générale de la Restauration,
introduit dans la loi de 1816 l'article 59 qui ordonne la recherche et la saisie
de tous les cotons filés, les tissus de coton et de laine et tous autres tissus prohi-
bés. Certains symptômes doivent nous faire craindre de pareils agissements
au lendemain de la guerre.
« Nous aurons, dit M. Alfred Neymarck, bien souvent l'occasion de parler
ici et ailleurs de protection, libre-échange, de cherté et bon marché, d'abon-
dance et de restriction et de quantité de problèmes économiques, budgétaires,
financiers et statistiques, que la guerre a soulevé-; et qu'il faudra résoudre. A
quels chiffres, par exemple, s'élèveront les budgers, la dette publique et les
impôts de demain, en France et dans tous les pays?
« Saluez le milliard, disait M. Thiers, aux environs de 1830, vous ne le reverrez
plus! )) Nous ne l'avons plus revu, pas plus que les 2 milliards sous le second
Empire, pas plus que les 3 et 4 milliards qui ont suivi, pas plus que nous ne
reverrons les 5 milliards de notre budget presque à la veille de la guerre ! Notre
Société ne manquera pas, on le voit, de bien intéressants sujets d'études statis-
tiques et de discussions dans l'avenir — mais pour le moment la communication
documentée, claire, précise et si bien présentée de notre confrère M. Magnan
présente un intérêt de premier ordre. Elle mérite d'être consultée et mise à
profit, quand des négociateurs autorisés, officiels, réunis autour d'un tapis vert,
auront à établir de nouveaux traités commerciaux entre les divers pays.
«Il est, du reste, nécessaire, dit M.Alfred Neymarck, que, dès maintenant,
sans attendre la fin de la guerre et la paix victorieuse et réparatrice, les pays
alliés et amis, unis dans la guerre, combattant les armes à la main pour le droit,
la justice, la liberté, la civilisation, contre l'injustice, la servitude, la barbarie,
procèdent à des enquêtes, entament des conversations, jettent les bases des
accords économiques, commerciaux, financiers, etc., qui devront intervenir
pour concilier les divers intérêts divergents. Il faut être prêts, le jour venu, à
dire : « Voilà ce que nous voulons et ce que nous ferons! » De la confraternité
d'armes doit naître et s'établir la confraternité économique, commerciale,
industrielle, financière entre les pays amis et alliés; ce sera la paix écono-
mique et non la guerre économique. Ces grandes lignes directrices, dit M. Alfred
Neymarck, ont guidé la récente conférence parlementaire internationale
des Alliés, mais il est utile que, sans attendre la fin de la guerre, toutes les bonnes
intentions dont chacun a fait preuve se traduisent en actes précis, proposés
dès maintenant, qu'il n'y aura plus qu'à signer au lieu de les discuter encore...
après la guerre. Au point de vue commercial, douanier, le travail de M. Magnan
rendra aux négociateurs des divers pays d'incontestables services. »
— 186 —
M.Alfred Neymarck, sans entrer dans le fond delà discussion intéressante
qui vient d'avoir lieu entre nos collègues et amis Fernand Faure et Yves
GuYOT, est d'accord avec eux, sauf sur quelques points de détail. Il estime que
tant que durera la guerre, aussi longue qu'elle soit, car nous voulons tous aller
jusqu'au bout, chacun de nous doit réduire ses besoins au strict nécessaire, se
priver de tout superflu et consacrer toutes ses économies et ses ressources aux
besoins de la défense nationale. « Ma formule, dit M. Alfred Neymarck, est
simple à comprenUre. Il faut se priver soi-même pour que tout abonde sur le
front. Il faut que le Trésor public soit muni de tous les capitaux dont il peut
avoir besoin. Quand un nouvel appel sera fait aux épargnes de chacun et de
tous, il faut encore que tout le monde, sans exception, y réponde. Une partie
seulement de notre armée de capitalistes de première ligne a souscrit au 5 %
national. Le reste de cette armée, puis la seconde et la troisième ligne —sans par-
ler des réserves qui sont intactes — doivent toujours se tenir prêtes à intervenir !
« Nous sommes les passagers d'un même navire ballotté et menacé par une
mer en furie. Sauvons-le pour nous sauver nous-mêmes, quels que soient les
sacrifices individuels, les restrictions et les privations que nous nous imposerons
de notre propre volonté. C'est un devoir national ! )>
M. le Président remercie l'orateur de sa communication, qui rend si bien
compte du rôle joué dans la guerre par une grande Administration de l'Etat.
Il conclut en souhaitant l'établissement d'un régime économique donnant
pleine satisfaction aux intérêts français et alliés,
La séance est levée à 19 heures.
Le Secrétaire général, Le Président,
A. Barriol. Malzac.
II
ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE DU 17 MAI 1916
RAPPORT SUR LA MÉDAILLE BOURDIN
M. le Dr Bourdin, président de notre Société en 1881, aimait profondément
la statistique et les statisticiens. C'était un esprit très fin, très délicat, et ceux
qui l'ont connu ne pourront jamais oublier sa bonne figure franche, souriante,
qui reflétait les qualités de l'âme et du cœur. La Médaille Boiirdin que notre
Société a fondée avec les arrérages du legs qu'il nous a fait rappelle toujours
son souvenir en même temps qu'elle est une récompense d'autant plus appré-
ciée et recherchée qu'elle est plus difficile à obtenir.
Cette médaille est décernée, sur la proposition du Conseil de la Société, à
l'auteur du travail le plus intéressant, publié dans le Journal de la Société de
Statistique, pendant la période des trois années qui précèdent le concours.
Ces conditions paraissent des plus simples pour déterminer le choix de la Com-
mission et celui du Conseil : mais les règlements que le Conseil lui-même a
édictés pour lui permettre de fixer son choix soulèvent des difficultés presque
insurmontables. Le candidat ne doit être choisi ni parmi les présidents»
vice-présidents, membres du bureau, anciens ou actuels, nr parmi les précé-
dents lauréats de la Médaille Bourdin. C'est obliger le rapporteur, comme il
le disait dans son précédent rapport, à faucher impitoyablement les plus belles
— 187 —
fleurs de notre jardin de chiffres et à dire à des anciens collègues qui ont
continué à travailler pour la science qui nous est chère : Non bis in idem. Il doit
alors trouver le lauréat parmi les membres de la Société, anciens ou nouveaux?
et, dans tous les cas encore, faisant partie de la Société depuis trois ans, puisque
le choix doit se porter sur des travaux publiés depuis trois ans.
Le rapporteur est donc obligé de compulser nos recueils, de lire et relire les
travaux qu'il a déjà entendus, et c'est pour lui une tâche agréable et utile :
agréable, parce qu'il revoit des signatures de collègues amis, estimés; utile,
parce qu'en les relisant à tête reposée, il s'instruit encore après les avoir
écoutés. Puis, après chaque lecture, il serait tenté de dire : « Voilà le candidat
qui s'impose au choix de la Société. » Mais alors la rigidité du règlement le
rappelle à la réalité. Il faut que le travail publié ait été fait dans les trois der-
nières années, ce qui oblige à choisir le lauréat parmi les membres faisant
partie de la Société depuis trois ans.
Nous serons certainement obligés de modifier, tôt ou tard, ces règles excessi-
vement dures et il nous faudra leur donner un peu moins de rigidité.
Votre rapporteur a fait ainsi le tour de notre jardin et respiré des fleurs
embaumées qui portent ?es noms, en suivant les années 1913, 1914 et 1915,
de March, Bellom, Borel, Yves Guyot, Meuriot, Fernand Faure, Barriol,
Malzac, notre Président actuel, Roulleau, Yvernès, Cadoux, Bernard, notre
si regretté ancien vice-président, D^ Chervin, de Boislandry, d'Eichtal, et,
à côté de plusieurs de ces noms, il pourrait ajouter « deux fois, trois fois, quatre
fois, cinq fois, six fois nommé », comme dans les grands concours. Les anciens
présidents, vice-présidents, membres du bureau, suivent les exemples que nous
ont laissés le maître inoubliable, le bon génie de la Statistique, E. Levasse ur,
comme l'a fait aussi E. Cheysson, ancien président et premier rapporteur du
Prix Bourdin, qui avait suivi les exemples de E. Levasseur. Ils ont laissé des
traditions de travail que les anciens s'efforcent de sui^Te, passibus non ssquis,
raditions qui sont conservées par les jeunes membres. Anciens et nouveaux
maintiennent ainsi l'éclat et le renom des travaux de notre Société.
Parmi les travaux, des membres « papables » de la Société qui ont retenu
l'attention de la Commission, le rapporteur citera celui de M. Michel sur les
Valeurs immobilières du. territoire français encore envahi au 15 novembre
1914; celui de M. Ch. Gallot sur la Nouvelle forme du budget de la Ville de Paris;
de M. Lefas, sur la Statistique des Fonctionnaires ; d'Edmond Théry, surla
; Monnaie du papier, etc.; mais il lui fallait concliu-e, quand il s'aperçut qu'une
violette modeste, chaque année renaissante et toujours plus embaumée, se
cachait dans notre parterre. Le lauréat du Prix Bourdin était dès lors désigné
et son choix fut accepté à l'unanimité. Il fait partie de la Société de Statistique
depuis 1897. Depuis 1898, tous les ans, il a régulièrement présenté à la Société
des statistiques d'une utilité incontestable, dressées avec un soin minutieux
et vous les avez toujours approuvées et applaudies !
Ce lauréat est président du Comité de contrôle de la Société de Prévoyance
des employés de l'État; sous-directeur honoraire au ministère de la Guerre,
trésorier de la Ligue nationale de la Prévoyance et de la Mutualité.
L'Académie Française a couronné un livre de lui plein de sagesse et do bon
sens : « Tu seras prévoyant. » Le Gouvernement a récompensé ses travaux, ses
— 188 —
bons et loyaux services en le nommant chevalier, puis officier de la Légion
d'honneur.
Ce lauréat, vous le connaissez maintenant. Qu'il m'excuse do froisser sa
modestie. C'est, comme je me suis permis de l'appeler souvent, notre Trésorier,
le « Cerbère « de notre Caisse et de nos comptes, notre cher Paul Matrat.
Vous vous associerez tous, mes chers Collègues, aux conclusions de la Commis-
sion du Prix Bourdin, en votant pour Paul Matrat.
Cette médaille a une valeur inestimable pour ceux qui en ont été honorés, car
elle est le témoignage de l'estime, de l'afîection des maîtres, des collègues et
confrères : c'est une fleur modeste, toujours belle et vivace. Vous la conser-
verez précieusement, mon cher Collègue, et vous me permettrez, au nom de la
Commission, de saisir cette circonstance pour remercier aussi, en lui offrant
tous nos respectueux hommages et nos remerciements, M"^^ Matrat, qui, chaque
année, a reçu si aimablement les membres de la Commission des Comptes qui
sont venus chez elle, au risque de troubler votre intérieur si calme et si tran-
quille, pour vérifier les livres, les comptes et la statistique de notre vigilant
Trésorier Paul Matrat, aujourd'hui lauréat de la Médaille Bourdin.
Le Rapporteur,
Alfred Neymarck.
(Ancien Président.)
m
LE COMMERCE INTERNATIONAL EN 1915 (D
SOMMAIRE
I. Le commerce de la France.
II. Le commerce du Royaume-Uni.
III. Le commerce de la Russie.
IV. Le commerce du Japon.
V. Le commerce de l'Italie.
VI. Le commerce des États-Unis.
VII. Le commerce de la Suisse.
VIII. Le commerce de l'Allemagne.
IX. Les transports maritimes et les frets.
X. Le change.
^ XI. Dernier mot.
I
LE COMMERCE DE LA FRANGÉ
Les importations en France, pondant l'année 1915, s-e sont élevées à
8.074.492.000 francs contre 6.402.169.000 francs pendant l'année 1914, et les
exportations à 3.022.302.000 francs contre 4.868.834.000 francs en 1914, soit
(1) Communication faite à la Soc'été de Statistique de Parts dans sa séance du 16 février
1916,
— 189 —
une différence de 5 milliards 52 millions de francs; mais 1914 n'est pas une
année normale. La comparaison doit se faire avec 1913.
Ces chiffres se décomposent ainsi :
Importations.
1915 1914 1913
Millions de francs
1.813,4
1.817,5
3.508,1
4.945,7
1.080,5
1.658,0
6.402,1
8.421,3
645,9
838,9
1.299,0
1.858,0
2.575,7
3.617,0
348,0
566 , 2
4.868,8
6.880,2
955,9
975,0
206,7
431,3
Objets d'alimentation 2.549,3
Matières nécessaires à l'industrie 3.153,5
Objets fabriqués 2.371,5
Totaux 8.074,4
Exportations.
Objets d'alimentation 543,6
Matières nécessaires à l'industrie 636,9
Objets fabriqués 1.662,3
Colis postaux 179,2
Totaux 3.022,3
Or, argent et billon (Importations) 114,7
— (Exportations) 148,7
Malgré la puissance de consommation de la guerre, les importations sont
restées inférieures à ce qu'elles étaient en 1913 de 347 millions. Il y a eu une
augmentation de 722,800.000 francs sur les objets d'alimentation et de 713 mil-
lions sur les objets fabriqués, mais il y a eu diminution de 1 milliard 792 mil-
lions sur les matières nécessaires à l'industrie.
Nos chiffres de douane comprennent les importations par l'État, tandis
qu'ils ne se trouvent pas dans les chiffres de la douane britannique. De là
résulte le gros chiffre de l'importation des viandes : 411,259.000 francs en 1915,
tandis que le chiffre de 1913 n'était que de 38.680.000 francs et celui de 1914
de 62.146.000 francs.
Même pendant la guerre, aucun pays ne peut se suffire à lui-même; il a be-
soin d'acheter au dehors et' d'autres ont besoin d'acheter certains de ses pro-
duits; seulement les courants commerciaux varient.
Les importations de Russie en France sont tombées de 458.500.000 francs
en 1913 à 50.700.000 francs en 1915; celles de la Grande-Bretagne ont aug-
menté : de 1 milliard 115 millions, elles ont atteint 1 milliard 914 millions;
celles de l'Italie, de 240.500.000 se sont élevées à 335 millions. Celles de deux
pays neutres se sont beaucoup élevées : l'Espagne, de 281.600.000 à 461 millions ;
celles des États-Unis, de 895 millions à 2 milliards 273 millions, soit de 1 mil-
liard 378 millions en plus, ou 154 %.
L'armée consomme pour détruire; elle ne rend rien comme produits en
échange de ce qu'elle absorbe; de là, la faiblesse de nos exportations, tombées
en 1915 de 6 milliards 880 millions à 3 milliards 22 millions, soit une diffé-
rence en moins de 3 milliards 858 millions de francs.
Si l'on excepte l'agriculture et les industries consacrées à la guerre, l'activité
de toutes les autres a été suspendue.
Le moratorium a immobilisé les capitaux. Les transports ont été absorbés
par les exigences de la guerre; et puis, on ne produit pas pour produire, on pro-
— 190 —
duit pour vendre. Où sont, en France, les acheteurs de bijoux, de soieries,
et même de linge usuel? De nos deux meilleurs clients, l'un, la Belgique, s'est
évanoui; l'autre, la Grande-Bretagne, a restreint ses achats de luxe.
Des gens, qui s'imaginent que leurs passions peuvent engendrer des réa-
lités, avaient répété sur tous les tons : « La guerre, c'est la conquête des mar-
chés allemands! » En même temps, l'Administration multipliait non seule-
ment les interdictions, mais aussi les formalités de sortie. Nul ne peut prendre
l'engagement de livrer à terme fixe.
Ces prohibitions ont atteint des objets qu'on pouvait croire à l'abri. Au mois
de décembre 1915, il y eut prohibition de sortie des cerneaux, des noix, noi-
settes et amandes. Au mois de janvier 1916, le ministre du Commerce voulut
bien informer la Chambre de Commerce française de Londres qu'elle était levée.
Nos diminutions d'exportations ont porté sur toutes les catégories; pour les
objets fabriqués, elles ont atteint le chiffre de 2 milliards 55 millions; mais il
y a eu des exceptions pour quelques articles, entre autres pour la soie.
L'exportation des tissus de soie et de bourre de soie, y compris les colis pos-
taux, s'est élevée à 336.600.000 francs. Ce chiffre n'a été dépassé qu'en 1907,
où les exportations représentèrent 396.600.000 francs, et en 1913, où elles attei-
gnirent 429 millions de francs. Il dépasse de beaucoup la moyenne décennale.
Nos exportations de tissus de laine, qui étaient de 220 millions en 1913, sont
tombées à 154 millions en 1914 et à 13.500.000 francs en 1915.
L'exportation des tissus de coton, dont la plus grande partie est envoyée dans
nos colonies, a subi les phases suivantes : 1913, 385.500.000 francs ; 1914, 281 mil-
lions; 1915, 152 millions.
Puisque nous ne pouvons plus fournir ce qui est nécessaire à nos colonies,
nous eussions pu rendre un grand service à leurs habitants et, en même temps,
faire un acte agréable à la Grande-Bretagne, en l'autorisant, pendant la guerre,
à leur envoyer des tissus de coton aux mêmes conditions que la France.
Notre exportation de produits chimiques, qui était de 140 millions en 1913,
est tombée à 126 millions en 1914 et à 80.300.000 francs en 1915; mais nos im-
portations de produits chimiques, qui étaient de 105.500.000 francs en 1913, sont
tombées, en 1914, à 82.300.000 francs et se sont relevées à 107.600.000 francs
en 1915 malgré la rupture de nos relations avec l'Allemagne.
Le chiffre de notre commerce en 1915, 1914 et 1913 avec les principaux pays
alliés et neutres a été :
Importalions Exponationi
mS ..1914 1913 1915 1914 1913
Pays alliés.
Millions (le francs Millions de francs
Russie 50,7 318,7 458,4 50,0 59,9 83,2
Angleterre 1.914,3 855.9 1.115,0 862,0 1.162,6 1.453,8
Belgique « » 565,0 » >> 1.155,0
Italie 335,0 173,6 240,5 265,3 215,4 305,8
Pays neutres.
Suisse 169,0 101.8 135,2 254,3 304,8 400,0
Espagne 461,0 133^0 281,6 108,0 112,3 151,2
États-Unis 2.273,0 795,0 895,0 380,3 377,0 422,6
Brésil 189,3 155,0 174,3 42,0 39,0 86,4
République Argenline. 353,4 230,5 369,2 80,8 93,2 199,9
— 191 —
Notre exportation a baissé partout : dans la Grande-Bretagne elle est
tombée de 1 milliard 454 millions à 862 millions de francs; en Italie, de 30&-mil-
lions à 265; en Russie, de 83 millions à 50; en Suisse, de 400 millions à 254;
en Espagne, de 151 à 108; aux États-Unis, de 422 à 380, etc.
Cependant, dans ce dernier pays, nous avons eu une augmentation sérieuse
sur un objet :
En quantité, notre exportation aux États-Unis a passé de 3.827 quintaux en
1913 à 4.440 quintaux en 1914 et à 5.591 en 1915 pour les tissus de soie pure,
de 1.541 à 1.864 et à 2.471 quintaux pour les tissus de soie mélangés; do
173 quintaux à 407 pour les tulles de soie, etc. Il est évident que l'interception
du commerce de l'Allemagne a été un facteur de cette augmentation de nos
exportations aux États-Unis.
Le total des droits à l'importation s'est monté à :
1913. . . 722 millions 1914. . . 580.500.000 1916. . . 871.500.000
La note relative au commerce du mois de janvier 1916 explique qu'il y a un
léger recul sur décembre; mais elle ajoute :
« Le recul n'est qu'apparent; il résulte de ce que les versements de l'inten-
dance pour les denrées et marchandises importées pour le compte de l'armée
sont inégalement répartis sur l'ensemble de l'année et ont été assez faibles au
cours du mois dernier. »
Voilà constatée, une fois de plus, une de nos chinoiseries administratives :
l'intendance importe; elle paie à la douane. Avec quoi? Avec des fonds qui lui
sont fournis par le Trésor. Et où vont les fonds ainsi versés? Ils retournent au
Trésor.
La douane vérifie avec soin les objets importés pour le compte de l'armée,
et pendant qu'elle examine minutieusement et compendieusement s'il faudrait
lui faire payer 1.500 francs ou 3.000 francs sur tel ou tel article, elle fait attendre
indéfiniment les autres importateurs.
II
LE COMMERCE DU ROYAUME-UNI
Dans le Royaume-Uni, le Board of Trade ne donne pas les chiffres des impor-
tations pour le compte de l'État. Les importations sont donc supérieures aux
chiffres ci-dessous.
Voici le tableau du commerce pour les trois dernières années (en millions
de livres sterling) :
1915 |1914 1913
Importations.
Marchandises
Or
Argent
Total. .
Produits britanniques.
Réexportations. . . .
Or ...
Argent
853,7
696,6
768,7
10,8
58,6
59,5
10,5
11,9
14,4
875,1
767,2
842,7
tations.
384,6
430,7
525,2
98,7
95,4
109,5
38,6
30,5
46,0
7,3
10,8
16,0
Total 529,4 567,6 696,9
— 192 —
L'excédent des importations en 1915 a été de £ 345.700.000; cet excédent
comprend £ 10.800.000 d'or, que les protectionnistes doivent inscrire comme
déficit.
Si nods ne prenons que l'excédent des importations de marchandises sur les
exportations et les réexportations et si nous comparons les années 1913 et 1915,
nous trouvons :
1915 1913 Augmentation
millions
Excédent des importations. . 370,3 133,9 236,4
Voici les principaux pays de provenance :
Différence
1915 1914 1913 d* 1915
•ur 1913
Million» de £,
États-Unis 238,0 138,6 141,6 + 96,3
Australie 75,7 59,8 58,4 + 17,3
IndeetCeylan 74,6 51,4 56,2 + 18,4
Argentine 63,9 87,2 42,5 + 21,4
Canada et Terre-Neuve . . 41,2 33,4 31,4 +9,8
Suède 19,8 14,1 14,2 + 5,6
Espagne. 18,9 14,1 14,4 + 4,5
Suisse 15,2 10,0 11,0 +4,2
Norvège 13,7 7,7 7,4 +6,2
Java 12,2 11,6 2,0 + 10,1
Italie 11,3 8,7 8,1 + 3,1
France . 31,5 37,8 46,3 — 14,9
Hollande 23,4 24,3 25,6 — 2,1
Danemark 22,6 25,4 23,8 — 1,2
Russie !.. 21,4 28,0 40,2 — 18,8
Belgique 1,6 16,1 23,4 —21,8
Turquie. 1,1 4,2 5,4 — 4,2
Allemagne » 47,0 80,4 — 80,2
Autriche-Hongrie » 4,4 7,7 — 7,7
Roumanie » 3,3 2,0 — 2,0
On voit que la plupart des neutres n'ont pas à se plaindre de leurs rapports
commerciaux avec la Grande-Bretagne : la Suède, la Norvège, la Suisse, l'Es-
pagne y ont augmenté leurs exportations. Le grand vide dans les importations
de l'Angleterre provient de 1 Allemagne.
La Grande-Bretagne a reçu en 1914 des États-Unis 34 millions de cwts
(50kg 8) (1.727.000 tonnes métriques) de froment, au prix de £ 14.876.000;
en 1915, 41 millions de cwts (2.082.000 tonnes) au prix de £ 26 millions, soit
20 % en plus comme quantité et 80 % en plus comme valeur; de la Répu-
blique Argentine, en 1914, 6.500.000 cwts (330.200 tonnes métriques) pour
£ 2.581.000 et en 1915, 1.200.000 cwts (609.600 tonnes) pour £ 8.613.000,
soit une augmentation de 100 % comme quantité et de plus de 300 % comme
valeur. Les envois du Canada et de l'Australie furent en dessous de la
moyenne.
La République Argentine envoya 44 millions de cwts de maïs (2.235.000
tonnes), au lieu de 28 millions de cwts (1.422.000 tonnes) pour £ 17 millions,
au lieu de £ 8 millions; soit une augmentation en quantité de 57 % et en
valeur de près de 100 %.
- 493 -
Les exportations du Royaume-Uni n'ont augmenté que dans quatre pays :
1915. 1914 1913 En plus
Millions de £,
France 69,7 26,8 28,9 +40,8
Hollande 18,0 13,4 15,2- + 2,6
Danemark 7,8 5,8 5,8 +2,0
Norvège 7,3 6,4 6,1 +1,2
Dans tous les autres pays elles ont diminué.
Les exportations de fer et d'acier ont subi les variations suivantes :
1915 1914 1913
Millions de £,
Navires neufs 1,7 6,9 11,0
Machines 19,2 31,3 37,0
Fer et acier 40,4 41,7 54,3
La Grande-Bretagne n'a pas de bateaux à vendre; elle en manque. 11 est
étonnant qu'elle ait pu exporter autant de 1er et d'acier et de machines. 11 est
probable que la plus grande partie de ces exportations était destinée à ses alliés
pour la guerre.
L'importation du coton en masse fut de 18.641.000 centals (100 livres de
453 grammes) (8.436 tonnes) en 1914, valant £ 55.350.000, et de 26.476.000 cen-
cals (12.000 tonnes) en 1915, valant £ 64.672.000. Sur ces chiffres les États-
Unis comptent, en 1914, pour 12.844.000 centals (5.800 tonnes) et £34.958.000,
et en 1915 pour 20.224.000 centals (16.000 tonnes) et £ 45.580.000.
On parle beaucoup de la possibilité pour une nation de se suffire à elle-même.
Certes, l'Angleterre, avec des colonies et des possessions sur tous les points
du globe, à tous les degrés de latitude et de longitude, paraît plus propre qu'au-
cune autre à réaliser ce postulat. Charles Dilke, quoique libre-échangiste, l'avait
présenté à ses compatriotes dans la Greater Britain. Or voici un fait caracté-
ristique qui prouve que ce n'est pas de ses possessions que la Grande-Bretagne
peut obtenir celle qui, de toutes les matières premières, est la plus importante
pour elle.
'( L'Inde produit 5 milliuns de balles de coton; le Lancashire en consomme
4 millions; mais comment se fait -il que la Grande-Bretagne soit obligée
d'acheter la plus grande partie de son coton aux États-Unis? En réalité, le Lan-
cashire ne consomme que 200.000 balles de coton de l'Inde, 0,50 % de la quan-
tité qui lui est nécessaire. Pourquoi? Parce que le coton de l'Inde est un coton
à fibre courte, « à courte soie », et que l'Angleterre file des numéros de plus en
plus fins, qui nécessitent des cotons à longue fibre, « à longue soie ».
L'exportation des filés de coton a été pendant les trois dernières années :
Livres de 45-! gramm»s Kilogrammes
1913 210.099.000 95.690.000
1911 178.496.000 77.142.000
1915 188.178.000 82.000.000
Les deux principales augmentations de 1915 sur 1914 sont destinées à la
France : 34.593.000 Ib. et à la Hollande : 16.606.000 Ib.
— 194. —
Les principales diminutions viennent de l'Allemagne : 32.446,000 Ib., et
de la Turquie : 5.511.000 Ib. L'exportation du coton en pièces a été de :
Yards
1913
. . . 7.075.000
1914
. . . 5.736.000
1915
. . . i. 748. 000
Les principales augmentations en 1915 sur 1914 ont été de
Yard.
En France
En Egypte
En République Argentine. .
202.584.000
40.849.000
34.194.000
Le tableau annuel des profits et pertes de 100 filatures indique une perte
de £ 150 en moyenne par société. Elles n'auront pas à supporter l'impôt sur les
bénéfices de guerre.
La Grande-Bretagne s'est décidée à déclarer dans VOrder in Council du
mois d'août le coton contrebande de guerre absolue. On croyait que cette
mesure allait provoquer une baisse de prix. Le 21 août, le Midling American
était à 5 s. 42 d., à la fm du mois il avait gagné 1/2 penny par livre et il a
gagné 1 penny en septembre. On peut en conclure que le marché allemand ne lui
fut pas complètement fermé.
Ces chiffres résultent de déclarations faites à la douane britannique et des
pièces à l'appui qui lui ont été remises. Les exportations sont évaluées au prix
Fob (franco bord); les importations au prix Gif (coût, insurance, fret). La
valeur de l'unité de marchandise importée doit excéder d'autant plus celle
de l'unité de marchandise exportée que les frets, cette année, dépassent toutes
les prévisions.
Les prix varient. Par conséquent les valeurs de douane annuelles ne repré-
sentent jamais des quantités identiques. The Economist fait chaque année la
comparaison des valeurs et des quantités entre les deux dernières années.
Voici son calcul pour 1914 et 1915 :
d
Valeur
u commerce
en 1915
Valpur
du commorce
de 1915
aux prix de 1914
Valeur
du cornmcrco
en 1914
Itnpnrtdtions.
381,9
287,3
181,5
853,7
Millions de livres sterling
Aliments, boissons, tubuc.
Matières premières. . . .
Objets fabriqués
309,7
284,6
163,6
297,0
236,5
160,5
Total. . . .
760,9
6^6,5
Exp
ortalions.
Aliments et boissons . . .
Matières premières. . . .
Objets fabriqués
25,0
52,4
292.8
22,3 ^
44,1
272,2
26,9
56,7
^338,6
Total. . . .
Réex}
384,6
)urtation>i.
353,2
430,7
Aliments et boissons . . .
Matières premières. . . .
Objets manufacturés . . .
22,4
54,6
21,8
20,5
56.8
20,6
17.4
53,9
24 , l
Total. . . .
98,8
97,9
95 , 4
Grand total .
1
.337,1
1.212,0
1.222,6
— 195 —
L'augmentation du grand total a été de £ 114.300.000. Mais comme les
prix ont augmenté de £ 125.100.000, il en résulte qu'en réalité le commerce,
non compris les achats de l'État, comme quantité, a diminué de £ 10.800.000,
soit, comme quantité, une diminution de 1 %, et comme valeur, de 10,2 %.
D'après la quantité des exportations la baisse en valeur serait de £ 77.500.000,
mais l'augmentation des prix l'a limitée à £ 46.100.000.
Pour les importations, le prix moyen s'est élevé de 13,4 % et la quantité
a augmenté de 9,3 %, tandis que pour les exportations (prix Fob) le prix s'est
élevé de 7,3 % et la quantité a diminué de 18 %.
Si l'on prend les objets de la première catégorie, aliments, boissons et tabacs,
on constate que la différence entre "£ 381.900.000 et £ 297 millions est de
84.900.000, pour 85 % elle est due à l'augmentation des prix et pour 15 % à
l'augmentation des quantités.
Des quantités importées. . . £. 853.700.000
il faut déduire 98.800.000
réexportées. Il reste donc £ 754.959.000
pour la consommation intérieure, soit, entre les importations et les exporta-
tions, une difîérence de £ 370.312.000.
Le calcul établi par The Economist donne la différence entre les importations
et les exportations au prix de 1914 :
Importations
Réexportations
Reste pour la consommation intérieure.
Exportation des produits britanniques.
Excédent des importations
Commerce total -r 114,4
La comparaison faite de la même manière entre le commerce de 1914 et celui
de 1913 donne les résultats suivants :
Millions de £.
Importations — 71,3
Réexportations — ^14,0
Reste pourla consommation intérieure. ■ — • 57,2
Exportation des produits britanniques. — 95,0
Excédent des importation'^ — 37,8
Millions
de^
-i-
157,
,1
-
3
,3
+
153
,8
—
46,
,0
+
199,
,9
Commerce total — 150,4
L'excédent des importations était de 134 millions en 1913, de 172 millions en
1914 et s'est élevé à 370 millions, soit une augmentation de £ 200 millions;
dans cette augmentation, la hausse des prix représente 154 millions en plus
pour les importations et 46 millions en moins pour les exportations. Les chan-
gements dans les quantités résultent d'une augmentation de £61.800.000 dans
les importations et d'une diminution de £ 77.500.000 dans les exportations.
— 196 —
L'augmentation des prix comptait pour £ 92 millions dans les importations
et réduisait la baisse des exportations de £ 31.400.000. Si les prix avaient
été égaux à ceux de 1914, l'excédent des importations aurait subi une réduc^
tion de £ 60.500.000, ramené à £ 309.800.000.
Les chiffres des exportations ne donnent pas les expéditions faites sur les
divers théâtres de la guerre; ils réduiraient l'excédent des importations; mais
les chiffres des importations pour le compte de la guerre et de la marine ne
sont pas compris non plus dans ces tableaux; de plus, comme ces envois sont
destinés à des Anglais, ils ne diminueraient pas la dette que les Anglais ont à
payer. Toutefois une partie du chiffre des importations est compensée par les
frets payés à des navires anglais.
Comme les Anglais n'ont pas eu, en 1915, de capitaux à placer au dehors, il
résulte pour le pays un embarras de cet excédent d'importations.
Les protectionnistes ne manqueront pas d'en conclure qu'ils ont raison de
déclarer que la balance du commerce est favorable, si les exportations sont
en excédent, et défavorable si ce sont les importations; mais, en état de guerre,
l'Etat achète et consomme, et ses consommations ne se traduisent par aucune
augmentation dans la production. En temps normal, il en est autrement. Cha-
que année les adultes produisent plus qu'ils ne consomment. Au bout de l'an-
née, ils ont augmenté leurs ressources, le capital de la nation. En temps de
guerre, ils consomment plus qu'ils ne produisent et, au bout de l'année, au lieu
qu'il y ait augmentation d'actif, il y a diminution.
Les interventions de l'Etat apportent de profondes perturbations dans le
commerce. Un Order in Council du 3 août interdit l'exportation de la houille,
même dans les pays alliés. L'émotion fut profonde. Quelques jours après le
Foreign Ofïice faisait savoir que cette interdiction d'exportation n'avait pour
but que d'obliger chaque exportateur de se munir de licences spéciales d'expor-
tation pour les pays autres que les possessions britanniques.
D'un autre côté, le Gouvernement anglais voudrait, dans le but d'alléger
le fret et dans l'intérêt du change, restreindre les importations. Il vient de nom-
mer une commission pour diniinuer celle du papier et de la pâte à papier. Est-ce
une réponse à la Suède qui vient d'interdire l'exportation de la pâte à papier?
M. S. P. Philipps, dans une communication à la Royal Society of Arts, a déclaré
que d'ici peu de temps le Canada serait en état de fournir de la pâte à papier
pour le monde entier, et il exprime l'espoir que celle qui en proviendrait
serait exempte de toute restriction. Mais le papier ne sert pas seulement aux
journaux et aux livres, il sert aussi à la fabrication des obus. Lord Burnham
a remarqué que l'industrie du papifjr est une industrie fondamentale à laquelle
étaient liées toutes les autres industries; et cette restriction, faite pour diminuer
les frets, portera préjudice à l'ensemble de l'industrie.
Une commission doit donner des licences autorisant d'en importer une cer-
taine quantité. Le président du Board of Tradc, M. Runciman, lui a écrit de
n'en réduire l'importation que d'un tiers.
Quel sera le résultat de cette mesure?
La pâte de bois et les papiers de toutes sortes ont représenté en 1914 et en
1915, pour chaque année, une importation au-dessous de 12 millions de hundred-
weights, soit de 609.000 tonnés métriques. M. Runciman a déclaré qu'on ne de-
— 197 —
vait en réduire qu'un tiers. L'écunomie de ces transports ne sera donc que de
200.000 tonnes. Ce n'est pas elle qui décongestionnera les transports mari-
times.
III
LE COMMERCE DE LA RUSSIE
D'après le supplément de L'Agence Économique et Financière, le commerce
de la Russie, pendant les dernières années, représente les chiffres suivants :
Exportation Importftioa Balança
Frontière d'Europe.
Milliers de roubles (•)
302.704 624.796
1915 ....
—
322.092
1914 ....
866.104 939.098
— .
72.994
1913 ....
1.420.949 1.220.539
+
200.410
1912 . . . .
1.428.037 1.036.685
Frontière d'Asie.
-L
391.352
1915 . . . .
82.550 423.339
340.789
1914 ....
89.986 158.894
68.908
1913 . . . .
99.185 153.495
54.310
1912 ....
90.760 135.087
44.327
(*) Le rouble = 2^66; le kopeck = 0^37.
On sait le rôle important que joue la récolte des blés dans la vie économique
de la Russie. Voici, d'après le Bulletin de la Chambre de Commerce russe de
Paris, la situation de la récolte des céréales en 1915, que plusieurs ministères,
ceux de l'Intérieur, de l'Agriculture, des Finances, du Commerce et de l'Indus-
trie, dont l'activité touche directement à la vie économique du pays, ont fait
établir par leurs agents locaux. Ces différentes statistiques constatent que
cette récolte a été, en 1915, au-dessus de la moyenne, mais elles n'en apprécient
pas, d'une manière uniforme, la différence. Par exemple, d'après l'enquête
du ministère de 1 '.agriculture, englobant quarante-huit gouvernements, le
total de la récolte a été de 10,6% au-dessus de la moyenne.
""i^""" 1915
1909-1913 —
Millions de pouds (*)
Seigle 1.121 1.375
Froment d'hiver 329 436
Froment d'été 708 715
Orge 557 585
Avoine 737 708
Total 3.452 3.819
(*) Le poud = 16k«380 (6 pouds = 98k«282).
La différence est plus considérable et atteint plus de 14 % d'après l'enquête
faite par les percepteurs d'impôts.
L'enquête du Comité central du ministère de l'Intérieur calcule la quantité
de seigle et de froment d'hiver (après déduction des semences) à 11,4 pouds
par habitant contre 7,4 px)uds en moyenne pendant les années 1910-1914.
1" 8ÉBIB,'57* VOli. N» ti j^
— 198 -
Quant aux stocks visibles, ils ont été (en milliers de pouds)
Dans
le commerce
Chei
1914
le» prodncteura
1/14 août
1914
1/14 octobre
1915
15/28 juillet
1915
15.334
26.161
174.506
181.560
6.377
• 3.773
163.973
129.826
2.431
9.811
43.791
24.925
3.105
17.579
32.655
53.317
Milieu novembre
1914
Milieu août
1915
Milieu novembre
1915
103
140
173
112-117
120-125
140-145
112-115
93-103
136-142
92
110
125
75-80
90-100
95-112
88
106
120
96-100
120-123
145-150
50-55
53-75
73-78
Froment
Seigle
Avoine
Orge
La diminution des stocks du seigle et de l'avoine est la conséquence de la
demande intensive de l'armée.
Malgré une récolte au-dessus de la moyenne et malgré l'arrêt des exporta-
tions qui absorbaient avant la guerre une partie très importante de la produc-
tion, les prix des céréales sont demeurés orientés à la hausse et n'ont cessé de
s'élever. Les voici, en kopecks, par poud.
Froment Yeletz, ghirka. . .
— Kief
— Odessa Oulka . . .
Seigle Yeletz
— SaLraof
Avoine Yeletz
— Kief
Orge Odessa
Le Journal du Commerce et de V Industrie explique la hausse des prix de la
manière suivante :
« Au début de l'été les prix des céréales commencèrent à baisser, mais
le mouvement à la hausse reprit dès qu'il apparut que les prévisions trop
optimistes ne se réaliseraient pas. Les producteurs, dont la situation écono-
mique, sous l'influence de l'interdiction de l'alcool et d'autres facteurs, s'est
beaucoup améliorée, n'ont pas besoin de réaliser immédiatement et se tien-
nent sur la réserve. Ils escomptent une récolte moins abondante en 1916 par
suite de la diminution de la surface ensemencée. Une forte demande de la part
de la meunerie et de la spéculation est aussi un facteur important de hausse. »
Le Congrès des représentants de l'industrie linière en Russie vient d'établir
le rendement probable de la récolte du lin en 1915. En ce qui concerne les
dix-sept gouvernements principaux, cette récolte se présente comme très supé-
rieure à celle do l'année précédente, elle la dépasse en moyenne de 78%.
La récolte du chanvre en 1915 est à peu près égale à ce qu'elle était en 1914.
La statistique de la production métallurgique pendant le premier semestre
de 1915 atteste une diminution importante due à l'arrêt des usines de Pologne,
au défaut de main-d'œuvre et de combustible.
Par comparaison avec le premier semestre de 1914, la production de la fonte
abaissé de 14,5% dans le midi de la Russie; elle est restée stationnaire dans
l'Oural; dans l'ensemble de l'Empire, elle a baissé de 20,2%.
La production des objets mi-fabriqués, en fer et en acier, a baissé de 16,3%
dans le midi do la Russie et de 28,8% dans l'ensemble de l'Empire.
— 199 —
La production des objets finis, en fer et en acier, a baissé de 18,2% dans
le midi de la Russie et de 23,4 % dans l'ensemble de l'Empire. En ce qui concerne
spécialement l'Oural, la production a augmenté, non seulement par compa-
raison avec 1914, mais aussi avec les années précédentes.
Quant à la production polonaise, eUe constituait, pendant le premier semestre
de 1914, 9,1 % de la production totale de la fonte, pour tout l'Empire, 12,2%
des objets mi-fabriqués et 11,7% des objets finis.
Par suite des difficultés de transports et du ralentissement de l'industrie
du bâtiment, les ventes de la fonte et des produits métallurgiques furent en
baisse, malgré l'accroissement des demandes des Administrations de la Guerre
et de la Marine.
Cette baisse des ventes a eu comme conséquence l'augmentation des stocks
de fonte dans une proportion de 14,4%, des objets mi-fabriqués dans une pro-
portion de 20,1 %, et des objets finis de 56,9% pour l'ensemble de l'Empire.
L'importation, surtout celle des machines et appareils en fonte et en acier,
qui se chiffrait pour six mois, les années précédentes, par une dizaine de mil-
lions de pouds, est tombée à quelques centaines de milliers de pouds.
La question des machines agricoles est de première importance pour la
Russie : de 1911 à 1913, les usines russes ont porté leur production à 160 millions
de roubles et l'importation s'est élevée à 170. <•' Mais actuellement, dit le Bulletin
de la Chambre de Commerce russe, l'importation de ces machines en Russie
étant presque nulle et, les usines russes ne pouvant produire la même quantité
que précédemment, la question prend en Russie une tournure assez sérieuse.
On ressent un besoin pressant de ces machines, notamment des moissonneuses
avec jette-javelle automatiques, ainsi que de moissonneuses-lieuses, dont le
stock en Russie s'élève à peine à 15.000 pièces, alors que la consommation
moyenne annuelle, pour les années précédentes, était de 40.000 à 45.000 pièces.
<■<■ Le ministère de l'Agriculture est entré en pourparlers avec les organisations
spéciales d'achat, ainsi qu'avec la Banque et le stock des machines agricoles
pour la campagne prochaine. D'autre part, le ministre de l'Agriculture a déposé
au Conseil des ministres la demande d'un crédit de 5 millions de roubles qui,
en deux ans, doit être employé à l'achat de différentes machines agricoles dans
les pays alliés et neutres. »
La plus grande partie de l'exportation russe se fait par les Dardanelles,
comme le prouve le tableau suivant du commerce russe en 1913 (1) :
Exportations
Milliers Miltiooi
de de
tonnr'S francs
Mor Noire et iikt d'AzolT. 1 1 . 086 1 . 286
Mer Baltique 5.857 1.227
M°r Caspienne 143 77
Mer Blanche 1.506 97
Océan Paciftque .... 61 12
Importât!
ODl
1
Millier»
I
klillioai
ae
de
tonnes
franr»
921
247
.515
1
.299
123
67
128
15
351
183
Totaux 18.653 2.699 9.038 1.811
5.581 1.355 6.316 1.858
Ensemble. . . 24.234 4.054 15.354 3.664
(1) Le Journal des Économistes, l. 46. p. 380 : La Russie et les Dardanelles, par Hoschiller.
C3t article a éLé r3produit dans le voluee ùu i è re auteur : L' EuropedevantConstantinople.
— ^00 —
Plus d'un tiers, comme valear, des exportations russes se font par le Bos-
phore.
Cette voie a été fermée. Arkhangel, d'autre part, esi obstrué une partie de
l'année par les glaces. Cependant, grâce à d'énormes brise-glaces, on a pu
maintenir à peu près le port libre, mais il n'est relié au centre de la Russie
que par un chemin de fer à voie unique.
Le port de Kola, plus au nord, mais baigné par le Gulf-Stream, ne gèle jamais.
Il était depuis longt(^mps question de l'aménager, mais on avait différé. En
1915, on a construit un débarcadère muni de grues pour deux bateaux, des
entrepôts et des bâtiments pour les employés et les ouvriers.
On espérait pouvoir livrer au trafic, en février 1916, une partie du débarca-
dère et des entrepôts : nous espérons que cette prévision est un fait accompli.
Une partie de la voie entre Kola et Petrograd est ouverte au trafic, mais sur-
la partie centrale, entre la baie de Soroka et Kandalaksha, les travaux de la
voie ne pourront être terminés avant la fm de 1917. Par conséquent, pour
assurer la circulation en 1916, on a l'intention d'effectuer par bateau à vapeur
le transport des marchandises entre ces deux points.
La Russie n'a donc eu qu'une seule voie d'accès direct à la mer pendant
toute l'année; c'est Vladivostock et le Transsibérien.
En novembre 1914, les exportations des États-Unis à destination de la
Russie par la voie d'Asie s'élevèrent à $ 2 millions par mois, atteignirent
$ 6 millions en avril et $ 11 millions en mai.
Par la voie d'Europe, elles atteignirent $ 18 millions en juillet.
On répète volontiers que « notre France doit reconquérir dans le commerce
russe la place d'où rAllemagnc nous a chassés »; c'est une de ces métaphores
telles qu'on en prodigue beaucoup sans s'occuper si elles s'accordent avec la
réalité. Les chiffres suivants montrent le développement de nos relations evec
la Russie.
Exportatious de France Importations
en Russie de Russie
(chiffres russes) (chitt'res français)
Francs Francs
1900 .... 83.645.000 231.200.000
1913 .... 151.595.000 461.800.000
L'augmentation de nos exportations en Russie a donc été de 84% et celle
des importations de la Russie en France de 100%.
Nous n'avons donc pas à « reconquérir »; nous avons à continuer le dévelop-
pement de nos rapports avec la Russie. Sans doute celui de l'Allemagne a été
plus considérable; mais nous ne supprimerons pas la position géographique
des deux pays : la Russie ne prohibera pas ses exportations avec l'Allemagne
qui dépassaient en 1912 de I 16 millions de roubles celles qu'elle envoyait dans
le Royaume-Uni.
1 909
1910
1911
1912
Allemagne
Roy.iiimo-lIni
Milli
ons do
rouilles
387,0
288,7
390,5
315,0
490,1
336 , 7
453,7
337,2
— 201 -
IV
LE COMMERCE DU JAPON
Le Japon a bénéficié de la guerre. En 1915, les exportations se sont élevées
à £ 70.830.000, soit une augmentation de £ 11.720.000 ou 16 % sur 1914.
Les importation? ont été de £ 53.242.000, d'où il résulte une diminution de
£ 6.331.000.
L'excédent des exportations sur les importations est de £ 17.588.000; en
1914, l'excédent des importations était de £ 463.000. Les exportations d'or ont
été de £ 4.067.000, les importations de £ 1.463.600.
On dit que le Japon a envoyé de fortes quantités d'or en Russie, mais elles
n'apparaissent pas dans les chiffres de la douane.
V
LE COMMERCE DE L'ITALIE
Je me permets de commencer par un tableau rétrospectif qui montre pour
l'Italie et la France les conséquences de la guerre de tarifs engagée en 1887.
Vous pourrez en trouver les détails dans \e Bilan du protectionnisme en France
de notre collègue M. G. Schelle (1). L'Italie remania en 1887 son tarif dans
an sens de plus en plus protectionniste, « pour montrer, selon la phrase de
M. Luzzati, à l'étranger d'une part, les pointes de fer du tarif général; de
l'autre, le rameau d'olivier des conventions ».
Nous connûmes les pointes de fer; nous relevâmes notre tarif général contre
l'Italie; l'Italie releva le sien. D'après les chiffres de la douane italienne, je
donne le résultat de cette guerre, en plaçant, en regard des chiffres de notre
commerce avec l'Italie, ceux de l'Allemagne et de la Grande-Bretagne.
1888
1886
1S87
1«88
1889
1890
1897
ImportalioDs
de France
d'Allemagne
de Grande-Bretagne
Millions de lire
288,4
119,0
313,5
310,8
129,3
274,6
326,0
165,7
306,3
155,5
144,8
263,9
167,5
156,4
313,7
165,8
140,3
318,9
116,3
157,2
»
De 1887 à 1888, le chiffre de nos importations baissa de 171 millions, soit
de 52%.
Au cours de l'année 1898 eut lieu un arrangement entre la France et
l'Italie, par lequel celle-ci opéra des réductions sur cinquante-deux articles de
(1) Bibliothèque du Libre- Échange (Libr. F. A'can)
— 202 —
son tarif général; mais l'Allemagne avait pris le dessus relativement à la
France.
1899 152,3 193,9 299,5
1900 167,3 203,4 358,7
1901 179,2 205,6 279,3
1902 183,0 221,7 287,2
L'augmentation continua, mais nous ne sommes revenus au chiffre de 1887
qu'en 1911 et pour une seule année. L'Allemagne a pris un dévelo])pement
énorme; mais elle n'a pas éliminé la Grande-Bretagne.
1911 327,2 550,1 509,8
1912 289,6 626,3 577,1
1913 283,3 612,7 591,8
1914 202,0 497,9 506,8
En 1887, les importations de ces trois pays s'élevaient à 798 millions; la
part de la France était de 40 % ; en 1913, elles étaient de 1 milliard 493 millions,
la part de la France était de 19%.
Exportations
en France en Allemagne en Grande-Bretagne
1885 367,1 103,6 71,0
1886 440,6 107,9 71,2
1887 404,8 115,2 78,9
1888 170,3 80,0 116,0
1889 « 164,8 91,4 112,7
1890 160,6 118,6 111,2
1897 116,1 179,2 114,0
Après l'arrangement de 1898 :
1899 201,3 236,1 147,9
1900 168,7 221,4 153,9
1901 174,9 235,0 151,4
1902 168,3 245,9 143,3
Voici maintenant les chiffres pour les quatre années 1911-1914 :
1911 206,1 301,2 222,8
1912 222,6 328,2 264,4
1913 231,5 343,4 260,5
1914 179,4 316,1 311,3
L'Italie n'est pas revenue, dans son commerce avec la France, aux chiffres
d'exportation de 1885-1887; mais elle a trouvé une compensation en Allemagne
et en Angleterre.
En 1887, le total de ses exportations dans les trois pays était de 591 millions
dont 68,5 % en France.
En 1913, il était de 893 millions dont 26,3 % en France.
De 1908 à 1912, année moyenne, l'Italie a importé pour 1 milliard 820 mil-
— 203 —
lions de matières premières et d'objets demi-fabriques, dont 374 millions de
houille, 230 millions de coton, 100 millions de laine, 65 millions de peaux brutes,
130 millions de bois et 24 millions de pâtes de bois.
Naturellement, il y a des projets pour qu'elle se suffise à elle-même; déjà,
en 1861, on avait voulu y pratiquer la culture du coton.
Elle a importé pendant cette période pour 805 millions d'objets fabriqués,
pour 649 millions d'objets d'alimentation.
Elle a exporté pour 592 millions d'objets fabriqués et pour 868 millions
d'objets demi-fabriques, soit pour 1 milliard 460 millions d'objets manufacturés.
La différence entre les importations des matières nécessaires à l'industrie et
celles des objets fabriqués est de 460 millions, mais elle doit être réduite de la
différence des évaluations de la douane à l'importation et à l'exportation.
Dans les importations, les produits dcmi-fabriqués comptent pour 19,2%, les
produits fabriqués pour 19,3%, soit 38,5%, dans les exportations, les premiers
comptent pour 23,5%, les seconds pour 31,8%, soit pour 55,3%.
Le commerce italien est tombé de 6.157.250.000 lire en 1913 à 5 milliards
99 millions de lire en 1914, soit une baissé de 16,5%.
Importations
Millions de lire
o/o
Exportations
Tot«l
Millions de lire
o/o
1913
3.646 )
21
2.512 1
12
6.158
1914
2.882 i
2.218 1
5.100
En noins. . .
764
294
1.058
L'excédent de la valeur de l'importation sur l'exportation, qui, en 1913, était
de 1 milliard 134 millions, a été réduite en 1914 à 664.149.000. Au lieu d'être
de 45% il n'a été que de 30%.
Cette diminution a ramené la valeur de l'importation aux chiffres de 1907
et de 1908, celle de l'exportation aux chiffres de 1911.
La valeur des matières nécessaires à l'industrie a baissé de 318 millions de
francs, parmi lesquels se trouvent 37 millions pour la houille, 139 pour les
matières premières des industries textiles, 44,7 pour les industries métallur-
giques et 24 millions pour les industries chimiques.
La diminution des objets fabriqués a été de 179.700.000, dont 33 millions
de produits métallurgiques, 43.800.000 francs de produits d'industrie méca-
nique et de constructions navales, 25.700.000 de pierres précieuses travaillées
et de travaux d'or et d'argent, 11.600.000 de l'industrie lainière.
La diminution de l'importation des objet? d'alimentation a compté pour
224 millions.
L'Italie était neutre en 1914. On a comparé ses pertes avec celles des autres
neutres, et voici les résultats de cette comparaison.
Ses exportations ont diminué de 12 % ; les exportations de l'Espagne de 18 % j
celles de la Suisse de 14 % .
Pour les belligérants, celles de l'Angleterre ont baissé de 18%; celles de
la France et de l'Autriche, presque 33 %, celles de la Russie 39%.
La diminution des importations a été pour l'Italie de 20%, pour l'Espagne
de 23%.
— 204 —
Voici les résultats pour les onze premiers mois de 1915 :
1914
1915
Total
ImportatioD*
Exportatiopg
4.736
2.714
2.021
4.950
2.913
2.036
Voici par pays les importations et les exportations pendant les huit premiers
mois :
Autriche-Hongrie. . . .
Allemagne
France
Grande-Bretagne. . . .
Argentine
Suisse
États-Uni.s d'Amérique.
Il
mporUtions
du
ler janvier au l'
r septembra
1914
1915
184,3
33,7
411,4
151,3
179,3
111,0
398,2
323,3
28,5
254,2
54,5
51,1
330,8
842,3
ExportatioDt
du
1er jauTierau lei
^ septembre
1914
1915
142,4
104,9
411,4
184,0
144,1
297,2
224,7
252,6
170,4
208,2
92,1
81,0
200,6
188,9
Différenct
)
_
150,
,9
—
261,
,1
—
68,
.3
—
75.
,2
+
225,
,7
— ,
3,
,4
+
511,
,5
Différend
1
_
37,
,5
227,
,3
+
153,
,1
+
27,
,9
+
37,
,8
—
11
,1
11
,7
Autriche-Hongrie. . . .
Allemagne
France
Grande-Bretagne. . . .
Argentine
Suisse
États-Unis d'Amérique.
Les importations venant de la République Argentine et des États-Unis ont
seules augmenté; les exportations en France, en Grande-Bretagne et dans la
République Argentine ont augmenté. Les exportations destinées à l'Autriche-
Hongrie en 1915 figurent encore dans les chiffres de douane. Il est vrai que
l'Italie n'a déclaré la guerre à l'Autriche- Hongrie que le 23 mai. Les expor-
tations de l'Italie ont augmenté en France pour un gros chiffre, dans la Grande-
Bretagne et dans la République Argentine.
VI
LE COMMERCE DES ÉTATS-UNIS
Les États-Unis ont un rôle prépondérant parmi les neutres comme fournis-
seurs et comme acheteurs des belligérants et des autres neutres.
Pour base de cette étude, je prends l'année fiscale qui finit au 30 juin en
me servant comme guide du travail de M. Lewis C. Sorrel, paru dans le numéro
de janvier 1916 du Journal of Political Economy de l'Université de Chicago;
il est intitulé : Dislocations in tJw foreign trade of the United States resulting
froin the European War.
- 205
Total du commerce des Etats-Unis.
(Années fiscales finissant le 30 juin.)
Commerce spécial.
1911 1912 1913
1914
1915
Millions de dollars (*)
Exportations. .
Importations. .
2.093,5 2.170,3 2.428,5
1.527,2 1.653,2 1.813,0
2
1
.329,6
.893,9
2.716,0
1.674,1
(*) Le dollar au pair = 5' 18.
Les exportations aux belligérants alliés donnent les chiffres suivants
1913-1914 1914-1915
France
Grande-Bretagne.
Russie (d'Europe)
Russie (d'Asie). .
146,1
369,3
597,1
911,7
25,3
37,4
1,1
23,3
Aux empires du Centre :
Autriche-Hongrie 23,3 1,2
Allen^agne 331,6 28,8
Les exportations directes des États-Unis à l'Allemagne tombèrent aussitôt
après la guerre. En juillet 1914, elles étaient de 15 millions de dollars; au mois
d'août elles furent réduites à 60.000, à zéro en septembre. Elles se sont rele-
vées à 6.300.000 dollars en janvier 1915, 4.900.000 en février 1915, puis elles
sont retombées à des chiffres insignifiants. En Autriche-Hongrie elles ne
comptent pas.
Les exportations en Belgique, à peu près nulles du 1^*" août 1914 jusqu'en
janvier 1915, donnent, à partir de cette date, les chiffres suivants par mois :
1915 1915
Million» de dollars Millions de dollars
Janvier 1,9 Juin 1,5
Février 3,3 Juillet 0,7
Mars 2,6 Août 1,4
Avril 1,4 S9ptembre 2,3
Mai 0,8
En 1914, les chiffres des exportations en France et dans la Grande-Bretagne,
pendant les mois d'août à novembre inclusivement, restèrent à peu près égaux
aux chiffres des années précédentes :
Août . . .
Septembre.
Octobre. .
Novembre.
France
Grai
1913
nde-Bi
retagnu
1913
1914
1914
—
—
—
—
En mi
illions
de
dollars
Kn mi
liions
de dollar»
10,7
7,4
38,3
32,9
17.5
19,0
58,4
41,8
26,1
17,0
70,9
72,4
19,1
20,8
66,7
69,5
— 206 —
Mais, à partir de décembre, la hausse atteint les chiffres suivants :
France i Graude-Bretairne
I „ ,„ 'il .
1913-1914 1914-1915 1913-1914 1914-1915
Décembre. . . . 18,3 37,5 64,0 83,8
Janvier
Février
Mars
Avril
Mai
Juin
Juillet
L'augmentation d'exportation aux pays neutres a été considérable.
Danemark.
Grèce. . .
Hollande. .
Norvège .
Suède. . .
11,5
34,3
60,1
99,7
11,7
41,9
49,5
101,7
13,5
40,6
43,8
93,3
8,8
51,6
36,5
94,3
9, fi
49,7
37,7
98,6
6,8
43,1
36,4
88,1
5,1
43,0
34,4
84,3
1912-1913
1914-1915
Millions
de dollar!
18,6
79,8
1,2
23,4
125,9
143,2
8,3
39,0
12,1
78,2
Totaux .... 166,1 363,6
Cette augmentation des importations dans les pays neutres Scandinaves et
en Hollande a-t-elle pour destination réelle l'Empire allemand ?
Cette augmentation représente 175.300.000 dollars, par conséquent elle reste
inférieure de 156 millions de dollars aux chiffres des exportations américaines
en 1912-1913 à l'Allemagne. En admettant que ces 175.300.000 dollars de mar-
chandises soient allées à l'Allemagne, le déiicit serait encore de moitié.
Mais ces chiffres indiquent les sorties des Etats-Unis; ils n'indiquent pas les
entrées en Allemagne. Le 26 janvier 1916, à la Chambre des Communes, Sir
Edward Grey faisait observer que quantité des objets auxquels ils se rappor-
taient nç sont jamais arrivés dans les ports des pays neutres; ils sont dans les
ports anglais soumis aux décisions de la Cour des Prises.
Tin journal avait dit que les exportations de froment des Etats-llnis à la
Norvège, la Suède, au Danemark, à la Hollande qui, pendant les dix premiers
mois de 1913, étaient de 19 millions de bushels (1), -étaient montées pour la
même période en 1915 à 50 millions do bushels, soit 31 millions en plus destinés
à l'Allemagne.
Toutefois ce chiffre de 50 millions est donné sous le nom de « autres pays »
dans les tableaux des États-Unis; et « les autres pays » représentent, en plus
des pays déjà nommés, l'Espagne, la Grèce, Malte, qui n'ont pas absorbé pour
moins de 23 millions de bushels.
Les blés d'Amérique y remplacent les blés qu'ils recevaient de Russie dans
les années normales.
Restent 8 millions de bushels en excédent; mais des arrangements spéciaux
(1) ae^KSô.
— 207 —
ont permis aux États-Unis de ravitailler la population belge et celle des dépar-
tements envahis en France. L'excédent des importations dans les pays Scandi-
naves et en Hollande disparaît.
On a dit aussi qu'ils avaient importé en excédent 3.700.000 barils de farine;
mais il faut en enlever 1.400.000 qui ont été pris par la France, 250.000 par
l'Italie, 1 million de barils destinés au ravitaillement de la Belgique. L'augmen-
tation de l'importation des trois pays Scandinaves est ainsi réduite à 700.000
barils; et, étant donné le défaut de la récolte en 1914, « on ne peut considérer,
dit Sir Edward Grey, cette augmentation d'importation comme excessive ».
Quand on étudie par mois le développement des importations des pays Scan-
dinaves et des neutres, on constate trois périodes. Pendant les trois premiers
mois de la guerre, leurs importations n'augmentent pas et sont plutôt en recul.
Mais, de novembre à mars, elles augmentent d'une manière anormale; à partir
de mars, elles baissent :
Hollande Danemark NorTège Suède
1914 Décembre 12,4 8,0 3,0 7,9
1915 Janvier 14,5 6,5 4,1 9,8
— Février 18,0 10,6 7,8 13,6
— Mars 23,3 11,5 4,9 18,3
— Avril 20,7 7,4 3,4 5,9
— Mai 12,9 4,9 2,0 4,3
— Juin 7,6 3,8 1,0 2,0
— Juillet 4,5 » » »
Il n'est pas téméraire de supposer que l'énorme augmentation à partir de
décembre était le résultat de ravitaillements fournis à l'Allemagne; mais la
Grande-Bretagne édicta son Order in Council du 11 mars 1915 dont l'article 3
stipule « que tout navire marchand, à partir du 1*^^" mars, en route pour un
port autre qu'un port allemand, qui transporte des marchandises à destination
d'un pays ennemi, peut être requis de décharger ses marchandises dans un
port britannique ou allié; et, si elles ne sont pas réquisitionnées pour le compte
de Sa Majesté, 'elles seront vendues par la Cour des Prises qui en percevra le
prix, dont elle disposera au mieux (1) ».
Quoique cet Order in Council n'ai^ pas empêché toute contrebande, les
chiffres que je viens de donner prouvent qu'il produisit un effet appréciable.
Il suffit de comparer les importations en novembre 1914, mois qui précéda
la grande hausse, et en novembre 1915 pour en être convaincu.
Hollande .
Danemark.
Norvège. .
Suède. . ,
Novembre
I91S
1914
Millions de
dollars
5,9
7,0
5,2
13,0
4,9
3,7
5,6
7,5
(1) Voir Journal des Économistes du 15 février : Le commerce maritime et les neutres, par
Yves GuYOT.
- 208 -
Dans ces quatre pays, il y a eu une diminution sensible des importations;
et en novembre 1914, comme on peut le vérifier par les chiffres précédents, le
grand afflux des importations américaines ne s'y était pas encore produit.
Quels sont les changements, résultant de la guerre, apportés dans la nature
des exportations des Etats-Unis?
Si nous comparons les cinq années fiscales finissant le 30 juin, nous trouvons
îes chiffres suivants :
Augmentations.
1911 1912 1913 1914 191S
Millions de dollara
(5rea^sf«//,9) Objets (raliincntaliou . . 124,9 123,9 211,0 465,3 573,8
Pont le froment 22,0 28,4 89,0 87,9 S.".3,5
Viande et produits de la laiterie. ... 149,3 156,2 153,8 146,2 220,0
Cuirs et' chaussures 53,6 60,7 63,8 57,5 120,7
Automobiles 15,5 25,6 31,2 33,1 68,1
Cotons manufacturés 40,8 50,7 53,7 51,4 71,9
Lainages 2,2 3,2 4,4 4,7 27,3
Diminutions.
Coton en masse 585,3 565,8 547,3 610,4 376,2
Fer et acier 222,7 259,7 304,6 251,^ 225,8
Bois et objr-ts en bois 2,2 3,2 4,4 0,4 21,2
Les exportations de fer et d'acier ont été inférieures de 25 % à ce qu'elles
ont été en 1912-1913. Mais la baisse n'a pas persisté. Au cours de l'année 19-15,
la consommation du coton pour explosifs n'a pas cessé d'augmenter. On estime
qu'elle a absorbé, aux États-Unis et au dehors, 3 millions de balles. Il en est
résulté à l'exportation 453 millions de kilos en plus qu'en 1914, chiffre presque
égal à celui de 1913. Les prix varient. Bas au commencement de 1915, ils étaient,
en décembre 1915, de 4,3 cents par livre (453 gr.) de plus que ceux du même
mois en 1914 et étaient à peine inférieurs à la moyenne de 1913. La demande
avait diminué avant la guerre. Dans les premiers six mois de 1914, elle avait
été inférieure à celle de toutes les années précédentes. Cette diminution aug-
menta au commencement de la guerre. En août et septembre les exportations
étaient de 50 % au-dessous de ce qu'elles étaient en 1913. La reprise ne com-
mence qu'en janvier 1915, quand les exportations remontent aux chiffres de
1913. Cette augmentation a continué et, à la fin de l'année 1915, on pouvait
considérer qu'elles dépassaient la normale de 50 %.
Sur 19 groupes de marchandises exportées qui ont subi la répercussion de
la guerre, 5 ont éprouvé une perte de 381 millions de dollars, dans laquelle la
perte sur le coton en masse compte pour 234 millions; les 13 autres ont gagné
809.50.0.000 dollars sur 1913-1914. Les objets d'alimentation comptent à
eux seuls pour 506 millions de dollars.
Au point de vue des importations, les modilications très nombreuses ont
porté sur une quantité d'objets, pour des chiffres très faibles. Il y a eu dimi-
nution sur quantité d'objets et augmentation sur les quatre groupes sui-
vants : le caoutchouc, le sucre, la laine en masse, la viande et les produits de
la laiterie et les peaux. Ces quatre groupes ont représenté sur 1913-1914 une..
— 209 —
augmentation de 112.500.000 dollars, dont 72.300.000 pour le sucre, 15.100.000
pour la laine. Pour les sucres, l'augmentation ne vient pas des quantités, mais
des prix.
Pendant les sept mois qui se sont écoulés du 30 juin 1915 au 31 janvier
1916, la différence entre les exportations et les importations a encore aug-
menté.
1913-1914.
1914-1915.
.1915-1916.
nportations
Exportations
Eicédeut
des exportations
Millions de dollars
883,7
1.521,8
698 , 0
930 . 5
1 . 334 , 7
404,1
.097,0
2.181,3
1.
.084,3
Voici les chiffres pour les douze mois comprenant
Janvier Février-décembre ImporlalionB Exportations Excédent des exportations
Millions de dollars
1914
1913
1 . 600 , 2
2.464,0
863,8
1915
1914
1.756,7
2.187,4
430,7
1916
1915
1.840,1
3 . 606 , 2
1.766,2
Jamais l'excédent des exportations, en douze mois, n'avait atteint un pareil
chiffre.
Cette différence entre les exportations et les importations enlève un argu-
ment aux protectionnistes pour engager, pendant la campagne présidentielle
qui vient de s'ouvrir, la question du relèvement des droits de douane. Cepen-
dant ils ont commencé une agitation, en mettant à profit les inquiétudes qui
résultent des transpositions d'industries qu'indique le titre de l'article auquel
je me suis référé. Mais, dans un discours tenu le 23 janvier au Republican Club
de New-York, M. Jacob H. Schiff disait : c Rien-ne peut arrêter le développe-
ment de notre prospérité, si ce n'est la renaissance d'une agitation protection-
niste dans la nouvelle campagne présidentielle. « Du reste, il en prévoyait
l'échec. J'ajoute que les Américains qui réfléchissent trouvent que « la balance
du commerce leur est beaucoup trop favorable (1) ».
VII
LE COMMERCE DE LA SUISSE
La Suisse est entourée complètement par les belligérants depuis le 23 mai,
date où l'Italie est entrée en guerre. Elle ne peut s'approvisionner que par leur
concours. Si elle veut de la houille, du sucre et de l'alcool, elle doit s'adresser
à l'Allemagne et à l'Autriche- Hongrie; si elle veut du blé, elle ne peut l'obtenir
que de la France.
D'après une étude de notre collègue M. D. Bellet, La France et la Suisse dans
leurs relations d'affaires, publiée par la Bibliothèque Universelle de Lausanne
(1) Voir dans le Journal des Économistes du 15 avril : Les lendemains de la paix. Les
Etats-Unis et leur commerce.
— 210 —
en janvier et février 1916, voici la répercussion qu'a eue la guerre sur nos
échanges avec la Suisse.
Les exportations de France en Suisse accusent une diminution formidable;
elle s'explique par les besoins intenses de la France, et aussi par le ralentisse-
ment, non moins intense malheureusement, d'une foule d'industries produc-
trices. Au point de vue alimentaire, par exemple, l'introduction en Suisse des
volailles, gibiers, etc., a baissé de 25.000 à beaucoup moins de 19.000 quintaux;
pour le lait, le beurre, le fromage, qui s'importent également en Suisse, l'abais-
sement est bien plus fort, puisque nous relevons les chiffres caractéristiques
de 47.000 et de 18.600 quintaux. Pour les pommes de terre, les légumes secs
et leurs farines, la comparaison est typique, puisqu'on tombe de 138.000 à moins
de 12.000 quintaux; mais il faut songer que 1912 était exceptionnel à cet égard,
car 1913 n'a accusé l'importation en Suisse que de 33.000 quintaux de ces pro-
duits; pour les fruits de table, on est descendu de 123.000 à 84.000 quintaux;
pour les sucres bruts ou raffinés, de 193.000 à 33.000; il ebt vrai qu'ici aussi
1912 fournissait un chiffre exceptionnel : l'importation correspondante en 1913
n'a été que de 75.000 quintaux de produits français. Les légumes frais, salés
ou conservés ne se sont plus introduits que pour 128.000 quintaux au lieu de
165.000 en 1912; les fourrages et sons pour 641.000 au lieu de 837.000; les tour-
teaux et drèches, qui jouent un rôle si important dans l'alimentation du bétail,
pour 30.000 au lieu de 184.000 quintaux. Le commerce d'exportation en Suisse
des vins français compté par la douane française est descendu de son côté de
220.000 à 105.000 hectolitres.
Le déficit a été aussi sensible, peut-être davantage, à certains égards, pour
les matières premières et les produits divers nécessaires à l'alimentation nor-
male des industries suisses. En première ligne vient le combustible minéral, qui
s'est introduit pour 1.610.000 quintaux métriques au lieu de 2.731.000 en 1912.
Pour les fontes, fers, aciers, les deux chiffres ont été de 356.000 et de 670.000;
de 28.000 et de 61.000 pour le cuivre; de 19.000 et de 38.000 pour les machines
et mécaniquer3, que la Suisse achète volontiers en France tout en lui en vendant
d'autres; de 28.000 et de 53.000 pour les outils et ouvrages en métaux; de 16.000
et de 26.000 pour les laines et déchets de laine; de 28.000 et de 38.000 pour la
soie et la bourre de soie.
Cette longue énumération nous permet de nous rendre compte des souffrances
véritables que la Suisse a subies du fait de la guerre et de la diminution de ses
relations commerciales avec la France. Cela contribue à accuser l'importance
de ces relations dans la vie économique de la Suisse, et nous laisse pressentir
l'importance encore plus grande qu'elles peuvent prendre, si l'on sait les diriger
dans la bonne voie. C'est ce qu'un journal populaire suisse, La Coopération,
disait fort bien, il y a peu de temps : « Si, d'une part, l'importation du charbon
et du sucre provenant d'Allemagne et d'Autriche nous» est indispensable,
d'autre part, les matières premières et les vivres provenant des Etats de la
Quadruple Entente ne nous sont pas moins nécessaires. » Un autre journal
suisse, La Correspondance, organe de la Ligue Suisse pour rabaissement du prix
de la vie, a établi au sujet du ravitaillement de la Suisse en temps de guerre — ^
importaJ,ion des denrées alimentaires — une répartition assez curieuse d'après
les pays d'origine. Il constate que, pour les céréales et légumineuses, l'impor-
— 211 —
tation de 1914, par rapport à celle de 1913, n'a été que de 79 % ; la proportion
correspondante est de 68 pour les aliments d'origine animale, de 55 environ
pour les autres comestibles, de 67 et plus pour les animaux, de 95 poiu* les
denrées coloniales; c'est seulement pour les fruits et les légumes que l'on est
demeuré au même chiffre. Il a étudié plus spécialement le quatrième trimestre
de 1914, comparé à la période correspondante de 1913, parce qu'il considère
qu'à ce moment le commerce avait déjà commencé de s'adapter à de nouvelles
conditions d'existence, et que prendre l'ensemble de l'année 1914 c'est con-
fondre une période influencée par la guerre avec une autre qui ne l'était point.
Pendant le quatrième trimestre de 1914, les puissances de la Quadruple En-
tente ont fourni 26 % de l'importation totale des céréales et légumineuses
au lieu de 36 en 1913; 29 % de fruits et légumes au lieu de 38; 3,70 % environ
de denrées coloniales au lieu de plus de 9; 77 % d'aliments d'origine animale
au lieu de 54; 97 % d'animaux au lieu de 86. L'Autriche et l'Allemagne ont
participé pour 82 % à l'introduction des denrées coloniales au lieu de 61,
pour 47 % au lieu de 44 en comestibles d'origine non animale; mais il y a eu
diminution formidable pour les céréales et légumineuses, 1,40 % au lieu de 25;
pour les fruits et légumes, 9 % environ au lieu de 55 ; pour les aliments d'ori-
gine animale, moins de 5 % au lieu de 20; pour les animaux, 3 % au lieu de 14.
Les différences respectives ont été comblées par les États-l'nis, qui sont par
exemple arrivés à introduire, durant le quatrième trimestre de 1914, 59 % des
céréales et légumineuses importées, au lieu de 13 durant la période corres-
pondante de 1913.
Pareilles transformations n'ont pas été sans faire souffrir cruellement la
population suisse. Pour le sucre, en particulier, il s'est produit une véritable
disette.
L'Administration française a très grand peur que la Suisse ne serve de couloir
pour ravitailler les empires du Centre ou pour écouler leurs produits. Elle multi-
plie les formalités et elle montre des méfiances extraordinaires. Le Temps a
publié une lettre de M. Eugène Thibault, du 30 janvier, racontant qu'un Fran-
çais, en traitement à Leysin, pour augmenter ses ressources, avait eu l'idée
d'envoyer à un mandataire des HaHes six caisses d'escargots. Quelques jours
après, la douane de Bellegarde l'informe qu'il doit produire un certificat d'ori-
gine, visé par le consal de Bâle, sinon l'expédition n'aura pas lieu. Notre homme
envoie aussitôt le certificat demandé. Mais le Bureau de la douane conteste
alors l'origine des escargots, et il annonce à M. F... que des échantillons prélevés
viennent d'être envoyés, aux fins d'expertise, à une commission compétente.
La Commission se réunit trois fois, et elle confie à un naturaliste le soin de
-rechercher la nationalité des gastéropodes suspects. Le naturaliste reconnut parmi
eux des allemands, des autrichiens, des français et des suisses, avec prédomi-
nance de sujets allemands! M. F..., expéditeur infortuné, fut invité par la
gare de Bellegarde à consigner la valeur de la marchandise et à verser 625 francs
d'amende. Ce n'est pas tout. A Paris, la Direction générale des Douanes elle-
même écrivit à M. Eugène Vars, président de la Chambre de Commerce
française à Genève, « au sujet d'escargots reconnus d'origine allemande ou
autrichienne, qu'aux termes de la loi les décisions arbitrales rendues par le
comité d'expertise légale sont définitwes et sans appel ».
— 212 —
Au mois de septembre 1915, le Conseil fédéral a créé mie société suisse de
surveillance économique (S. S. S.), « chargée d'importer des matières premières,
des produits finis ou à demi finis, pour le compte de tiers et pour livrer ces pro-
duits aux fins d'être employés ou travaillés en Suisse, aux conditions aux-
quelles est soumise la marchandise. Elle n'est pas autorisée à faire du com-
merce pour son propre compte. Elle ne recherche pas de bénéfices ».
Mais, par une lettre du 19 janvier 1916, la Chambre de Commerce de Genève
en a demandé la suppression, en dénonçant les « entraves que la création de la
S. S, S. apporte au commerce :
v( 1° Que ces entraves ont, d'une manière générale, pour résultat de faciliter
le commerce de nos ennemis avec la Suisse, au détriment du commerce français;
« 2° Que cette facilitation est la conséquence forcée des retards énormes
apportés dans l'expédition et dans la livraison des marchandises expédiées
de France, retards causés par la multiplicité des formalités imposées, d'une
part, et, d'autre part, dans le flottement persistant dans l'organisation d'une
institution qui aurait dû fonctionner normalement depuis le 16 novembre 191.5
et qui, à l'heure qu'il est, n'a pu être mise en état de rendre les services que l'on
espérait, si tant est qu'elle pouvait en rendre;
« 3^ Que le petit commerce est irrémédiablement frappé et mis, par suite
de l'impossibilité où il est de faire partie des syndicats et de supporter les
charges que son entrée dans ces syndicats lui imposerait, dans l'alternative ou
de ne pouvoir faire face à ses affaires, ou de se fournir chez nos ennemis;
« 4° Que cette nécessité de se fournir chez nos ennemis est également imposée
au grand commerce suisse;
« 5° Qu'en ce qui concerne les maisons françaises, elles sont acculées à l'obli-
gation monstrueuse, si elles entrent dans les syndicats, de se trouver en rapports
avec des maisons appartenant à des nations ennemies et d'encourir même les
conséquences d'une solidarité pécuniaire avec ces maisons, alors que la loi
du 4 avril 1915 interdit ces rapports à tout Français, avec pour sanction des
conséquences pénales graves. »
VIII
LE COMMERCE DE L'ALLEMAGNE
Quel a été depuis la guerre le commerce de ^Allemagne? Quel est celui de
l'Autriche-Hongrie ?
Nous pouvons savoir ce que la Grande-Bretagne, la France, la Russie ne leur
envoient pas et ne leur achètent pas.
Voici ce que représentait ce commerce en 1913, d'après les statistiques alle-
mandes :
Imporlations Exportation.
Allemagne d'Allemapi.
UillioDs de marks
France 584,2 ^ ' 789,9 '
GraïKle-Bretiigne 876,1 1.438,2
Russie 1.424,6 880.0
Totaux .... 2.884,9 3.108,1
— 213 —
Le total des importations en 1913 était de 10 milliards 770 millions de marks
et celui des exportations de 10 milliards 96 millions de marks; relativement
aux importations, c'est donc une diminution de 27,7 % et aux exportations de
30,8 %.
La National City Bank vient de dresser une table montrant le total des im-
portations et des exportations des Etats-Unis avec l'Allemagne pour les dix
mois finissant en octobre :
Je donne, d'après le Times, les cbifîres en livres sterling :
1915 1914 1913
Milliers de £
Importations 8,194 25.757 30.336
Exportations 2.357 31.212 54.129
Le commerce de l'Allemagne et des Etats-Unis représentait en 1913
£ 84.405.000; en 1915, il est tombé à £ 10.551.000, soit une différence en moins
de £ 73.914.000 ou de 87,5 %.
Voici les principaux objets reçus aux Etats-Unis :
Couleurs et teinture
Dentelle de coton
Tissus .• • •
Faïences et porcelaises
Gants
Fourrures
Livres et cartes . .
Le tableau compte encore £ 123.000 de broderies et de soies; mais, comme
en 1913, l'Allemagne n'en avait expédié que pour £ 27.000 et en 1914 £ 28.000,
ce chiffre est invraisemblable.
~ La seule importation importante des États-Unis en Allemagne est le coton
en masse. La voici en quantités :
1915 1914 1913
Mille livres (de 453 er)
2.135 13.634^ 22^411
Les autres importations : maïs, automobiles, engrais, lard, saindoux, ne re-
présentent chacune que quelques milliers de livres sterling.
Relativement à l'importation des céréales en Allemagne et en Autriche-
Hongrie, nous ne trouvons pas de renseignements dans le Bulletin de V Institut
international d'' agriculture de Rome, quoiqu'il ait établi un bureau en Suisse
pour continuer ses relations avec les empires du Centre.
Dans son Bulletin de février 1916, il donne :
Milliers d« £,
446
780
949
319
840
976
483
883
474
313
579
669
318
522
596
110
343
340
93
184
216
Alletna^D*
1915 1913-1914
Uoyeuns
des années
1908-1909
• 11912-1913
Mille quintaux
Production du froment. . 39.719 46.559 39.623
ire SKBIB. 57« VOL. — K» 6
— 214 —
L'importation a été de 23.610.000 quintaux pendant la moyenne quinquen-
nale, de 24 millions d'août 1913 à juin 1914. A partir de cette date, il n'y a
pas de renseignements.
La production de la Hongrie a été, pendant la période de 1908 à 1913, en
moyenne de 46 millions de quintaux; en 1913-1914, de 41 millions et en
1914-1915 de 28.600.000 quintaux.
Son exportation avait été pendant la période quinquennale de 3.969.000
quintaux, d'août 1913 à juillet 1914 de 4.439.000 quintaux, et d'août à no-
vembre 1914 de 335.000 quintaux.
Quant à la RoumEinie, dont la production était de 23 millions de quintaux
pendant la période quinquennale et l'exportation moyenne de 13.500.000,
sa production ne fut que de 12.500.000 quintaux en 1914, son exportation n'est
évaluée qu'à 668.000 quintaux; pour l'année 1915-1916, sa production est
estimée à 24.436.000 quintaux, mais, jusqu'au mois de novembre, son expor-
tation n'aurait été que de 140.000 quintaux.
Il est très difficile de savoir dans quelle mesure la Roumanie et la Bulgarie
ont contribué au ravitaillement de l'Allemagne et de l'Autriche- Hongrie en
froment.
Les chemins de fer hongrois à voie unique n'ont pu faire de grands trans-
ports de blé : la victoire sur la Serbie rendait libre la voie du Danube,
qui peut surtout être utilisée après les périodes de glaces et de brouillards.
Mais l'Allemagne et l'Autriche- Hongrie ayant créé un monopole d'achat, le
Gouvernement roumain créa un monopole d'exportation qui éleva les prix
d'exportation au double des prix intérieurs. Les empires du Centre ache-
tèrent cependant 50.000 wagons de blé de 10 tonnes chacun; mais l'Angle-
terre en acheta à son tour 80.000. Ces deux achats représenteraient plus de la
moitié de sa production et la moyenne quinquennale de ses exportations de
1908 à 1913.
En Allemagne et, par répercussion, dans les pays alliés, on s'était fait de
grandes illusions sur les ressources que pouvaient produire l'alliance de la Bul-
garie et de la Turquie aux empires du Centre.
La moyenne de la production de la Bulgarie en froment de 1908-1909 à
1912-1913 a été de 1.210.000 tonnes, son exportation de 282.000 tonnes. Il
est vrai qu'en temps normal la Bulgarie exporte pour 7 à 8 millions de francs
d'essence de rose.
Quant à la Turquie d'Europe et à la Turquie d'Asie, on n'a de statistique de
la production du blé que pour 1910-1911. Elle se serait élevée en Europe à
688.000 tonnes et à 3.800.000 tonnes en Asie. Mais si les Turcs ont à peine de
blé à consommer, ils ne peuvent en donner aux autres, et actuellement la famine
règne à Constantinople.
Quant à la Serbie, en temps normal elle aurait pu fournir quelques milliers
de porcs. Lo « guerre des cochons » en 1905 est un des épisodes caractéris-
tiques des conflits balkaniques. En 1905, la Serbie et la Bulgarie ayant conclu
une sorte d'union douanière, l'Autriche-Hongrie ferma ses frontières aux porcs
serbes, dont l'exportation s'élevait en moyenne à 135.000 pour une valeur
dé 15 millions de francs. C'était la ruine ou la sujétion; heureusement qu'un
Français, M.Bigeon, de Bordeaux, s'engagea à acheter 160.000 porcs abattus
— 215 —
par an : la Serbie fut affranchie de l'Autriche, put faire un emprunt à Paris et
acheter des canons au Creusot (1).
Du côté des Balkans, les empires du Centre ne peuvent donc rien retenir
au point de vue de l'alimentation.
Il y a le pétrole de Roumanie, dont la production s'élève à 140.000 tonnes par
mois. La politique de la Roumanie a subi certaines variations à cet égard.
L'Allemagne manque de cuivre : on avait beaucoup parlé de la conquête
de la mine de cuivre de Bor, appartenant à des Français et située en Serbie.
Elle produisait 8.000 tonnes par an; mais ses installations ont été détruites
avant que les Allemands aient pu en prendre possession, et le traitement de
son minerai est difficile. Ce n'est pas là une ressource.
En octobre 1915, l'Allemagne avait produit 1.215.000 tonnes d'acier, et, en
novembre, 1.192.000 tonnes, dont respectivement 690.000 et 688.500 tonnes
de la province du Rhin et de la Westphalie.
Un Allemand, le D^ R.-J, Oberfohren, y écrit au Journal of Commerce, de New-
York, une lettre qui a paru dans le numéro du 9 février 1916.
Il a pour but de montrer que le blocus des Alliés ne prive de rien l'Empire
allemand.
Le cuivre? Dans le premier trimestre de 1914, l'Allemagne en avait importé
42.000 tonnes et on peut remplacer le cuivre par le zinc, l'aluminium, le fer et
l'acier. Gomme conducteur d'électricité, la différence entre Le zinc et le cuivre
est de 3,71. Le zinc prend la place du cuivre et la conservera après la guerre.
La différence, comme conducteur d'électricité, entre l'aluminium et le cuivre
est de 1,11. L'aluminium a l'avantage d'être plus léger. Probablement que dans
l'avenir il remplacera le cuivre pour beaucoup d'usages.
Le fer, il est \Tai, n'est pas bon conducteur de l'électricité; mais il peut rem-
placer le cuivre dans beaucoup d'emplois, et l'Allemagne a les minerais de fer
de la Belgique (?), du nord de la France et de la Suède.
II est vrai que l'Angleterre est le principal producteur d'étain, mais l'Alle-
magne le remplacera par le plomb, qu'elle trouve en abondance en Silésie, dans
le Harz et l'Erzgebirge.
L'Allemagne a un stock suffisant de nickel, et, du reste, elle peut le rem-
placer comme elle remplace le cuivre.
Quant au caoutchouc, l'Allemagne en avait importé 20.000 tonnes en 1913,
14.000 tonnes en 1914. Elle en a saisi un fort stock à Anvers, mais ce n'est pas
suffisant. L'Allemagne a recours à la régénération du caoutchouc, à un mélange
de pulpe de bois et de papier avec le caoutchouc pour les bandages des auto-
mobiles, et maintenant la Mitteldeutsche Gummkvarenjahrik Louis Peters A. G.,
de Francfort, fabrique du caoutchouc synthétique.
La pulpe de bois a remplacé le coton pour la fabrication du fulmicoton; elle
a remplacé aussi le liège et le linoléum.
L'île de Formose produit^les neuf dixièmes du camphre du monde. Mainte-
nant les chimistes allemands font du camphre synthétique avec de la turpen-
tine, qui est un produit du pin. ' <
(1) Voir, pour plus de détails sur la « guerre des cochons », le Journal des Économistes,
novembre 1912, p. 182.
— ^ilG —
L'Allemagne importait l'iiuile de coton de Russie. Maintenant on extrait
de 60.000 à 80.000 tonnes d'huile lubrifiante du goudron de houille.
Le Dr R. J. Oberfohren dit qu'il s'arrête là parce qu'il le veut bien, autre-
ment il pourrait continuer cette énumcration, et il conclut : « Après la paix,
l'Allemagne n'aura pas besoin d'importer quantité de matières premières et
la balance de son commerce sera ainsi favorablement influencée. »
En attendant, les ports des anciennes villes hanséatiques restent sans mou-
vement. Hambourg est dans la désolation; quoique son Sénat ait élevé son im-
pôt sur le revenu de 25 %, son budget en 1915 montre 174 millions de marks
en recettes et 200.400.000 marks en dépenses.
En 1914, la flotte commerciale allemande comptait 2.170 vapeurs, représen-
tant 2.832.000 tonnes et 4.935 voiliers comptant 3.320.000 tonnes. Aujourd'hui
ils se rouillent dans les ports.
IX
LES TRANSPORTS MARITIMES ET LES FRETS
Leb frets sont très élevés. Le Statist du 22 janvier a donné le petit tableau
suivant :
s Frets pour la Grande-Bretagne.
- Augmentations pour 100
de
1916 1915 1914 1916 sur 191.4
1916 1914
De Bombay 125/0 20/0 18/0 -f- 107/0 + 594
River Plate aux Étals-Unis. . . 150/0 60/0 13/6 + 136/6 + 1.011
États-Unis. — Ports atlantiques
(coton) 280/0 90/0 31/3 + 248/9 + 796
Ports atlantiques (blés) .... 81/31/2 33/101/2 9/0 + 72/3 1/2 + 803
Moyenne .... 159/1 5Ï7Ô 17/11 + 14Ï72~ + 787
En octobre, le prix moyen du froment en Angleterre était de 43 s. 5 d. le
quarter ; au milieu de janvier, il était de 56 s. 7 d. Ce n'est pas le blé qui manque,
ce sont les moyen» de transport.
L'î Statist calcule que le coût dircH't et indirect des frets depuis la guerre a
chargé le Royaume-Uni de £ 400.000.
.! 'ai entendu en France, et surtout en Italie, des personnes dire : « Pourquoi
le Gouvernement britannique ne les abaisse-t-il pas? »
M. Marconi, l'inventeur de la télégraphie sans fil, fit son maiden speech au
Sénat italien sur ce thème que l'Angleterre c n'avait pas l'intention de modère»"
les frets, qui sont pour elle une source do bénéfices énormes ».
Cette attaque, venant d'une personnalité qui a de bonnes raisons pour être
au courant des affaires anglaises, était aussi injuste qu'étonnante. D'août 1915
à janvier 1916, il n'y a eu que 154 navires anglais qui aient transporté du
charbon de CardilT à l'Italie, tandis qu'il y a eu 209 navires d'autres natio-
nalités. Ce ne sont donc pas les navires anglais qui ont établi le taux du fret.
De la Tyne en Italie, le transport n'a été effectué que pour moitié par des
navires anglais et ils prenaient un fret moindre que les autres navires.
— 217 —
Le Gouvernement anglais a répondu aux plaintes du Gouvernement italien
en lui offrant de lui vendre le charbon au prix auquel il le payait, mais à la
condition que le Gouvernement italien se chargeât du transport. Il refusa.
Des journaux italiens demandent au Gouvernement italien de mettre en
demeure le Gouvernement anglais de lui louer des bateaux; et ils articulent
des insinuations qui doivent réjouir le Gouvernement allemand si le Gouverne-
ment anglais les louait plus cher qu'ils ne l'entendent.
D'après le Giornale de la Chambre de Commerce de Londres^ les trfente
navires allemands dont les noms suivent (dont le tonnage est important) étaient
dans les ports italiens :
Bari, Waltraute ; Cagliari, Stitzfels et Peter-Carlo ; Catania, Lipari ; Gênes,
Moltke, Kônig- Albert, Prinz- Régent- Luitpold et Hammersberg ; Leghorn,
Amalfl et Termini ; Ligata, Porto fino ; Naples, Bayern, Rhenania, Marsala
et Italia; Palerme, Algier, Catania et Tunis; Porto Empedocle, Imbros ;
Savone, Heinrich et Bastia ; Syracuse, Barcelona, Kattentiirm, Sigmaringen,
Albany, Mudros, Ambria ; Venise, Samos et Volos.
A la Chambre des Communes, le 17 février, M. Houston de Liverpool a posé
cette question : « Pourquoi l'Italie demande-t-elle des navires anglais quand
elle peut se servir de ceux-là? Le Portugal vient de lui donner un exemple
qu'elle pourrait suivre. »
On m'a affirmé que le Gouvernement italien les a réquisitionnés.
Le Shipping World a publié l'analyse d'un exposé de la situation de la
marine britannique fait par W.-S. Abell, chief ship surveyor to Lloyd's Register^
que je recommande à mes collègues.
Sur les 20.000 navires possédés par la Grande-Bretagne, 16,500 sont engagés
dans le Home trade. Le Home trade comprend les Iles Britanniques et la côte
continentale de Brest à Hambourg. Il n'en reste donc que 4.500 engagés dans
le commerce étranger proprement dit, dont 3.600 d'un tonnage brut supérieur
à 1.000 tonnes.
Un tiers de ces navires appartient à des lignes de navigation; les deux autres
tiers sont des gênerai traders. La moyenne du tonnage brut des navires de la
première catégorie est de 5.000 tonnes; celle des navires de la seconde, de
4.000.
Le Gouvernement a réquisitionné 800 navires de plus de 1.000 tonnes;
42 steamers ont été retenus dans les ports ennemis; 78 dans la Baltique et
la Mer Noire. Voilà donc la suppression de 120 navires pour le commerce de
haute mer. Le nombre des steamers inutilisables pour des causes diverses
a été de 1.050, Ce chiffre a été réduit par les 100 navires allemands pris ou
internés qu'on a utilisés. Sur 3.600 navires, il y en a donc 950, soit 25 % qui ont
fait défaut.
La diminution du personnel a été également de 25 % sur 250.000 hommes
employés dans la marine britannique.
Le nombre annuel de voyages par bâtiment a été réduit de 4 1/2 à 3 parce que
les navires ont dû aller chercher leur fret plus loin et ont subi diverses causes
de retard.
Cependant, le poids de la cargaison fut augmenté, par 100 tonnes, de 115 ton-
nes à 145 tonnes.
— 218 —
De plus, on a transformé les installations pour passagers de certains navires
en installations pour le transport des marchandises.
M. Runciman, le président du Boardof Trade, dit que l'approvisionnement du
Royaume-Uni a besoin de 12.500.000 tonnes; il faut y ajouter le tonnage
réclamé par les Alliés.
« Le problème, a-t-il dit, est de faire contenir deux pintes dans un pot d'une
pinte. »
Il y a encore d'autres causes. Quand un navire est obligé d'attendre pendant
des jours et des jours son déchargement, sa capacité de transport est réduite
par tous les jours perdus. Si son voyage dure quinze jours là où il en faudrait
huit, c'est un bateau en moins pendant huit jours. Il doit relever le taux de son
fret du double si, au lieu de faire deux voyages, il ne peut en faire qu'un.
Les surestaries viennent s'ajouter au fret qu'elles dépassent rapidement
si le navire reste quelques jours sans pouvoir opérer son déchargement. La pre-
mière mesure à prendre pour diminuer le taux des frets, c'est de supprimer
l'encombrement des ports, des douanes et des chemins de fer.
Les grands ports anglais avaient perdu 40.000 dockers. On a vu des navires
rester cinq semaines dans la Tamise sans pouvoir obtenir leur débarquement,
alors qu'en temps normal une semaine aurait suffi.
Les chantiers ont été absorbés par les besoins de l'amirauté. Il a fallu du
temps pour prendre avec elle des arrangements qui permissent de réparer les
navires et de terminer ceux qui étaient en chantier.
La construction navale a été très faible. Le Shipping World n'a pas fait son
enquête annuelle. D'après une autre source, les chantiers britanniques n'au-
raient lancé que 517 navires de 649.300 tonnes au lieu de 1.294 représentant
1.722.000 tonnes. L'Angleterre ne donne aucun renseignement sur ses construc-
tions pour la marine de guerre.
Pour la première fois depuis sa constitution la Maison Harland et Wolff,
les constructeurs du Titanic, qui avaient en 1914 construit le Britannic de
50.000 tonnes, n'ont pu lancer un seul navire dans l'année, tandis qu'en 1913
ils avaient lancé six steamers jaugeant 156.000 tonnes.
Dans les Dominions, on a lancé 153 petits navires jaugeant 32.900 tonnes;
dans le reste du monde, on aurait lancé 955 navires marchands et navires de
guerre, jaugeant 989.300 tonnes au lieu de 1.600, jaugeant 1.694.000 tonnes
en 1914.
Un fait montre la profonde perturbation apportée par la guerre dans les
courants commerciaux. La Compagnie de Suez n'a pu donner un dividende
réduit pour 1915 qu'en ayant recours à sa réserve; et on a annoncé qu'elle relè-
verait son tarif de 6^ 25 à 6^ 75, soit de 50 centimes par tonne.
X
leIîhange
Un autre fait, qu'on appelle « la crise des changes », montre la perturbation
apportée par la guerre dans les relations économiques.
Dos gouvernements sont revenus au système pourvoyeur et achètent diree-
— 219 —
tement à des fournisseurs étrangers; les transactions entre individus continuent,
mais beaucoup sont faites pour le compte de l'État.
Les marchandises introduites sont consommées rapidement et ne donnent
rien en retour. 11 faut payer les fournisseurs. Or, il n'y a que trois moyens de
paiement : donner de l'or, des valeurs ou des marchandises. De l'or? Les pays
qui en ont ne veulent pas se démunir. Sauf la Grande-Bretagne, ils gardent
une encaisse et offrent du papier en partie garanti par cette encaisse; mais tant
que ce papier n'est pas remboursable en or à guichet ouvert, sa valeur repose
sur la confiance qu'inspirent ceux qui l'émettent; elle ne présente pas une
certitude.
Des marchandises? C'est bien là ce qui manque. Nous avons vu la baisse de
l'exportation de la Grande-Bretagne, de la France et de la Russie. Loin de
se plaindre de l'invasion des marchandises étrangères, les Etats-Unis se plai-
gnent actuellement d'être gorgés d'or.
Importations d'or Exportation» d'or
Millions de dollars
1913 63,7 91,8
1914 57,4 222,6
1915 451,9 31.4
L'or n'est qu'un moyen d'achat. S'il ne circule pas, c'est un poids mort.
Les États-Unis sont effrayés de ce triomphe bulhoniste. Ils trouvent que «la
balance du commerce leur est si favorable qu'elle constitue un danger ». Ils
ne pourront l'éviter qu'en prenant des intérêts dans les affaires de notre conti-
nent. Les États-Unis en Europe, par leurs capitaux, leurs administrateurs et
leurs ingénieurs, ce sera le soûl moyen pour eux de porter remède à cette
pléthore.
Des valeurs? L'Angleterre recueille actuellement ses valeurs américaines
pour en faire des instruments de paiement.
Le franc subit une dépréciation; mais le mark allemand en subit une beau-
coup plus forte (1) :
En pays neutres.
En Suisso, dépréciation du franc 10,55%
— — du mark 23,30
En Hollande^ dépréciation du franc 16,85
— — du mark 28,25
Aux Ëtats-U.iis, dépréciation du franc 11,05
— — du mark 23,20
Cette dépréciation serait encore bien plus forte si l'Allemagne avait de grands
paiements à faire au dehors. Le blocus maintient le niveau de son change.
Elle a envoyé à New-York, par voie de Hollande, des valeurs américaines
pour tâcher de l'améliorer. Elle n'y est pas parvenue.
Ce ne sont pas les bons de caisse de prêts, institués parla loi du 4 août 1914,
qui inspireront confiance. Il n'est pas inutile d'en rappeler le caractère tel qu'il
est défini par l'article 2 de cette loi :
« Il sera émis, pour le montant total des prêts consentis, un papier-monnaie
- - - - .. • II-. — r>
(1) Agence économique et financière i
— 220 ^
{Geldzeiçhen) spécial, dénommé Bons de Caisse de prêts (Darlehnskassenschein).
Ces bons seront acceptés en paiement, pour leur pleine valeur nominale, par
toutes les caisses impériales, ainsi que par toutes les caisses publiques de tous
les Etats confédérés : dans les transactions privées, leur acceptation n'est pas
obligatoire. . .
• ... Les bons de Caisse de prêts sont assimilés aux bons de Caisse de l'Empire
{Reichskassenscheine). »
Il ressort de ce dernier paragraphe que ces bons peuvent servir de couverture
aux billets de la Reichsbank dont l'émission peut atteindre trois fois leur mon-
tant.
, Au 31 décembre 1915, ils reprépentaient un montant de 2 milliards 347 mil-
lionp de marks et pouvaient gager 7 milliards 41 millions de marks de billets de
la Reiçhsbank 1 ■ , - •
XI
DERNIER MOT
M. 0. P. Austin, chief statistician oj the foreign department of the National City
Bank, a comparé le commerce de 14 nations pendant les six premiers mois
de 1914, époque normale, et pendant les six mois avril-septembre 1915 (1).
Il a trouvé les résultats suivants :
Impo
rtatiODi
Exportations
Hillioni
de dollars
5
.882
5
.027
5,
.5Ȏ
4
.648
1914, 1er janvier-30 juin ....
1915, avril -septembre
Différence 357 379
La difîérence entre les deux périodes est faible : 9,1 % pour les importations
-7,5 % pour les exportations.
Mais les perturbations économiques sont plus profondes que ne l'indiquent
ces chiffres. Il y a des déplacements d'industries même dans les pays neutres.
Aux États-Unis, l'activité s'est développée dans le sens de la fabrication des
armes et des munitions. Au lendemain de la guerre, elle sera frappée d'un arrêt
subit. On ne fera pas éclater les obus pour les utiliser. Il restera un stock
d'armes et de munitions qui, nous l'espérons, resteront sans emploi.
On a raconté que les Allemands constituaient actuellement d'énormes stocks
de marchandises dont ils inonderaient le monde au lendemain de la signature
de la paix; quel genre de marchandises? Ils manquejrt de matières premières,
et ils emploient d'abord le fer et l'acier qu'ils produisent à des outils de guerre.
Dans les pays envahis, comme la Belgique et le nord de la France, un temps
assez long sera nécessaire pour la réinstallation des usines, pour le rétablisse-
ment de? outillages, pour la reconstitution des stocks. Il en résultera probable-
ment de fortes hausses de prix; et le pouvoir d'achat de ceux qui en auront
besoin aura diminué.
(l) Journal of Commerce of Neiv- York du 20 janvier XdïG.
— 224 —
Toute l'Europe souffrira d'une inflation de papier; la première besogne sera
de la réduire. C'est une étrange illusion que de compter sur les gouvernements
pour venir au secours des industriels et des commerçants. La besogne la plus
utile qu'ils auront à faire, ce sera de diminuer leurs dettes, de rembourser les
avances qu'ils auront reçues, de permettre aux banques de reprendre le paie-
ment en or, de travailler au rétablissement d'un crédit normal. M, G. Schelle a,
dans un article du Journal des Économistes du 15 janvier, indiqué les économies
dont est susceptible le budget français. C'est à elles qu'il faudra penser et
non à de nouvelles dépenses!
Je n'ai fait qu'effleurer le sujet de l'intervention des gouvernements au
point de vue du commerce international. Le moment n'est pas encore venu
d'examiner complètement le rôle de l'État pourvoyeur et fabricant. Mais nous
pouvons déjà, sans témérité, affirmer que les faits qui se sont déroulés depuis le
i^^ août 1914 ne donneront pas d'argumxents en faveur de ceux qui ont espéré
obtenir, comme bénéfice de la guerre, la socialisation des moyens de production
et d'échange. De plus, la démonstration est faite, dans la Grande-Bretagne
spécialement, que les limitations légales et syndicales de la productivité du
travail étaient une cause de stagnation et de régression dans le développement
économique des nations. Si les Alliés veulent réparer rapidement leurs ruines,
ils doivent abandonner la politique de paternalisme et de mollesse préconisée
par « l'école tendre » et déployer dans les travaux de la paix au moins autant
d'énergie que dans les batailles de la guerre.
Yves Guyot.
IV
LA POPULATION
ET
LES LOIS ÉLECTORALES EN FRANCE
DE 1789 A NOS JOURS
(Suite) (')
TROISIÈME PARTIE
LA MONARCHIE CENSITAIRE
De 1814 à 1848, le régime électoral a un caractère purement censitaire. Sans
doute, il y avait déjà eu un véritable cens électoral avec les constitutions de
1791 et de l'an III ; mais nous avons vu qu'il était très peu élevé (4^ 50) et n'em-
pêchait pas le « pays légal » d'être fort large (4.300.000 citoyens actifs). D'autre
(1) Voir JouFfiat de là Soâiété de Statistique de Paris, numéro de mai^l916, page 157,
— 222 —
part, la Constitution de l'an X avait aussi établi un régime censitaire étroit,
mais il ne s'appliquait qu'au recrutement des collèges électoraux de départe-
ment. Enfin, dans aucune des constitutions antérieures à la Charte, on n'avait
introduit un cens d'éligibilité; la Charte, au contraire, détermine un cens autant
pour l'éligibilité que pour l'électorat. La Révolution de 1830 n'y a apporté qu'une
légère amélioration; néanmoins, les conséquences qu'elle a eues dans le domaine
électoral divisent naturellement en deux parties la période à laquelle nous
sommes arrivés : la Restauration et la Monarchie de Juillet.
I — LA RESTAURATION
1° Lois électorales et répartition des sièges parlementaires. — a) La
Charte de 1814. — La Charte du 4 juin 1814, véritable constitution de la mo-
narchie restaurée, établit un régime nouveau autant pour le droit électoral que
pour le mode d'élection. On est électeur à trente ans d'âge et avec un cens de
300 francs d'impôts directs; pour être éligible, il faut quarante ans d'âge et
le cens est de 1.000 francs. S'il ne se trouve pas dans le département au moins
50 personnes dans ce cas, le nombre des éligibles sera complété jusqu'à concur-
rence de ce chiffre par les plus imposés au-dessous de 1.000 francs (art. 38, 39
et 40 de la Charte). Pour le mode d'élection, la Charte ne précise rien; il y est
dit seulement (art. 35) que la « Chambre des députés des départements » (on
l'appelle ainsi sous la Restauration) sera composée de députés élus par les col-
lèges électoraux dont l'organisation sera déterminée par les lois. L'article 36
ajoute que « chaque département aura le même nombre de députés qu'il a eu
jusqu'à présent)). Ainsi, tout en annonçant une innovation de ce côté, la Charte
avait l'air de garder le statu qiio. En effet, parmi les articles transitoires, l'ar-
ticle 75 stipule que « les députés qui siégeaient au Corps législatif lors du dernier
ajournement, continueront de siéger jusqu'à remplacement ». Cela veut-il dire
que toute l'assemblée sera prochainement renouvelée? Nullement, puisque
l'article 76 dit que « le premier renouvellement d'un cinquième de la Chambre
aura lieu en 1816, suivant l'ordre établi par les séries )>, c'est-à-dire en vertu
de la Constitution de l'an X. Ainsi la Chambre des Députés, au début de la Res-
tauration, n'est, sous un autre nom, que le Corps législatif de l'Empire :
Louis XVIII pouvait-il moins faire pour l'assemblée qui venait de le rétablir?
Mais cette Chambre disparaît avec la première Restauration et est rem-
placée par la Chambre des Cent-Jours élue suivant le régime de l'Acte addi-
tionnel, dont nous avons parlé plus haut.
b) Les élections de 1815. — Louis XVIII rétabli pour la seconde fois se trou-
vait donc en présence de deux Chambres, l'une qu'il ne pouvait reconnaître
puisqu'elle était l'œuvre des Cent-Jours, l'autre que la Charte de 1814 avait
bien reconnue, mais alors sans autorité et d'ailleurs d'un loyalisme suspect.
Une nouvelle Chambre est convoquée et, cette fois, un régime électoral nouveau
est établi, non par une loi, mais par une simple ordonnance (13 juillet 1815).
Le Roi avait, il est vrai, l'air de s'en excuser sur les circonstances « qui vou-
laient une représentation plus nombreuse et émanant plus directement des
collèges électoraux ». C'était exact en ce sens que les députés étaient vraiment
— 223 —
élus et non plus choisis par le Sénat; vrai encore puisque la nouvelle Chambre
allait être sensiblement plus nombreuse que l'ancien Corps législatif.
Quel fut donc le régime électoral de 1815? Les collèges d'arrondissement et
de département étaient maintenus; mais les collèges d'arrondissement propo-
saient, en quelque sorte, les députés; ils élisaient chacun un nombre de candi-
dats égal au nombre des députés du département et, parmi eux, le collège
électoral de département devait choisir au moins la moitié des députés. Si le
nombre total des députés du département était impair, le partage se faisait
à l'avantage de la portion qui devait être choisie sur la liste des collèges d'arron-
dissement. Pour les électeurs comme pour les éligibles, l'ordonnance de 1815
abaissait l'âge réclamé par la Charte : il était uniformément de vingt-cinq ans.
Enfin, de même que l'ordonnance de 1815 maintenait les collèges électoraux
de 1802, elle maintenait aussi les adjonctions de 1802 et 1806 et celles-ci furent
accrues par l'ordonnance du 21 juillet 1815 qui autorisait le Gouvernement à
ajouter encore 10 membres aux collèges d'arrondissement et 20 aux collèges
de département. C'était mettre à la discrétion du pouvoir les élections dont
devait sortir la « Chambre introuvable ». De plus, si l'âge était abaissé pour les
députés, le cens d'éligibilité de la Charte était conservé; les députés élus étaient
tenus de produire à la Chambre un relevé de leurs contributions directes cons-
tatant qu'elles s'élevaient au moins à 1.000 francs (1).
La Chambre élue en août 1815 était moins nombreuse que celle de l'Acte
additionnel, mais elle l'était plus que le Corps législatif qu'elle remplaçait. Elle
comptait 402 membres, total bientôt réduit à 395 à cause des pertes territoriales
subies en novembre 1815 (deuxième traité de Paris). Pas plus que l'Acte addi-
tionnel ni que la Charte, l'ordonnance du 13 juillet 1815 ne stipule rien qui pro-
portionne la représentation parlementaire à la population; elle donne simple-
ment un tableau de la répartition des sièges. Mais il est visible que la proportion
existe. Le département le plus peuplé, le Nord, à cette époque, obtient 12 sièges;
la Seine, 10; la Seine-Inférieure et le Pas-de-Calais en ont respectivement 9
et 8. Le total de 7 députés est accordé aux départements de plus de 500.000
âmes; le taux minimum — 2 députés — est celui des départements les moins
peuplés : Basses-Alpes, Hautes-Alpes, Lozère et Pyrénées-Orientales. Dans
près du tiers des départements, 26, le total des mandats est de quatre; il est do
trois dans 23 départements, de six dans 13 et de cinq dans 7 seulement. Si l'on
admet pour une population d'environ 30 millions un quotient de 70.000 habi-
tants, on constate qu'il est généralement observé : on le retrouve exactement
pour les dix départements les plus petits et les dix départements les plus peuplés
à cette époque.
Cette Chambre de 1815, la « Chambre introuvable », vota une nouvelle loi
électorale. Contrairement aux bourgeois libéraux qui voulaient alors res-
treindre le droit de suffrage, la majorité ultra-royaliste le voulait étendre aux
masses surtout paysannes. Aussi la loi adoptée par la Chambre en mars 1816
(1) A ce propos, un ancien émigré se plaignait de n'être pas éligible, tandis que l'ac-
quéreur de ses biens l'était. Yoir Archives Nationales Fie HI, Seine, 1815. C'est à ce fonds
que nous empruntons la plupart des renseignen ents que les publications officielles ne
nous fournissent pas.
-^ 224 —
abaissait-elle le cens électoral à 50 francs; elle établissait le suffrage à deux
degrés au canton d'abord, puis au chef-lieu du département, et elle admettait
le renouvellement intégral de la Chambre. On aurait eu ainsi un corps élec-
toral de deux millions d'électeurs primaires. Mais cette loi fut rejetée par les
pair« et le Roi ne tarda pas à mettre fin à l'existence de la Chambre introuvable
par l'ordonnance du 5 septembre 1816,
c) Les élections de 1816. — Cette ordonnance, en même temps qu'elle dissol-
vait la Chambre, modifiait aussi le régime électoral. Comme en 1815 sans
doute, les deux catégories de collèges subsistent et ceux de département
choisissent les députés sur la liste dressée par les collèges d'arrondissement:
il est simplement dit que là où il n'y aura qu'un représentant à élire, le collège
de département pourra le prendre hors la liste des arrondissements. Le cens
d'éligibilité est toujours de 1.000 francs. Mais, sur deux points, l'ordonnance
de 1816 marque un retour à la Charte de 1814. D'abord pour l'âge : les députés
doivent avoir au moins quarante ans, ensuite pour le nombre des représon'
tants. On revient, en efîet, à une unité près, au chiffre de 1814, soit à celui du
Corps législatif de l'Empire. 11 y avait 258 députés et les départements retrou-
vaient le même quantum de députation que deux ans auparavant. Notons
seulement une exception : les Basses-Pyrénées avaient trois députés au lieu
de deux. Bien entendu, comme l'effectif de la Chambre baissait de 395 à 258,
il y avait réduction de sièges dans tous les départements, excepté les Basses-
Pyrénées. En ce qui concerne la proportion des sièges à la population des
départements, nous ne pouvons que renvoyer aux remarques que nous avons
faites plus haut à propos de la répartition des sièges en 1802, avec cette obser-
vation que, dans la répartition de 1816, il n'a été tenu aucun compte du
mouvement de la population depuis 1801. Mais pouvait-il en être autrement,
vu le caractère si imprécis des dénombrements d'alors?
d) La loi électorale de 1817. —■ Jusqu'ici la loi électorale que promettait la
Charte avait été remplacée par des ordonnances. La loi du 5 février 1817 mit
un terme à cette situation. Elle n'institue ni un régime électoral nouveau ni
une nouvelle répartition des sièges; elle innove seulement quant au mode
d'élection des députés. Cette fois, il n'y a plus deux sortes de collèges; tous les
éleoteursy c'est-à-dire les citoyens payant 300 francs d'impôts directs et âgés
de trente ans ne forment plus qu'un seul et même collège par département;
on le sectionne seulement quand il y a plus de 600 électeurs, mais cela ne rompt
pas l'unité du collège. De plus, et cette réforme était encore plus importante,
l'unité de collège avait pour conséquence l'élection directe des députés. Ainsi,
quelle qu'ait été la restriction du « pays légal^» sous la Restauration, elle a
introduit, et cela de façon définitive, l'élection directe.
Quant au nombre des députés, il reste le môme qu'en 1816, c'est-à-dire
comme en 1814, 258, et leur répartition est aussi la même. La durée du man-
dat législatif est de cinq ans et la Chambre se renouvelle chaque année par cin-
quième. A cette fin, l'ordonnance du 27 novembre 1816, complétée par la loi du
22 janvier 1817, avait réparti les départements en cinq séries : A, B, C, D, E,
dont la date de renouvellement fut fixée par le tirage au sort. Mais, dans
chacune d'elles, l'ordre des départements n'est par, cmme dans nos trois
séries sénatoriales actuelles, indiqué par l'alphabet, mais les séries renferment
des départements appartenant aux diverses régions du royaume, de façon,
disait l'ordonnance, que « deux départements limitrophes ne soient pas la
même année appelés à procéder aux élections ». Ce mode de répartition nous
semble plus juste que celui que nous avons adopté pour le Sénat; nous
aurons l'occasion de revenir sur cette question.
e) La loi du doublé vote^ — La loi électorale de 1817 n'eut elle-même qu'une
brève existence. On sait comment le Gouvernement, effrayé des élections libé-
rales et sous le coup de l'assassinat du duc de Berry, dut céder aux injonctions
des ultra-royalistes et faire voter la loi dite « du double vote » (30 juin 1820). La
durée de la législature fut ensuite portée à sept ans (1824). La nouvelle loi
rétablissait les deux catégories de collèges : arrondissement et département,
sans toucher cependant au principe de l'élection directe. Les collèges d'ar-
rondissement comprenaient tous les électeurs à 300 francs et nommaient
258 députés; les collèges de département comprenaient seulement les plus
imposés en nombre égal au quart des électeurs inscrits du département : ils
élisaient les 172 députés nouveaux. La Chambre se composait donc désor-
mais de 430 membres, chiffre qu'elle conserva jusqu'à la fin de la Restaura-
tion. Sous ce régime, le nombre des députés a donc beaucoup varié et voici un
résumé de ces variations :
En 1814. Régime électoral de 1802, conservé par la Charte . . 258 députés.
1815. Ordonnance du 13 juillet 395 —
1816. — du 5 septembre i
1817. Loi électorale du 5 février (
1820. Loi du double vote (30 juin 1820) 430 —
Évidemment la loi de 1820 s'inspirait de l'Acte additionnel qui avait distingué
la représentation des deux collèges, mais dans un sens beaucoup plus restrictif,
puisque les électeurs des collèges d'arrondissement payaient déjà un cens assez
élevé. En outre, en 1815, chaque arrondissement administratif avait formé un
collège électoral; en 1820, les collèges d'arrondissement étaient au nombre de
258 et par conséquent moins nombreux sensiblement que les arrondissements
administratifs (363). 11 fallut donc découper dans les départements des arrondis-
sements électoraux spéciaux et cela était l'œuvre du Gouvernement et non
du Parlement. Cette opération affecta la presque totalité des départements, 79,
Dans les sept autres, il n'y avait qu'un seul collège, celui du département, et
on y pratiquait la loi de 1817. Ces départements étaient ceux qui n'avaient
qu'un député ou dont le total des électeurs ne dépassait pas 300 ou ceux qui
comprenaient cinq arrondissements sans compter plus de 400 électeurs. »
A l'exception de la Corse, en raison de son chiffre plus particulièrement
faible d'électeurs, tous les départements recevaient un supplément de sièges.
Dans plus de la moitié — 44 — ce supplément était de 2 sièges; dans 21 dé-
partements, il ne dépassait pas l'unité; il était de 3 dans 17 départements
et de 4 dans trois départements seulement : Nord, Seine et Seine-Inférieure.
C'étaient les trois départements les plus peuplés, mais il y avait toutefois déjà
— 226;—
entre les deux derniers une différence de 170.000 habitants. De même, parmi \e^
autres départements, il n'y avait souvent pas de rapport entre la distribution
des nouveaux sièges et la population. L'Ardèche avec plus de 300.000 âmes ne
se voyait donner qu'un siège comme les Hautes-Alpes, avec 120.000; et l'Aude,
avec plus de 250.000, en recevait deux. Pareillement, trois sièges étaient attri-
bués à rille-et-Vilaine et seulement deux aux Côtes-du-Nord, avec une popula-
tion peu différente, et même à l'avantage de ce dernier département. Assuré-
ment, les départements les plus peuplés bénéficiaient, dans l'ensemble, de la loi
ou plutôt de la répartition des nouveaux mandats. Les dix départements les
moins peuplés ne gagnaient globalement que 9 sièges, tandis que cette adjonc-
tion était de 31 pour l'ensemble d«s dix plus grands départements. Cela donnait
pour l'une et l'autre catégorie un siège de plus par 200.000 âmes environ. Mais
la loi de 1820 n'invoquait nullement, cela va sans dire, le principe de la popu-
lation et, du reste, l'étroitesse dtt droit de vote dans les collèges de département
mettait le bénéfice de l'augmentation des sièges à la discrétion d'un nombre
infime d'électeurs. C'était là tout le secret de la loi.
Cette loi de 1820 était, suiyant le mot de M. de Serres, un répit de dix ans
accordé aux Bourbpns. Il vin| un moment où elle fut trouvée trop libérale, et
l'une des ordonnances du 25 juillet 1830 modifiait, en effet, le régime élec-
toral. Elle excluait la patentp du total des impôts directs exigés par le cens;
ce qui privait du droit électoral un grand nombre de commerçants ; de plus, les
collèges d'arrondissement n'élisaient plus directement leurs députés, mais,
comme en 1815, ils choisissaient un nombre de candidats égal au total des
députés du département, et le collège de département élisait, parmi eux, au
moins la moitié des députés. Cette violation de la loi de 1817 amena la Révolu-
tion de 1830 et la fin des Bourbons.
On trouvera dans le tableau suivant (VI), la répartition des sièges parle-
mentaires par département d'après les lois électorales de la Restauration.
2° Le « PAYS LÉGAL » SOUS LA RESTAURATION. — Nous avous maintenant à
voir quel était le nombre des électeurs sous la Restauration et son rapport à
l'ensemble de la nation (1). Vers 1817, au moment du vote de la loi électorale
et dans les premiers temps de son exécution, le total des électeurs était d'en-
viron 102.000, soit 3,30 pour 1.000 habitants. Et cette proportion déjà si faible
diminue encore dans les années suivantes; car, aux élections de juin 1830, on ne
compte plus que 92.500 électeurs. Ce fait était dû soit aux dégrèvements d'im-
pôts, soit aux difficultés suscitées par l'Administration pour l'inscription sur
les listes électorales (2). L'oscillation du total des imposés autour de la limite de
300 francs d'impôts directs provoquait dans ces listes de fréquentes varia-
tions..
(l)Le tableau VII, que nous donnons plus loin, est une combinaison des chilîrcs publiés
par le Moniteur (janv. 1817) et de ceux que nous avons trouvés aux Archives nationales
(fonds Fie III).
(2) Par exemple, dans le Calvados, le nombre des électeurs était de 2.295 en 1817; il est
de 2.907 en 1820 et de 2.400 seulement en 1828 (Arch. nat. Fie m Calvados. 5).
— 227 —
Tableau VI
Nombre des députés par départements sous la Restauration.
DéparCenients
Ain
Aisne
Allier
Alpes ^Basses-). ^
Alpes (Hautes-) . .
Ardèche
Ardennes
Ariège
Aube
Aude
Aveyron
Boufhes-du-Rhôno .
Calvados
Canlal
Charente
Charente- Inférieure.
Cher
Corrèze
Corse
Côte-d'Or
Côtes-du-Nord . . .
Creuse
Dordogne
Doubs
Drôme
Eure
Eure-et-Loir. . . .
Finistère
Gard
Haute-Garonne . .
Gers
Gironde
Hérault
Ille-et-Vilaine . . .
Indre
Indre-et-Loire . . .
Isère . .
Jura
Landes
Loir-et-Cher. . . .
Loire
1815
1816 et 1817
1820
—
Ordonnance
D'après
du
Loi
l'ordoDnauce
5 «epicmbrc 1816
H
double Yote
du
du
du
3 féTrier 1817
25 juin 18Î0
l:j juillet 1815
C)
7
3
5
(2;
6
4
6
(2)
3
2
4
(2)
2
1
2
(1)
2
1
2
(n
3
2
3
(1)
4
■ 2
3
(1)
3
2
3
(1)
3
2
3
(1)
3
2
4
(2)
4
3
5
(2)
4
3
5
(2)
6
4
7
(3)
3
2
3
(1)
4
3
5
(2)
5
4
7
(3)
3
2
4
(2)
3
2
3
(1)
4
2
2
5
3
5
(2)
7
4
6
(2)
3
2
3
(1)
6
4
7
(3)
3
2
4
(2)
3
2
3
(1)
6
4
7
(3)
4
2
4
(2)
6
4
6
(2)
4
3
5
(2)
6
4
7
(3)
4
3
5
(2)
7
5
8
(3)
4
3
6
(2)
/
4
7
(3)
3
2
3
(1)
4
2
4
(2)
5
4
6
(2)
4
2
3
(1)
3
2
3
(1)
3
2
3
(1)
4
3
5
(2)
(*J Les chiiïi-es entre parenthèses indi(iuent le nombre des députés élus par les collèges
de départenaent.
— 228 —
Départenienta
Haute-Loire ...
Loire-Inférieure .
Loiret
Lot . .
Lot-et-Garonne. . .
Lozère
Maine-et-Loire. . .
Manche
Marne
Marne (Haute-) . .
Mayenne
Meurthe
Meuse
Morbihan
Moselle
Nièvre
Nord
Oise
Orne
Pas-de-Calais . . .
Puy-de-Dôme . . .
Pyrénées (Basses-) .
Pyrénées (Hautes-).
Pyrénées-Orientales.
Rhin (Bas-). . . .
Rhin (Haut-) . . .
Rhône
Saône (Haute-). . .
Saône-et-Loire. . .
Sarthe
Seine
Seine-et-Marne. . .
Seine-ct-Oise. . . .
Seine-Inférieure . .
Sèvres (Deux-) . . .
Somme
Tarn ..."....
Taru-et-Ciarunut^ . .
Var
Vaucluse
Vendée
Vienne
Vienne (Haute-) . .
^'^osges
Yonne
Total .
1815
1816 et 1817
1820
D'aprèi
Tordonnance
du
Ordonnance
du
5 septembre 1816
et
loi électorale
Loi
du
double vote
du
1.3 Juillet 1815
du
5 février 1817
25 juin 1820
3
2
3
(1)
6
4
6
(2)
4
3
5
(2)
4
4
6
(2)
4
3
5
(2)
2
1
2
(1)
6
4
7
(3)
7
4
7
(3)
4
3
5
(2)
3
2
4
(2)
4
3
5
(2)
4
3
5
(2)
4
2
4
(2)
6
4
6
(2)
n
/
4
7
(2)
3
2
4
(2)
12
8
12
(4)
4
3
5
(2)
5
4
n
J
(3)
8
4
7
(3)
7
4
7
(3)
5
3
5
(2)
3
2
3
(1)
2
1
2
(1)
7
4
6
(2)
6
3
5
(2)
5
3
5
(2)
4
2
3
(1)
6
4
7
(3)
5
4
7
(3)
10
8
12
(4)
4
3
5
(2)
6
4
7
(3)
9
6
10
(4)
3
2
3
(1)
6
4
7
(3)
4
2
4
(2)
3
2
4
(2)
4
3
5
(2)
3
2
3
(1)
4
3
5
(2)
3
o
4
(2)
3
2
4
(2)-
4
3
5
(2)
4
3
5
(2)
402 (♦)
258
430 (172)
(•) Total réduit à 395 par suite des pertes territoriales du second traité de Paris (nov.
1815).
Et le pays légal, si restreint fût-il, se réduisait encore, depuis la loi du
double vote, à un autre pays légal, en quelque sorte superposé au premier
et constitué par le quart des électeurs les plus imposés, soit environ 25.000
contribuables, qui nommaient^ 172 députés ou les deux cinquièmes de la
Chambre. Ce collège était pris dans l'ensemble du département et non dans
chaque arrondissement eia particulier, ce qui avantageait les arrondissements
les plus riches.
La répartition des électeurs par département n'est pas seulement intéressante
au point de vue politique, mais elle offre un coup d'œil sur l'état économique
et social de nos départements àjcette^époque, le pouvoir électoral étant fonc-
tion de la richesse et^surtout de la richesse foncière. Dans quatorze dépar-
tements, ij y avait moins de 500 électeurs; c'étaient des départements peu
peuplés ou peu riches, ceux des Alpes avec la Corse, des Pyrénées, du Massif
Central (Creuse, Haute-Loire, Aveyron, Lozère), quelques-uns de l'Est
(Aube, Vosges) et en Bretagne le Morbihan. Dans certains de ces départements,
la proportion des électeurs à la population était des plus faibles : de 1 pour
1,000 h£d)itants dans le Morbihan, les Vosges, les Basses-.Upes, de moins de
1 %Q dans les Hautes-Alpes, les Basses-Pyrénées et les Hautes-Pyrénées; enfin,
le minimum était donné par la Corse avec 0,2 électeurs par 1.000 habitants.
Elle n'avait, en effet, que 39 électeurs.
Dans plus du tiers des départements —38 — on comptait plus de 1.000 élec-
teurs, et parmi ceux-ci, 11 en avaient plus de 2.000 : Bouches-du-Rhône, Cal-
vados, Charente-Inférieure, Eure, Eure-et-Loir, Gironde, Moselle, Nord,
Saône-et-Loire, Seine et Seine-Inférieure. Il suffît de citer ces départements
pour voir qu'il n'y a pas de corrélation absolue entre le total des électeurs et
la population. Dans la Seine, il y avait par 1.000 habitants plus de 15 électeurs;
cette proportion était de près de 9 dans l'Eure-et-Loir, de 8 dans les Bouches-
du-Rhône, de 6 dans la Seine-Inférieure, de moins de 5 dans la Gironde et
le Calvados.
Deux provinces de richesse inégale, la Bretagne et la Normandie, font aussi
un contraste électoral très frappant. Dans la première, le chiffre global des élec-
teurs n'était que de 3.567 pour une population de 2.400.000 âmes, soit à peine
1,5 électeurs par 1.000 habitants; en Normandie, il y avait 11.750 électeurs
poiu- 2'.600.000 habitants, soit 4,5 électeurs par 1.000 habitants, proportion
triple de la précédente. En général, dans la province, le taux des électeurs est
élevé dans les régions de richesse foncière, agricole ou viticole. Ce que nous
venons de dire de la Normandie s'applique à l'Eiu-e-et-Loir qui, avec moitié
moins d'habitants, avait autant d'électeurs que la Gironde; dans l'Indre-et-
Loire et le Loiret, la proportion des électeurs était également très forte (6 pour
1.000 habitants) et de même dans les départements essentiellement viticoles
du Midi, l'Aude et l'Hérault, où elle était de 7,3 et 6 par 1.000 habitants, res-
pectivement. Mais le nombre des électeurs n'avait pas d'influence sur la répar-
tition des députés qui était, nous l'avons vu, basée surtout sur le chiffre de la
population. Tout au plus peut-on remarquer que, lors de la distribution des
nouveaux sièges de département en 1820, certains départements ont paru béné-
ficier du total de leurs électeurs. Par exemple, à population égale, le Calvados
ire BKEiB. 57' VOL. i— n' 6 jg
reçoit 3 sièges supplémentaires et le Finistère seulement 2 ; l'Eure de même, par
opposition au Morbihan, etc.
Si le total des électeurs était fort restreint, combien plus encore l'était celui
des éligibles avec un cens de 1.000 francs ! En 1817, le nombre de ces personnes
âgées d'au moins quarante ans — âge de l'éligibilité — ne dépassait guère
16.000 pour l'ensemble du pays, soit 5 par 10.000 âmes et 15,7 par 100 élec-
teurs. Dans dix départements, le contingent des éligibles était de moins de 50
et par conséquent devait être complété jusqu'à ce chiffre par les plus imposés
au-dessous de 1.000 francs; c'étaient le Var avec 48 unités, la Corrèze avec 41,
les Basses-Pyrénées et les Vosges avec chacun 36, l'Ardèche et la Lozère avec
chacun 26, les Basses-Alpes avec 17, les Hautes-Pyrénées avec 9, les Hautes-
Alpes avec 7 et enfin la Corse avec 1, qui était le général Sébastiani ! C'étaient
là des départements pauvres et où le rapport des électeurs à la population, nous
l'avons vu, était très faible.
Il paraît cependant n'y avoir pas de corrélation entre la proportion des élec-
teurs et celle des éligibles, et ici encore nous nous trouvons en présence d'un
phénomène intéressant d'économie sociale. Prenons, par exemple, les dix
départements où la proportion des imposés à 1.000 francs est la plus élevée :
Seine-et-Marne (38,5 pour 100 électeurs), Vendée (37,3), Nièvre et Morbihan
(30,2), Aisne (28,5), Eure (27), Loir-et-Cher, Allier, Oise et Orne (plus de
26 %). Leur proportion d'éligibles est donc fort au-dessus de la moyenne
générale de la France, 15,7 %. Or, à l'exception de l'Eure dont il a été
question plus haut, tous ces départements ont un nombre d'électeurs assez peu
considérable. Quatre dépassent à peine la moyenne de la France (3 pour
1.000 habitants), cinq autres sont au-dessous avec un minimum de 1 %o
dans le Morbihan. Au contraire, dans certains départements où nous avons
constaté une forte proportion d'électeurs, Eure-et-Loir, Bouches-du-Rhône,
Aude, Indre-et-Loire, la proportion des éligibles est peu élevée, de 10 à 13 ^jo
des électeurs seulement. Cette double disproportion s'explique par le régime
de la propriété : le nombre des électeurs est en raison directe de sa divi-
sion, celui des éligibles en raison inverse. Un exemple frappant du phéno-
mène nous est fourni par la Bretagne, réserve faite du département d'Ille-et-
Vilaine qui diffère assez sensiblement d'ailleurs du reste de la régioji. Les
départements bretons ont une moyenne d'électeurs très faible (de 1 à 1,5
pour 1.000 habitants) et leur proportion d'éligibles est, par contre, très forte,
de 25 à 30 pour 100 électeurs. Dans certains départements riches cependant,
mais où le développement industriel créait déjà une population ouvrière assez
nombreuse, la proportion des électeurs et des éligibles était également mé-
diocre; c'était le cas des départements alsaciens du Bas-Rhin et du Haut-
Rhin.
— 231 —
Tableau VII
Électeurs (cens : 300 francs; âge : 30 ans) par département, vers 1817.
Éleeteun
Départemrntc
Ain
Aisne
Allier
Alpes (Basses-) . .
Alpes (Hautes-) . .
Ardèche
Ardennes
Ariège
Aube
Aude
Aveyron
Bouches-du-Rhône .
Calvados
Cantal
Charente
Charente-Inférieure.
Cher
Corrèze
Corse (en 1819) (1). .
Côte-d'Or
Côtes-du-Nord . . .
Creuse
Dordogne
Doubs
Drôme
Eure
Eure-et-Loir. . . .
Finistère
Gard
Garonne (Haute-) .
Gers
Gironde
Hérault
Ille-et-Vilaine . . .
Indre
Indre-et-Loire . . .
Isère
Jura
Landes
Loir-et-Cher. . . .
Loire
Loire (Haute-) . . .
Loire-Inférieure . .
Loiret
Lot
Total
596
1.416
784
148
106
547
554
353
494
1.835
1.438
2.734
2.295
849
1.302
2.821
962
584
39
1.399
707
452
1.392
653
676
2.572
2.276
574
679
1.471
1.314
2.165
1.864
1.005
615
1.680
1.293
632
521
820
920
424
876
. .657
706
Par
1.000 hibilulU
2
3,2
2,8
1
0,8
1,8
2
1,5
2 2
/,3
4,2
8
4,7
3,4
3,8
7
4
2,2
0,2
4
1,3
2
1,5
1,8
2,5
6,1
9
1,2
2,1
3,8
4,3
4,1
5,8
1,8
2,6
6
2,1
2,1
2
3,5
2,8
1,5
2
6,4
2,5
(1) Ce département offrait cette particularité bizarre que le total des électeurs y était
inférieur à celui des éligibles, fixé légalement au minimum de 50.
Électearf
Départements
Lot-et-Garonne. . .
Lozère
Maine-et-Loire . . .
Manche. . . . . .
Marne
Marne (Haute-) . .
Mayenne
Meurthe
Meuse
Morbihan
Moselle
Nièvre
Nord
Oise
Orne
Pas-de-Calais. . . .
Puy-de-Dôme , . .
Pyrénées (Basses-) .
Pyrénées (Hautes-) .
Pyrénées-Orientales.
Rhin (Bas-) ....
Rhin (Haut-) . . .
Rhône
Saône (Haute-) . .
Saône-et-Loire . . .
Sarthe
Seine
Seine-Inférieure , .
Seine-et-Marne. . .
Seine-et-Oise. . . .
Sèvres (Deux-) . . .
Somme
Tarn
Tarn-et-Garonne . .
Var
Vaucluse
Vendée
Vienne
Vienne (Haute-) . .
Vosges
Yonne
Total .
Totil
Par
1.000 habitants
1.536
4,8
228
1,7
1.443
3,3
1.639
2,8
1.100
3,7
484
2,1
1.273
3,7
701
2,1
551
1,8
405
1
2.113
5,5
635
2,5
2.161
2,6
1.154
3,1
1.170
2,7
1.920
3
1.413
2,5
320
0,8
152
0,7
450
3,2
568
1,1
575
1,6
1.681
4,4
517
1,6
2.175
4,3
1.603
3,8
12.842
15,6
4.073
6
992
3,2
960
2,3
992
3,5
1.887
3,7
588
1,7
919
3,8
591
1,9
561
2,5
735
2,3
1.077
4,1
1.016
3,7
365
1
931
2,8
101.846
3,39
3° Paris et la Seine. — Il nous faut dire un Bpot du département de la
Seine en particulier.
Comme dans l'ensemble du pays, le total des électeurs n'y a pas augmenté,
à l'époque de la Restauration. De 12.842 en 1871, on le voit s'abaisser à 9.983
en 1820 et il demeure le même en 1830 (10.023). La proportion des électeurs à
la population qui était de 12,4 pour 1.000 habitants en 1817, n'était plus, en
1830, que de 10,6 dans le département de la Seine. D'après la loi de 1820, la
Seine formait huit collèges d'arrondissement (Voir le tableau VIII). Sauf les
Tableau VIII
Collèges électoraux de la Seine en 1820.
ARRON-
ÉLECTEURS
ACCROISSEMENT (-)-)
POPCLiATION
ACCROISSEMBST
ÉLECTEURS
cbliLiÈCÈS
DISSEMENTS
cor'es-
poudants
1820
1830
OU
UIMINOTION ( — )
di-s élrcteurs
1817
1831
OU
D I M ! s 0 T I 0 H
1817-1831
pour
1.000 habitants
en 1830
I
l<îr et 4^
1.673
1.642
— 31
97.000
112.000
+ 15.000
14,6
II
2'
1.480
1.627
+ 147
65.000
75.000
-f 10.000
21,7
III
3' et 5-
1.493
1.558
4- 65
100.000
113.000
+ 18.000
13,2
IV
6= et 8'=
1.482
1.500
+ 18
143.000
154.000
+ 11.000
10,0
V
7= et 9'
1 228
1.154
— 74
98.000
103 . 000
-|- 5.000
11,2
VI
10'
817
839
+ 22
76.000
84.000
-f- 8.000
10,0
VII
11' et 12'
1.270
1.141
— 129
128.000
128.000
>'
9,0
VIII
l'OTAL. .
Banlieue
540
562
+ 22
93.000
164.000
+ 71.000
3,5
9.983
10.023
-f 40
806.000
94.S.000
+ 142.000
10,6
11^ et X® arrondissements, qui constituaient chacun un collège électoral séparé,
les autres étaient réunis deux par deux dans une même circonscription, et la
banlieue n'en formait qu'une seule. La population, comme le nombre des élec-
teurs, variait beaucoup d'un collège à un autre. De 1817 à 1831, la population
de la Seine avait augmenté de 142.000 unités; mais cela ne pouvait donner
lieu à aucun changement dans la répartition des sièges, la loi étant muette à
ce sujet. Le total des électeurs n'avait pas varié de 1820 à 1830; il n'y avait
qu'une augmentation un peu sensible dans le 2^ collège correspondant au 11^ ar-
rondissement. C'était, du reste, celui où la proportion des électeurs était de beau-
coup la plus forte, 21,7 pour 1.000 habitants, tandis qu'elle n'était que de 10,6
dans l'ensemble du département, et de 12,1 o/oo dans Paris même. C'était le
quartier du riche commerce, Chaussée-d'Antin et Palais-Royal notamment.
Partout ailleurs, le taux des électeurs était sensiblement inférieur. Il était le
même à peu près — de 13 à 14 pour 1.000 habitants — dans les 1®^ et 3® col-
lèges, formés, le premier, des P^ et IV^ arrondissements, le second, des III®
et V®, soit toute la région de Paris s'étendant du Mail aux Champs-Elysées
et correspondant partiellement aux I®'", II® et VIII® arrondissements actuels,
Il n'y avait que 10 à 11 électeurs'par 1.000 habitants dans les 4®, 5® et 6® col-
lèges; le 4® comprenait les VI® et VIII® arrondissements (le Marais, Porte-
Saint-Denis, Popincourt, etc.); le 5® correspondait aux VII® et IX® arrondisse-
ments (la Cité, l'Arsenal, Sainte-Avoie, etc.). Le 2® et le 6® collège, nous l'avons
dit, ne renfermaient chacun qu'un arrondissement, les II® et X®. Leur popu-
lation était au-dessous des autres circonscriptions ; ils correspondaient, partiel-
lem.ent il est vrai, le 2® collège à la Chaussée-d'Antin, le 6® au faubourg Saint-
Germain. De tous les collèges électoraux purement parisiens, c'était le 7® qui
détenait la plus faible proportion d'électeurs, 9 pour 1.000 habitants; il corres-
pondait à peu près aux V® et VI® arrondissements d'aujourd'hui. C'était alors
des quartiers plutôt ouvriers; il en était de même de la banlieue; aussi cette
8® circonscription, qui était la plus peuplée, 164.000 âmes, soit le double et
plus que les 2® et 6®, et qui avait gagné plus de 70.000 unités depuis 1817,
n'avait-elle qu'une proportion infime d'électeurs, 3,5 par 1.000 habitants.
{A suivre.) P. Meuriot.
— 234 —
V
CHRONIQUE DES QUESTIONS OUVRIÈRES ET DES ASSURANCES
SUR LA VIE
Le DalIoz et la guerre (1). — Depuis ma dernière chronique, la liste des interventions
législatives et réglementaires s'est encore accrue; ce développement, qui s'explique
par la prolongation des hostilités, des mesures à prendre par les pouvoirs publics,
impose aux commentateurs et aux rédacteurs de recueils une tâche toujours accrue :
cette tâche ne résulte pas seulement de la continuation d'une œuvre dont une sorte
de mirage paraît sans cesse éloigner le terme désiré; elle dérive également de la néces-
sité de fournir au lecteur les moyens de retrouver au milieu d'une brousse réglemen-
taire le fil conducteur indispensable aux recherches de la pratique : le besoin de célé-
rité est, en effet, d'autant plus impérieux dans les recherches que les situations envi-
sagées affectent un caractère temporaire inhérent à la période des hostilités et récla-
ment des s(dutions immédiates comme toutes celles qui se rattachent à des événements
de guerre. L'administration Dalloz a mis tout en œuvre pour satisfaire à ce pro-
gramme : d'une part, elle a échelonné à dos dat. s de plus en plus rapprochées les
tomes de son encyclopédie sur La Guerre de 1914, dont les derniers volumes ne portent
plus que sur des périodes de six semaines; c'est ainsi qu'à la différence des sept pre-
miers qui embrassaient au minimum deux mois, les trois derniers volumes ne visent
que six semaines au plus : le dernier volume, par exemple, est limité aux deux dates du
15 février et du 1^^ avril 1916; d'autre part, de même que la table générale alphabé-
tique des cinq premiers volumes se trouve h la fin du tome V, de même celle des cinq
derniers figure dans les soixante-dix dernières pages du tome X. Si l'on ajoute que
cette table évoque par les mots : accidents du travail, assurances, exploitations houil-
lères, orphelins (pensions), ouvriers, pensions, retraites ouvrières, sociétés de secours
mutuels, veuves, une multitude de questions ouvrières et de matières d'assurances,
on comprendra que je n'hésite pas à étendre à. ce dernier volume paru les éloges appli-
qués aux précédents et sanctionnés par la faveur croissante d'un public sans cesse
plus fidèle et plus nombreux.
La Loi Dalbiez. — Indépendamment des recueils généraux qui comprennent la
série des dispositions législatives, la publication de volumes spéciaux est nécessitée
par l'importance de certaines lois et par le caractère touffu du cortège réglementaire
qui les accompagne.
Tel est le cas de la loi du 17 août 1915 assurant la juste répartition et une meilleure
utilisation des hommes mobilisés et mobilisables, loi dénommée Dalbiez du nom do
son promoteur. A cette loi se rattachent l'instruction ministérielle du 30 août 1915
et la circulaire ministérielle du 2 septembre suivant relatives, l'une et l'autre, à
l'application de l'article 3 qui vise l'examen des auxiliaires et réformés par une com-
mission spéciale de réforme, l'instruction ministérielle du 19 septembre 1915 et la
circulaire ministérielle du 15 octobre suivant publiées pour l'applfcation des mesures
de l'article 6 qui règlent la situation du personnel des usines travaillant pour la
défense nationale, l'instruction ministérielle du 18 septembre 1915 relative aux dis-
positions de l'article G qui visent spécialement le personnel des houillères, l'instruc-
tion ministérielle du 27 octobre 1915 qui trait.' de l'application de l'article 9, organi-
sant une inspection des formations sanitaires et services de toute nature, à l'effet
de renvoyer, dans les armées, les gradés et les hommes de troupe qui, aptes à faire
campagne, se trouveraient indûment ou en surcroît des besoins dans ces formations
ou services.
De là l'utilité du volumi? où l'administration Dalloz (2) no s'est pas contentée de
la reproduction de ces textes, mais en outre a présenté le commentaire de chaque
article de la loi avec la classification des mesures édictées et leur interprétation basé(>
(1) La Guerre de 1914, dix volumes parus : 2 francs chacun. Paris, 11, me Soufïlot.
(2) La Loi Dalbiez, 2 francs. Paris, 11, rue Soufllot*
— 235 —
tant sur les rapports et les débats parlementaires que sur les instructions et circu-
laires rédigées postérieurement à la promulgation de la loi.
Le volume est d'ailloiu-s pourvu de deux tables, l'une chronologique, l'autre alpha-
bétique, et le commentaire juridique porte au haut de chaque page le numéro de
l'article analysé au cours de celle-ci.
Ces quelques explications sur la constitution de ce livre permettent, je l'espère,
d'en apprécier toute la valeur théorique et pratique.
Les changes et la guerre. — Aucune institution financière ne peut s'affranchir
de la répercussion du change : la question est donc du domaine d'une chronique
d'assurance. A ce titre, il convient de mentionner le remarquable volume (1) que
vient de publier la célèbre maison d'édition dt Sir Isaac Pitman, do Londres. L'au-
teur, M. William F. Spalding, a abordé par la base cette étude dont la complexité
effraie d'ordinaire à tort, mais dont les difficultés réelles s'opposent aux improvisa-
tions et ne permettent point de suppléer par l'ingéniosité à la connaissance appro-
fondie de la question. C'est donc à juste titre qu'il (^xpose tout d'abord les principes
des changes étrangers, puis les bases de leurs cours, l'intervention du numéraire
dans les transactions internationales, la cotation des changes, la signification des
termes usités dans la matière, l'influence de la présente guerre, le rôle du crédit, le
mécanisme de la négociation des traites. On ne saurait, d'autre part, contester le
puissant intérêt des chapitres où M. William F. Spalding traite des échanges avec
l'Inde, la Chine et en général l'Extrême-Orient. La multiplicité des exemples atteste
les connaissances pratiques acquises par l'auteur grâce à sa situation profession-
nelle dans les milieux bancaires, de même que la valeur et la précision des déve-
loppements théoriques résultent de la science consommée de l'éminent maître du
Collège de la Cité de Londres.
En un mot, le public est certain de trouver dans ce volume, avec la netteté didac-
tique et la sûreté de documentation, l'illustration vivante de règles abstraites et la
consécration nouvelle de ce précepte ancien, mais toujours exact, que « ce que l'on
conçoit bien s'énonce clairement ».
L'assurance sur la vie, moyen de crédit. — Les tragiques circonstances de l'heure
présente n'ont pas seulement surpris les imprévoyants ou les amateurs d'illusions :
elles ont, de plus, attiré l'attention du public sur des questions dont il ignorait
l'existence ou méconnaissait la portée. De ce nombre est le rôle de l'assurance sur la
vie en matière de crédit. Dans un volume où il en aborde tous les aspects (2),
M. Barrère, docteur en droit, lauréat de la Faculté de Toulouse, avoué au tribunal
de première instance de Perpignan, examine d'abord l'assurance sur la vie comme
moyen de crédit pour l'assuré, selon que la police est directement souscrite en
faveur du créancier ou que la police existante est utilisée comme instrument de cré-
dit (divers modes d'attribution et de transmission à titre onéreux, effets des divers
modtjs, principe d'attribution, principe de transmission), et il traite de la réalisation
de l'assurance; puis il étudie l'assurance sur la vie comme moyen de crédit pour le
bénéficiaire, selon que la police est directement souscrite en faveur du bénéficiaire,
ou que la police déjà existante est utilisée comme instrument de crédit (constance
du bénéfice, procédés d'utilisation du bénéfice à titre de crédit), et, comme dans
le précédent chapitre, il termine cette partie de son ouvrage par l'exposé de la réali-
sation du gage. Enfin un appendice est consacré au procédé qui permet à l'assuré
d'emprunter à son assureur sur son propre contrat. La multiplicité des références
met en lumière la richesse de documentation de l'auteur, et la précision de son style
nerveux atteste sa maîtrise du sujet. Tous les lecteurs de l'ouvrage s'associeront, j'en
ai la ferme conviction, au vœu que M. Barrère, dans une édition enrichie par de nou-
veaux aperçus, expose l'état de la question à l'étranger et dote son précieux volume
d'une bibliographie sélectionnée.
Les prix et la guerre. — Le Bureau de statistique du travail de Washington a assumé
(1) Foreign Exchanges and Foreign hills in theory and in practice. In-8, relié toile,
227 pages, 5 shellings.
(2) L'Assurance moyen de crédit. In-8, 102 pages. Fontemoing, Paris*
— 236 —
la tâche de publier chaque année, depuis 1900, sauf une interruption en 1901, la valeur
des prix de gros; il a dfpuis 1902 donné des index-nunibcrs : le bu+ de cette enquête
n'él ait autre que la continuation des recherches effectuées pour le Cornit é des Finances
du Sénat sur la période 1840-1891, sous la direction de M. Roland P. Falkner. Toute-,
fois, lors de la mise on œuvre des documents réunis en 1902, il fut constaté que
divers articles compris dans le rapport du Comité avaient cessé d'être fabriqués ou
avaient perdu leur-importance sur le marché; par contre, des articles qui ne figuraient
point dans ce rapport avaient atteint un développement qui en comporlait la men-
tion. Do là, l'obligation d'établir une nouvelle série d'index-numbers basés sur, la liste
revisée des produits et portant sur la période dont l'origine était 1890. Telle est la
série qui a élé continuée dans les rapports ultérieurs.
Le volume que j'ai sous les y( ux et qui, désigné par le n^ 173, est intitulé: Index-
numbers of wholesale priées in the United States and Foreign Coiintries, ne tire pas
uniquement sa valeur de cotte richesse de documentation que M. Royal Meeker,
l'éminent commissaire du département du Travail, sait constituer et féconder par
une méthodique élaboration. On y trouve également, sous la signature de M. Wcsley
C. Mitch;'!!, une é'ude théorique et critique de plus de cent pages, r(>lative à réta-
blissement et à, l'ulilisation des index-numbers : l'histoire de ces symboles, les diffi-
cultés de la mesure de la variation des prix, les caractéristiques de leurs fluctuations,
la variété des méthodes employées pour l'établissement des index-numbers, la com-
paraison des principaux ir.dex-numbers d'Amérique pour les années 1890 à 1913
servent de base à des conclusions aussi compréhensiyes que motivées. Cette pre-
mière partie du volume est suivie d'une seconde qui présente la monographie des
index-numbers aux États-Unis et dans les pays étrangers; l'ouvrage se termine par
deux chapitres consacrés l'un aux travaux de l'Institut International de Statistique
dans sa session dé La Haye en 1911, l'autre à, une bibliographie sélectionnée com-
plém(mtaire. On peut donc regarder ce volume de plus de 300 pages comme un traité
en même temps que comme une encyclopédie de la matière, dont les deux auteurs,
MM. Meeker et Mitchell, peuvent à bon droit revendiquer l'honneur.
Les publications du Bureau de statistique du Travail des États-Unis. — Depuis
sa création, en janvier 1885, le Bureau de statistique du Travail. des Etats-Unis a
publié 25 rapports annuels, 12 rapports spéciaux et 173 bulletins, indépendamment
de 50 volumes de rapports divers présentés en exécution de lois du Congrès. Cette
abondante moisson exige une classification méthodique pour être utilisable par les
chercheurs. De là, l'utilité du volume intitulé : Siibject index of the publications of
the United States Bureau oj labor statistics up ta May 1 1915 (n» 174) qui donne,
à la suite d'une introduction, la liste chronologique des publications (rapports annuels,
rapports spéciaux, rapports divers, bulletins bimestriels, bulletirs publiés par séries
depuis le l^rjuin^,!, 1912), pais la liste par matières, véritable table analytique dans
l'ordre alphabétique des sujets traités dans les pubîicadons du Bureau de statistique,
enfin la liste des bibliothèques où peuvent être trouvées ces publications, soit biblio-
thèques alimentées par des envois officiels, soit bibliothèques publiques, soit bibîio-
thèqu(>s d'établiss(mients d'enseignement, de cercles, de villes, de groupements com-
merciaux, soit bibliothèques du Canada, de Cuba, des Philippines et de Porto- Rico.
Cette niLution des lieux cjui contiennent des documents officiels ist particulièrement
utile au public et non moins efficace pour la difTusioe des matériaux accumulés :
elle doit être retenue comme un exemple dont il serait heur^aix de voir s'inspirer les
gouvernomcnis européens.
_X'assurance contre les accidents du travail aux Pays-Bas. — Au milieu de la
tourm(;nle qui i niraînf les belligérants dar.s l'épopée la plus sanglante de l'histoire,
la constatation des travaux pacifiques des peuples neutres exerce ure influence
sédative sur des espriis habitués par la proloigation de la lutte à l'interruption
d'œuvres similaires. De ce nombre est le magistral rapport que M. Treub, ministre
des Finances des Pays-Bas, a présenté à la Reine sur le fonctionnement de l'Établis-
sement royal d'assurance contre les accidents du travail en 1914. Ce document
s'ouvre par l'exposé de la constitution de l'établissement au double point de vue
du personnel et de l'administrai ion; il se continue nol animent par des développe-
ments sur le domaine de l'obligation de l'assurance et sur la classification des entre-
prises assuj(4ties, sur les conditions dans lesquelles les exploitations assujetties sup-
portent le risque professionnel, par deà indièations relatives aux accidents survenus
— 237 —
tant au point de vue de leur constatation que de leur réparation, par l'exposé de
la situation financière, de la situation juridique sous le rapport des relations avec
le droit civil, par l'analyse de l'application de la loi de 1901, par la statistique des
pénalités intervenues, enfin par le résumé de la jurisprudence.
On peut donc constater combien ce volume, illustré d'ailleurs par des graphiques,
est riche en documents où la théorie s'éclaire des lumières de la pratique, et il convient
d'en reporter l'honneur sur M. Naest, l'éminent président de la Direction de l'Éta-
blissement royal d'assurance.
L'assnrance contre les accidents du travail en Suède. ^~ Le rapport que les hommes
de science et de pratique attendent toujours avec une légitime impatience et accueil-
lent avec une faveur toujours croissante, dans lequel la Direction de l'Établissement
suédois d'assurance présente les résultats d'application de l'assm-ance contre les acci-
dents du travail, a été publié pour l'année 1914. On y trouve, notamment, à la suite
d'une introduction, des renseignements relatifs aux entreprises- et aux ouvriers
assurés, aux achats de rentes viagères, aux indemnités allouées, aux résultats finan-
ciers, à l'assurance des pêcheurs contre les accidents, à l'allocation d'indemnités
par suite de blessures reçues au cours du service militaire, aux frais d'administration,
aux décisions formulées par l'Établissement d'assurance pour el et ermir.tr le degré
d'invalidité. Une série de tableaux indique le nombre des années de travail et les
données relatives aux accidents qui ouvrent droit à indemnité soit au cours, soit
en dehors du travail, la statistique détaillée des cas d'invalidité permanente et de
décès (avec répartition d'après le groupe d'industrie, le sexe, l'âge, le degré d'inva-
lidité, la cause de l'accident, la partie du corps lésée). Un résumé en français met
à, la elisposition des lecteurs non polyglottes les éléments fondamentaux du rap-
port.
En un mot, ce précieux document met une fois de plus en évidence les rares qua-
lités d'administrateur du directeurde l'Établissement suédois d'assurance, M. J.May,
dont la réputation, d'ailleurs, n'est plus h. faire.
L'activité de cette administration ne s'est point, du reste, limitée au domaine du
passé : on en trouve la preuve dans les remarquables considérations qu'elle a pré-
sentées sur le projet de loi relatif à, l'assurance obligatoire contre les accidents, dont
l'entrée en vigueur n'est pas prévue à une date antérieure au 1^^ juillet 1917 et
peut-être au 1®^ janvier 1918.
L'assurance contre le chômage en Danemark. — Le rapport de l'Inspection du
service de lutte contre le chômage en Danemark, durant l'exercice du 1^^ avril 1914
au 31 mars 1915, apporte les données essentielles sur le fonctionnement de l'assu-
rance contre le chômage, les ressources (cotisations, intérêts, subventions de l'Etat
ou des communes), les dépenses (secours quotidien, secours de voyage, secours de
déménagement, allocations en nature, frais d'administration), la liste des cinquante-
sept caisses de chômage avec indication de l'effectif de chacune d'elles, le nombre,
rapporté à un membre, des jours de chômage et des jours indemnisés distingués pour
chaque année depuis 1908, les indications analogues détaillées par caisse de chô-
mage pour le dernier exercice, les nombres de chômeurs, indemnisés ou non, répartis
par industries, enfin une statistique des chômeurs répartis d'après la durée du
chômage indemnisé, tels sont les éléments du rapport aussi condensé que substan-
tiel dont M. Black vient d'enrichir la collection des oeuvres relatives au chô-
mage. Il n'est pas inutile de souligner, à l'heure actuelle de stagnation des
affaires, la valeur pratique d'études de cette nature.
La statistique des accidents industriels dans l'État de New-York. — Le Bureau de
statistique et d'informations de l'État de New- York vient de publier, sous la direc-
tion de la Commission industrielle, un volume relatif à la statistique des accidents
industriels (no 75), qui fait suite aux publications trimestrielles de 1907 à 1913, au
bulletin n^ 47 de 1911, aux statistiques parues soit dans les rapports anruels de 1901
à 1911, soit dans le Bulletin n» 68 pour les années 1912 et 1913.
Le Bulletin n" 75, daté de mars 1916, comprend trois parties : la première contient
la statistique des accidents déclarés durant l'année qui prend fin le 30 septembre
1914, la seconde est une discussion relative k l'effet des appareils de sécurité, le
troisième est une analyse des causes d'accidents.
— TSS —
Les conclusions de ces deux dernières parties (p. 10 et 23) méritent une mention
spéciale :
10 De la seconde partie il résulte en premier lieu que ni les patrons ni les ouvriers
ne reconnaissent la nécessité d'utiliser les dispositifs de sécurité connus contre les
accidents de machines et, en second lieu, que de tels dispositifs, qui seraient efficaces
et pratiques, sont encore à l'état embryonnaire;
20 De la troisième il se dégage que : a) le degré de fréquence des accidents est, dans
l'ordre décroissant des causes, dû aux machines, à la chaleur et à l'électricité, à la chute
de personnes, aux poids et à, la chute d'objets, enfin à des causes diverses; b) dans
les mines et les carrières, ce sont les poids et la chute d'objets, puis les machines, la
chaleur et l'électricité, la chute de personnes' et les causes diverses qui occasionnent
les accidents; c) dans les travaux du bâtiment et du génie civil, ce sont les chutes de
personnes, puis les machines, la chaleur et l'électricité, les poids et la chute d'objets,
ainsi que les causes diverses, qui, dans l'ordre de fréquence décennante, entraînent
les sinistres industriels. D'ailleurs, les machines peuvent déterminer la chute des per-
sonnes, et l'on compte sur l'achèvement des passages souterrains à. NLW-York pour
réduire les cas de décès causés par les poids et les chutes d'objets dans les industries
du bâtiment et du génie civil.
Ce rapport constitue un nouveau service rendu à l'étude de la prévention des
accidents, et nous devons en féliciter M. Louis Wiard, le commissaire du Bureau de
statistique de New- York.
Maurice Bellom.
VI
VARIÉTÉ
A PROPOS DE LA POPULATION ÉTRANGÈRE ET CULTUELLE DE L'ITALIE
Parmi les grands Etats de l'Europe, aucun ne possède une unité ethnique et confes-
sionnelle aussi complète que l'Italie. La péninsule, dans sa presque totalité, est
de race italienne et de religion catholique (il ne s'agit bien entendu que de la religion
déclarée au recensement).
Lors du dernier dénombrement, celui du 10 juin 1911, le total des étrangers demeu-
rant en Italie n'était que de 79.756, soit 0,23% de la population du royaume, et l'ac-
croissement était peu sensible depuis 1901, date à laquelle le nombre des étrangers
était de 61.600. En 1901, le recensement avait distingué parmi les étrangers la popu-
lation habituelle et la population occasionnelle. Le premier groupe comptait près de
38.000 unités, soit 65% du total des étrangers recensés alors en Italie. En 1911,
l'Administration a distingué la population étrangère d'après la date de l'établisse-
ment dans le pays, soit depuis plus de trois mois ou moins de trois mois, une rési--
dence de plus de trois mois étant considérée comme caractérisant la population
habituelle. Dans ces conditions, la population étrangère établie dans le royaume
serait de 50.232 personnes; mais près d'un quart du total des étrangers — près de
20.000 — n'ont donné aucune indication de la durée de leur séjour. 11 est donc fort
difîicile d(! distinguer la population habituelle de la population occasionnelle. Cepen-
dant la profession des étrangers peut fournir quelques éclaircissements à ce sujet.
En effet, sur l'ensemble des étrangers, il y a plus de 11.000 propriétaires et rentiers
{henesiaidi), plus de 11.700 étudiants à différents titres, enfin les étrangers amenés
en Italie pour la santé de leur famille, et les enfants de moins de dix ans sont au
nombre de plus de 20.500. Ces diverses catégories de population appartiejinent plutôt
à la population oc«asionnelle et on ne pourrait guère évaluer à plus de moitié du total
l'effectif des étrangers demeurant en Italie de façon permanente.
L'Italie ne saurait donc être considérée comme un pays d'immigration. Ce qui
le prouve, c'est la presque égalité des sexes dans la population étrangère : 40.031
hommes et 39.725 femmes. Or, on sait que, dans toute population immigrée, les hom-
mes ont une proportion très forte. D'autre part, l'Italie ne peut attirer les ouvriers
— 239 —
étrangers; elle a trop de main-d'œuvre chez elle et elle en exporte dans de nombreux
pays. Aussi la plupart des étrangers appartenant à des professions actives sont-ils des
industriels (7.448), des commerçants (3.274), banquiers, etc. Enfin il ne faut pas
négliger les domestiques amenés par le^ familles riches (plus de 4.400 personnes).
La France vient au premier rang de la population étrangère de la péninsule, avec
plus de 15.000 ressortissants ou 18,8% du total. \'iennent ensuite l' Autriche-Hongrie,
avec près de 12.000; la Suisse, avec 11.121; l'Allemagne, avec 10.71.5; l'Angleterre,
avec plus de 6.100. La Russie ne compte que pour moins de 1.900 sujets. Parmi les
étrangers non européens, les Etats-Unis donnent le plus fort contingent, avec près
de 5.000 personnes; il y a un peu plus de 4.000 Argentins et de 3.000 Brésiliens.
Naturellement, la répai'tition des étrangers varie beaucoup suivant les régions.
Celle qui en compte le plus est la Lombardie, avec 17.100, ce qui est encore un chiffre
bien modeste, puisqu'il n'y représente que 0,30 % de la population totale. Le Piémont
compte 13.300 étrangers; la Ligurie et le Latium un peu moins de 10.000; la Vénétie
et la Toscane, chacune 7.000. C'est dans le Piémont que les Français ont leur plus
nombreuse colonie, 5.200 unités, plus du tiers de leur effectif total; ils sont plus de
3.000 en Ligurie et 1.600 dans le Latium. Les Austro-Hongrois sont surtout nombreux
dans la Lombardie (3.400) et la Vénétie, les Suisses en Lombardie, comme les Alle-
mands. Les Anglais ont leurs plus forts groupes dans la Ligurie, la Toscane et Rome.
Les Américains (États-Unis) ont leurs principales colonies dans le Latium et en Cam-
panie.
La minorité confessionnelle (de religion déclarée) ne comprenait en 1911 que
123.253 protestants et 34.324 israélites, la population catholique étant de 32.983.000
habitants et représentant ainsi plus de 95 % de la population totale du royaume.
De 1901 à 1911, le nombre des israélites avait subi une baisse légère (on en comptait
en 1901 35.617); mais le total des protestants avait augmenté d'une manière très
sensible, puisqu'on n'en comptait que 65.595 en 1901. Leur effectif avait donc pres-
que doublé de 1901 à 1911. Dans la population étrangère, la proportion des protes-
tants était particulièrement élevée : elle était de 22,8 % au lieu de 0,40 dans l'en-
semble de la population. '
Dans une seule région de l'Italie, le protestantisme a un caractère autochtone,
c'est dans le Piémont, notamment dans la province de Turin où se trouvent les
Vaudois.Le Piémont compte plus de 25.600 protestants dont 19.560 dans la province
de Turin. Hors le Piémont, la population protestante ne dépasse 10.000 âmes que dans
trois régions : Lombardie, Pouilles et Sicile. Dans le Latium, elle n'est que de 4.624
personnes.
Quant aux israélites, leur groupement le plus nombreux se trouve dans le Latium,
plus de 7.000 individus, soit le cinquième de leur total. Ailleurs, leur effectif ne dé-
passe 4.000 que dans le Piémont, la Lombardie et la Toscane.
LIne particularité des deux minorités cultuelles est que la majorité y appartient
aux hommes : leur proportion est de 55,7 % et de 51 % respectivement chez les pro-
testants et les israélites, tandis qu'elle est de 48,5 seulement chez les catholiques.
Nous devons enfin noter que la statistique italienne a relevé le nombre des citoyens
qui n'ont pas fait de déclaration cultuelle ou ont déclaré n'appartenir à aucun culte.
En 1911, le total de ceux qui n'ont rien répondu à la question cultuelle était de
653.000 et ceux qui ont répondu négativement étaient au nombre de 874.500 (dont
315.000 femmes), soit 2,50 % de la population totale. C'est dans l'Emilie que cet
élément « areligieux » est surtout nombreux, plus de 258.000 habitants ou 9,4 %
(plus de 14 % dans les deux provinces de Reggio et Ravenne). Il y en a encore
plus de 100.000 dans la Lombardie et la Toscane, avec une proportion respective
de 3 et 4,7 % de la population totale. D'une façon générale, le nombre des haljitants
di nessuna religione se rencontre surtout dans le nord de la péninsule : l'ensemble
des régions du Piémont, Ligurie, Lombardie, Emilie et Toscane en compte près de
660.000, soit les trois quarts de la population de cette catégorie. C'est pour l'en-
semble une proportion de 4,6%. Seule, dans le Nord, la Vénétie fait exception, sa
proportion n'est que de 1 %. C'est le taux de l'Italie Méridionale dans l'ensemble;
il est de 2 % dans le Latium et dans les Pouilles : c'est le maximum.
P. Meuriot.
- 2i0 -
VII
LISTE DES DOCUMENTS PRÉSENTÉS DANS LES SÉANCES DES 19 AVRIL ET 17 NIAI 1916
ORIGINE ET NATURE
INDIGES
de
ORIGINE ET NATURE
INDICES
de
des
classement
des
CLASSEMENT
dans la
dans la
DOCUMENTS
Bibliothèque
DOCUMENTS
Bibliothèque
DOCUMENTS OFFICIELS
tique de l'Empire du Japon. 3o= an-
Austrsdie
née. 1916
Jal 16
Bureau confédéral du Recensement et de
Statistique (Melbourne). — Naviga-
tion et migration d"outre-mer pour
— Mouvement de la population de l'Em-
pire du Japon pendant l'année 191 2
(nombres absolus et proportions). .
Ja2|2
Tannée igiS
A»a<5 15
Suède
DÉPARTEMENT CiviL. — Naissances illégi-
— Recensement de la Confédération des
États d'Australie du 3 avril 191 1
times et mortalité. 1915
SAa23 15
(vol. II, tables détaillées)
As»!^ Il b
— Statistique agricole. 191.5
SAa4 15
Cuba (République de)
— Tables de mortalité et de survie pour
Secrétariat du Commerce. — Commerce
la période 1901-1910
SAalS 01-10
extérieur, !<■■■ semestre 1916 et an-
DÉPARTEMENT DES FINANCES. — Fabrica-
née fiscale 191 /J-igiB
Eucu<^^ 15 a
tion et vente de l'eau-de-vie et fabri-
cation du sucre de betterave. 1914-
Danemark
1915
Sel 14.15
Bureau statistique de l'État. — Gommuni-
— Banque de Suède. — Situations. Rap-
calions statistiques, A*" série, tome
ports annuels pour l'année 1915 . .
Scfi 15
XLVIII. 1916
Dal6 16 XLVIII
DÉPARTEMENT DE LA JuSTICE. Rapport
annuel sur les prisons. 1914. . . .
États-Unis
Ssual 14
Ville de Stockiiolm. — Annuaire statis-
DÉPARTEMENT DU TRAVAIL. — Bulletin
no 180. — The boot and shoe indus-
tique pour 1914
Ssa2 14
try in Massachusetts as a vocation
Uruguay
for women. 1916
Eui^ss 15
Ministère de l'Instruction pubuque. —
Inspection nationale de l'Instruction
Service de la Santé publique. — Coramu-
munity sickness survey Roches -
primaire. — Mémoire présenté à la
ter N. Y. Septembre 1915
Eu^di 15
Directiofl générale de l'Instruction
France
primaire par Abel Pérez, inspec-
Ministère du Travail. — Résultats sta-
teur national, pour 191 1 à 1914. . .
Uel 11-14
tistiques du recensement général de
la population, effectué le 5 mars
Inspection nationale de l'Instruction pri-
maire. — Annales de l'Instruction
191 1. Tome II : Population présente.
primaire. Année XII-XIII, tome XIII,
résultats par département
Fual'ï II b
no» 1-18, juillet 1914-décembre 1915.
Uc3 14-15
— Travaux des commissions mixtes dé-
partementales pour le maintien du
OOCUMENTS PRIVÉS
travail national. 1916. Tome I*;'
(Seine). Procès-verbaux des séan-
Chambre de Commerce de Marseille. —
ces. Rapports des sous-commis-
Les zones franches et l'exportation
sions. Vœux adoptés ... ... .
Fi">« 15
française
TIC 267
Italie
Simon (André). — Une période transitoire
Ministère de l'Agriculture, de l'Indus-
sera-t-elle nécessaire lorsque l'AI-
trie ET DU Commerce. — Statistique
sace-Lorraine fera retour à la France
annuelle des causes de décès pour
igiS
(agriculture et viticulture)'? . . . .
TU» 252
|Ba.2G|3
Dublin (Louis-I.) — Vital statistics io re-
lation to life insurance
7^1107
Japon
Frankel (Lee-K.) — Heights and vveights
Cabinet Impérial. — Bureau de la Statis-
of New York city childrcn 14 (0
tique générale. — Résumé statis-
iCyearsofage
Tî' III
Le Gérant: R. STEINHEIL
NANCT, IMPRIMERIE BERGER-LEVRAULT — JUIN igi6
JOURNAL
SOCIÉTÉ DE STATISTIQUE DE PARIS
N° 7. — JUILLET 1916
I
PROCÉS-YERBAL i3E LA SÉANCE DU 21 JUIN 1916
s O :iVC]VE-A.IRE
OUVERTURE DE LA SÉANCE PAR M. MALZAC, PRÉSIDENT, ET ADOPTION DU PROCES-VERBAL DE LA
SÉANCE DU 19 AVRIL 1916.
NÉCROLOGIE.
NOMINATIONS ET PRÉSENTATIONS DE MEMBRES TITULAIRES.
COMMUNICATIONS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL. — PRÉSENTATION D'OUVRAGES.
REMISE DE LA MÉDAILLE BOURDIN A M. MATRAT.
COMMUNICATIONS DE MM.
RENÉ PUPIN, SUR . LA BALANCE ÉCONOMIQUE DE LA FRANCE EN 1912 ET 1915 « ;
PAUL MEURIOT, SUR « LE COMMERCE DE L'ITALIE DANS LES QUINZE DERNIÈRES ANNÉES ».
OUVERTURE DE LA SÉANCE PAR M. MALZAC, PRÉSIDENT — PROCÈS-VERBAUX DES
SÉANCES DES 19 AVRIL ET 17 MAI 1916
La séance est ouverte à 11^ 40 sous la présidence de M. Malzag, président,
qui met aux voix l'adoption du procès-verbal de la séance du 19 avril 1916;
ce procès-verbal est adopté sans observations. M. le Président fait connaître
à la Société que le Journal de juin n'a pu être distribué, les événements mili-
taires ayant retardé la réception des épreuves; l'adoption du procès-verbal
de la séance du 17 mai est donc remise à une date ultérieure.
NÉCROLOGIE
M. le Président fait part à la Société du décès de deux de nos collègues,
MM. Camille Martinet, président honoraire à la Cour d'appel de Paris, mem-
bre titulaire depuis 1881, et Gustave Cauderlier, ingénieur, membre corres-
pondant de la Société à Bruxelles depuis 1900.
M. le Président adressera aux familles de MM. Martinet et Cauderlier
les condoléances de la Société.
1'* bAbiz. 57« VOL. — n' 7 17
— 242 —
NOMINATIONS ET PRÉSENTATIONS DE MEMBRES TITULAIRES
M. le Président met aux voix les candidatures de :
MM. Lacroix, secrétaire général de la Chambre de Commerce de Paris,
présenté par MM. Bellom, Cadoux et Barriol;
EvESQUE (Maurice), docteur en droit, présenté par MM. Desroys du Roure
et R.-G. Lévy;
Laurent, directeur général des Forges et Aciéries de la Marine, présenté
par MM. Brizon et Barriol.
Ces candidatures sont acceptées à l'unanimité et MM. Lacroix, Evesoue
et Laurent sont nommés membres titulaires.
M. le Président annonce qu'il a reçu les demandes d'admission en qualité
de membres titulaires de : ,
MM. Descombes (Paul), directeur honoraire des Manufactures do l'État,
président de l'Association centrale pour l'aménagement des montagnes, 102,
rue de Pessac, à Bordeaux, présenté par MM. Malzac, F. Faure et Barriol.
Sartiaux (Félix), ancien élève de l'Ecole polytechnique, chef des services
administratifs de la Compagnie du Chemin de fer du Nord, 108, rue Caulain-
court, à Paris, présenté par MM. Barriol et Girard.
Conformément aux précédents, M. le Président, d'accord avec le Conseil,
pense que la Société pourrait se prononcer immédiatement sur ces candida-
tures. Aucune objection n'étant présentée, MM. Paul Descombes et Félix
Sartiaux sont élus à l'unanimité membres titulaires de la Société.
COMMUNICATIONS DE M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ET PRÉSENTATION D'OUVRAGES
Le secrétaire général annonce qu'il a reçu pour la Société les livres suivants :
France. — Statistique agricole annuelle. 1913.
Statistique sanitaire de la France. 1^^ partie. — Villes de 5.000 habitants
et au-dessus. Année 1913.
Statistique des chemins de fer français au 31 décembre 1912 (France.
Intérêt général).
Statistique de la navigation intérieure. — Relevé du tonnage des mar-
chandises. Année 1913.
Exposé de la situation générale de l'Algérie présentée par M. Ch. Lutaud,
gouverneur général de l'Algérie.
États-Unis. — Compensation Législation of 1914 and 1915.
Norvège. — Statistique concernant le traitement des enfants moralement
abandonnés. Années 1912 et 1913.
Rapport sur l'état sanitaire et médical pour l'année 1913.
Rapports des préfets sur l'état économique et social des préfectures
pendant la période de 1906 à 1910.
Russie. — Commerce extérieur de la Russie par la frontière d'Europe. Janvier
et février 1916.
Commerce extérieur de la Russie par la frontière d'Europe et d'Asie.
1914. Volumes I et IL
Population par communes, cantons, juridictions, villes et préfectures
au 31 décembre 1915.
Annuaire statistique de la Suède. 3^ année' 1916. Publié par le Bureau
central de Statistique.
Il fait connaître en outre que M. Mortara, notre savant collègue, professeur
à l'Université de Rome, a adressé à la Société la copie de ses travaux les plus
importants, savoir :
Tables des survivances et dos variations do l'état civil; tables de la natalité
légitime pour la population féminine do la commune de Milan (1899-1902).
— 243 —
La mortalité en Bulgarie.
Polémique sur la mortalité.
Le monopole des assurances et la mortalité italienne.
La durée moyenne de la vie au point de vue de la production économique.
La mortalité selon l'âge et la durée de la vie au point de vue de la production
économique.
Annales de Statistique :
Sur les variations de fréquence de certaines anormalités rares selon graphique
des sujets.
Variations de la mortalité de génération en génération en Suisse.
Tables de mortalité avec la cause de la mort pour la population italienne
(1901-1910).
Sur les mesures de répression des anormalités collectives de variations indé-
terminées.
Les conceptions avant le mariage (Supplément à la procréation hors du
mariage).
Messine (Gom.ment on y vit).
Le mouvement de la population en Italie.
D'autre part, grâce à l'obligeante intervention de ]\L le D^" Chervin, M. Pe-
TROVicH a remis à la Société un grand nombre d'ouvrages statistiques qui ne
figuraient pas dans notre bibliothèque et parmi lesquels on peut citer :
Statistique des chemins de fer français au 31 décembre 1893. (France. Intérêt
général), l''^ partie. — (France. Intérêt local). 2« partie.
Répertoire de la législation des chemins de fer français au 31 décembre
1893.
Etude sur les principaux ports de commerce européens de la Méditerranée.
1883.
Rapport sur les tarifs des chemins de fer de la Confédération germanique et
de l'Empire d'Autriche. 1861.
Notice sur les chemins de fer de la Confédération germanique (2^ partie :
Exploitation commerciale). 1861.
Notice sur les chemins de fer de la Confédération germanique (3^ partie :
Exploitation technique). 1862.
Routes nationales. Recensement de la circulation en 1888.
Statistique de la navigation intérieure. Nomenclature et conditions de navi-
gabilité des fleivves, rivières et canaux. Relevé général du tonnage des mar-
chandises. Année 1889.
Valeurs mobilières. Russie. Réimpression de notices et des tableaux du
Bulletin russe de statistique. Mai 1900.
Résumé de la législation générale des chemins de fer allemands. 1894.
Résumé de la législation générale des chemins de fer russes. 1894.
Rapport sur les conditions dans lesquelles s'effectuent les transports des
céréales dans la Russie méridionale, par Ernest Pontzen.
Feuilles périodiques du Bureau royal de statistique de Prusse. 1891 et 1892.
Statistique des chemins de fer suisses pour les années 1888 à 1893.
Annuaire démographique et tableaux statistiques des causes de décès. 1894.
Rapport annuel de la Banque d'assurances mutuelles « Slavia » de Prague
pour l'année 1893.
Les chemins de fer en Amérique. 1882.
Rapport sur les tramways électriques. 1896.
Achèvement du canal à écluses de Panama.
Canal de Dortmund à Ems.
Bulletin de l'Institut International de Statistique. 1895.
— 244 —
Statuts de la Société anonyme hongroise d'assurances contre la grêle et
réassurances. 1890.
Les assurances agricoles en Bavière. 1889.
Bulletin statistique mensuel édité par la Commission centrale statistique
impériale et royale. Vienne, 1890.
Bulletin périodique pour l'ensemble des voies routières et d'intérêt local.
Wesen, 1892.
Mouvement de la population des pays de la Couronne de Hongrie en 1890
et 1891.
Résultats du recensement de la population effectué dans les pays de la Cou-
ronne de Hongrie au début de l'année 1891.
La production économique des pays de la Couronne de Hongrie en 1891 et
1892.
Trafic des marchandises dans les pays de la Couronne de Hongrie en 1893.
Statistique des chemins de fer allemands en exploitation d'après les données
des administrations de chemins de fer, élaborée par le Bureau des chemins
de fer de l'Empire. Années d'exploitation 1892-1893, 1893-1894.
Exposé d'ensemble des données les plus intéressantes de la statistique des
chemins de fer allemands.
Conditions fondamentales de l'Association d'assurances des unions écono-
miques hongroises, créée par la première Société générale hongroise d'assu-
rances.
M. le Président adressera à MM. Mortara et Pétrovich une lettre officielle
de remerciements.
M. le Secrétaire général donne connaissance à la Société de la lettre qui lui
a été envoyée par le Comité du Livre et il croit répondre aux sentiments una-
nimes du Conseil d'administration en engageant les membres de la Société
à donner leur appui à cette œuvre de propagande française dont le siège social
est situé 101, rue du Bac, à Paris.
n informe également les membres de la Société que, dans un but de propa-
gande, la Librairie Berger-Levrault, 5-7, rue des Beaux- Arts, à Paris, a été
autorisée à reproduire, dans la collection bien connue de ses Pages d'Histoire,
1914-1916, le Tableau des Forces économiques des Puissances belligérantes avant la
guerre, qui résume un travail très complet et très consciencieux de la Chambre
de Commerce de Nancy, -que l'on doit féliciter vivement de son initiative.
Ce tableau, qui s'impose à l'attention de toutes les populations de l'Entente
et des pays neutres, est présenté sous la forme d'une élégante plaquette; à
la suite de conclusions saisissantes imposées par l'examen des chiffres, on a
reproduit le texte intégral des résolutions adoptées par la récente Conférence
économique des Alliés.
M. le Secrétaire général annonce que la Société a reçu la médaille commémo-
rative pour laquelle elle avait souscrit au Comité de Foville. Cette médaille,
qui reproduit très fidèlement les traits de notre cher et regretté ancien prési-
dent, sera précieusement conservée dans les archives de la Société et confiée
à notre trésorier M. Matrat.
M. A. Neymarck annonce à la Société qu'il vient de recevoir les exemplaires
du lO*' Rapport sur les statistiques internationales des valeurs mobilières
présenté par lui à Vienne, et il dépose cet ouvrage sur le bureau.
Les statistiques des valeurs mobilières y sont présentées sur les mêmes bases
et dans la même forme que dans les rapports précédents parus depuis 1891;
tous les éléments en ont été contrôlés avec soin. M. A. Neymarck rappelle
que le rapport comporte un exposé général, un chapitre afférent aux statis-
tiques européennes, un chapitre afférent aux statistiques extra-européennes,
un chapitre afférent aux statistiques diverses et une conclusion générale, aux
termes de laquelle — bien qu'elle ait été rédigée avant la guerre actuelle —
l'auteur déclare qu'il n'a rien à changer.
— 245 —
REMISE DE LA MÉDAILLE BOURDIN A M. MATRAT
M. le Président fait connaître que, comme sanction de la décision prise
à l'nnanimité au cours de la séance du mois dernier, il a la très agréable mission
de remettre à M. Matrat, trésorier de la Société, la médaille du prix Bourdin.
M. Matrat, en recevant la médaille des mains du président, renouvelle à
ses collègues l'expression do ses très vifs remerciements.
COMMUNICATION DE M. RENÉ PUPiN SUR « LA BALANCE ÉCONOMIQUE DE LA FRANCE
EN 1912 ET 1915 »
M. le Président donne la parole à M. Pupin pour le développement de sa
communication.
Dès le début de cette dernière, l'auteur pose en principe que la balance du
commerce se dérobe aux observations nécessaires des économistes et des statis-
ticiens,'qui doivent étudier séparément les trois éléments ae notre commerce
extérieur (Objets d'alimentation. Matières premières., Produits fabriqués)
comme formant autant de compartiments et anches, et passer ensuite à l'examen
approfondi de la balance économique.
Lorsqu'on procède ainsi, on est obligé de constater :
l" Que la France exportait (avant la guerre, en 1911-1913) pour 115 francs
de produits fabriqués, tandis qu'elle en importait pour 47 francs, soit une
balance nettement à son avantage;
2o Que l'importation d'objets d'alimentation procédait d'une nécessité,
d'ailleurs accrue par plusieurs récoltes déficitaires, et que l'interdiction de cette
importation nous eût placés, ^délibérément, dans la situation peu enviable
qu'occupe aujourd'hui l'Allemagne en face du blocus anglais;
3^ Que nos achats de matières premières représentent 58 % de notre impor-
tation totale, que ces importations sont indispensables à l'industrie et au
commerce français, dont l'activité se traduisait en 1912 par une production de
15 milHards de revenus (salaires, profits, dividendes, etc.).
Il est d'ailleurs un fait que l'on ne doit pas oublier, c'est qu'il existe une
« Épargne de l'importation » toute semblable à l'épargne de nos revenus
(produits étrangers non périssables, dont la valeur s'incorpore annuellement
dans l'inventaire de nos biens).
L'auteur dresse ensuite un tableau de la balance économique de 1912 : le
montant total des engagements liquidés ou régularisés atteint 21 milliards
500 millions en chiffres ronds (dettes et créances de la France au dehors) et se
solde par un envoi dans ce pays de 206 milhons d'espèces métalhques. On doit
souligner ici, tout particulièrement, le chiffre des dépenses des étrangers
en France, soit 2 mjlliards 171 millions.
Si l'on enferme sous une même rubrique tout ce qui concerne les titres-,
coupons, amortissements, on remarque que la balance économique se résume
presque en trois soldes : produits, J milliard 680 milhons à notre charge; titres,
415 millions en notre faveur; dépenses des individus (étrangers), 1 milhard
821 millions. Ainsi, les dépenses des étrangers paient à elles seules tout notre
excédent d'importation et nous permettent encore de recevoir pour 206 millions
de métaux précieux en matière d'apurement.
Avec 1915, la situation change complètement d'aspect : nous importons pour
8 milhards 500 millions de marchandises et n'en pouvons guère exporter pour
plus de 3 milhards. Nos dépenses de frets passent de 350 millions à 2 milliards
800 millions. Les étrangers en France n'auraient dépensé que 800 millions, en
plus desquels l'armée anglaise nous laisserait quelque 600 millions.
Le déficit est considérable, mais il est en grande partie compensé par nos
opérations de crédit et le produit de l'emprunt réalisé au dehors (environ
3 milliards) ainsi que par nos reventes de titres étrangers (650 millions).
Cette situation explique suffisamment la hausse des changes sur l'Angleterre
— 246 —
et. les pays neutres, mais en même temps elle montre qu'on ne saurait y remé-
dier par de fréquents envois d'or — véritables gouttes d'eau perdues dans la
rivière — et qu'il importe essentiellement de se ménager des crédits à long
terme, à Londres et à New-York, sur des bases plus libérales, en vue d'une situa-
tion plus lourde encore en 1916.
M. Rjené Pupin termine en émettant la conviction que l'Angleterre, qui tire
de gros avantages de son portefeuille étranger et de sa marine marchande (dont
les profits font partiellement retour au Trésor britannique sous la forme d'im-
pôts de bénéfices de guerre), ne négligera rien pour seconder la tâche de nos
charges extérieures, corollaire du magnifique effort qu'elle a patiemment
accompli, pour la commune victoire de nos armes.
M. le Président remercie notre collègue de sa communication et ouvre la
'discussion au sujet de cette dernière.
M. d'Eichthal demande la permission de formuler des réserves concernant
les chiffres qui ont été produits par M. Pupin, déclarant que certains, d'entre
eux lui paraissent devoir être l'objet de vérifications approfondies; il cite
notamment les évaluations afférentes aux dépenses des étrangers en Fraace et
aux dépenses des Français à l'étranger.
M. F. Faure estime que les membres de la Société ne peuvent prétendre
soumettre ces données à une discussion définitive avant que la communication
do M. Pupin ait été publiée dans le Journal et que les chiffres produits aient
pu être analysés. Il croit cependant devoir d'ores et déjà signaler que les chiffres
des exportations de marchandises, fournis sans doute d'après les statistiques
douanières, résultent d'évaluations faites d'après la méthode fixée par le règle-
ment de 1894, c'est-à-dire qu'ils tiennent compte des valeurs de ces marchan-
dises au moment où elles quittent le pays sans être grevées des frais de trans-
port, des frais d'assurance et des bénéfices des vendeurs. De là une rectification
qui pourrait entraîner la revision du chiffre de plus de 2 milliards 171 millions
— qui semble fort élevé — donné comme montant des dépenses des étrangers
en France; en sens inverse, les chiffres des importations doivent comprendre,
en sus de la valeur des marchandises importées elle-même, le montant des frais
de transport et d'assurance et peut-être le bénéfice des importateurs. Enfin les
chiffres des statistiques douanières de 1915 doivent être les chiffres provisoires
déduits des observations de l'année 1914, et il n'est pas besoin de faire remar-
quer que, dans la réalité, ces prévisions doivent avoir été sensiblement affectées
par les événements.
Il croit cependant devoir présenter quelques observations à propos des
chiffres relatifs aux exportations et importations dont M. Pupin a fait usage
pour établir sa balance économique de la France en 1912 et 1915.
Comme tous les chiffres en général et plus que d'autres peut-être, les chiffres
de la statistique douanière ne doivent pas être employés sans qu'il soit tenu
compte de la méthode qui a servi à les obtenir. Leur sens et leur portée dépen-
dent beaucoup de cette méthode.
S'agit -il des chiffres exprimant le poids des marchandises? Il faut savoir
s'il s'agit du poids brut ou du poids net; il faut savoir comment se calcule
le poids quand il s'agit de marchandises se mesurant au moment du passage
à la frontière au volume ou au nombre de têtes; il faut savoir comment s'opère
la conversion des hectolitres ou des têtes en kilos.
S'agit-il des valeurs ? La question est plus délicate et plus importante encore.
Il faut savoir tout d'abord s'il s'agit de valeurs définitives ou de valeurs
provisoires. Les valeurs définitives sont les valeurs adoptées, pour la dernière
année écoulée et connue, par la Commission permanente des valeurs de douane.
Les valeurs provisoires sont les valeurs définitives de l'année précédente adop-
tées par le Service des Douanes pour la valoration des marchandises importées
et exportées pendant l'année en cours et qui nous sont données dans l<>s
J)ocuments statistiques mensuels publiés par l'Administration.
— 247 —
Il faut savoir ensuite que la valeur des importations ne se calcule pas comme
celle des exportations. La valeur des importations est le prix des marchandises
« à l'arrivée dans les ports ou bureaux-frontières de France, déduction faite
des droits de douane et des taxes intérieures, ainsi que des escomptes et usances
adoptés par le commerce ». La valeur des exportations est « le prix également
dans nos ports ou sur nos frontières, c'est-à-dire au point effectif de sortie ».
Tout cela est exposé tout au long dans la grande circulaire de la Direction
générale des Douanes, en date du 2 juin 1894, sur « l'économie générale de la
statistique commerciale dans ses rapports avec les opérations s'effectuant sous
les divers régimes de douane ». Cette circulaire est un véritable Code en 203 arti-
cles de la statistique douanière.
Mais, de tout cela, M. Pupin ne paraît avoir tenu aucun compte. Il n'est guère
possible d'interpréter autrement le silence qu'il a gardé à ce sujet.
S'il en avait tenu compte, il n'aurait pas m^anqué de grossir le chiffre des
créances françaises auxquelles servent de base nos exportations de marchan-
dises. Il y aurait ajouté le montant probable des frais de transport et d'assu-
rance ainsi que des bénéfices réalisés par la vente dans le pays acheteur. Et
peut-être eût-il été ainsi amené à diminuer le chiffre énorme qu'il attribue un
peu gratuitement à nos créances du chef des dépenses des étrangers résidant ou
passant en France.
Quant aux chiffres que nous donnent nos statistiques douanières pour 1915,
ce sont des chiffres provisoires, la Commission permanente des valeurs en
douane n'ayant pas fonctionné depuis 1914; ce sont, par conséquent, des chiffres
beaucoup trop faibles. Il est indispensable que M. PuPI^' s'explique là-dessus.
M. Pupin répond qu'il s'est efforcé de tenir compte de cette modification
par une majoration de 500 millions dans la valeur des importations.
M. Elcus fait observer enfin qu'aucune évaluation stÀre ne peut être facile-
ment faite pour les achats de valeurs mobilières opérés par les Français sur
les marchés étrangers, la plupart des règlements se faisant par chèques.
La discussion concernant la communication de M. Pupin pourra être reprise
après les vacances annuelles.
COMMUNICATION DE M. PAUL MEURIOT SUR « LE COMMERCE JTALIEN PENDANT LES
QUINZE DERNIÈRES ANNÉES »
M. le Président donne la parole à M. Paul Meuriot pour le développement
de sa communication.
L'orateur expose tout d'abord que, pendant les quinze années qui ont précédé
la guerre, soit de 1899 à 1913, le com.merce de l'Italie a fait de sensibles pro-
grès. D'une moyenne annuelle de 2 milliards 300 millions de 1894 à 1898, il
s'est élevé à 5 milliards 620 millions de 1909 à 1913, dont plus de 2 milliards
200 millions aux exportations. A l'importation, la plus-value provient surtout
des matières premières, ce qui résulte en effet du progrès même de l'industrie
italienne : leur importation totale, qui atteignait à peine le milliard de francs
vers 1900, a dépassé 2 milliards en 1913. Parmi celles-ci, il convient de signaler
les cotons bruts, dont l'importation a plus que doublé, les minerais et métaux,
la houille, qui sont dans le même cas. Avec les matières premières, une large
plus-value est aussi acquise aux céréales dont l'importation, dans l'espace de
quinze ans, passe de 210 à 570 millions, dont 400 pour le froment, fait d'autant
plus intéressant que la production du blé, en Italie, a elle-même augmenté
assez notablement (58 millions de quintaux en 1913 au lieu de 40 en 1900).
Cela prouve sans aucun doute l'accroissement du bien-être dans la nation.
Par contre, l'importation du sucre est devenue presque insignifiante, grâce au
développement de l'industrie nationale : près de 2 millions de quintaux de
1909 à 1913 au heu de 40.000 de 1896 à 1900.
.Aux exportations, l'accroissement des produits fabriqués correspond à celui
— 248 —
des matières premières importées. Leur total, qui étail de 470 millions de 1890
à 1903 (valeur moyenne annuelle), s'élève à 1 milliard 250 millions de 1909 à
1913. L'exportation porte principalement sur les soies (en particulier les soies
grèges qui, avec un total de 530 millions, constituent le cinquième de l'ex-
portation totale, sur les produits alimentaires qui ont triplé depuis 1901, les
tissus de coton, dont la vente a quadruplé depuis cette même date, etc.
Parmi les Etats avec lesquels s'opère surtout le commerce italien, le premier
rang parmi les pays européens était tenu avant la guerre par l'Allemagne, dont
les échanges avaient atteint 953 millions en 1913 (343 aux exportations). L'An-
gleterre venait au second rang avec un ensemble de 850 millions, dont 260
aux exportations. La France avait occupé la première place avant la rupture
du traité de commerce, en 1887, avec un chiffre d'affaires de 740 millions à cette
dernière date; depuis il s'abaisse à 340 millions en 1900 et en 1913 il n'était
encore revenu qu'à 515 millions. L'Italie avait surtout perdu à cette rupture,
puisque ses exportations, qui étaient de plus de 400 millions en 1887, ne dépas-
saient plus 170 millions en 1900 et n'étaient revenues qu'à 230 en 1913. C'était
à peu près le total des exportations de l'Italie en Autriche- Hongrie, dont l'en-
semble des échanges avec l'Italie était, en 1913, de 475 millions. Avec la Suisse
et la Russie, le chiffre des affaires était moindre; mais, tandis qu'avec cette
dernière puissance, la très grande majorité des échanges consistait en importa-
tions (237 millions sur 317), avec la Suisse au contraire les exportations avaient
une plus-value considérable (250 millions sur 336). Hors d'Europe, deux Etats,
les États-Unis et la République Argentine, font^ un commerce très important
avec l'Italie : 790 millions d'échanges avec les États-Unis et 350 millions avec
l'Argentine en 1913. Mais avec les États-Unis, les importations forment 70 %
au commerce total, tandis qu'avec l'Arggntine leur part n'est que de 46 %.
Ces deux pays sont du reste les deux grands foyers d'attraction de l'émigi'a-
tion italienne d'outre-mer.
Le commerce italien s'est assez ressenti de la guerre, à laquelle l'Itahe prend
part seulement depuis la fm de mai 1915. En 1914 et 1915, le total des exporta-
tions demeure le même que durant la période 1909-1913. Les importations qui
avaient fléchi en 1914 se sont relevées l'an dernier presque au niveau de la
dernière période quinquennale. Ce que l'Italie a perdu du côté des Empires
centraux, elle l'a regagné du côté de l'Angleterre, de la Suisse, surtout de la
France et hors d'Europe. Avec la France, le commerce italien retrouve ses
échanges d'il y a trente ans : en 1915, l'Itahe nous a vendu pour 370 millions
au lieu de 230 en 1913. Hors d'Europe, le mouvement des échanges a été de
près de 1 milliard 500 millions avec les États-Unis en 1915 au lieu de 790 millions
en 1913, et avec l'Argentine, il a été de 440 au lieu de 350 en 1913.
Avec l'ensemble des pays alliés, le commerce de l'Itahe était de 1909 à 1913
de plus de 1 milliard 720 millions; il n'était avec F Austro-Allemagne que de
1 milHard 360 millions. Si, de ce côté, les exportations de l'Italie avaient une
plus-value du reste assez faible, elle serait bien compensée si, aux grandes puis-
sances alliées, on ajoute la Belgique, le Portugal, surtout les colonies anglaises.
En résumé, l'intérêt bien entendu de l'Italie — comme ses sympathies — la
portait vers les États de l'Entente.
M. Fernand Faure formule à l'égard des statistiques présentées par M. Paul
Mkuriot la même observation que celle que lui ont paru appeler les statistiques
empruntées par M. Pupin.
En ce qui concerne particulièrement l'importation du charbon, il y aurait
grand intérêt à préciser s'il s'agit de prix réel ou de prix provisoire et à appuyer
la statistique des prix par une statistique des poids.
M. II. -G. LÉVY juge qu'une conclusion particulièrement nette ressort de la
communication de M. Paul Meuriot : c'est l'importance extrême que présente
la question des traités de commerce. L'entente économique entre les alliés
- 249 -
s'impose; c'est énoncer un truisme que dire que cette entente constitue le vrai
moyen de mettre fin aux succès du commerce de l'Europe centrale. Il est inté-
ressant de voir les statistiques italiennes fouinir en faveur de cette impérieuse
nécessité des arguments nouveaux.
La séance est levée à 19-^ 30.
Le Secrétaire général, Le Président,
A. Barriol. Malzac.
II
LE JAPON, NOTRE AMI ET NOTRE ALLIÉ
NOTES DEMOGRAPHIQUES ET FINANCIERES
Le 15 août 1914, quelques jours à peine après que la guerre s'était déchaînée
sur l'Europe, le Gouvernement japonais, allié de l'Angleterre et ami de la
France, faisait remettre au Gouvernement allemand, par l'intermédiaire de
son ambassadeur à Berlin, l'ultimatum suivant, qui était en même temps
communiqué à l'ambassadeur allemand à Tokyo :
« Considérant que, dans la situation présente, il est hautement important
et nécessaire de prendre des mesures pour écarter toutes causes tendant à
troubler la paix en Extrême-Orient, et pour sauvegarder les intérêts généraux
visés par la convention d'alliance entre le Japon et la Grande-Bretagne..., le
Gouvernement impérial du Japon croit de son devoir d'aviser le Gouver-
nement impérial allemand d'avoir à exécuter les deux propositions suivantes :
« 1° Retirer immédiatement des eaux japonaises et chinoises les navires
de guerre et vaisseaux armés allemands de toute nature et désarmer sans
délai ceux qui ne peuvent être retirés;
« 2° Remettre sans condition ni compensation aux autorités impériales
japonaises, à une date qui ne saurait être postérieiu-e au 15 septembre 1914,
tout le territoife loué de Kyao-Tcheou, en vue d'une restitution éventuelle
dudit territoire à la Chine. Le Gouvernement impérial du Japon annonce
en même temps que, au cas où, le 23 août à midi, il n'aurait pas reçu du Gou-
vernement impérial allemand une réponse notifiant acceptation incondi-
tionnelle de l'avis précédent, il se verrait contraint d'agir comme il croirait
nécessaire pour faire face à la situation (1). »
On imagine aisément la stupeur et la colère que dut provoquer à Berlin
la lecture de ce document de si magnifique et hautaine impertinence. Aveu-
glée par le fol orgueil de sa force matérielle, sûre du prompt succès de ses
armes, comment l'Allemagne se serait-elle attendue à ce qu'une nation, qui
semblait bien pouvoir demeurer impunément à l'écart du conflit, osât ainsi
la braver en face?
(1) Cf. Japan Mail, août-décembre 1914, et Revue des Sciences politiques, février 1916,
Maurice Courant : «La Politique du Japon pendant la première année de la guerre euro-
péenne. »
^ 250 -
Le texte même de l'ultimatum ne montrait-il pas qu'en se rangeant aux
côtés de ses alliés et de ses amis, le noble Japon n'entendait point seulement
servir ses propres intérêts, mais aussi donner au peuple allemand l'insultant
exemple de la fidélité aux engagements consentis et prendre sa part de gloire
dans l'œuvre de libération du monde civilisé? Cela est si vrai que, lorsqu'il
eut achevé, entre le 25 août et le 7 novembre 1914, la tâche militaire qu'il
s*était tracée, — en chassant à jamais l'Allemagne de Tsin-Tao et du territoire
de Kyao-Tcheou dont elle avait fait une si solide et si ingénieuse base navale
et économique, — le Gouvernement mikadonal continua d'apporter aux
Alliés, sous la forme que l'on sait, l'appui le plus précieux, et qu'il adhéra
solennellement, le 19 octobre 1915, par la voix autorisée de son ambassadeur
à Londres, M. Inouyé, à la déclaration par laquelle la Grande-Bretagne, la
France et la Russie s'étaient engagées à ne pas conclure de paix séparée.
Les Français n'en sont plus à juger leurs amis d'Extrême-Orient sur la seule
foi des relations de voyages et des romans où de délicats lettrés et de char-
mants poètes leur ont décrit la grâce des paysages de l'Empire du Soleil Levant,
la douceur des mœurs de ses habitants et le mystère de ses légendes. Tout
le monde sait aujourd'hui qu'une grande nation moderne, disciplinée, forte,
laborieuse et sage, s'est épanouie là-bas, dans l'archipel aux cinq cents îles;
mais il nous a paru qu'il n'était pas sans intérêt de réunir et de présenter
quelques indications et quelques chiffres susceptibles de caractériser son déve-
loppement actuel, notamment aux points de vue de la démographie et des
finances publiques; nous avons à cet effet largement utilisé les nouveaux docu-
ments officiels publiés par l'Administration japonaise et en particulier par le
ministère des Finances (1).
(1) On ne saurait trop louer le soin que l'Adaiinistration japonaise apporte à la prépara-
tion et à la présentation des documents statistiques destinés à caractériser les efforts et les
progrès de la nation. Il faut citer au premier planV Annuaire financier et économique du Japon,
que le ministère des Finances publie en un français impeccable (1915, 15<^ année. Tôkyô,
Jmprimerie impériale), et le Résumé statistique de V Empire du Japon, rédigé par le Bureau
de la Statistique générale du Cabinet impérial (1916, 30'' année. Tôkyô), dont le texte est
bilingue, japonais et français. Parmi les autres ouvrages statistiques, il faut mentionner le
Mouvement de la Population et la Statistique des causes de décès de VEinpire du Japon, égale-
ment publiés par le Bureau de la Statistique générale en japonais et en français, et certains
annuaires ou documents coloniaux notamment : Annual Report on rejorms and progress iti
Chôsen, The Siaiistical Summary nj Taïwan, édités parles soins des gouvernemenls généraux
de Corée et de Formose...
Nous avons naturellement converti toutes les évaluations en mesures françaises en nous
basant .sur les taux approchés de conversion suivants :
Longueurs 1 ri 3>^>" 927
( 1 ri carré I5ifn^<i 42345
Surfaces | 1 chô O^a 9917
' 1 tsubo 3=a 3
181 04
Capacités ! Vï. \
^ I 10 shô i
1 kwan l ^^^ „,^
PQJjg 1 1 . 000 mommé S
1 kin
160 mommé
Monnaie \ ^ ^^" \ 2' 583
100 sen
0kK6
- 251 -
I — DÉMOGRAPHIE
Population. — On sait que le Japon est constitué par une série d'archipels,
de forme et de relief tourmentés, reposant sur de grands fonds et offrant les
climats les plus divers, puisqu'ils sont disposés entre les 51^ et 21^ degrés de
latitude septentrionale, suivant une ligne dont la direction générale va du nord-
est au sud-ouest; la plupart des montagnes sont de nature volcanique et il
existe encore au Japon une vingtaine de volcans en activité (1).
Les îles les plus importantes du Japon proprement dit sont :
au centre, la Grande Ile ou Nippon (Nihon, Hondo ou Honshyû), qui repré-
sente à elle seule une superficie de 224.000 kilomètres carrés — très voisine
de celle de la plus grande des îles britanniques (Angleterre et Ecosse) — avec
les villes industrielleret maritimes de Tôkyô (capitale depuis 1868, l'une des
plus importantes cités du monde) et Yokohama au sud-est, non loin de la haute
cime neigeuse du Fouzi-Yama (Fujisan), puis, au sud, Osaka, l'ancienne capi-
tale Kyoto, Nagoya et Kobe; la latitude moyenne de ces deux groupes de villes
(35°) correspond à celle de la Tunisie centrale;
au nord de Nippon, Ezo ou Yezo (Hokkaidô), dernier refuge de la race
autochtone des Aïnos, d'abord refoulée par la race japonaise et aujourd'hui
presque complètement submergée par elle;
et au sud, Kyûshyû et Shikoku.
Il faut mentionner en outre, au nord-est d'Hokkaïdô, l'archipel des îles
Kouriles (Chishima) long de 1.200 kilomètres (2); à l'ouest de la Grande Ile,
le petit archipel désormais illustre (3) des îles Tsushima; au sud de Kyûshû
enfm, jetant un pont entre cette île et Formose, le groupe des îles Riûkiû
(Okinawa), annexées en 1873, échelonnées sur 1.100 kilomètres environ.
La superficie du Japon proprement dit est d'environ 382.000 kilomètres
carrés, un peu inférieure aux trois quarts de la surface de la France continen-
tale.
Mais l'Empire a, depuis quelques années, presque doublé son territoire
par l'acquisition ou la conquête de trois grandes colonies d'une superficie
totale de 288.000 kilomètres carrés, comprenant :
l'île Formose (Taïwan), cédée par la Chine en 1895 et lentement conquise
sur les tribus indépendantes et à demi sauvages qui l'habitaient : la pacifi-
cation complète ne remonte pas au delà de 1914; à Taïwan se rattachent les
îles Pescadores (Hôkôtô); Formose est sous 24° de latitude, au niveau de la
Haute-Egypte;
la Sakhaline japonaise (Karafuto). L'île de Sakhaline fut occupée par les
troupes japonaises au cours de la guerre contre la Russie en août 1905 et la
(1) On trouvera une carte géologique du Japon dans l'ouvrage de M. Félicien Challaye,
Le Japon illustré, qui constitue d'ailleurs une excellente monographie sur Ja vie économique
et politique, morale et artistique du peuple japonais.
(2) Les possessions russes aux îles Kouriles avaient fait l'objet d'un échange avec les pos-
sessions japonaises de Sakhaline en 1875. '
(3) La bataille navale où l'amiral Togo anéantit la flotte russe de la Baltique s'est livrée
près de cet archipel le 27 mai 1905.
- 252 -
partie de l'île située au sud du parallèle 50^ fut cédée par la Russie au traité
de Portsmoutli (1); la latitude moyenne de ce territoire (48°) et son climat
sont sensiblement ceux de notre Beauce;
enfin la Corée (Chôsen), qui, peu après la guerre russo-japonaise, fut placée
sous le protectorat japonais (1907), puis annexée à l'Empire en août 1910,
avec l'île de Quelpaert (Cheh-Ju).
Le traité de Portsmouth ayant par ailleurs consacré la cession des baux
russes relatifs au Liao-Tong, le Kwantung, petite province méridionale de cette
presqu'île (d'une superficie — îles voisines comprises — de 3.000 à 4.000 kilo-
mètres carrés), avec Port-Arthur (Riojun) et le grand port de Dalny (Daïren),
est passé sous l'administration japonaise. La durée de validité de ces baux,
qui n'avaient été consentis en 1898 que pour vingt-cinq années, vient d'être
portée à quatre-vingt-dix-neuf ans par la convention sino-japonaise du
25- mai 1915 (2).
La population est très inégalement répartie entre ces différentes contrées.
Le Japon proprement dit compterait actuellement plus de 54 millions
d'habitants, soit plus de une fois et un tiers la population de la France conti-
nentale; la densité est donc fort grande : 142 têtes en moyenne par kilomètre
carré, très supérieure à celle de l'Allemagne et presque double de celle de la
France. Elle atteint son maximum dans la partie méridionale de la Grande Ile;
. les villes de Tokyo et Osaka, notamment, se sont admirablement développées,
au point que la première dépasse largement le chiffre de 2 millions d'âmes
et que la seconde, qui en comptait en 1890 près d'un demi-million, a, depuis,
triplé son importance. Kyôtô n'est pas loin d'atteindre 500.000 habitants. Il
y a dans chacune des villes de Yokohama, Nagoya et Kobe environ 400.000
âmes; à Nagasaki, à Hiroshima, à Kanazawer et à Kure, beaucoup plus de
100.000. Le Japon ne renferme pas moins de vingt-neuf grandes cités {Shi et
Ku) de plus de 50.000 habitants.
On admet aujourd'hui que les populations de la Corée (Séoul, 250.000 âmes)
et de Formose (Pescadores comprises) représentent respectivement un peu plus
de 17 millions et de 3.500.000 habitants; celle de Karafuto est, au contraire,
infime, puisque, pour une superficie de 34.000 kilomètres carrés, elle n'arrive
pas même au chiffre de 65.000! Il y a là, pour la colonisation japonaise, sur un
terrain favorable à la culture et à l'élevage, avec des côtes propices à l'orga-
nisation des grandes pêcheries de hareng, de truite et de saumon, une réserve
d'espace appréciable.
Ainsi la population globale de l'Empire atteindrait environ 75 millions
(1) Le peuple japonais, victorieux de la Russie et conscient de ce que lui coûtait sa vic-
toire, désirait vivement obtenir la possession complète de Sakhaline. Le traité de paix,
^n ne lui en accordant que la moitié, lui causa une déception si vive que de graves émeutes
éclatèrent à Tôkyô. Cf. sur ce point: Ludovic Naudeau, Le Japon Moderne, k La Folie de
septembre 1905. »
(2) C'est à dessein que nous laissons ici de côté la mention de tous les autres avantages
que le Japon doit retirer de cette .convention, qui fut précédée de si pénibles négociations >
mais dont les conséquences paraissent devoir être si importantes, — ainsi d'ailleurs que celle
deroccupation,filaquellele Japon a été conduit par ses opérations de guerre, de quelques
îles allemandes dans les archipels du Pacifique (Marshall, Mariannes, Carolines).
- 253 -
d'hatitants et serait presque double de celle de la France. On jugera do la
rapidité de son développement par ce fait que, dans le cours des neuf dernières
années, elle se serait accrue de 17 % (12 V2 % seulement pour le Japon propre-
ment dit), alors que le recensement de 1911 ne faisait pas même ressortir pour
la France continentale, par rapport au recensement de 1906, un accroissement
del %!(1).
Le Kwantung, d'autre part, compte environ 500.000 habitants, dont les
neuf dixièmes sont Chinois.
On peut noter en passant qu'à l'inverse de ce qui se produit généralement
pour les pays d'Europe (les peuples balkaniques exceptés), la population japo-
naise masculine est nettement supérieure en nombre à la population fémi-
nine.
Les statistiques officielles font ressortir pour le Japon proprement dit un
nombre de mariages fort élevé : plus de 442.000 pour 1910 (2); le coefficient
de nuptialité correspondant est 87 pour 10.000 habitants, très supérieur aux
coefficients correspondants des peuples d'Occident.
Par contre, l'usage — on pourrait dire : l'abus — du divorce s'est depuis
longtemps établi au Japon; on a compté en 1910 près de 60.000 divorces, soit
un coefficient de 11,8 pour 10.000 habitants, alors que le coefficient français,
que nous jugeons, et non sans raisons, déjà bien trop élevé, est voisin de 3,85
pour 1911.
Nous ne citerons que pour mémoire — toujours pour la même année — les
chiffres et coefficients statistiques de natalité et de mortalité : 1.726.522 nais-
sances d'enfants vivants, soit 339 pour 10.000 habitants, avec 1.039 naissances
(1) Ces chiffres sont officiellement fournis par le ministère des Finances japonais et s'ap-
pliquent au 31 décembre 1915. Ils ne peuvent avoir cependant que le caractère d'évaluations
qui, même si elles ont été préparées avec grand soin, ne sauraient suppléer à des résultats
de recensements réguliers. Les derniers chiffres contrôlés remontent à 1910 et les statistiques
donnent, au 31 décembre de cet exercice, les résultats suivants, arrondis à un demi-million
près ;
Japon 51 millions d'habitants.
Chôsen . .
Taïwan . .
Karafuto. .
Ensemble
13 —
3 —
Mémoire.
67 millions d'habitants.
Au début de l'année 1872, le Japon proprement dit comptait seulement 33 millions d'âmes;
la population a dépassé 35 millions en 1878, 40 millions en 1889, 45 millions en 1901 et
50 millions en 1909. Si l'on observe les sept périodes quinquennales qui se sont écoulées
du l'^'' janvier 1876 au 31 décembre 1910, on constate que les coefficients successifs d'ac-
croissement pour chacune desdites périodes se sont élevés à :
5,88%, 4,93%, 6,03%, 4,49%, 6,04%, 6,36%, et 6,93%.
(2) C'est là le nombre total des mariages, y compris les unions d'espèce particulière qui
sont dénonimées : — Niufu-kon-in, mariage contracté avec une femme ayant qualité de
chef de maison; cette union a pour effet de faire entrer l'époux dans la maison de sa femme;
— et Muhoyoshi-yengumi, mariage contracté entre le fils adoptif et la fille du chef de maison
qui l'a adopté.
On entend par chef de maison le chef d'un groupe de famille.
- 254 -
de garçons pour 1.000 naissances de filles et une proportion de plus de 83 mort-
nés pour 1.000 naissances; d'autre part, 1.073.732 décès, soit 211 pour 10.000
habitants. Ce sont là des éléments dont il convient de ne faire usage qu'avec
la plus grande prudence, les déclarations n'étant faites à l'état civil que dans
des conditions très irrégulières.
Nous observerons en passant que la mortalité infantile est fort élevée et
que le nombre des suicides est loin d'être négligeable : on en a relevé plus de
11.000 dans l'Empire en 1912 (1).
Les statistiques ne fournissent pas d'indications complètes sur la réparti-
tion professionnelle; voici cependant quelques renseignements sur cet impor-
tant sujet.
JAPON PROPREMENT DIT
Agriculture. — C'est évidemment l'agriculture qui constitue la plus grande
industrie nationale; elle absorbe environ 60 % de la main-d'œuvre. Aussi le
Gouvernement japonais oriente-t-il bien nettement ses préoccupations vers
l'amélioration ou le défrichement des terres, le développement de la machinerie
agricole et des travaux d'irrigation, la protection des cours d'eau, la conquête
des terrains sur la mer, l'assèchement des lacs ou marais; il favorise notamment
l'établissement des rizières (2), la sériciculture (3), la production du thé (4),
du tabac (5) et de la laque (6).
La grande loi sur l'agriculture, qui remonte à 1899, a été amendée en 1909
et, tout récemment encore, en juin 1915; la loi de 1900 sur les sociétés coopé-
ratives, complétée en 1909, est venue encourager la formation des associations
de crédit, d'achat, de vente, de production de toutes natures, mais spéciale-
ment des sociétés coopératives agricoles; il n'existe pas moins de 12.000 sociétés
(1 ) L,ps statisticiens japonais^ qui tiennent à se montrer délicats psychologues, s'attachent
à établir une répartition des suicides d'après les motifs... présumés de désespoir : ils dis-
tinguent ainsi les suicides déterminés par l'aliénation m.entale, les revers de fortune, le souci
de l'avenir, la maladie, l'amour, le remords et même... les discussions entre membres d'une
même famille! Ils nous donnent aussi la classification des suicides d'après le genre de mort
adopté; les préférences masculines vont nettement à la strangulation et les préférences
fénùnines à la submersion... Voilà certes le fruit de consciencieuses mais impitoyables obser-
vations !
(2) Trois millions d'hectares cultivés en rizières assurent une production annuelle moyenne
d'un peu plus de 100 millions d'hectolitres. Le Japon récolte en outre de grandes quantités
d'orge, de froment, de seigle...
(3) Rendement annuel de 8 millions d'hectolitres de cocons. La soie grège est générale-
ment préparée dans des ateliers familiaux : on comptait, en 1913, 330.000 ateliers de dix ou-
viers et moins contre 4.000 seulement de plus de dix ouvriers; la production correspondante
(soie grège et déchets) est d'environ 180.000 quintaux.
(4) Trente mille hectares consacrés à la culture du thé donnent une récolte totale d'efiviron
320.000 quintaux.
(5) La surface cultivée en tabac a beaucoup varié; elle tend actuellement à s'accroître :
31.000 hectares en 1913, produisant 480.000 quintaux de feuilles, d'une valem- de 40 à
45 millions de francs.
(6) Un millier d'ateliers recueillent annuellement 3.000 quintaux de laque, et 1.500 ate-
liers, 126.000 quintaux de cire.
— 255 —
coopératives : beaucoup d'entre elles sont groupées en fédérations (celles-ci
au nombre de plus de soixante) et rattachées à l'Union centrale de Tokyo.
Les sociétés agricoles peuvent disposer, par l'intermédiaire de la Banque
hypothécaire du Japon et de la Banque coloniale du Hokkaïdô, des capitaux
déposés en caisse d'épargne, pour lesquels l'Etat ne demande qu'un intérêt peu
élevé. 15 millions d'hectares de terres environ sont soumis à l'impôt foncier.
Quelque attention que l'État ait apportée à la question de l'élevage, à l'amé-
lioration du cheptel et à sa défense contre les maladies contagieuses, il semble
que les résultats obtenus, honorables assurément, soient loin d'avoir répondu
aux espérances qu'on avait conçues : le troupeau bovin ne comprend guère,
à ce jour, que 1.400.000 têtes; le troupeau porcin, 300.000; l'effectif des espèces
caprine et ovine est négligeable. Il y a, au Japon, 1.500.000 chevaux.
Les salaires agricoles sont très peu élevés. Un garçon de ferme se paie en
moyenne de 130 à 135 francs par an et une fille de ferme, de 80 à 85 francs!
PÊCHE. — La pêche comportait surtout, jusqu'à ces derniers temps, les
pêcheries côtières; le rendement de ces dernières a atteint en 1913 le beau
chiffre de 245 millions de francs. La production est d'ailleurs extrêmement
variée : la pêche du hareng, qui arrive en tête, représente un peu plus de
10 % de l'ensemble; viennent ensuite les pêches de sardine et anchois, bonite,
dorade, seiche, sole, maquereau, crustacés, etc. Mentionnons pour mémoire
la pêche du corail. Si l'on ajoutait à ces résultats ceux des pêcheries en haute
mer que l'État cherche à développer et que la convention de 1907 avec la
Russie a évidemment favorisées en ouvrant aux pêcheurs japonais l'accès
des eaux russes, ceux des pêches de Corée, de Formose, de Karafuto et du
Kwantung, on arriverait à dépasser 280 millions de francs. Il faut d'ailleurs
bien observer que, très souvent,la pêche ne constitue pour ceux qui l'exercent
qu'un métier d'appoint : sur un effectif de 1.740.000 pêcheurs, plus de 930.000
s'occupent en outre d'agriculture ou d'autres métiers. La flotte de pêche
comprend surtout des petites barques du modèle traditionnel (au nombre de
420.000 environ), mais la tendance s'affirme, de jour en jour plus nettement,
à recourir aux chalutiers et baleiniers à vapeur, analogues à ceux que nous
utilisons en Europe, et l'on compte déjà plus de 2.000 barques à moteur :
cette flottille moderne grossira sans doute très vite. Une loi de 1901 régit la
pêche et de nouveaux règlements de banques lui assurent, depuis 1911, la dis-
position des capitaux nécessaires.
Les progrès des pêcheries ont naturellement entraîné l'établissement de toute
une industrie annexe, pour la préparation des produits (valeur des produits
manufacturés en 1913 : 154 millions de francs) et pour l'exportation sur la
Chine et même sur l'Amérique et l'Europe (valeur des produits exportés :
63 millions).
La pisciculture enfm donne, bon an, mal an, un revenu brut d'environ
10 millions de francs; elle paraît appelée à progresser dans l'avenir.
Salines. — Les salines, au rendement desquelles s'ajoute celui de quelques
gisements salins d'importance très secondaire, fournissent annuellement
640.000 tonnes de sel environ pour une valeur de 32 millions de francs.
- 256 -
Mines. — Le sous-sol japonais contient des gisements riches et variés; on
y trouve surtout de la houille et du cuivre, mais aussi de l'or, de l'argent, du
plomb, du zinc, du fer (1), de l'antimoine, du manganèse, du graphite, du
pétrole, du soufre, etc. Sur les 800.000 hectares concédés à plus de cinq mille
entreprises, 265.000 sont accordés aux fins d'extraction de la houille, 223.000
renferment du minerai de cuivre (avec, au moins pour partie, des minerais
d'autres métaux) et 130.000 du pétrole; mais il est bien entendu que la surface
actuellement exploitée ne représente qu'une part assez faible de la superficie
des concessions, un peu plus du cinquième, soit 180.000 hectares en chiffres
ronds.
L'effectif des ouvriers mineurs est d'environ 260.000 travailleurs, dont la
{l)Le problème delà production du fer est l'un de ceux qui se posent avecle plus d'acuité
pour l'industrie japonaise. Les meilleurs gisements (Kamaïslii et Sennin en Iwaté) ne four-
nissent qu'une quantité de minerai très inférieure aux besoins (222.000 tonnes en 1913, ce
qui correspond à moins de 65.000 tonnes de métal) ; on trouverait dans le souci de parer à
l'insuffisance du rendement des mines nationales l'un des éléments caractéristiques de la
politique commerciale du Japon, — et même de sa politique étrangère (Cf. Convention avec
la Chine du 25 mai 1915).
Il fallut bien en effet que l'industrie métallurgique se résignât à demander à l'étranger
la matière première qu'elle ne pouvait trouver dans le pays même, et il ne serait pas sans
intérêt de faire l'historique des recherches et des négociations entreprises à ce sujet en tous
points du globe, jusqu'en Espagne, en Suède et au Chili.
Quoi qu'il en soit, nous voyons figurer aux tableaux du commerce de l'année 1913, dernier
exercice normal avant la guerre, les valeurs suivantes d'importation :
Minerais et métaux bruts 187.500.000 francs.
(dont 150.500.000 de fer).
Métaux ouvrés 39.500.000 —
Machines 132.000.000 —
L'ensemble de ces trois éléments représente donc 359 millions de francs. Si l'on analyse
les deux premiers, on y trouve notamment :
du minerai de fer, pour 4 millions (de provenance presque exclusivement chinoise);
des fers en saumons, pour 27 millions;
des fers en barres, verges, T, pièces d'angles..., pour 35.500.000;
du fil de fer galvanisé, pour 6.500. W)0;
du fer en plaques et feuilles étamées, pour 12 millions;
du fer en plaques et feuilles, pour 22 millions;
des rails, pour 10.500.000;
des tuyaux et tubes de fer et acier, pour 18 millions;
de la clouterie de fer, pour 3.500.000.
L'exportation correspondante de minerais et métaux bruts et de métaux ouvrés est rela-
tivement faible : 107 millions seulement (où d'ailleursles cuivres en lingots et plaques entrent
à eux seuls pour 73 millions et les machines pour 16.500.000).
On appréciera la perturbation que la guerre européenne apporta dans la sidérurgie japo-
naise en mesurant l'importance de la place qu'avaient prise dans ces échanges l'Allemagne
d'abord, puis l'Angleterre et même la Belgique. Si l'on s'en.tient par exemple auxseuls articles
d'importation de fers en barres, verges, etc., fers en plaques et feuilles, rails, tuyaux et
tubes, clouterie, représentant une valeur de 87 millions de francs, on constate que l'Alle-
magne intervient dans ce chiffre pour 31 millions de francs, l'Angleterre pour 25.500.000.
la Belgique pour 10 millions; le reliquat était fourni surtout parles États-Unis (21 millions).
De 1913 à 1914, l'importation des matériaux en fer a baissé de plus de 54 millions de francs
et celle des machines de plus de 30 millions.
^ - 257 -
majorité — 172.000 — sont attachés aux mines de houille et 79.000 aux
mines métallifères (1).
Usines et ateliers. —Le nombre des ouvriers et ouvrières employés dans
les usines et ateliers est de l'ordre de grandeur d'un million : le recensement
fait en 1913 donne exactement 376.000 hommes et 540.000 femmes, soit
ensemble 916.000 personnes. La répartition est approximativement la sui-
vante :
Homme* Femmei Entemble
Filature de la soie et organsinage 13.000 209.000 222.000
Autres industries textiles 58.000 260.000 318.000
Mécanique et industrie du. fer 88.000 5.000 93.000
Industrie minière, raffinage des métaux, indus-
trie électrique et gaz d'éclairage 78.000 8.000 86.000
Industrie chimique et céramique 55.000 25.000 80.000
Alimentation 36.000 7.000 43.000
Industries diverses 48.000 26.000 74.000
Comme on le voit, la filature de la soie occupe à elle seule près du quart de
l'effectif total des ouvriers d'usines et ateliers, mais, comme les autres indus-
tries textiles, filature du coton, tissage, manufacture de tricots et tresses,
etc., c'est surtout des femmes qu'elle emploie. Les salaires sont ici particu-
lièrement bas; ils n'en sont pas moins de 50 % environ plus élevés que les
salaires correspondants d'il y a quinze ans : un tisseur, par exemple, gagne
en moyenne de 1^15 à 1^20 par jour, mais une tisseuse ne touche que de
70 à 75 centimes.
D'une manière générale, les salaires ne peuvent être comparés à ceux que
l'on paie en Europe. Le gain journalier moyen des ouvriers appartenant à
une profession banale varie, .suivant l'emploi, entre 1 et 2 francs par jour;
seuls les niétiers difficiles, pénibles ou dangereux haussent les salaires moyens
au delà de 2' 25 (tailleurs de vêtements européens, charpentiers, constructeurs
de bateaux, plâtriers...) et de 2^50 (tailleurs de pierre, couvreurs en tuiles...);
les maçons arrivent cependant — à peu près seuls — au taux moyen de 2^ 80
à 2^85. L'industrie japonaise emploie beaucoup d'enfants (âge minimum légal
de onze ans), et le taux des salaires de ces derniers est a fortiori extrêmement
réduit.
(1) La production s'est élevée, en chiffres ronds, pour l'année 1913, d'une part à 21 mil-
lions de tonnes de houille (d'une valeur de 183 millions de francs), — c'est-à-dire un peu
supérieure à la moitié de la production française, — d'autre part à 66.000 tonnes de cuivre
(valeur, 108 millions), à un peu plus de 5 tonnes et demie d'or (valeur, 19 raillions! et 146 ton-
nes d'argent (valeur, 15 millions), à 57.000 tonnes de fer brut (valeur, 6.500.000 francs)^
à 3.700 tonnes de plomb (valeur, 1.500.000), etc., et enfin à 3 millions d'hectolitres de
pétrole (valeur, 32 millions) et à 60.000 tonnes de soufre (valeur, 4 millions).. L'ensemble des
extractions de l'année représente une valeur de 380 millions de francs environ, c'est-à-dire
sensiblement la moitié do-la valeur annuelle moyenne du produit des mines françaises, mais
l'industrie minière japonaise est en plein développement, et l'on peut s'attendre à ce que
le rendement s'améliore très rapidement : il est d'ores et déjà à majorer de 65 à 70 millions
de francs, si l'on veu-t ajouter à la production japonaise proprement dite celle des mines
de Corée et de Formose, ainsi que celle de l'Aciérie nationale.
l" sÉaiK. 57' TOli. — «0 7 18
- 258 -
Manufactures de l'État. — Mais il convient de rapprocher de cette popu-
lation ouvrière le contingent relativement important des salariés des manu-
factures de l'État. Celles-ci occupent environ 97.000 ouvriers et apprentis
et 15.000 journaliers, 29.000 ouvrières et apprenties et 9.000 journalières,
soit en tout 150.000 personnes (112.000 hommes et 38,000 femmes). Voici
comment, dans les grandes lignes, se répartit cet effectif.
Hommes Ftmmet Ensemble
Imprimerie impériale 1.500 1.500 3.000
Ateliers dépendant du Bureau des Chemins de
de fer de l'État 16.600 400 l'J.OOO
Monnaie 200 » 200
Manufactures des tabacs du monopole. . . 8.000 21.100 29.100
Établissements militaires, arsenaux, manufac-
tures de drap, de vêtements, usines de con-
serves, de matériel sanitaire 24.100 6.200 30.300
Établissements maritimes, arsenaux, ateliers
de réparations, houillères 51.400 8.200 59.600
Fonderie d'acier 9.900 600 10.500
Bureaux des forêts 500 100 600
Fabriques de matériel pour les télégraphes, les
phares 200 d 200
Comme il est naturel, la main-d'œuvre féminine est surtout employée par
les manufactures de tabac et, dans les établissements de la guerre et de la
marine, par les manufactures d'armes (Tokyo et Osaka) et de vêtements
militaires.
Chemins de fer. —A propos des ateliers dépendant du Bureau des Chemins
de fer de l'État, rappelons que les chemins de fer japonais, dont le développe-
ment est actuellement très rapide (1), ne constituent encore qu'un réseau peu
important; sur 11.000 kilomètres exploités en 1914, 9.000 appartiennent à
l'État qui a d'ailleurs racheté en 1906-1907 les lignes appartenant à dix-sept
compagnies privées (Loi de mars 1906) et en a payé la valeur au moyen d'un
emprunt de 1 milliard 200 millions de francs; 2.000 kilomètres sont encore
entre les mains de compagnies concessionnaires au nombre de 69, dont la plu-
part fonctionnent sous le régime de la loi d'avril 1910, dite loi des chemins
de fer légers. Le coût de la construction de ce réseau est évalué à près de
2 milliards de francs.
Voici quelques caractéristiques du trafic pour l'exercice financier 1913-
1914 :
Tablsâu
(1) Le réseau japonais compte seulement trente-six années d'existence. Il ne comprenait
on 1872 que 30 kilomètres appartenant à l'État; en 1888, 950 kilontètros dont moitié environ
à l'État (C. V. SuLR, Royal StatL-?tical Society).
Etat
Compagnies
Ensemble
168
39
207
5.939
452
6.391
133
12
145
30,80
70,00
2,27
36 1/2
4
40 1/2
137
5
142
123,30
348,96
2,83
-^ 259 -
Nombre de voyageurs ( en millions)
Distances parcourues par les voyageurs ( en millions
de kilomètres)
Prix du transport des voyageurs (en millions defrancs)
Moyennes par voyageur.
Distance parcourue (en kilomètres)
Prix perçu (en centimes)
Prix par kilomètre (en centimes)
Tonnage des marchandises ( en millions de tonnes) . .
Prix du transport des marchandises (en millions de
francs)
Moyennes par tonne.
Distance parcourue (en kilomètres)
Prix perçu (en centimes)
Prix par kilomètre (en centimes)
Il faudrait ajouter à ce réseau national les voies ferrées de la Compagnie
du Sud-Maiidchoui'ion (fondée en 1906) dont la longueur exploitée en 1914
était de 1.100 kilomètres; elles ont transporté en 1913-1914 4 millions de
voyageurs et 6.500.000 tonnes de marchandises.
Enfin le Japon possède un réseau de tramways électriques de plus de 2.000
kilomètres.
Toutes les indications qui précèdent se réfèrent au Japon proprement dit.
11 conviendrait de les compléter par un exposé au moins sommaire de la situa-
tion démographique des trois colonies de Corée, de^Formose et de Karafuto.
Malheureusement les données manquent; quelques soins (parfois un peu
rudos) et quelque célérité que les Japonais aient apportés à l'organisation de
ces contrées &oumi^,es depuis peu à leur contrôle, ils n'ont pu y faire régner
encore le même ordre que dans la Métropole; l'aménagement se poursuit sans
trêve : nul doute qu'il ne donne à brève échéance des résultats satisfaisants.
Corée (Chôsen).
Nous nous bornerons donc à rappeler que la population coréenne est essen-
tiellement agricole, mais que les méthodes de culture, traditionnelles et pri-
mitives, sont loin de donner encore les fruits qu'on peut attendre d'un sol
naturellement fertile. Les paysans sont pauvres et le désordre financier, les
exactions des percepteurs d'impôts qui se sont perpétués jusqu'au début de
ce siècle n'étaient point de nature à soulager sa misère. La production agricole
du pays consiste surtout en céréales (le riz vient naturellement en première
ligne) et en beau bétail; on peut mentionner aussi la culture des arbres à
fruits et du gin-seng (1) et, du moins depuis quelques années, l'élevage des
vers à soie.
(1) On sait que le gin-seng est d'un usage médicinal extrêmement répandu dans tout
l'Extrême-Orient; sa racine charnue et savoureuse aurait une action tonique qui en ferait
une sorte de panacée universelle. . v
- 260 -
Les Coréens tirent un mauvais parti de la pêche, même côtière, qui pour-
rait être beaucoup plus fructueuse s'ils perfectionnaient leurs procédés; le
produit annuel des pêcheries n'en représente pas moins une valeur d'environ
30 millions de francs (morue, sardine, langouste, etc.).
Le sous-sol est riche; on y trouverait surtout de l'or, du fer, de l'anthracite
et l'on peut escompter à bref délai un large développement de l'exploitation
minière; des salines ont été installées depuis 1907, dont le produit a déjà
remplacé le sel qu'on importait naguère de Chine.
L'industrie est encore dans l'enfance, et le réseau des chemins de fer coréens,
commencé en 1900, ne compte guère que 1.600 kilomètres en exploitation,
mais la grande ligne de Wiju — Séoul —Fusan, qui traverse le pays de part en
part, fait partie de la ligne la plus courte qui relie par voie ferrée l'Europe aux
parages du Japon méridional. ^
Formose (Taïwan).
La situation méridionale de l'île de Formose, l'importance des forêts qui cou-
vrent son territoire, le naturel encore sauvage des indigènes tout récemment
domptés, donnent à l'autre grande colonie japonaise un caractère très particu-
lier. Il ne saurait encore être question d'une exploitation économique satis-
faisante de ses facultés agricoles ou de ses richesses minières. Néanmoins les
nouveaux maîtres du pays ont déjà réussi à y développer la culture du riz,
du thé (1), de la canne à sucre (2) et du tabac. Le bois, le camphre, l'opium, sont
des produits naturels de l'île, et le sous-sol renferme l'or, le cuivre, la houille (3)
et le pétrole.
Karafuto.
Presque inhabitée, la colonie de Karafuto est encore extrêmement pauvre .
Le Japon en a commencé la colonisation méthodique; la mise en valeur des
terres propices aux cultures des régions tempérées et au développement des
pâturages permet de grands espoirs. Actuellement, les indigènes sont surtout
pêcheurs et ils exportent notamment en Amérique des quantités appréciables
de conserves de crabes (4); on pêche aussi, en Karafuto, la morue, la sole, le
hareng, la truite et le saumon. Le territoire ne comprend pas moins de trois
bassins houillers et l'on y a découvert des gisements de pyi'ite et des nappes de
pétrole; les sables aurifères enfin y seraient abondants.
Fonctionnaires et prêtres. — Il n'est pas sans intérêt de terminer cette
ébauche si imparfaite de statistique professionnelle par quelques renseignements
(1) Thé oolong et thé pouchonj?, exportation en 191 4 : 16 millions de francs.
(2) l.a récolte de 1914, particulièrement importante, s'est élevée à 1.585.000 tonnes de
cannes à sucre et a donné 150.000 tonnes de sucre.
(3) L'extraction de l'or et sa récolte dans les sables ou les alluvioiis ont produit, en 1914,
5 millions de francs; l'extraction du cuivre un peu moins de 3 millions et celle de la houille
près de 3.500.000.
(4) Cinquante mille caisses contenant chacune 4 douzaines de boîtes, en 1914.
- 261 -
généraux concernant les fonctionnaires et employés civils de l'État et des indi-
cations sommaires sur une profession qui comporte un nombreux personnel,
celle des prêtres prêcheurs.
On comptait au Japon, fin 1913, environ 206.700 fonctionnaires, qu'on peut
répartir en quatre catégories :
Fonctionnaires supérieurs, dit Choku-nin 600
Fonctionnaires supérieurs, dits 6'o-ntrt 8.000
Fonctionnaires subalternes, dits i/an-nin 69.700
Agents salariés, dits Ya-toi . . 128.400
Dans cet effectif, le ministère des Communications intervient, à lui seul, il
est vrai, pour 52.200 têtes; les gouvernements de Corée et de Formose (gou-
vernements locaux compris) sont respectivement représentés par 23.300 et
21.500 fonctionnaires ou agents.
Les traitements et salaires annuels de tout ce personnel sont de l'ordre de
grandeur de 180 millions de francs, savoir : 7 millions pour les Choku-nin,
31 pour les So-nin, 74 pour les Han-nin et 68 pour les Ya-toi.
Quant aux prêtres prêcheurs, ils se rattachent aux deux grandes religions
japonaises. On sait en effet qu'à côté du shintoïsme, la religion primitive et
traditionnelle, dont les principales manifestations se réfèrent au culte des
morts i Kami), \e bouddhisme s'est implanté au Japon vers le sixième siècle et
s'y est considérablement développé, en se déformant d'ailleurs au contact des
traditions et des mœurs nationales et en se différenciant en une dizaine de gran-
des sectes (1). Nous ne ferons pas ici état du confucianisme, qui a bien plutôt
le caractère d'une philosophie que celui d'une religion, — il ne touche guère
au Japon que les classes dirigeantes — non plus que des différents cultes et
confessions chrétiens qui n'ont pas pénétré profondément dans le pays, du
moins postérieurement à l'interdiction formulée au dix-septième siècle.
' Le shintoïsme et le bouddhisme sont placés sous la direction de quelques
chefs ou administrateurs de sectes ; au premier se rattache un personnel de 73.000
prêtres prêcheurs; le second ne compte pas moins de 75.000 prêtres prêcheurs,
avec 52.000 prêtres simples et environ 10.000 élèves des deux sexes. Aussi bien
le nombre des temples est-il fort élevé, même si l'on ne fait pas état de ces tem-
ples « situés hors de l'enceinte et n'ayant aucune distinction» que les statistiques
officielles traitent avec une certaine hauteur : plus de 50.000 temples shintoïstes
et plus de 70.000 temples bouddhiques réclament les soins d'une armée de ser-
viteurs, et certains d'entre eux sont l'objet de pèlerinages qui ne le cèdent pas
en importance aux centres religieux les plus fréquentés de nos pays d'Occi-
dent (2).
(1) La secte la plus connue et la plus répandue est celle du Shin-Shiu. Depuis 1868, la reli-
gion bouddhique est séparée de l'État.
(2) Il faut ci ter i)arini les plus illustres de ces sanctuaires l'antique Naikû, temple shintoïste
de la déesse du soleil, Aniaterasu, à Ise, et les beaux temples bouddhiques de Kyoto.
- :262 -
II — BUDGET DU JAPON, DETTE PUBLIQUE ET LÉGISLATION FISCALE
Budget 1915-1916. — Le tableau du budget japonais ne comporte pas des
recettes et des dépenses de l'importance de celles qui figurent — même en
temps de paix — sur les budgets des grands États européens; les montants
en sont cependant déjà fort honorables. On trouvera résumé ci-après le projet
de budget du Japon proprement dit afférent au présent exercice financier
(1915-1916) (1) dans la .forme même où il est présenté par l'Administration
des Finances de Tokyo, réserve faite naturellement de la conversion en francs.
Il convient cependant de faire remarquer que le budget de l'exercice 1913-
1914 fut le dernier budget normal qu'ait eu le Japon, au point de vue tant de
son assiette que des conditions de son établissement. Le budget de 1914-1915
ne put être voté par suite d'un désaccord survenu entre les deux Chambres
au sujet des constructions navales, et le Gouvernement, faisant application de
la Constitution, dut remettre en vigueur, en principe, les dispositions budgé-
taires de l'année précédente, lesquelles, modifiées par le vote de certains
crédits extraordinaires, notamment à la suite de la déclaration de guerre à
l'Allemagne, conduisirent à la fixation des recettes au chiffre d'environ 1 mil-
liard 690 millions de francs (1 milliard 380 millions de recettes ordinaires et
310 millions de recettes extraordinaires, dont 199 provenant du virement de
l'excédent de l'exercice précédent), et des dépenses au chiffra d'environ 1 mil-
liard 611 millions de francs (1 milliard 74 millions de dépenses ordinaires et
537 millions de dépenses extraordinaires); c'étaient là, du fait des circonstances,
des sommes relativement peu élevées, et le montant des recettes prévues se
trouvait, en particulier, inférieur aux comptes définitifs de recettes de tous
les exercices écoulés depuis 1907 (2); la guerre européenne ayant eu pour effet
de diminuer les ressources de l'État tout en aggravant ses charges extra-
ordinaires, il fallut bien, pour assurer l'équilibre budgétaire, resserrer ainsi
les évaluations, comprimer les dépenses, quitte à ajourner certains travaux
projetés. Toutefois, la situation financière générale était assez satisfaisante,
en août 1914, pour que le pays pût affronter sans crainte la crise qui se déchaî-
nait : le Trésor avait alors des disponibilités suffisantes; aucun emprunt n'était
nécessaire, l'émission des billets de banque avait cessé de dépasser la limite
légale et la balance du commerce extérieur s'était sensiblement améliorée.
Mais la dissolution de la Chambre des Représentants, prononcée le 25 dé-
cembre 1914, empêcha que le budget de 1914-1915 fût lai-même voté réguliè-
rement, et le Gouvernement dut, une fois encore, faire application — mutatis
mutandis — des dispositions du budget précédent, et les évaluations, complé-
(1) L'année financière commence au l®' juillet.
(2) Le montant total des recettes ordinaires et extraordinaires inscrites au budget du
Japon n'était pour l'exercice 1877-1878 que de 135 millions de francs. II a, depuis cette
époque, presque constamment été en croissant, dépassant le demi-milliard en 1897-1898
et le milliard en 1905-1906, année consécutive à la guerre contre la Russie. On trouvera
plus loin quelques indications concernant les emprunts auxquels l'Empire dut par ailleurs
recourir.
- 263 -
tées par un vote du Parlement de mai 1915, conduisirent aux recettes et dé-
penses exposées ci-après, s'élevant respectivement à 1 milliard 604 millions
et 1 milliard 525 millions de francs, en régression marquée par rapport à celles
de l'exercice précédent.
RECETTES ORDINAIRES
Impôts.
Impôt foncier 189.251»000ï
Impôt sur le revenu 91.092,000
Patentes 48.160.000
Droits de succession 5.938.000
Taxe sur les voyageurs 12.370.000
Impôt sur les mines 6.734.000
Impôt sur l'émission des billets de banque 2.859.000
Impôts sur les boissons alcooliques 233.902.000
Impôt sur le shôyu 12.742.000
Accise sur le sucre 61.571.000
Taxe de consommation sur les tissus 35.930.000
Taxe de consommation sur le pétrole 3.707.000
Impôt sur les opérations de Bourse 7.746.000
Droits de douane 103.289.000
Droits de tonnage 1.428.000
Taxes diverses 684.000
Ensemble 817.403.000
Revenu du timbre 78.603.0001
Recettes provenant des exploitations et domaines de l'État.
Services postaux, télégraphiques et téléphoniques . . . 157 . 811 . 000*
Forêts 27.576.000
Profits nets du monopole du sel 27.829.000
Profits nets du monopole du camphre 185.000
Profits nets du monopole du tabac 155.414.000
Revenus des autres exploitations et domaines de l'État. 23. 686. 000
Ensemble 392.502.000
Virement du compte spécial des dépôts 26.429.000
Virement du compte spécial du gouvernement général de Chôsen. . 16.534.000
Virement du compte spécial du gouvernement général de Taïwan. . 14.767.000
Autres recettes diverses 8.155.000
Ensemble 1.354.393.000'
RECETTES EXTRAORDINAIRES
Produit de la vente des biens de l'État 7.600.000»
Recettes de l'indemnité chinoise 6.556.000
Recettes provenant de la souscription aux emprunts
publics 4.004.000
Virement de l'excédent de l'exercice précédent . . . 123.853.000
Virements divers et autres recettes 107.611.000
Ensemble 249.624.000»
1.604.017.000'
264
DEPENSES ORDINAIRES
Liste civile 11.624.000»
Département des Affaires étrangères 10.029.000
Département de l'Intérieur 32.688.000
Département des Finances 443.899.000
Département de la Guerre 191.240.000
Département de la Marine 111.358.000
Département de la Justice 29.371.000
Département de l'Instruction publique 24.867.000
Département de l'Agriculture et du Commerce. . . 17.714.000
Département des Communications 166.895.000
Ensemble 1.040.285.000»
DÉPENSES EXTRAORDINAIRES
Département des Affaires étrangères 5.933.000»
Département de l'Intérieur 93.228.000
Département des Finances 160.585.000
Département de la Guerre 34.619.000
Département de la Marine 135.289.000
Département de la Justice 1.673.000
Département de l'Instruction publique 2.099.000
Département de l'Agriculture et du Commerce . . . 17.706.000
Département des Communications 33.333.000
Ensemble 484.465.000»
1.524.750.000'
Parmi les principales dépenses ordinaires de l'Administration de l'État,
signalons :
Milliers de francs
Affaires étrangères. — Ambassades et consulats à l'étranger 8.720
Intérieur. — Service des préfectures 23.627
Finances. — Intérêts des dépôts et frais de paiement. . 26.429
Chambre des Pairs et Chambre des Représentants. . . 4.151
Perception des impôts 23.756
Transfert au compte de consolidation de la Dette. . . . 319. 628
Guerre. — Services de l'armée 180.900
Marine. — Services de la flotte 110.806
Justice. — Cours et tribunaux 14.602
Service des prisons 14.276
Instruction publique. — Universités (1), écoles et bibliothèques. . . . 14.824
Agriculture. — Service des forêts 11.326
Communications,- — Services des Communications 74.768
Pensions et annuités 88.935
Du budget de la métropole, il convient de rapprocher les budgets colo-
niaux.
Celui de Corée comporte pour 160 millions de recettes, dont 74 millions de
recettes ordinaires; les impôts interviennent dans ce chiffre pour 35 millions
(fournis en grande partie par l'impôt foncier et les droits de douane), le revenu
du timbre pour 3 millions et les recettes des exploitations et domaines de l'Etat,
(1) On sait que le Japon possède un corps enseignant de haute culture et aussi de grande
indépendance : il l'a prouvé lors de l'affaire du ministre Koubota, fin 1905.
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chemins de fer compris, pour 32 millions. Les dépenses ordinaires comprennent
notamment 15 millions pour leo Lravaux des chemins de fer, auxquels s'ajoutent
23 millions de dépenses extraordinaires, 24 millions pour le service du Gou-
vernement général, des préfectures et de la police et, bien que la Corée ait
été définitivement annexée au Japon, une charge de 4 millions pour la liste
civile de la Maison royale Li.
Sur les 91 millions de francs de recettes du budget de Formose., les impôts,
douanes et timbre compris, fournissent 22 millions, les exploitations et do-
maines de l'État 52 millions et les recettes extraordinaires 17 millions.
Les budgets de Karafulo et du Gouvernement du Kwantung sont naturelle-
ment plus modestes (5 millions de recettes totales en chiffre rond pour cha-
cun d'eux).
Emprunts. — Le Gouvernement japonais n'a pu assurer le développement
si rapide du pays, tant au point de vue économique qu'au point de vue mili-
taire, qu'en recourant largement à des emprunts, emprunts intérieurs et
emprunts étrangers; ces derniers ont été émis sur divers marchés d'Europe et
d'Amérique, Londres, New- York, Paris et même sur le marché allemand.
On trouvera ci-après le tableau général de la Dette nationale japonaise,
donnant, à la date du 31 mars 1915, les montants des émissions et amortisse-
ments et faisant ressortir par différence la dette non remboursée.
D'une manière générale, les clauses d'émission prévoient une période de
non-remboursement qui varie de cinq à vingt ans; les périodes de rembourse-
ment adoptées s'échelonnent sur les trois premiers quarts du vingtième siècle,
l'amortissjement de l'emprunt français 4 % et celui de la troisième émission
de l'emprunt livres sterling 4 % devant prendre fin en 1970.
Date Montant Amortissement Reste
de de déjà à
l'émission l'émission effectué amortir
Emprunts intérieurs. (En millions de francs)
Ancienne dette publique (sans intérêt) . . . 1872 28 24 4
Emprunt 5 % 1906-1915 135 1 134
Emprunt 5 % (marque Ko) 1908-1909 1.231 42 1.189
Emprunt 5 % (spécial) 1906 803 419 384
Emprunts % (Onshi), 1910-1911-1913 77 » 77
Emprunt 4 % 1910-1912 713 16 G97
Obligations du Trésor pour les travaux pu-
blics de Corée 191.3 77 » 77
Total 3.064 502 2.562
Emprunts étrangers.
Emprunts li\Tes sterling 4% (fe émission). 1899 252 13 239
Empruntlivressterltng 4 1/2% (ire émission). 1905 757 44 713
Empruntlivres sterling 41/2 % (2e émission). 1905 757 44 713
Emprunt livres sterling 4% (2^ émission) . 1905 630 mém. 630
Emprunts livres sterling 5% 1907 580 mém. 580
Emprunt français 4% 1910 450 mém. 450
Emprunt livres sterling 4 % (3^ émission) . 1910 277 » 277
Obligations du Trésor (émises à Paris) . . . 1913 200 » 200
Obligations des compagnies de chemins de fer
rachetées 1906 35 » 35
Total 3.9